a life, a story Tout commence en ce 1er Juin 1982, dans cet hôpital de Caracas où Manual Villanueva et Julia Exteberria attendent l'arrivée de leur premier enfant. Ma mère en pleurs, insultant mon père qui laissait dans sa main une main broyée par sa force, les veines ressortant à cause de la douleur, ce dernier s'évanouissant. Puis un cri strident de cet être qui allait leur procurer tout le bonheur du monde. "Mais quel magnifique bébé!" disaient ces gens en me regardant, des sourires à la con qui ne voulaient absolument rien dire à la vue de ce nourrisson fripé. C'est donc ainsi, du haut de mes 3kg que je débarquais comme une diva dans la famille Villanueva. Oui oui, celle-là même! Mais je ne suis que leur cousin. C'est déjà pas mal non? Quelle chance ils ont ! J'aimerais tant être à leur place pour pouvoir me côtoyer.

Il est vrai que nous aurions pu rester au Vénézuéla mais ce n'était là, que le lieu de ma naissance et l'histoire de quelques semaines. Pour moi du moins. Nous sommes tous retournés en Espagne, à Séville précisément, mes parents et moi, mon père ayant cédé au caprice de ma mère. Une belle maison de ville, près de la place d'Espagne. Nous avions les moyens en effet mais que faisaient mes parents? Manual était -et est toujours me direz-vous- le directeur de l'Université de Séville -oui, rien que ça, y'a quoi?- tandis que Julia, même si elle se dit pour le peuple par ses origines, me racontant pour la énième fois la fameuse guerre d'Espagne qu'elle n'a jamais faite, vient d'une famille aristocratique. Il faut bien un mouton noir dans la famille et elle l'était. Elle fait pourtant partie de ces bourgeois que les républicains, à cette époque, détestaient mais elle se sent encore impliquée dans la libération des pauvres en mettant à bas les riches. Pourtant, enlevez-lui cette richesse et je ne suis pas certain qu'elle fasse encore long feu. Barkatu Ama, maite zaitut.

Nous étions bien là-bas, tous les trois mais apparemment, ça ne leur suffisait pas. On fut très rapidement rejoint par un petit frère alors que je n'avais que deux ans, et par une petite dernière, à quelques années près encore. Je ne dis pas que je regrette leur venue, bien au contraire, ils sont mes petits protégés aussi après tout, je ferais tout pour eux mais il s'avère qu'ils n'étaient pas réellement un cadeau. Peut-être à cause de moi, il est vrai, ils voulaient à tout prix traîner avec leur grand frère! Une mauvaise influence avais-je eu sur eux, lorsque je répondais à nos parents juste pour les faire chier, que je faisais des choses dans leur dos bien qu'on savait pertinemment, tous sans exception, que dès lors où ils le découvraient, ils nous envoyaient voir le prêtre de la ville pour qu'on se confesse et qu'on retourne dans le droit chemin. Mais tout cela est derrière moi maintenant, j'ai bien quitté le cocon familial depuis un bon bout de temps! Enfin, à quelques rues de là, dans un appartement.

Un master en langues dans la poche, polyglotte du coup en français vu que c'est à la frontière, en arabe, quelques belles vacances de l'autre côté de la mer et l'anglais, obligatoire depuis le plus jeune âge mais que j'ai peaufiné de mon côté. Et du basque par ma mère qui y tenait à tout prix, m'apprenant la langue depuis que je suis petit, l'obligeant aussi aux deux autres. Tant qu'à faire! J'ai donc commencé à faire de la traduction pour des brochures et des modes d'emploi mais cela m'avait vite lassé. A ma dernière année de fac, j'étais dans une radio locale en parallèle et ce, pendant quatre ans, animant une émission que j'ai finalement délaissé. J'avais d'autres projets et c'est avec l'argent familial que j'ai investi dans un Drive-In à Séville, qui tourne encore et dont je prends des nouvelles par le gérant que j'y ai placé. Et quitte à continuer les caprices, j'ai même fait restaurer un théâtre : le Phoenix. Histoire d'avoir des revenus complémentaires que je partage avec mes parents, la source du financement hein! Pourquoi faire appel à une banque quand elle est déjà à ta disposition?

Maintenant, place à la tragédie.

J'ai, à cette période de ma vie, environ 32 ou 33 ans. Ils manquaient de professeurs de théâtre à l'Université et c'est avec mon cursus en langues et mon "a restauré un théâtre" que j'ai obtenu le post. Comme si ça suffisait. Mon père est le directeur de l'Université au fait, je vous en ai déjà parlé? Ah oui? Bon. Le piston quoi, la grande classe! - A bas les privilégiés! - Oh c'est bon Ama, va t'en plaindre oui, foutue com.. Non même pas, mais c'est quoi ton parti au juste, toi? Bon, au cas où que vous ne l'auriez pas remarqué, je suis très attaché à ma mère. A mon père aussi. Enfin, passons. J'ai gardé ce job durant environ 2 ans car j'y ai vécu une histoire d'amour et cela, notre cher Manual ne l'a pas vraiment accepté. Il a osé me virer. Ah! Que je copule avec les étudiantes, ça passe mais des gens de mon âge et il n'y a plus personne hein! Bref. Ce fut court et intense. A jamais dans mon coeur. Un amour qui m'a détruit. On s'est embrouillés. On s'est séparés. On s'est retrouvés mais elle a décidé de rejoindre notre Seigneur chez une connaissance après un repas assez catastrophique. Urgences. On l'emmena à la morgue pour je ne sais quelle raison. Dans la logique des choses, cela voulait dire qu'elle était morte mais j'avais du mal à y croire même en l'ayant vu. Une vérité ou un tour de passe-passe? Ce n'est que six mois après que j'ai découvert la supercherie. Mon ancienne collègue voulait juste déguerpir mais n'a pas osé me l'avouer. Et quelle ne fut pas sa surprise quand sur les boulevards on s'est croisés! Elle s'est confondue en excuses comme si je devais comprendre son geste et ne pas ressentir cette humiliation dorénavant naissante. J'en ai connu des tordues mais pas à ce point, une première!

Et le temps passa mais la plaie était toujours ouverte.

J'ai à ce moment, 36 ans lorsque je décidais de m'envoler pour les Etats-Unis, à Monterey. J'ai voulu faire affaire en achetant une laverie que j'ai rentabilisé en discothèque typique dans l'ambiance des années 80, patins à roulettes mis en avant en passant par un toboggan d'une des machines à laver. Et elle fonctionne encore cette boîte! Plutôt bien et surtout dans le légal! Tu te vomis dessus, un jeton et tu peux laver ta chemise sur place! Tout a été si bien calculé!

Et c'est là-bas que je fis la connaissance de cette inconnue, où par besoin de s'en mettre plein la tête, nous sommes partis à quelques kilomètres, moi avec mes souvenirs quant à cette trahison, elle par sa vie qu'elle me raconta mais que j'ai oublié due à un excès de boisson. On débarqua à Las Vegas où on s'est vite retrouvés mariés. Un accident en soi. Me marier avec une inconnue! Surtout une femme qui n'a pas été choisie par ma mère, là, ce serait passé chez les Villanueva! Les démarches ont pris deux ans, un bon billet sous la table pour accélérer les choses et surtout sous sa pression à elle, cette dernière étant amoureuse de quelqu'un depuis un long moment. Peut-être d'ailleurs était-elle même en couple avec ce gars à ce moment. Je ne m'en rappelle plus. Cela remonte à presque 3 ans maintenant.

Mais ces dernières années alors? Eh bien, j'suis seul comme un chien.
Amoureusement parlant du moins. Mais je me suis remis de cette trahison à la con. Et de ce divorce aussi, bien que si je la croise, j'essaie de l'éviter le plus possible.
La familia est présente, se ramène de Séville au fil des ans, au compte-goutte, du côté du frère de mon père. "Ha ces foutus mexicains, toujours à profiter du système hein!" Puis mon frère et ma soeur sont venus me rejoindre durant ce temps aussi. J'les vois assez souvent comme les autres vous me direz.

Je tiens toujours cette fameuse discothèque dans le centre. Ne sachant plus quoi faire de mon argent, je l'ai investi dans trois appartements, dont un que j'occupe avec une charmante colocataire du nom de Lexie depuis peu, la dernière s'étant barrée car je ne voulais pas me macquer avec elle. Les femmes, je vous jure des fois! Ha et je fais du tennis aussi, histoire de continuer à claquer un peu plus d'oseille tout en gardant cette bedaine qui ne veut pas partir même si je sue comme un cochon. Et au risque de vous impressionner, je suis un grand joueur de triangle et de kazou.

Sinon, même après cette si courte présentation, vous êtes toujours dispo? Plutôt chez vous ou plutôt chez moi?