Depuis sa rupture et qu'elle a quitté Paris, Arabella a repris sa vie à Monterey. Enfin un bien grand mot, son cœur lui est resté dans cette chambre d'hôtel. Les journées au musée se ressemblent toutes. Ce nouveau travail lui plait et permet au moins de payer le loyer mais ce n'est pas ce qui la fait vibrer. Dès qu'elle a un peu de temps, elle en profite pour se renseigner sur comment se lancer et enfin ouvrir son agence de voyage. Un projet qu'elle a toujours eu mais qu'elle n'a jamais pu accomplir. En attendant, ce job de guide, ça fait l'affaire. Cette journée ressemble en tout point à toutes les autres, elle enchaine les visites depuis ce matin. Les groupes se font de plus en plus réactifs à ses commentaires sur les œuvres exposées au musée.

L'art contemporain, ce n'est pas ce qu'elle préfère mais fallait s'y faire. Se trouvant alors face à une affiche de Shepard Fairey. Artiste connu pour l'affiche Hope qui met en lumière le président Obama, elle expliquait alors l'intérêt de cette affiche représentant une femme. La cause féministe a toujours été importante pour elle. Plongée dans son commentaire, elle ne remarqua pas tout de suite la présence d'Hippolyte.

« Comme vous pouvez le voir, cette affiche représente à la fois la paix et justice avec les signes que l'on peut observer aux deux extrémités de la femme ici représentée. » déclara-t-elle, calmement.

Les questions s'enchainaient et alors qu'elle laissait au groupe le loisir de s'attarder sur les différentes affiches, elle l'apercevait enfin. Qu'est-ce qu'il fait là ? Et pourquoi venir ici, elle soupirait alors que son cœur tambourinait dans sa poitrine. Le revoir, ça lui fait quelque chose, elle ne pouvait le nier. Se mordant légèrement les lèvres, elle le fixait sans trop savoir comment réagir.

« Qu'est-ce que tu fais là ? » demanda-t-elle, froidement.

Son ton était aiguisé comme un poignard, comme celui qu'il lui a mit en la laissant seule dans cette chambre d'hôtel. Elle ne demandait qu'à avoir ses explications. Un jour, tu sauras qu'il lui avait écrit après tout sur un mot. Note qu'elle a déchiré. Repensant à ce jour maudit, elle fuyait le regard, sachant qu'il suffisait qu'elle se perd dans ses yeux pour qu'elle replonge. Et ça, il n'en est pas question. Oh ça non, elle doit lui montrer à quel point, elle lui en veut.

Bella se demandait en cet instant pourquoi il a choisi un tel moment pour débarquer comme ça, comme si de rien n'était. Elle fit mine d'ignorer ce qu'il venait de lui dire. Soufflant légèrement pour essayer de masquer la colère qui la gagnait. Elle ne disait rien pendant quelques secondes alors qu'il l'avait presque affiché devant un groupe entier de touristes. Sa visite était gâchée par sa présence et fallait qu'elle trouve le moyen de rebondir, ou même de fuir. Grande inspiration, elle demandait au groupe de s'attarder sur un tableau pendant qu'elle prendrait Hippolyte entre quatre yeux pour lui dire de se calmer et qu'il n'avait rien à faire ici.

« Je vous invite à observer le tableau un peu plus loin et ensuite nous discuterons ensemble de ce dont à quoi il vous fait penser. » proposa-t-elle, alors.

Le groupe s'exécuta et elle posa enfin les yeux sur le brun, le regard grave et presque noir. Elle soupirait à ses paroles, il la suppliait mais de quoi ? De le reprendre. Pathétique au possible, elle levait les yeux au ciel un instant. Elle le laissa lui mettre ce papier dans sa poche qu'elle a envie de jeter dans la prochaine poubelle qu'elle verrait. Nouveau soupire et elle lui adressa enfin ce qu'elle avait envie de dire depuis le début.

« Mais pardon ? T'es sérieux de débarquer ici sans prévenir. En plein milieu d'une visite. Déjà d'une, tu me fous la honte et je n'ai pas envie de te voir. Ni d'écouter tes excuses qui seront aussi pathétiques que toi. » souffla-t-elle, énervée.

Elle ne mâchait pas ses mots, la rancœur est bien là et cela l'anime à un point où elle pourrait être bien plus froide et persuasive tout comme méchante. Le revoir, c'est comme s'il venait de piétiner son cœur une deuxième fois.

« C'était avant qu'il fallait le dire. Franchement je ne sais pas ce qui me retient de te demander de prendre le prochain avion pour la France et de me laisser tranquille. Je ne sais pas, je ne sais plus. J'ai besoin de réfléchir. » expliqua-t-elle, cette fois ci le ton plus grave.

Elle ne pouvait pas continuer à lui faire la discussion alors qu'elle doit poursuivre sa visite. Elle lui tourna le dos, il peut rester s'il veut et se dirigea vers le groupe pour faire son travail. Pas question qu'il ne lui fasse une mauvaise réputation ici alors que Joséphine avait été si gentille de la recommander pour le musée.