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FT.    @Jayson Salazar   
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Les dernières fois que Jay et moi nous sommes vus, nous avons dû faire face à une panoplies d’émotions. Affronter ces nombreuses peurs, ou dans mon cas plutôt, ces terreurs qui m’ont submergées. Non seulement, je dois vivre avec le fait que ma fille de quatorze ans l’a renversé avec ma voiture alors qu’il était à moto, mais en plus, comme si ce n’était pas déjà suffisant, le pont sur lequel nous nous étions retrouvés s’est effondré juste sous nos pieds. Par chance que Jay s’y était retrouvé en même temps que ma fille et moi, sinon, je ne suis pas certaine que je pourrais affirmer qu’elle serait encore des nôtres. Je n’aime certainement pas me rappeler cette soirée. Je préfère à tout coup l’éviter. Surtout lorsque l’on sait à quel point elle s’est mal terminée pour lui. Il a dû finir sa soirée à la maison d’arrêt de Monterey. Une chance qu’Albano ait été là pour l’en sortir. J’ai dû témoigner, à la suite de Célian, en sa faveur. Il a fini par sortir, mais j’ai bien vu qu’il avait été ébranlé par cette nouvelle fois. Et j’ai bien peur que chaque fois ne soit pire que la précédente. Avec l’impression de s’enfoncer encore plus, que ça devient si difficile de s’en sortir. Aujourd’hui, tout ce que je demande, c’est seulement de lui apporter un peu de quiétude dans son monde de brute. Un peu de douceur pour venir apaiser ses maux qui pèsent si lourd sur ses frêles épaules. Malgré l’image répugnante qu’il croyait projeter, je ne l’ai jamais trouvé repoussant. Bien au contraire. Là où j’aurais été supposé être dégoutée, j’ai été émerveillé par tant de force et de courage. Par cette vulnérabilité qu’il m’a offert. Il m’a donné un accès à sa personne. Ce qu’il semble ne faire que très rarement. Je crois que j’ai eu bien de la chance cette soirée-là...

Après notre appel téléphonique, j’ai dû me dépêcher de me faire présentable.
13H30
L’heure ne cesse d’avancer et je dois le rejoindre dans trente minutes. De toute manière, je ne peux pas me mettre sur mon trente et un pour l’activité que je nous ai prévue pour la journée. Au contraire. J’enfile une paire de jogging long et un chandail de sport. Aujoud’hui, nous allons bouger. Je remonte mes cheveux d’une couette et j’attrape mes clefs au vol. Je suis prête à démarrer. En route vers l’immeuble communautaire !

Enfin arrivée devant chez lui, j’attends qu’il me rejoigne dans ma voiture qui est beaucoup trop petite pour lui. Je me rappelle de la première fois où il y est embarqué, ce qui me décroche un faible rire. Ça n’avait pas été de tout repos le pauvre. Surtout parce qu’il était très blessé à son dos. J’espère tout de même qu’il a eu le temps de se remettre. Lorsque je le vois enfin se diriger vers la voiture, je sors pour l’accueillir et le saluer.

Alors que nous sommes en route, je lui explique en long et en large le plan de la journée. Au menu : Paintball, karting, arcades, gadget de réalité virtuelle, lasertag, mini-golf fluorescent, labyrinthe, trampoline, slackline... des tonnes d’activités qui nous permettrons de retomber en enfance. C’est le moment ou jamais de mettre de côté tout ce qui nous tracasse et de simplement profiter pleinement. Bien évidemment, nous devrons aussi manger, probablement autre chose que de la salade cette fois-ci. Faut dire que je n’ai pas encore prévue ce bout de la soirée.

Aujourd’hui, nous avons besoin de légèreté. Nous avons besoin de retrouver cette ambiance qui est venue nous habiter lors de notre premier «rendez-vous». Nous avons besoin de laisser l’épisode du pont, ou même de la maison d’arrêt, derrière nous. Nous avons besoin de souffler, de nous accorder un moment de répit en partageant un moment agréable. Aujourd’hui, la seule chose qui nous est ordonnée, c’est d’en profiter pour rire à pleins poumons et de nous amuser comme des fous.

Je le traîne par la main, toute excitée d’enfin lui montrer cet endroit.

- Jay... tu sais, ce que j’ai envie de faire depuis bien longtemps ? Retomber en enfance. Tu veux commencer par quoi ?

Lui dis-je les yeux remplis d’émerveillement.

C’est toujours le genre d’endroit que j’ai aimé fréquenter lorsque j’étais petite. J’y venais souvent en compagnie de mes parents et de Romy. Ensuite, j’y ai apporté mes filles avec Callum. Maintenant, c’est avec Jayson que je souhaite partager cet endroit.
Avec nos âmes d’enfants que nous possédons toujours, je ne demande rien de plus que de partager cette journée avec lui à mes côtés. Et si j’avais rencontré Jay dans mon adolescence, qui sait ce qui aurait pu se passer ?

 
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Il me serait difficile de décrire ce que j’ressens, faut dire que les mots c’est pas toujours mes potes. Dire que j’ai osé lui parler d’fessées ! Une chance qu’elle n’ait pas raccroché… Une chance qu’elle ait envie de me voir. Parce que quand j’la regarde, j’vois bien qu’il y a un fossé énorme entre nos deux mondes. C’est d’ailleurs c’qui m’a frappé, la première fois que l’on s’est vu. J’crois que c’est ce qui l’a frappé aussi ce soir là au camping… Puis après, c’est son sourire qui m’a happé et j’étais près à tomber dans c’fossé pour essayer d’la rejoindre. J’suis pas si naIf, j’sais que j’en aurais jamais les capacités, d’être à son niveau social et intellectuel. Mais c’qui est dingue avec cette femme, c’est qu’elle m’inspire l’sentiment que ça n’a pas d’importance… Que j’ai l’droit d’être qui j’suis à ses côtés, que nos mondes sont différents mais qu’ils ont l’droit de s’rencontrer. C’est que moi, j’ai peur d’abimer son monde à elle…

J’ai passé des vêtements propres après avoir pris une douche, parce que j’suis pas un gars avec l'hygiène la plus irréprochable… J’aurai sans doute pu m’raser, sortir l’grand jeu, mais fallait pas trop m’en demander. J’ai enfilé les premiers vêtements qui m’sont tombés sous la main, au grand désespoir des yeux d’autrui la plupart du temps. Y’a que l’odeur qui m’préocupe, l’reste… J’m’en inquiète pas trop. Les gouts et les couleurs… J’voulais pas avoir l’air du pauvre type qu’elle a vu sortir de taule la dernière fois. J’en ai fait des insomnies, de ses larmes que j’ai osé abandonner devant elle. J’me sens minable, faible… J’aurai voulu que ce jour n’existe jamais, tout comme je chéri ce jour d’une certaine manière, parce qu’elle avait été là, tout comme Azara. Que je n’étais pas aussi livré à moi même que je me le suis pensé dans ma cellule.

J’répondais aux messages de Missy avec une lenteur extraordinaire, j’voulais faire des efforts d’orthographes pour elle, des efforts vains. J’me sentais mal à l’aise de lui écrire, parce que je sais que j’ai l’air d’un abruti. J’sais pas comment elle à pu sentir c’malaise, parce qu’elle à réussi à m’faire passer outre tout ça. Elle a dit qu’elle m’comprennait et ça… C’était fort.

Quatorze heure un peu dépassé. J’attendais assis sur les marches en bas de l’immeuble. L’envie de fumer une clope me dévore, mais j’essaie d’économiser quelques deniers. En parlant d’argent, je n’avais aucune idée de l’endroit où elle voulait m’emmener, ni du budget nécessaire. Budget que je n’ai strictement pas. J’avais une réserve, pour le mariage d’Azara. Il était exclu de taper dedans. Remplir le frigo n’était pas à l’ordre du jour, alors… J’ai tapé dans l’argent destiné à payer les factures déjà en retard, histoire de ne pas venir les mains dans les poches. Et puis qui sait, mon talent de pickpocket aura peut-être l’occasion  de s’exprimer.

La voiture arrive. Une bien petite automobile pour mes longues jambes, mais ce n’est pas ce qui m’freine. L’installation est compliquée, j’me cogne dans tous les sens : la tête, les genoux dans la boite à gant, l’épaule contre celle de la blonde, puis la portière se referme quand même. Mes yeux verts clairs se tournent vers la blonde alors que j’suis à peu près installé avant que je n’éclate de rire. On dirait un crapaud sur une boite d’allumettes !

Le fou rire passé, la nervosité avec ; je l’écoute me parler de ce qu’elle souhaite faire de cette journée. Elle énumère bon nombre d’activités, tellement même, que j’apprécie l’idée qu’il soit impossible de tout faire en une journée et donc… Une deuxième journée ne serait pas du luxe.

- J’espère que t’as emporté un pied d’biche pour m’sortir de là.

Que j’lui dis alors qu’elle se stationne devant un complexe d’amusement. Heureusement, je parviens à me déplier en dehors de la voiture comme un grand. Je m’étire un peu, j’laisse mon attention s’perdre sur le parking, les couleurs et les familles qui circulent.

Puis j’sens ça. Cette chaleur au creux d’ma main.
C’te douceur sous mes doigts.
Ouais, juste sa main dans la mienne.

J’l’ai serré en retour, cette petite main fine entre mes doigts tatoués.
Mon regard s’perd dans l’sien, elle brille tellement de vie…

J’l’ai fixé, quelques secondes. Mon enfance, elle ne fut pas heureuse, mais je me console en me disant qu’elle aurait pu être pire. Et puis, j’ai eut une sorte d’enfance, en partageant celle d’Azara. J’ai connu cet endroit moi aussi, grâce à elle. Et peut-être maintenant avec Missy.

- Je veux…

J’veux sortir des ténèbres, j’veux laisser derrière moi cet épisode du pont, de la maison d’arrêt. J’veux m’en sortir, c’est vrai. J’veux pas retomber dans mes travers, j’veux pas m’dire que j’n’ai aucune chance d’y arriver. Est-ce qu’elle le comprend ça ? C’combat que j’mène tous les jours. Que j’ai l’impression d’gagner, quand j’regarde au fond de ses yeux bleus.

J’l’ai prise dans mes bras. J’ai pas réfléchis.
J’voulais juste le faire depuis tellement longtemps.
La serrer contre moi.

- Merci… que j’soufflais. Parce qu’elle m’avait sorti de cette taule, parce qu’elle m’abandonnait pas pour une raison qui m’échappait complètement, parce qu’elle rendait tout plus doux lorsqu’elle est là.

J’pensais pas m’laisser submerger par son odeur, j’pensais pas que j’aurai envie d’la garder dans mes bras indéfiniment, ni que j’aurai envie de l’embrasser… Peut-être fut ce notre conversation plus tôt ? J’la relâchais, pour ne pas la mettre mal à l’aise, parce que je n’ai pas voulu abuser. Avec maladresse, j’lui replace une mèche de cheveux, un geste qui voulait s’excuser d’avoir imposé c’contact sans lui avoir demandé la permission. J’me rends compte aussi qu’mon être n’a pas réagit avec effroi, de cette proximité.

- J’adorais les trampolines ici, avec Zaza. enchainais-je avec un sourire avec cette éternelle pointe nostalgique.

 
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FT.    @Jayson Salazar   
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Alors que je me stationne devant l’immeuble communautaire, je vois Jay dans toute sa splendeur s’approcher de la voiture. Bien évidemment, je remarque l’effort vestimentaire qu’il a fourni concernant son accoutrement. Pour une fois, je n’ai pas l’impression de cotoyer une abeille ni même un SDF, ce qui est plutôt un bon point.

S’il y a bien une chose à laquelle je ne m’attendais pas, c’est que l’installation soit aussi compliquée. La première fois que Jayson est entré dans ma voiture, l’embarcation avait été plutôt simple contrairement à cette fois. Avait-il grandi entre temps ? Espérons seulement que le voyage soit moins chaotique que son entrée fracassante, disons-le ainsi. Ce n’est pas qu’il avait presque manqué de me coincer moi aussi avec son épaule contre la mienne, mais je nous sentais presque étouffer, confinés dans un espace beaucoup trop petit pour nous abriter tous les deux. Mais lorsque la tension palpable dans l’air se met à redescendre et que nos regards se croisent, nous extirpons, chacun à tour de rôle, un rire incontrolable. Le fait qu’il arrive à me faire rire de la sorte, seulement en entrant dans ma voiture, me prouve bien que la vie avec lui est loin d’être ennuyante.

Pendant le trajet, je me mets à déblatérer sur l’infini de possibilités de choix d’activités que nous aurons l’opportunité de réaliser au cours de cette journée bien spéciale que je nous ai organisée. Journée sous le signe de la légèreté et de l’amusement le plus total. Interdiction d’y amener de la mélancolie ou même du drame. Évitons de nous retrouver dans le même état que celui dont nous avons été plongé sur le pont. Essayons de laisser cet épisode derrière nous. Tout ce que je souhaite, c’est de mourir d’un fou rire en sa compagnie. Chose qui me semble bien être, plus que possible.

J’vois bien qu’il se moque de moi avec sa p’tite remarque sur le pied de biche. Mais ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il vient juste de révéler que je suis une persone bien prévoyante, en toutes circonstances. Je plonge ma main à l’arrière du coffre de ma voiture et devinez ce que j’en ressors : et oui, bel et bien, un pied de biche.

- Si tu savais comme ça m’a été utile dans ma vie, mais dans ce cas-ci, je crois bien que nous serons capable de nous en passer.

Bien pratique lorsque ma portière passagère décide de ne pas s’ouvrir. Heureusement que cette fois-ci, elle ne semble pas faire des siennes. Je referme la portière du coffre avant de me diriger vers mon acolyte de la journée. J’empoigne sa main et je l’entraine à l’intérieur du grand complexe d’amusement.

En pénétrant à l’intérieur du centre, une agréable sensation me submerge. Le bruit des machines qui me rappelle de nombreux souvenirs, l’ambiance festive qui se dégage du bâtiment, l’odeur de barbe à papa qui me fait saliver ainsi que la main de Jayson dans la mienne. Je n’ai pas besoin de plus pour passer une journée parfaite. Je me souviens de cet endroit, comme si j’y avais mis les pieds hier. Je me souviens de ce qu’il a représenté à l’époque où Cal était encore parmi nous. Rares étaient les week-ends où l’on ne se retrouvait pas ici, en famille. Seulement que mon mari, mes filles et moi. On y croisait souvent les gens du quartier. Cal et moi étions un couple respecté et admiré parmi notre entourage. Les gens nous saluaient et appréciaient être en notre compagnie, car nous respirions le bonheur. Nous étions complémentaires, complices.

Aujourd’hui, c’est avec Jayson que je m’y présente. Lui qui est, tout l’inverse de Callum. Mon mari était un homme qui prenait soin de son apparence, avec un sérieux exemplaire. Un homme droit, un homme qui ne défiait pas les règles, un homme qui respectait l’autorité et qui inspirait au respect. Sa prestance était telle qu’il était impossible de ne pas détourner le regard lorsqu’il entrait dans une pièce. J’ai tout de même la drôle d’impression que plusieurs regards sont tournés vers nous en ce moment.

Je crois que c’est, parce qu’en moins de deux, je me retrouve dans les bras de Jayson. Alors que je suis toute crispée, je sens mon corps se décontracter à son contact. Ma tête vient doucement se poser contre son torse et pendant quelques secondes, je souhaite plus que tout, profiter de cette étreinte que je sens si chaleureuse. Alors que je m’apprêtais à en savourer chaque seconde, on dirait bien que Miranda, la mère du petit Billy, n’est pas du même avis. Je vois bien le regard qu’ils me lancent au loin, elle et son mari. Je suis capable de deviner ce qu’ils sont en train de chuchoter «Regarde, c’est la femme de Callum, la veuve endeuillée. Wow, elle passe vite à autre chose». Bon, je ne suis pas encore capable de lire sur les lèvres, mais je suis à peu près certaine que c’était quelque chose dans ce style. Au loin, je l’aperçois chuchoter à Billy «Vient Billy, ne restons pas près de ces gens». Le regard de dégoût qu’elle nous lance ensuite me pulvérise sur place. Miranda avait été mon amie pendant de longues années. Enfin, c’est ce que j’avais cru. Il faut croire que je m’étais trompé.

Alors que Jay me souffle des remerciements, je suis beaucoup trop perdue dans mes pensées pour entendre la moindre chose. Et si ? Et si Miranda avait raison ? Et si, c’était malvenu de me présenter ici avec un autre homme ? Et si c’était malvenu de le laisser me prendre dans ses bras comme ça ? Et si c’était malvenu d’essayer de trouver le bonheur ailleurs ? Et si je devais rester fidèle à Callum toute ma vie ? Je déteste Miranda à l’instant, pour avoir soulevé autant de questions en moi avec la force d’un simple regard. Et si, la réalité nous frappait maintenant ? Et si nous étions trop différents l’un de l’autre ? Et si, j’arrêtais un peu de me poser des questions bordel !?

- Tu...

Complètement déstabilisée, je n’arrive plus à parler. Je n’arrive même plus à me souvenir de ce que je m’apprêtais à lui dire. Je l’écoute vaguement parler. Les trampolines. Oui. Bonne idée ! N’importe quoi pour me retrouver le plus loin possible de ces affreuses personnes. Je ne les laisserai pas gâcher cette journée qui devait être sous le signe de la légèreté et de l’amusement.

Reportant enfin mon attention sur celui qui la mérite entièrement, je m’efforce de lui sourire en retour. Après tout, il ne mérite pas de subir toutes mes insécurités du moment qui m’ont été révélées et pointées du doigt. Tout ce dont j’ai besoin, c’est qu’il me montre le chemin vers la rédemption. Vers la paix et la tranquilité d’esprit. Que je sois légitime de ressentir à nouveau, à ses côtés. Je m’évertue à me répéter stupidement...

Amusons-nous, pleinement. Foutons-nous des conséquences, tout simplement.

 
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FT.    @Missy Fitzgerald   
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Missy, armée d’un pied de biche, c’est drôle comme sensation mais ça m’plait assez. J’aime ce côté totalement décalé chez elle, parfois. Une fille qui peut être tellement raisonnable et pourtant… Tellement surprenante à la fois. Moi, j’suis du genre prévisible dans la connerie. D’elle, on s’attend sans doute à ce qu’elle soit du genre à toujours suivre les règles et à appeler un serrurier en cas de problème de portière. Plus j'apprends à la connaître, plus j’observe ce petit grain de folie spontanée, plus je reste scotché à qui elle est. J’en veux toujours plus, de connaissance d’elle. J’ai jamais aimé ça pourtant, apprendre.

Je souris, une lueur impressionnée dans le regard jusqu’à ce qu’elle range l’outil dans le coffre de sa petite voiture. La magie continue d’opérer, lorsqu’elle saisit ma main sans réfléchir, sans hésiter sur ce geste, sur cette décision. Ça fait battre follement mon cœur qui peine à se remettre à l’heure des vivants depuis cette nouvelle incarcération.

Un élan de vie, je l’ai prise dans mes bras. J’n’en croyais pas moi même, d’en être capable. De provoquer c’contact écrasant que je ne réservais plus qu’à ma fille depuis ma libération d'Atwater. Je me sentais réconforté par cette étreinte, j’avais aussi la folle envie d’la protéger, j’voulais bêtement qu’elle se sente en sécurité avec moi. Moi… L’ex taulard, cassos, l’raté des Salazar. J’suis complètement dingue j’crois, déconnecté d’la réalité. J’me laisse déconnecter avec elle, j’me laisse aller à rêvasser que même si y’a certainement aucune chance que ça soit pour plus qu’une après midi, au moins cette journée est à nous si on l’décide.

Lorsque je la relâche, cette lueur égarée au fond de ses yeux me pique au cœur. Évidemment, j’ai du merder quelque part, et c’quelque part… C’était d’avoir osé faire ça : la prendre dans mes bras. Ça ne m’étonne pas de moi même, quand bien, j’parviens toujours à m’décevoir malgré tout. Ce sourire qu’elle m’adresse n’est pas comme les autres. J’tourne la tête, en direction de ce qu’elle regardait un peu plus tôt. Des gens… Juste des gens. Puis j’me rends compte de ça… Je me suis trop habitué à ces regards qui jugent, depuis toujours. Bien pire désormais. Cette étiquette collée sur mon front, la méfiance naturelle que les gens “bien” éprouvent à mon égard. Mes yeux verts dardent cette femme, qui vient de nous regarder à plusieurs reprise. Elle tient la main de son fils avec plus de fermeté que nécessaire. Je peux presque l’entendre déglutir de là où je suis, alors que mon regard autoritaire ne la quitte pas, jusqu’à ce qu’elle baisse la tête en direction de son enfant. C’est pas mon genre, de faire du mal à une femme ou à des enfents, mais tout à fait mon genre d’abuser de la peur que je peux provoquer auprès de ceux qui m’emmerdent. Elle est libre de croire que je pourrais la tabasser sans le moindre scrupule, si ça peut éloigner son air hautain de Missy.

Je reporte à mon tour mon attention un étage plus bas, sur le visage de la blonde.

- Regardes-moi…

Pourquoi j’ai dis ça ?
Ça m’perturbe tellement… C’regard là.

- Passer du temps avec moi, Missy… Ça sera toujours comme ça.

Je soupire.

- Du moins, quand y’a du monde autour. Les gens regarderont, ils me jugeront toujours. Ils seront aussi comme ça avec tous ceux qui ont l’malheur de m’cotoyer. Ils sont sévères, parce qu’ils savent qu’ils valent mieux que moi et… J’ai pas envie d’passer ma vie à leur en vouloir ou à essayer de changer c’qu’ils pensent. J’ai juste accepté, j’dis pas que j’aime ça… Mais j’peux rien y faire. Je sais, que tu peux pas être fière d'être vue avec moi, mais j’veux pas que ça t’fasse souffrir. J’aurai dû… Penser à te parler de ça avant, tu sais… Du regard des autres. C’est qu’on s’habitue à tout, j’crois. J’vois que toi, les autres… J’fais pas parti d’leur monde.

Pourtant, j’ai l’impression de n’avoir qu’un pied dans l’monde de Missy. Que j’pourrais en ressortir comme j’en suis arrivé. Sait-elle seulement qu’elle fait parti du mien ? Faudrait qu’elle puisse lire entre les lignes, qu’elle ait le décodeur spécial Jayson Salazar… C’est pas gagné.

J’me sens vulnérable à cet instant, à nouveau. Parce que c’est terrifiant, d’laisser quelqu’un entrer dans mon monde à moi, dans c’putain de chaos. J’me pince les lèvres, persuadé que ce que j’raconte ne fait pas l’moindre sens. Ça n’a jamais de sens, quand on a pas l’controle de c’quon ressent et qu’on essaie d’exprimer tout ça quand même…

- On peut aussi courir sur la plage, là où il n’y a personne.

Parce que j’veux pas qu’elle abandonne l’idée d’passer du temps avec moi, même si pour ça il faut que l’on soit seuls au monde.

 
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FT.    @Jayson Salazar   
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Cette étreinte a pour effet de provoquer une multitude d’émotions en moi. Je suis pronfondément tiraillée entre le désir de rester enfouie dans ses bras pour le reste de l’éternité et celui de me retirer doucement. De fuir ce mal-être qui m’avait habité l’espace de quelques secondes au lieu d’affronter. Au fond, je sais pertinemment ce que je désire. J’ai désiré ce moment depuis maintenant quelques temps. Simplement, je ne sais pas si je suis encore prête à l’assumer au front de ceux que je connais depuis belle lurette. Jamais je n’aurais pensé obtenir un regard de jugement de la part de Miranda. Celle qui, je croyais, était mon amie. Ce qui s’avère être totalement faux à priori, puisqu’elle me juge tout en ne sachant rien de la situation. Jayson et moi ne sommes pas en train de commettre un acte illégal, ni même de faire quelque chose de mal. Nous sommes seulement deux personnes qui cherchent un peu de réconfort dans les bras l’un de l’autre... n’est-ce pas ? J’crois bien que c’est tout. C’est ce que j’aime bien me dire.

Je prends une grande inspiration, callée au fond de ses bras et je ferme doucement les yeux. Qu’est-ce que c’est apaisant ! Je ne me suis pas sentie aussi apaisée depuis... Depuis longtemps. Je ne sais pas ce que j’attends... Une caresse ? Un petit mot sursurré au creux de l’oreille ? Mais au lieu de douces paroles ou même d’un moment d’affection et de tendresse, je mérite un regard hautain et rempli de jugement de la part de ma chère et tendre voisine. Voilà qui me déstabilise plus que je ne l’aurais cru. J’ai seulement peur que... Oh merde ! Que Jayson le ressente. Je ne souhaite pas du tout lui imposer mon mal-être et encore moins lui faire ressentir. Mais c’est ce qui est en train de se produire. Je dois absolument me justifier. Il ne peut pas croire que j’aille honte de lui. Il ne faut pas qu’il le croit. Mais avant même que je n’aie le temps d’ouvrir la bouche, il me demande de le regarder. Il me défie de plonger mes yeux bleus à travers son regard noisette. Pour la première fois, je ne suis pas certaine d’avoir envie de le croiser. Mais ce regard qu’il m’offre, il n’a rien de rassurant. Au contraire. C’est plutôt un regard perdu, un regard honteux. Et c’est hors de question que je ne fasse rien pour l’en changer. Alors que je l’écoute attentivement, mon cerveau n’arrête pas de se faire un million de scénarios différents. Ça semble tout de même sérieux ce qu’il est en train d’me dire. Je n’peux franchement pas le laisser tout mettre sur ses épaules non plus. Pour qu’il comprenne mon sérieux, j’empoigne son visage de mes petites mains froides, tout comme je l’ai fait auparavant alors que tout ce que je souhaite, c’est de capter son attention.

- Non non Jayson, c’est pas ça du tout. Miranda, la femme là-bas qui nous regardait, c’est bien moi qu’elle regardait comme ça... pas parce que je suis avec toi... Enfin, si, peut-être un peu. Mais aussi parce que je suis veuve. Elle était en train de me juger, de se dire que je ne suis qu’une pauvre moins que rien parce que je suis passée à autre chose.

J’me rends compte de ce que je viens de dire. De la gaffe monumentale que je dois rattraper.

- Pas passer à autre chose, enfin, je sais même pas si c’est vraiment possible mais parce que j’étais dans tes bras j’veux dire...

Et puis merde à la fin ! Je n’ai pas envie de laisser des gens coincés comme Miranda me dicter ma conduite. Si nous partons, c’est que je la laisse gagner. Je laisse son regard de jugement avoir une emprise sur moi et je refuse que ça ne se termine comme ça.

- Et si on allait plutôt au trampoline, tu en dis quoi ?

Encore une fois, je me sens aventureuse. Je joint sa main dans la mienne, tout en lançant un dernier regard vers Miranda. Loin de moi l’idée de m’abaisser à son niveau, mais je ne peux me retenir de la toiser du regard.
Je propose les trampolines, parce que je me souviens qu’il avait mentionné adorer y venir avec Zaza. Tout ce qu’il manque pour que cette journée ne soit parfaite, c’est un peu de nostalgie. Mon sourire de retour, j’attrape maintenant ses deux mains, me plante devant lui tout en disant

- À toi l’honneur.

La seule chose que j’ai envie de voir présentement, c’est Jay virevoltant dans les airs avec un immense sourire bordant son visage. Eh oui, je veux simplement qu’il perde ce regard triste et qu’il redevienne celui qu’il a toujours été ; l’homme énergique et heureux comme je le connais.