a life, a story -

❝ La famille, les Hobbs. ❞
Les Hobbs sont une grande famille. Non pas via les parents et les générations précédentes, mais bien par la fratrie. Les Hobbs, c’est sept enfants de cinq pères différents. Nous avons l’aînée « Prof », notre protagoniste du jour, suivi rapidement par deux frères « Atchoum et Joyeux », chacun de père différent, âgé de vingt-neuf ans et de vingt-sept ans. Deux ans plus tard, âgées aujourd’hui de vingt-cinq ans, nous avons les jumelles « Timide et Simplet ». Dois-je préciser qu’elles ont le même père ? Viennent ensuite les deux derniers « Grincheux et Dormeur », ayant le même père et le seul référent paternel que la fratrie a eu. Aujourd’hui, ils ont respectivement vingt-et-un ans et dix-neuf ans. Une très grande famille. Une famille soudée par les tempêtes qu’ils ont dû surmonter. Ils se disputent comme dans toute fratrie, mais ils ne laisseront jamais tomber l’un des leurs. Si l’on s’en prend à un Hobbs, on s’en prend à tous les Hobbs.
La blondinette ne changerait rien de sa famille. Même si cela veut dire, ne pas avoir de parents.
Oh oui, Héra adore les surnommer comme les sept nains dans Blanche-Neige. Son passe-temps étant de les taquiner, encore aujourd’hui. N’est-ce pas le rôle de l’aînée d’embêter les plus jeunes ?

❝ Une naissance incertaine et un début de vie compliquée. ❞
Héra doit son prénom et son second prénom à sa grand-mère maternelle. Mordue de mythologie et croyante non pratiquante, Hanna n’a pu s'empêcher de lui donner le nom de la reine des dieux. Héra veut également dire « Jéhovah est ma lumière ». Concernant Athénaïs, c’est en lien avec la déesse grecque de la guerre et de la sagesse. Aux yeux de la vieille dame, sa petite fille était propice à devenir une vraie guerrière, une combattante avec une certaine sagesse. Digne d’une grande leadeuse. Il faut dire que la demoiselle avait de grandes chances de ne pas voir le jour ou du moins, ne pas vivre au-delà de quelques jours.

Sa mère était âgée de dix-huit ans quand elle est tombée enceinte. Ayant fait un déni de grossesse, trop défoncée et alcoolisée, elle s’est seulement rendu compte qu’elle était enceinte au bout de cinq mois de grossesse. Hors délais pour avorter. Lana ne voulait pas de cet enfant, de cette « chose » qui grandissait en elle. Elle a tout fait pour le faire partir, espérant faire une fausse couche. Elle n’a donc en aucun cas diminué sa consommation de drogue et d’alcool. Elle en venait même à se frapper le ventre. Son souhait a failli se réaliser.

Héra est née à vingt-huit semaines. Prématurée, elle a été placée en réanimation néo-natale, sous assistance respiratoire. Les pédiatres étaient peu confiants à sa survie. Lana n’est pas venue la voir une seule fois, quittant l’hôpital afin de poursuivre sa vie. C’est Hanna qui a passé jour et nuit au chevet de sa petite fille, priant tous les Dieux pour qu’elle s’en sorte. Mais si elle s’en sortait, qu’en allaient être des séquelles neurologiques ? La drogue et l’alcool ne sont pas un mélange idéal en cas de grossesse.

Au bout d’environ deux mois, Héra put enfin rentrer chez elle, dans les bras de sa grand-mère. Défiant tous les pronostics, elle a cloué le bec aux médecins les plus pessimistes. Après une batterie d’examens, la jeune enfant ne devrait avoir aucun trouble neurologique, en plus de s’être battue pour sa vie. C’est face à ce courage, à ce combat mené, que Hanna l’a appelé « Héra Athénaïs ».

❝ Une figure paternelle, Jake, le papa Hobbs ❞
Après la naissance de Héra, quatre autres enfants sont nés. À commencer par deux garçons, dont seul le troisième de la fratrie a trouvé grâce aux yeux de la matriarche, suivis par des jumelles. Pendant la première année de leur naissance, les fillettes ont vécu un temps chez leur père avant que celui-ci ne décide de fonder sa propre famille et couper tout contact avec elles.

Lana a enfin arrêté l’alcool et la drogue pour le bien de ses enfants. Enfin, plutôt pour le bien d’un homme qu’elle venait de rencontrer dans un bar. Le coup de foudre. Jake. Pour Héra, ayant vu une flopée d’hommes aller et venir au domicile familial, elle évitait de s’attacher. Âgée de neuf ans, elle rêvait d’avoir un papa comme une bonne partie des enfants de son âge. Mais, il s’avère que Jake était le bon. Reporter, il parcourait le monde, mais il rentrait toujours à la maison. Lana était métamorphosée, bien que la relation avec son ainée fût assez chaotique. Ce lien maternel ne s’étant jamais tissé, Héra avait la chance d’avoir sa grand-mère, qui vivait également avec eux. En revanche, ça se passait mieux avec les autres enfants, attisant au début, la jalousie de la blondinette. Heureusement, son lien avec Jake était fort. Le soir, il lui racontait toutes ses aventures, des étoiles scintillaient dans le regard de la petite blonde qui avait envie de suivre ses traces. L’idée de parcourir le monde lui plaisait tant.

Quelques mois plus tard, trouvant étrange de ne pas voir sa grand-mère debout à préparer les pancakes, Héra s’était rendue dans sa chambre. Après avoir frappé, elle finit par y entrer.

- Mamie ? Lance la jeune demoiselle avant de s’approcher doucement du lit.

Sa main se posant sur sa joue, elle sursaute en sentant sa peau froide. Le cœur tambourinant dans sa cage thoracique, elle se met à la secouer, la suppliant de se réveiller.

- Mamie, réveille-toi ! MAMIIIIE !! S’il te plait !! PAPAAAA ! crie-t-elle après Jake, les larmes menaçant d’inonder ses joues au teint de porcelaine.

Malheureusement, celui-ci ne put que constater le décès de Hanna. Décédée dans son sommeil, elle a eu la plus belle des morts qui soit. Sans souffrance. Mais, sa famille n’a pas eu le temps de lui dire au revoir. Héra en sera dévastée et un vide prendra place dans son petit cœur. Elle en venait même à regretter que ce ne soit pas sa mère, à la place de sa grand-mère. Une pensée, qu’elle n’avouera jamais à personne. Tant, elle s’est sentie honteuse dès la seconde, où cette pensée à traverser son esprit. Elle est restée une bonne heure allongée près de celle qui a été son modèle. Pleurant silencieusement avant que Morphée ne vienne l’envelopper dans ses bras, l’emmenant au pays des songes. Jake était venu la chercher afin de la porter jusqu’à son lit, permettant enfin aux secouristes d’emmener Hanna avec eux.

Peu de temps après cette perte tragique naquirent deux garçons à deux ans d’intervalle. Pendant deux ans, les Hobbs ont connu le bonheur, du moins ce qui s’en rapproche. Héra avait alors quatorze ans et elle avait ses premières relations amoureuses, elle vivait comme toute jeune fille de son âge. Profitant de son adolescence, comme l’aurait souhaité sa grand-mère. Néanmoins, le sort continue de s’acharner sur les Hobbs. Deux militaires ont débarqué à la maison, annonçant le décès de Jake. Missionné pour suivre une équipe de militaire en Irak, il est décédé dans une explosion.

Ce décès signera le début de la fin pour la famille Hobbs. La fratrie se soutiendra après cette nouvelle disparition, ils resteront solidaires entre eux. Pendant ce temps, Lana sombrera à nouveau dans ses addictions, ne trouvant pas la force de tenir. Même pas pour ses sept enfants.

❝ Abandon parental, le choix cornélien de Héra ❞
Après le décès de Jake, Lana est retombée dans ses vieux démons. Délaissant ses enfants, Héra a dû reprendre le rôle de la mère. Elle entretenait la maison, payait les factures et faisait à manger pour tout le monde. Elle avait dix-sept ans. Terminale au lycée, elle peinait à bosser correctement. Mais, les choses n’allaient pas aller en s’améliorant.

Un jour, alors qu’elle rentrait plus tôt de ses cours, elle s’était mise à tout ranger et à jeter les cadavres de l’addiction de sa mère. Par ailleurs, dans la poubelle, elle aperçut une seringue et un garrot. Le matériel de sa junkie de mère. Ne supportant plus cette vie, l’aînée des Hobbs pète un plomb et décide de monter dans la chambre de sa mère afin de lui balancer ses quatre vérités. Or, elle n’y était pas.

- Lana ?! appelle-t-elle sa mère dans toute la maison.

Loin d’être une figure maternelle à ses yeux, Héra ne l’a jamais appelé « maman ». Sortant du domicile, elle prend conscience que la voiture n’est pas là. Bizarre. Les sourcils froncés, elle rentre à nouveau et elle commence à imaginer le pire. Grimpant l’escalier, elle se rend à nouveau dans la chambre afin d’ouvrir tous les placards et le tiroir. Plus rien. Plus une seule affaire. Prenant son téléphone, elle tente de la joindre, mais elle tombe directement sur son répondeur. Un bruit sourd dans ses tympans, la tête qui tourne, le souffle qui s’accélère. Héra comprend que leur mère vient de les abandonner. Sans un mot. Pas un seul foutu papier. Elle a tout retourné, rien. Lana est partie sans même se soucier de ce qu’allaient devenir ses progénitures. Quelle garce ! De plus, elle est partie avec les petites économies de la famille, ainsi que l’argent de poche des jumelles et des deux derniers de la famille, après avoir cassé leurs tirelires. La haine qu’elle avait envers sa génitrice prit une expansion hallucinante. Elle n’a jamais autant haï quelqu’un, qu’elle ne hait celle qui la mise au monde.

Après avoir appelé les deux plus grands de la fratrie, toute la tribu est réunie à la maison. Elle leur avait demandé d’aller chercher tout le monde et de rentrer immédiatement. Qu’allaient-ils devenir ?

Le temps que tout le monde rentre, la blondinette a appelé la seule personne en qui elle pouvait avoir confiance. MJ. Ancienne baby-sitter des Hobbs, elle est toujours restée en contact avec elle. Besoin d’avoir son avis, MJ est parvenue à lui expliquer les deux solutions qui se dressaient devant elle. Deux solutions qui changeront sa vie à partir de maintenant.

Prenant Atchoum à part, elle lui raconte tout. Ce dernier hallucine, évidemment. Mais, il n’est pas étonné.

- Qu’est-ce qu’on fait ? demande-t-il. On appelle les flics ?
- Non…si on les appelle, ils enverront la protection de l’enfance et on sera séparés dans des familles d’accueil. T’imagines ce qu’ils vont vivre ?!
- Alors quoi ?! Héra, ça va bien se remarquer qu’on n’a plus personne.
- Pas si on se tait, et que l'on fait comme si de rien n’était.

Deux choix se proposaient à la demoiselle. Soit, elle avertissait le départ de leur mère et ils seront placés et séparés, mais au moins, elle vivra sa vie d’ado’ comme tout le monde. À elle, le bal de promo avec son copain, les soirées étudiantes et ses études en journalisme grâce à une bourse sportive. Soit, elle fait passer sa famille avant tout. Et dans ce cas, ils se taisent et la demoiselle laisse tomber ses rêves de devenir reporteur, sa vie de lycéenne et elle se met à chercher activement du boulot.

Héra pose son regard sur ses frères et sœurs qui sont au salon, avant de regarder son frère, âgé d’un an de moins qu’elle.

- On ne dit rien. Je vais chercher du boulot et on va gérer. Il est hors de question, qu’on nous sépare. Dit-elle d’une voix ferme et sûre d’elle.

❝ La vérité éclate, les assistants sociaux débarquent. ❞
C’était un dimanche matin quand la vie de la famille Hobbs a de nouveau pris un tournant catastrophique. On sonne à la porte. Héra était occupée à préparer le petit déjeuner pour toute la tribu. Elle se souvient encore d’avoir crié « une seconde, j’arrive » avant de se laver les mains et d’aller ouvrir. La peur la prit à la gorge quand elle vit trois policiers et deux assistantes sociales sur le perron.

- Mademoiselle Hobbs, Héra, c’est bien ça ? Nous aimerions bien voir ta maman. Demande-t-elle à la jeune fille de dix-neuf ans.
- Elle est partie en voyage pour le boulot. Ment-elle.
- Il nous faudrait les contacts de son patron. Peut-on rentrer ?

Dès qu’ils ont franchi la porte, la demoiselle a compris que sa famille allait éclater. La tribu s’est retrouvée au salon et questionnée par les deux dames. Bien que les ainés se sont montrés un peu agressifs en les voyant mettre la pression aux plus jeunes, elles sont parvenues à leur faire cracher le morceau. La décision a été sans appel. Ils ont dû suivre la police. Héra a fini par tout avouer, mais elle s’est montrée claire. Elle bosse et elle se tue au travail pour ses frères et sœurs. Ils ne manquent de rien. Elle supplie l’agent de les laisser rentrer chez eux. Malheureusement, les cinq plus jeunes de la fratrie se sont vu être dispersés dans des familles d’accueil. Tandis que les deux plus âgés étaient libres de rentrer chez eux.

Héra déteste le système. Des verres et des assiettes se retrouvent balancer contre les murs. Comme si sa famille n’avait pas assez souffert. L’État en rajoute une couche. Pour la première fois, Hobbs se décide d’aller voir son voisin. Oncle George. Un homme âgé, multimillionnaire et qui éprouve une tendresse envers ces sept enfants. Elle n’a jamais accepté un centime de cet homme, mais ici, elle n’a pas les moyens de se payer les meilleurs avocats et retrouver sa famille. Sans une once d’hésitation, il lui a présenté les meilleurs dans le domaine, de vrais requins. Jouant de ses relations, il a fait en sorte à ce que le mois suivant, le procès puisse avoir lieu.

Le jour J arrive. Quand ce fut à elle de parler. La jeune demoiselle décide d’ouvrir son cœur pour la première fois, afin de faire comprendre au juge, l’importance de laisser sa famille unie. Elle se lève de sa chaise, son regard se plonge dans celui du juge.

- Je n’ai que dix-neuf ans. J’en avais dix-sept quand notre mère s’est volatilisée sans laisser le moindre mot. Prenant avec elle toutes les économies qui nous restaient. Je sais que nous aurions dû avertir la police. J’ai décidé de ne pas le faire, car je savais qu’on nous aurait séparés, comme c’est le cas en ce moment. Si c’était à refaire, Madame la Juge, je le referais. Je ne vais pas vous mentir, ce n’est pas simple tous les jours. J’accumule autant de boulot que je peux, pour m’assurer de leur donner une vie décente. Vous ne pouvez absolument rien me reprocher, ni les services sociaux. Mes frères et sœurs ont de quoi manger, de quoi s’habiller. Je place le peu d’économie que j’ai dans un compte qui servira pour leurs études. Vous pouvez même demander à leurs professeurs, ils ne ratent aucun cours, ils ne sont jamais en retard et ils ont de bonnes notes. Même ceux qui rencontraient des difficultés.
- L’un de vos petits frères s’est quand même souvent retrouvé au commissariat. Ne peut s’empêcher d’intervenir l’assistante sociale de la protection à l’enfance.

Héra tourne son regard, assombri par la colère, vers cette femme, les dents et les poings serrés.

- C’est un ado. Ça fait des conneries. Je suis sûr que les familles dites « normales » peuvent aussi rencontrer ce genre d’ennuis. Je n’ai jamais dit que nous étions parfaits. Alors, fermez là, c’est à moi de parler. Lance-t-elle sèchement en la pointant du doigt, avant de reposer son regard sur la juge.

Une boule se forme au fond de sa gorge, les larmes lui montent aux yeux, mais elle ne laisse rien paraitre. Les poings posés sur la table en bois foncé, la tête baissée et les yeux fermés, Héra souffle doucement avant de se redresser. Droite comme un i, elle regarde la juge, droit dans les yeux, une nouvelle fois.

- Je sais que j’ai sûrement commis des erreurs. Mais, vous ne pouvez pas me reprocher de les rendre malheureux ou de ne pas leur donner une vie décente. Non. Nous sommes une famille et on se serre les coudes depuis que nous sommes gosses. Nous avons perdu notre grand-mère et celui qui faisait office de figure paternelle et qui était également le père des deux derniers. Nous nous sommes battus pour garder la tête hors de l’eau et rester ensemble. Je comptais faire une demande d’émancipation et demander d’être leur tutrice. Sauf que je n’avais pas les moyens. Je ne suis pas la sœur parfaite, mais je me battrais jusqu’à mon dernier souffle pour eux et je les protégerais envers et contre tout. Dit-elle une profonde détermination dans la voix. Et je peux déjà vous dire que je les inciterais à fuguer des maisons d’accueil où ils sont, pour revenir chez eux. Avec moi, ils sont heureux, en bonne santé et en sécurité. Mettez-les dans des foyers et vous allez nous séparer et au vu des statistiques, certains pourraient subir des abus, de la violence, de la négligence. Dit-elle avant de regarder l’assistante sociale. Et ne venez pas me contredire ! Vous êtes débordés. Ce n’est pas une critique, mais une constatation. Vous ne pouvez pas surveiller toutes les familles. Continue-t-elle de dire avant de reposer son regard sur la juge. Alors, laissez-moi les ramener à la maison. Une assistante sociale peut passer autant qu’elle veut pour venir vérifier. Mais au moins, elle n'aura pas à se rendre dans plusieurs foyers. Ça sera un gagne temps pour eux. Je vous en supplie… Ne séparez pas ma famille. Supplie-t-elle en laissant, finalement, une larme salée couler le long de sa joue. Ils sont toute ma vie.

Le verdict a été prononcé seulement une heure après le retrait du juge. Face à cette rapidité, Héra a été prise de doute, un poids sur l’estomac, elle craignait qu’on sépare sa famille. Mais contre toute attente, la juge s’est placée de son côté. Dans la foulée, elle l’avait émancipé et fait d’elle la tutrice légale de ses six frères et sœurs. À la condition qu’une assistante sociale passe une fois par mois. Enfin, une bonne nouvelle. Le soir même, la famille Hobbs fêtait la décision de la juge.

❝ Les petits boulots le jour, camgirl et escorte la nuit. ❞
Subvenir aux besoins de six personnes, payer le crédit de la maison que leur mère leur a laissé sur le dos, mettre de l’argent de côté pour les études de ses frères et sœurs, la nourriture, les factures… Héra a été obligée de vite grandir et devenir une adulte à dix-sept ans. Heureusement, elle pouvait compter sur le second de la famille. Sans oublier que finalement, la fratrie au complet mettait la main à la patte pour aider. Chacun à son niveau, bien sûr.
La jeune femme enchaina les petits boulots. Serveuse, barmaid, vendeuse, femme de ménage, secrétaire, assistante… Tout ce qu’elle pouvait trouver, elle prenait. Même du boulot non déclarer. Pendant un temps, elle s’est même mise à faire du strip-tease sous le pseudo de Saphir. Le même qu’elle utilisait, quand la nuit, elle se lançait en tant que camgirl. Elle n’en était pas fière, elle se dégoutait d’elle-même. Mais, ça payait bien. Mieux que ses boulots en journée.

Mais un jour, son second frère l’a pris à part. Un de ses potes l’avait reconnu. Pourtant, elle faisait attention à cacher son visage. Mais son tatouage sur son avant-bras gauche la trahit.

- Tu m’dégoutes ! Tu fais ta pute devant des mecs en chien. T’es tombée bien bas, Naïs ! balance-t-il en la regardant avec dégout.
- Ne me parle plus jamais comme ça. Dit-elle après quelques secondes de silence, choquée par les propos tenus par son frère. Tu crois que ça m’éclate de faire ça, peut-être ?! Putain, j’accumule autant de boulots que je peux pour que vous puissiez bouffer, vivre ici, faire des études et avoir une vie un minimum décent ! Et toi, tu me craches ça à la gueule ?! Tu crois que je ne me dégoute pas ?! Je n’ai pas le choix, ok ? C’est ce qui paye le mieux. Alors, si t’es pas content, c’est la même chose.

La relation entre le frère et la sœur s’était dégradée depuis. Ils ne se parlaient plus. Héra avait fini par arrêter ce boulot. Un soir, alors qu’elle travaillait dans un bar comme barmaid, une certaine Angela l’a accosté. Rapidement, elle a compris qu’il s’agissait d’une mère maquerelle. D’ailleurs, cette dernière ne s’en cachait pas et lui proposait un boulot en tant qu’escorte. Il faut croire qu’à ses yeux, Héra avait le physique, la prestance et l’intelligence nécessaire pour intéresser des hommes fortunés. Sans oublier qu’elle parlait en plus de l’anglais, le français et le russe. Atout non négligeable. Bien sûr, au début, elle a refusé son offre. Coucher pour de l’argent, non. Elle pouvait tomber bien bas, mais pas aussi bas. Sauf qu’Angela lui assura qu’elle n’y était pas obligée. Une escorte pouvait juste être une présence féminine pour le temps d’une soirée, sans aller plus loin. La brune était libre de poser ses propres limites.

Continuant ses petits boulots nocturnes, elle a eu ses petits admirateurs comme d’autres strip-teaseuse et camgirl. Si au début, ça lui semblait inoffensif, par la suite, c’est devenu plus malsain. Un homme assis sur le capot de sa voiture à chaque fois qu’elle terminait son service, de nombreux cadeaux qui l’attendaient dans sa loge, le sentiment de se sentir suivis… Chaque parcelle de son corps lui disait de rester sur ses gardes. Le plus âgé de ses frères, mis dans la confidence de ses craintes d’avoir affaire à un fan un peu harcelant, venait la chercher après son service. Malheureusement, les choses se sont envenimées quand les cadeaux ont commencé à arriver au domicile et que son téléphone s’est mis à sonner plusieurs fois par jour, ainsi que durant la nuit. Une simple respiration. Rien de plus. Bien que son numéro soit sur liste rouge. Des commentaires un peu trop détaillés sur le chat de la cam, ce qui a fini par la conduire à arrêter ce boulot.  

Prévenir la police ? Quel flic aurait pu la prendre au sérieux ? Loin d’être naïf, elle est consciente de l’image que les strip-teaseuses peuvent avoir. Certes, ils ne pensent pas tous comme ça, mais comment les reconnaitre ? Vivant dans la crainte et sous la protection de son frère, au bout de quelques mois, elle en a eu assez. Héra s’est mise au cours de self défense et elle s’est munie d’un taser.

Il aura fallu environ un an avant que son frère ne pète un plomb et parte voir la police. Par chance, il est tombé sur un policier qui a pris cette affaire au sérieux. Trois semaines plus tard, le harceleur a été trouvé et mis en détention. Enfin, Héra a pu recommencer à vivre sereinement et ne plus devoir regarder par-dessus son épaule.

Une semaine plus tard, la jeune Hobbs frappa à la porte du bureau d’Angela, acceptant le job. Ainsi débuta son boulot d’escorte et elle stoppa sa carrière en tant que strip-teaseuse. À la suite de son vécu, elle a eu besoin de changer d’air et de quitter le monde du strip-tease. Adieu Saphir, bonjour Angélina Abott. Aucun de ses clients ne connaît sa véritable identité.

❝ Oncle George, l’ange gardien des Hobbs ❞
Cet homme d’une soixante d’année, multimillionnaire grâce à son entreprise, était un ami de la grand-mère des Hobbs. Les sept enfants se sont beaucoup attachés à lui. Héra particulièrement. Il veillait sur eux et les couvrait de cadeaux à Noël, à défaut de pouvoir les aider financièrement. Il faut dire que la blonde est une personne particulièrement fière et bornée.

Entre l’ainée des Hobbs et George, la relation est devenue plus fusionnelle quand elle a vécu chez lui pendant près d’un mois quand Lana est revenue dans leur vie. Héra avait alors vingt-cinq ans. Autant vous dire que l’ambiance était électrique. Elle lui avait sommé de quitter la maison familiale et de ne plus jamais revenir. Malheureusement, tout le monde n’était pas de son avis. Ce qui a conduit à un vote, ce qu’ils font toujours quand une décision doit être prise et qu’elle impacte tout le monde. Qu’elle ne fut pas sa déception, quand elle vit les jumelles, Joyeux et Grincheux voter pour que leur mère revienne à la maison. Bien qu’elle comprenne leur choix, elle ne pouvait pas s’empêcher de se sentir blesser. N’ayant pas la force de jouer l’hypocrite et de vivre sous le même toit que la matriarche, elle a pris ses affaires avant de quitter la bâtisse. Elle veut retrouver sa famille ? Très bien, elle la lui laisse. Elle ne s’en occupe plus.

C’est ainsi qu’elle s’est retrouvée hébergée par George. Malgré son inquiétude, Héra a continué à vivre sa vie. Sauf, qu’en contrepartie de son hébergement, la blonde était sollicitée pour venir bosser avec lui. À savoir au sein du label de musique « Blue Sound Records », l’un des plus grands du pays. Sa réputation n’est plus à faire. Le côté humain et transparent de l’entreprise l’ont permis de se démarquer des autres. Tous styles confondus y sont les bienvenues. Héra ne connaissait pas les intentions de l’homme. Elle se contentait donc de le suivre, de l’observer et parfois de donner son avis quand il le lui demandait. À savoir, tout le temps. Il s’était avéré que la jeune femme était dotée de l’oreille absolue. Elle savait précisément ce qui pouvait clocher dans une mélodie ou une chanson. Un véritable atout pour l’entreprise. Pourtant, Héra ne voulait pas être payée. Elle faisait ça pour rendre service et puis elle se prenait au jeu.

Au bout d’environs un mois, Héra eut la visite d’une des jumelles. Lana était de nouveau parti. Emportant avec elle, tout l’argent qu’elle avait pu trouver. En rentrant, dans la poubelle, la blonde a pu constater à nouveau que sa mère n’avait jamais cessé de se droguer. Encore une fois, elle avait débarqué dans leur vie, pour les blesser un peu plus. Bien que l’envie de balancer un « je vous l’avais bien dit » lui brulait les lèvres, elle n’a rien fait. Ils souffraient assez comme ça.

Il y a cinq mois, la police est venue leur annoncer la mort de la matriarche. Décédée d’une overdose sous un pont, dans une ville voisine. Et si je vous disais que Héra n’a pas ressenti une once de tristesse, au contraire, même plutôt du soulagement, vous la prendrez pour une cinglée ? Ou bien pour une jeune femme, juste brisée si souvent par celle qui la mise au monde, qu’elle ne ressentait plus aucun amour à son égard ?

Malgré son retour au domicile des Hobbs, Héra a poursuivi sa collaboration avec Oncle George.

❝ Aujourd’hui ❞
Âgée de trente ans, Héra vient de déposer ses affaires dans son nouveau bureau. Son propre bureau à elle. Un bureau donnant une vue imprenable sur la ville, grâce à la hauteur du bâtiment, sans pour autant être un building. Son regard se pose sur la petite plaque en or qui se trouve sur son bureau. « Héra Athénaïs Hobbs, PDG ».

Il y a deux mois, Georges est décédé à la suite d’un cancer des poumons. Une nouvelle perte a digéré pour les Hobbs. Mais le testament les a laissés sans voix. Sur un compte, au nom de Héra, huit cent mille dollars s’y trouvaient. Cet argent, c’était à elle de le partager entre ses frères et sœurs et d’en faire bon usage. Il va de soi qu’à l’unanimité, elle s’en est d’abord servis pour faire les diverses réparations et travaux dans la maison et terminer de payer le crédit restant, concernant leur maison. Quant au reste de l’argent, ils étaient bloqués pour payer les études. Ce ne sera qu’après, que l’argent sera partagé en six. L’ainée se mettant en retrait. Le reste de la fortune du vieil homme a été distribué à travers plusieurs associations et refuges en tout genre.

Après tout, elle a appris qu’il lui laissait la gestion de l’entreprise. N’ayant pas eu d’enfant, il a fait d’elle son héritière de ce qu’il a mis toute une vie à construire. Elle a encore du mal à réaliser tout ça. Il va de soi qu’elle quittera son boulot de serveuse au bar et qu’elle a arrêté son boulot d’escorte. Une nouvelle vie s’ouvre à elle.

Sans compter qu’ayant reçu les affaires de Lana par les autorités, Héra a passé une soirée à regarder ce qui leur a été rendu. C’est dans une boîte en métal qu’elle a trouvé le journal intime de sa mère. Ce n’est que récemment qu’elle a eu le courage de le lire. Enfin, seulement une partie. Elle s’est arrêtée après avoir lu le passage sur son géniteur. Un nom, un seul. Hunter. À côté, entouré d’un cercle rouge et écrit en lettre capitale « famille riche et puissante ».

Prise d’une envie de connaitre l’autre partie de son arbre généalogique, la jeune femme a décidé de se mettre en quête et de débuter ses recherches. Pure curiosité…

○ En vrac ○
01. Ainée d’une fratrie de sept enfants. 02. Ne connais pas son père biologique. 03. Sa mère a tout tenté pour se débarrasser d’elle, alors qu’elle n’était encore que dans son ventre. Elle est née prématurément. 04. Jake est le père des deux derniers, il est celui qui a tenu le rôle du père pour tous les enfants, jusqu’à son décès en Irak. Il était reporteur. 05. Enfant, c’est elle qui a découvert le corps de sa grand-mère, décédée pendant son sommeil. 06. Leur mère les a abandonnés du jour au lendemain, sans laisser de mot. Elle a fini par revenir quelques années plus tard, juste pour dépouiller ses enfants avant de repartir. Elle est décédée, il y a six mois, d’une overdose. 07. Elle est celle qui a protégé sa famille envers et contre tous. Même des services sociaux qui ont fini par débarquer, deux ans plus tard. Heureusement, elle est parvenue à se faire émanciper et à devenir leur tutrice. 08. Son ancien nom de stripteaseuse et de camgirl était Saphir. Celui en tant qu’escorte était Angélina Abott. 09. Elle a l’oreille absolue. 10. Elle est passionnée par la musique depuis toujours, bien que son rêve aurait été de devenir reporteur, comme Jake. 11. Elle adore lire un tas de bouquins, c’est une fan de jeux vidéo et de jeux de société. 12. Elle a regardé Saw une bonne centaine de fois. 13. C’est une amoureuse des animaux. Elle compte bientôt adopter un chiot pour faire la surprise à ses sœurs et frères. 14. Sa famille est son ancre. Bien que les plus grands ont quitté la maison, ils se retrouvent tous les dimanches pour le brunch. Une tradition qu’aucun membre de la fratrie ne rate. 15. Elle a été harcelée pendant un an, par un client du club de strip-tease, ainsi que de ses vidéos en tant que camgirl. 16. Sportive, elle adore faire du surf, de la boxe et courir le matin ou le soir. 17. Son péché mignon, ce sont les Ferrero Rocher. 18. Elle fait les meilleurs pancakes du monde, d’après ses frères et sœurs. 19. Elle déteste les haricots rouges et la nourriture trop épicée. 20. L’odeur du feu de bois dans la cheminée, c’est l’odeur qu’elle préfère. 21. Elle raffole de la téquila et de cocktails en tout genre. 22. Elle n’a jamais touché à la drogue, même pas un joint. 23. Elle n’est pas fan des reptiles. 24. Bien qu’elle soit carnivore, elle limite sa consommation de viande. 25. C’est une dingue de café, bien qu’elle ait horreur de l’odeur. 26. Elle se présente jamais en disant son prénom et son nom, sans utiliser son second prénom. Elle a sinon l'impression que ça donnerait "Tétraclops", digne d'un nom de pokémon. 27. Son surnom Naïs est réservé à sa famille et à ses plus proches amis.