TW :: aucun

Pause déjeuner. Cette fois-ci, Harper décide de délaisser ses collègues le temps du déjeuner afin d’aller manger avec une personne qu’elle n’a plus vu depuis un petit temps. A savoir l’un de ses parrains, Caleb. A défaut d’avoir une maman dans sa vie, Harper ne manque pas moins d’amour. Un père adoptif qu’elle aime par-dessus tout, son héros, celui avec qui elle reste très fusionnelle malgré son départ de la maison. Un tonton adorable qui l’a aidé à surmonter son chagrin quand la sœur de celui-ci a abandonné époux et enfant. Deux parrains avec qui elle est très proches et une marraine a qui elle se confie pour des histoires de cœurs ou bien lorsque ses hormones se sont mis en route lors de ses premières règles. Une maman de substitution, dont elle soupçonne qu’elle ne laisse pas son père très indifférent. Du moins, vu le Noël qu’ils ont passé ensemble, il ne faudrait pas la prendre pour une quiche. Mais, ça semble être réciproque, ce qui ravie la demoiselle. Elle ne souhaite qu’une seule chose, que son père soit heureux. Et s’il l’est avec Sinaya, elle serait tout simplement heureuse pour eux. Mais, ombre au tableau : Matt. Pourtant, elle est certaine que durant la soirée de Noël, avoir vu quelque chose dans le regard de sa marraine. Une lueur qui n’a rien avoir avec de l’amitié.

Ils ne se voient pas autant qu’ils le souhaiteraient, surtout par manque de temps. Il faut dire que du côté de la demoiselle, elle ne chôme pas. Ambulancière pour la caserne, elle suit actuellement une formation pour devenir pompière, comme son père. Puis, comme si ce n’était pas suffisant, voilà qu’elle s’est lancée dans les Olympiades, organisée par le Maire. La raison ? Pour l’anniversaire de son chien. Oui. Monterey est sûrement la seule ville où le maire organise un évènement pour l’anniversaire de son animal. Amoureuse des bêtes, elle peut comprendre cette envie de rendre ce jour unique et mémorable. Même si Spiky aurait sûrement préféré un os à moelle à la place. Intégrant l’équipe des Sonics, la demoiselle a fait quelques nouvelles rencontres. Il faut dire qu’elle ne connaissait qu’Ethel, Valéria et Antonios.

S’arrêtant en chemin avant de rejoindre le cabinet du détective, elle passe par une petite pizzeria qu’elle affectionne beaucoup et où elle se rend souvent avec Jamie. Il faut dire que c’est l’une des rares qui propose des pizzas végétaliennes. Mais pour cette fois-ci, elle en prit une normal, la préférer de son parrain.

Pizza en main, elle finit par se rendre à sa destination. Elle a hâte de prendre de ses nouvelles, de s’assurer qu’il va bien. Consciente que son divorce avec Anya l’a profondément brisé, elle a tenté d’être autant présente que possible. Même à New-York, elle a tout fait pour garder le contact et prendre de ses nouvelles régulièrement. Quelle pétasse celle-là d’avoir brisé le cœur de son parrain. Bien qu’au début, elle n’a jamais rien eu contre Anya, depuis le divorce, une haine a grimpé en elle. Puis, n’ayant jamais été vraiment dupe, elle a toujours senti cette animosité de cette femme à son égard. Peut-être qu’elle n’a jamais trop apprécié le lien fort qui unissait Caleb et elle. Elle n’en sait rien. Mais, quoi qu’il en soi, son parrain est bien mieux sans cette pimbêche.

Entrant dans le bâtiment où se trouve le bureau de Caleb, Harper croise sa secrétaire, Mme Cooper. Arborant son magnifique sourire, lui donnant ainsi l’air d’un petit ange, la jeune femme se trouve être dans ses bonnes grâces. Oui, Caleb lui ayant déjà parlé d’elle, Hartley a rapidement compris qu’avec son joli minois, elle est parvenue à attendrir cette dame.

- Bonjour Madame Cooper ! Vous êtes radieuse, comme toujours. Lance Harper avec entrain. Tenez, je vous ai apporté des biscuits pour le goûter.
- Oh merci, c’est adorable. Lance Mme Cooper. Monsieur Adelson est libre, tu peux y aller.

Après l’avoir remercié, la petite blonde poursuit sa route jusqu’au bureau de son parrain. En vérité, il s’agit d’une petite surprise, il ne s’attend pas vraiment à sa visite. Chose risquée, vu qu’il lui arrive d’être en vadrouille pour ses affaires. C’est là qu’elle peut remercier Madame Cooper de l’avoir informé sur son emploi du temps. Donnant des petits coups sur la porte, elle attend d’avoir son accord avant de l’ouvrir et de passer sa tête, la pizza toujours à la main.

- Hey parrain ! Petite surprise ! Je ne te dérange pas, j’espère ? Je me suis dis que nous pourrions manger ensemble. Explique-t-elle en entrant dans le bureau, toujours le sourire aux lèvres.

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Je suis dans une merde noire.

Voilà ce que je n’arrête pas de me répéter en boucle, tournant sur moi-même, installée sur mon fauteuil à roulettes, derrière mon bureau, le regard fixé sur le plafond, l’âme en berne. Putain, ouais Caleb, t’es au boulot, là. Alors… concentre toi. Et travaille. Non?
Mission impossible, ces derniers jours. Trop de rebondissements dans mon quotidien qui a été si longtemps… tranquille et sans histoire.
Mais c’est une douce époque qui est bien loin derrière moi, à présent.
Car ma vie pourrait maintenant être qualifiée de foutoir sans nom.

Oh, ne sois pas si dur avec toi même, Caleb. Pense à toutes ces formidables femmes qui occupent une place de choix dans ta vie, qui te rendent si heureux, si complet: Sinaya, ma petite soeur récemment devenue maman pour la deuxième fois, femme forte malgré le départ précipité de son compagnon, Matt. Anya, mon ex-femme pour qui je voue un respect absolu et dont la dernière conversation ne m’a pas laissé indifférent. Et bien entendu: Siobhan Fitzgerald. L’impossible qui a fini par se concrétiser. Le “et si” qui maintenant gonfle dans l’espace et s’ancre dans une réalité que je vénère.
Il y a celles qui ont toujours été là. Qui, malgré les aléas du destin, ne sont jamais parties. Car elles n’avaient aucune raison de le faire ou bien parce que je me suis trop solidement accroché à ces proches que j’aime tant.
Et puis, il y a celle qui est arrivée si récemment. Sawyer.
Celle qui occupe mes pensées, ces derniers jours. Bien malgré moi.

Sur le papier, c’était une cliente comme une autre. Mais les surprises ont bien meilleur goût quand elles cachent en leur sein un véritable cataclysme.

Mais je n’ai pas le temps de me noyer dans toutes mes interrogations, toutes mes pensées qui ne font que me torturer. Entendant doucement toquer à la porte, je me redresse, intrigué. Et quand je découvre une petite blonde souriante et aux mains chargés, je bondis hors de mon siège et m’avance vers elle, tout en lui demandant:

Je… Mais… Harper! Mais qu’est ce que tu fais là?

Mon petit rayon de soleil. Manquait plus qu’elle, dans la longue liste des individus que j’aime le plus sur cette planète. Moi qui n’ai pas pu enfanter à cause d’un problème de stérilité (une longue histoire qui, fort heureusement, connaît un happy end de dingue, on en parlera un autre jour), j’ai toujours eu en haute estime Harper Hartley. Car c’est la fille de mon meilleur ami, de mon frère de cœur, Connor. Oui, c’est une excellente raison. Mais surtout que j’ai eu la chance et l’honneur de devenir un de ses parrains. Et j’ai toujours tenté d’être à la hauteur de ce cadeau et de cette confiance.
Tentative bien vaine, non mais sérieusement, c’est quoi ce ton que j’emploie avec elle, hein? Comme si elle était responsable de tout ce putain de merdier!

Non, elle est tout sauf son origine. Soupirant, les mains sur les hanches, je baisse les yeux et rétorque aussitôt:

Ma beauté, excuse moi pour le ton un peu bourru, la matinée a été longue… Viens dans mes bras!

L’étreinte est rapide mais elle me met instantanément du baume au cœur. Je me délecte de ces quelques secondes de douceur et surtout, je renifle une odeur qui me met en joie. Tout en déposant un baiser sur la joue de Harper, je m’approche du carton qu’elle tient dans les mains et ajoute:

Oh, oh, oh, une pizza… Mais c’est que j’ai une filleule d’une rare qualité! Et en plus… Ma préférée. En plein dans le mile! Viens, installe toi.

Gourmand de nature, je n'attends pas une seconde afin d’ouvrir le gigantesque carton et d’attraper une belle part, dans laquelle je mords avidement. Oh putain, qu’est ce que ça fait du bien, de manger, bordel! Ça m’aidera sans doute à remettre de l’ordre dans mes idées. C’est que pour le moment, là haut, c’est un sacré foutoir… Posant le repas sur la table basse branlante, je m'affale dans mon canapé, tapote à côté de moi pour inciter Harper à me rejoindre et lui demande, tentant d’afficher une mine désinvolte:

Alors… Quoi de neuf, ma chérie?

Et je croise les doigts pour qu’elle me raconte un maximum de choses, ne lésinant pas sur les détails.
Car quand ça sera mon tour…
Oh, Mon Dieu, je ne saurais pas quoi répondre.
Je peux mentir ou en tout cas cacher la vérité aussi longtemps que possible. Je suis fort, solide comme un roc.
Sauf en sa présence.
Là, je ne réponds plus de rien…

tw :: aucun

Revoir mon parrain, ça me donne du baume au cœur. Le grand dadet à l’air dur, mais surtout, il a un grand cœur aussi doux qu’un chamallow. Ainsi, c’est avec un large sourire que je fais glisser ma petite tête blonde à travers l’embrasure de la porte, pour ainsi lui faire part de ma présence. Après quoi, j’ouvre la porte afin de pouvoir entrer dans le bureau de Caleb qui semble bien surpris par ma venue. Je ne peux m’empêcher de tiquer face aux mots et au ton employé. Penchant légèrement la tête sur le côté, le sourcil gauche haussé, il s’excuse rapidement.

- T’inquiètes pas, c’est moi qui débarque à l’improviste, mais tu es peut-être occupé ? Je ne voudrais pas te déranger. Si tu veux, je peux te laisser la pizza et repartir pour que tu puisses te reposer.

Loin de moi l’envie de l’interrompre dans son travail. Je me doute que son boulot de détective privé doit être éprouvant et éreintant parfois. Peut-être pensait-il se reposer un peu ? Bien sûr, quand il me propose d’aller dans ses bras, je ne me fais pas prier pour aller entourer sa taille de mes petits bras fins, comme des brindilles. Me mettant sur la pointe des pieds, parce qu’il n’est pas petit ce gaillard, je lui fais un bisou sur sa joue.

- Qu’est-ce que tu crois. Je suis d’une valeur inestimable. Dis-je sur un ton faussement condescendant, le menton un peu relevé avant de rire doucement. En vrai, je me suis dit autant t’apporter ta pizza préférée en venant te voir.

Je finis par fermer la porte de son bureau derrière moi, avant de retirer ma veste que je pose sur le dossier de la chaise qui se trouve face à son bureau. Je passe ma main dans mes cheveux clairs tout en le rejoignant sur le canapé pour m’asseoir à ses côtés. Je suis sincèrement contente d’être passée le voir. Il faut dire que je mène une vie particulièrement remplie ces temps-ci. Entre le boulot d’ambulancière, ma formation pour devenir pompière et la chaîne YouTube de la bande qui nécessite de faire des tournages, je ne chôme vraiment pas. Mais étant une personne hyperactive et ne restant pas en place, ce rythme de vie me convient parfaitement.

La pizza étant prédécoupée, je me sers facilement une part tout en prenant une serviette pour ne pas tacher le canapé et mes fringues. Après tout, je retourne bosser après, j’aimerais éviter de devoir me changer.

- Oh, pas grand-chose. Tout se passe très bien à la caserne. Ils me font souffrir à la formation, mais ça me plait beaucoup. Je dois juste me muscler un peu plus, car le matériel est assez lourd et ça me ralentit. Hé bon, je suis un petit machin tout frêle quoi… Dis-je avant de croquer un morceau et de l’avaler après l’avoir mâché. Sinon, à côté de ça, le boulot d’ambulancière se passe très bien. Oh, et j’ai enfin trouvé le cadeau d’anniversaire pour papa ! J’espère que ça va lui plaire… soufflais-je doucement.

Offrir des cadeaux, j’ai toujours aimé ça. Mais, j’essaye de trouver des choses qui ont un sens pour la personne et un peu unique. Autant dire que ce n’est pas facile de se creuser la tête. Encore plus quand il s’agit de papa. Après le départ de maman qui nous a lâchement abandonnés, il est devenu mon unique repère. La personne qui ne m’a jamais laissé tomber et qui ma constamment soutenu. Je fais donc au mieux pour ne jamais le décevoir et le rendre aussi fier que possible.

- Je me suis arrangée avec le grand manitou de la caserne, notre chef, pour récupérer un vieux casque de pompier. Je lui ai redonné une seconde vie avec de la peinture en bombe et j’ai demandé à toute l’équipe de signer. Je me dis que tu pourrais en faire de même. Demandais-je en attrapant mon grand sac en bandoulière afin de sortir l'objet pour le lui tendre, après avoir déposé ma pizza sur la table. Tu le trouves comment ? Je l’ai bombé avec les couleurs de la caserne bien sûr et j’ai mis en doré les détails, pour les mettre en valeur. J’ai encore le temps d'en prendre un autre et de recommencer.

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Je ne veux pas réellement l’avouer mais l’arrivée d’Harper m’inspire deux sentiments plus que contradictoires. D’un côté, je suis sincèrement heureux de la revoir, parrain qui aime tant cette complicité naturelle entre sa filleule et lui. Une évidence même quand on sait que j’ai toujours fait partie de sa vie, de sa famille. Connor, son père, mon meilleur ami depuis toujours, presque comme un frère, n’a pas hésité une seule seconde pour me confier ce rôle dans lequel je m’applique depuis toujours. Et malgré les aléas, le départ d’Eli, mon divorce avec Anya… j’ai toujours fait en sorte d’être présent. Que Harper sente que je suis là pour elle, qu’elle peut compter sur moi dans n’importe quelle étape de sa vie est d’une importance capitale. Je ne suis pas parfait, je ne suis pas un modèle… mais quand il s’agit de Harper, je tiens à être le plus irréprochable possible. Pour un Adelson, cela va de soi.
Et puis, de l’autre, j’aimerais qu’elle s’en aille, qu’elle fasse demi-tour, même si l’odeur de pizza qu’elle apporte est alléchante à souhait. Car être en tête à tête avec ma filleule est également l’occasion pour mon Karma de se confronter à mon monumental égo.
Avec les informations que je détiens sur l’identité de sa mère biologique… Suis-je réellement capable de lui apporter cette information, de but en blanc? La situation semble inexplicablement embourbée, ça ne fait aucun doute…
Mais pour le moment, il s’agirait surtout de se reconnecter à l’instant présent. L’appel du ventre est redoutable, j’imite donc Harper en me servant une part de cette pizza qui a l’air délicieuse. Mordant avidement dedans, je me rends à peine compte que je viens de faire tomber au sol un bout de jambon et me fait la curieuse réflexion qu’un chien ne serait pas de trop, dans ce bureau. Je hoche la tête, docilement, au fur et à mesure des explications de Harper à propos de son intense quotidien. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il est fort rempli, dis donc! C’est une vraie championne, affrontant courageusement chaque difficulté, mordant la vie à pleines dents. Incapable de résister, je souris tout en posant ma main sur son épaule et lui disant:

Tu vas y arriver, et si tu as besoin d’un partenaire de sport, tu ne m’appelles pas surtout! Haha, je plaisante…

Et quand elle évoque son père, je déglutis. En réalité, je me souviens surtout de notre dernière discussion… qui ne s’est certainement pas déroulé comme prévu. Soudainement blême, je me contente de bredouiller deux trois mots incompréhensibles mais je ne peux pas échapper à des explications. Me forçant à retrouver le sourire, je réponds à sa question concernant le casque qu'elle souhaite lui offrir pour son prochain anniversaire:

Il est parfait, ma chérie, je suis certain que ça va lui plaire... Je… Je pourrais le signer tout à l’heure, d’accord?

Je crois que j’ai perdu l’appétit… ce qui est un réel signe de faiblesse et d’alerte absolue, dans mon cas. Tentant de trouver un échappatoire, ce dernier vient à nous quand Madame Cooper, ma secrétaire, fit irruption dans mon bureau, un dossier à la main, pour m’informer que le chèque de Sawyer Salomon a bien été encaissé et que le rapport de son enquête nécessite une relecture de ma part.
Et bah putain, ça s’appelle une sacrée coïncidence doublée d’un foutu bon timing, n’est ce pas?
Tu voudrais pas me lâcher la grappe, foutu Karma?
Ne sachant quoi répondre à Madame Cooper, je me contente de lui jeter des regards inquiets qui ont pour but de la faire fuir. Fronçant des sourcils, elle finit par quitter la pièce à reculons. Je lui expliquerais plus tard… ou pas, c’est déjà un sacré bordel comme ça, inutile d’y mêler davantage de protagonistes. Alors, tentant de changer de sujet, je propose à ma filleule:

Tu… Un verre de soda pour accompagner la pizza?

Enfin, dans mon cas, il s’agirait surtout de se servir un whisky. Ou deux, l’après midi risque d’être longue…

tw :: abandon parental

Remarquant qu’il n’est pas dans son état habituel, je ne doute pas une seconde que je suis la cause de ses tourments. Pour moi, c’est son boulot qui doit lui prendre la tête. Ce dont je n’ai pas totalement tort, étant donné que je suis la pièce centrale de son affaire. Je suis à mille lieues d’imaginer que mon parrain, cet homme qui compte énormément à mes yeux, contient une information que je souhaite acquérir depuis des années : l’identité de mes parents biologiques. Par le passé, j’ai tenté de les rechercher par moi-même, mais malheureusement mon dossier était si mince que j’en avais conclu que ma génitrice n’a jamais voulu de moi. Pas de lettre, pas de numéro, pas de photo, rien qui aurait pu me donner ne serait-ce qu'un tout petit indice. Cette femme ne tenait pas à être retrouvée. Ce fut donc à contrecœur que j’ai fini par lâcher l’affaire. À quoi bon me torturer ? À quoi bon m’infliger une douleur supplémentaire ? Je ne saurais jamais d’où je viens, ni même, si j’ai des frères et sœurs quelque part. Connaitre mes origines est une utopie pour moi. Ayant fait le deuil de ceci, aujourd’hui je préfère laisser ça derrière moi. J’ai un père, un parrain, un oncle, une tante et des amis qui m’entourent. Je n’ai besoin de rien d’autre. Alors que mes géniteurs aillent se faire foutre.

Pendant la dégustation de la pizza, je réponds aux questions de Caleb. Face à sa réponse concernant le sport, je me mets à rire, tout en secouant la tête.

- T’inquiètes ! Mes collègues se font un plaisir de me coacher et de me faire souffrir en prime. Ils sont sadiques, si tu savais. Grognais-je. Par contre, ça ne te ferait pas de mal de faire un peu de sport. Tu vas finir tout rouiller sinon. Poursuis-je en le taquinant et lui donnant un petit coup d’épaule.

À l’approche de l’anniversaire de papa, j’ai eu envie de montrer à Caleb ce que j’ai l’intention de lui offrir. À savoir un casque de pompier personnalisé. Je sais à quel point, il aime son boulot. Bien sûr, j’ai également l’intention de lui offrir un cadre photo numérique. Je suis consciente que mon départ de la maison l’a rendu triste. Je me dis qu’avec ça, je pourrais lui envoyer plein de photos. Bon, en réalité on se voit tous les jours vu qu’on bosse à la caserne, mais je sais que ce n’est pas la même chose.

Pensant voir Caleb enjoué par l’idée, je constate qu’il est mal à l’aise. Encore une fois, je suis loin de me douter de ce qui se passe autour de moi. Les sourcils froncés, je le regarde avec la tête légèrement penchée sur le côté, un peu inquiète. Je le connais. Il est bizarre depuis que je suis arrivée. Pourtant, il est le premier à me taquiner et aujourd’hui, je le sens distant et sur la réserve.

- Parrain… Ça va, toi ? Tu ne m’as l’air en… ne puis-je continuer tandis que Madame Cooper vient à faire son apparition dans le bureau.

Lui adressant un chaleureux sourire, ce dernier bien à disparaitre rapidement lorsque j’entends que Sawyer a fait appel aux services de Caleb. Pourquoi aurait-elle eu besoin des services d’un détective privé ? Ainsi, il la connait… Est-ce à cause de cette affaire que ma voisine ne veut plus me voir ? A-t-elle été occupée par celle-ci ? Pourquoi ne pas me l’avoir dit clairement ? J’aurais compris. Décidément, tout ceci, c’est bon à me donner la migraine. Non, je ne dois pas me casser la tête à son sujet. Elle m’a rejeté, c’est tout ce dont j’ai besoin de retenir. Après tout, c’était qu’une femme que j’ai croisée. Rien d’autre. J’ai eu cette foutue manie à m’attacher à elle. Un psy me dirait sans doute que c’est à cause de celles qui m’ont abandonné…

À nouveau en tête à tête avec Caleb, je me décide quand même d’en parler. Curiosité ? Possible.

- Hum, oui pourquoi pas, merci. Mais… dis-moi, tu connais donc Sawyer ? Tu sais que c’est ma voisine ? Elle n’a rien de grave au moins, qu’elle ait fait appel à tes services ?

Bon en soit, il y a peu de chances que je parvienne à avoir une info, sûrement qu’il est tenu par le secret professionnel. Pourtant, ma curiosité a été piquée. Gros défaut, je l’admets.

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Je dois me rendre à l’évidence: je suis un très mauvais comédien. Bon, au moins, je suis certain de ne pas me reconvertir dans le cinéma, du coup. Aucune chance qu’une brillante carrière dans ce domaine s’ouvre à moi. Je n’arrive pas à cacher ma surprise, ma gêne et même mon angoisse quand il s’agit de Sawyer Salomon. Extrêmement mal à l’aise, je m'agrippe à la seule chose qui me fasse du bien, quand je suis tourmenté: un verre de whisky. Si seulement Madame Cooper ne s’était pas permise d’entrer dans ce bureau! Quelle vieille pie, celle là, bordel de merde. Alors, j’active le mode “Caleb boudeur et renfrogné”, même si je sais que ce n’est pas la bonne attitude à adopter. J’écoute d’une voix distraite Harper me questionner, alors, je ne trouve rien de mieux que de lui tourner le dos, continuant inlassablement à faire les cent pas, histoire de détourner mon attention sur un tic de comportement rassurant. Mais c’est peine perdu: je suis au pied du mur et je dois tenter de le surmonter. Alors, au prix d’un incroyable effort, je tords ma bouche dans un affreux sourire loin d’être naturel et m’exclame à l’attention de Harper:

Non, rien de grave ma chérie. Rien d’impor…

Rien d’important, voilà ce que je comptais dire à ma filleule. Mais comment pourrais-je me montrer aussi réducteur, bafouant ainsi la quête de vérité que non seulement Sawyer a depuis toujours réclamer mais également sa progéniture, par extension? Non, je ne peux pas me cacher derrière un énième mensonge. Je ne peux pas réitérer l’échec que j’ai connu, il y a quelques jours, avec mon meilleur ami, Connor. J’ai voulu cacher ce secret trop longtemps, pensant à tort que je pourrais le contrôler, lui et ses conséquences dévastatrices.
Quelle monumentale putain de connerie de merde.
Alors, avalant d’une traite le contenu de mon verre, je me décide à être fort. À faire preuve de franchise envers Harper car elle mérite d’être entourée de personnes saines, qui ne cherchent que son bonheur. Je la connais depuis toujours, je sais à quel point la vérité sur ses origines pourraient l’aider dans sa construction, continuerait de forger la belle jeune femme qu’elle est déjà. Alors… On inspire, on expire. Et on tend vers une vérité nécessaire à offrir, maintenant. Tout de suite. Dans la seconde qui suit.
Allez, Caleb. Dégoupille cette grenade mais assure-toi de rester dans les parages pour réparer les dégâts. Ne fais pas la même erreur qu’avec son père.
Alors que je m’apprête à répondre à la question de Harper, Madame Cooper fait de nouveau une entrée fracassante, baragouinant je ne sais quoi si un prétendu rendez-vous que j’aurais d’ici quelques minutes. D’un distrait battement de main, je lui fais comprendre qu’il est temps qu’elle quitte cette pièce et soupire lourdement, posant ma main sur mes yeux, les frottant, me raclant la gorge.
Putain, le Karma, tu veux pas me filer un coup de main, là? J’en aurais bien besoin.
Alors, faisant sans doute preuve d’une brusquerie savamment mal dosée, je finis par avouer:

Sawyer… a fait appel à mes services pour raisons personnelles. Elle cherchait son enfant, qu’elle a été forcée d’abandonner à la naissance.

Pause nécessaire afin de reprendre mon souffle, je finis par retrouver une certaine dose de courage et je plante mon regard dans celui de Harper. Cette jeune blonde adorable, que je porte en haute estime et qui semble à la fois si vulnérable, si forte, si sensible et courageuse. Alors, j’amorce ce qui sera l’une des discussions les plus importantes que j’aurais avec ma filleule:

Elle… j’ai fini par la retrouver. Sa fille. Je… C’est… C’est toi.

Waouh, Caleb, niveau finesse, t’as encore tapé dans le mille, on dirait.
J’espère que t’es prêt à ramasser à la petite cuillère ta victime… Putain de bourreau.
Et dire que tout a commencé par une coïncidence… Mais dans la vie, tout est une question de hasard. Et de ce qu’on compte faire avec les cartes que le destin nous distribue.
Il n’y a plus qu’à attendre un signe de la part d’une Harper complètement sous le choc, désormais.

tw :: aucun

Le comportement étrange de Caleb m’interpelle. C’est rare quand je le vois aussi… anxieux ? Est-il au courant pour le retour de ma mère adoptive ? Peut-être qu’il se demande comment me l’annoncer. S’il savait… Il aura fallu que j’aie un problème cardiaque pour qu’elle daigne revenir dans ma vie. Comme si j’avais besoin d’elle. J'ai passé plus de temps sans elle dans ma vie qu'avec elle. Depuis l’hôpital, je ne l’ai pas revue. Je ne veux pas. Je me suis construite sans elle. Papa et moi, on s’en est sortis sans elle. Maintenant, il est heureux avec Sin. Je sais qu’elle, au moins, elle ne lui brisera pas le cœur. Sinaya. La seule femme qui ne m’a jamais déçue. Du moins, jusqu'à présent. Elle ne m’a jamais abandonné. Pas comme ma mère biologique, Eli et Sawyer. À croire que je suis loin d’être la fille idéale pour une femme. Trop rebelle ? Trop énergique, peut-être ? Pas assez coquette ? J’avoue que je n’en sais rien. Quoi qu’il en soit, j’ai appris à être heureuse et m’épanouir sans elles dans ma vie. Quant à Sawyer, je la connais à peine. Je l'oublierai rapidement, elle ne sera plus qu'une voisine à qui je saluerai poliment. Mon père m'ayant bien éduquée, je saurai me montrer courtoise.

De toute façon, je compte bien mettre de côté le retour d'Eli. Soraya va tellement mal que mon attention ne peut être portée que sur elle. Elle a besoin de mon soutien. Sa vie est bouleversée depuis qu'elle a découvert la vérité, et bon sang, que je déteste de la voir aussi mal.

Après le départ de Madame Cooper, parrain semble vouloir répondre à ma question concernant Sawyer. Une curiosité mal placée, je dois bien l’avouer. Peut-être, une petite information sur la raison pour laquelle elle a cessé de vouloir me voir du jour au lendemain. Autant dire que je ne suis pas déçue du voyage. Sawyer a donc un enfant ? Un enfant qu’elle a été forcée d’abandonner ? Comment peut-on forcer ce genre de chose ? Cette femme a le caractère d’une lionne, voire même d’un tank certes, ce n’est pas vivant, c’est pour l’image.

- Je ne savais pas qu'elle avait eu un enfant..., lâchais-je sans me douter une seconde de la bombe qu'il va me lancer.

Peut-être que Sawyer m’évite, car mon histoire de gosse adopté résonne avec ce que sa progéniture a pu vivre. Pourquoi ne pas me l’avoir dit ? Je sors de ma torpeur au même moment où Caleb m’annonce que je… quoi… pardon… ? Moi, la fille de Sawyer ? Error 404. Veuillez réinitialiser mon cerveau. Bug dans la matrice.

Mon regard est rivé sur lui. Je ne bouge pas, je ne cligne pas des yeux. On dirait que l'information met une éternité à atteindre mon cerveau, et enfin mes neurones se connectent. Fille de Sawyer…, moi ? Ma mère adoptive qui revient dans ma vie, et en même temps, j’apprendrais qui est ma mère biologique ? Une femme qui m’aurait abandonné une seconde fois, donc ?

J’éclate de rire.

Un rire cristallin s'échappe de ma bouche. Parce que bien sûr, tout cela n'est qu'une plaisanterie. Je connais mon parrain et ses blagues à deux balles, que j'adore malgré tout. Ça ne peut être que ça, de toute façon. L'univers, le karma, le destin, peu importe, ne peut pas être aussi sadique que ça.

- Elle était drôle, celle-là, parrain. Vraiment, c’était un peu risqué quand même. Mais très drôle, lançais-je une fois le fou rire passé. Je te remercie en tout cas, car ça me fait relativiser. Et je te jure que j’avais bien besoin d’un bon fou rire. Après tout, le retour d'Eli aurait pu être pire que ça, car oui, je sais qu'elle est de retour, tu n'as pas besoin de prendre des pincettes. T’imagines, au même moment, j'aurais pu apprendre l'identité de ma génitrice, qui serait une femme qui m'aurait ghostée une seconde fois. Surtout que bon, je me doute bien que si tu découvrais vraiment qui est ma mère biologique, tu en aurais parlé à papa, et lui, il me l'aurait dit.

Je suis tellement convaincue que c’est une blague que je ne me pose aucune question sur la véracité de ses propos. Pour moi, c’est trop gros tout ça. J’ai vu mon père, il me l’aurait dit s’il connaissait l’identité de celle qui m’a mise au monde. Il sait que j’ai cherché à connaitre mes origines et la raison de mon abandon.

- Bon sinon… Je comprends que tu ne veuilles pas me parler de tes enquêtes. Secret professionnel, je connais ça. Bref, quoi de beau dans ta vie ? demandais-je en croquant dans une nouvelle part de pizza.

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Le sol tremble, je peux le sentir dans chaque atome de ma pauvre carcasse. Quelque chose approche, une catastrophe qui ne va pas tarder à tout engloutir sur son passage. Cette fois-ci, je me sens chanceux: j’ai pu l’anticiper. Celle que j’ai connu lors de ma dernière visite chez son père, Connor Hartley, était imprévisible, d’une violence sans nom et irrémédiable. Seul le temps nous dira si notre amitié pourra être sauvée mais pour le moment, tout semble compromis. Elle a eu lieu il y a quelques jours à peine et pourtant, elle est encore si fraîche dans mon esprit. Durant les nuits qui ont suivi notre discussion houleuse, je n’ai su trouver le sommeil, bien trop obsédé, me rejouant encore et encore la scène dans mon cerveau tourmenté.
Mais on ne peut changer le passé. La seule prise possible se trouve dans ce présent bien trop incertain mais que je tente de maîtriser d’une main faiblarde.
Cette fois-ci, je ne me défilerai pas. J’irais au bout de mes explications.
Première bribe d’information délivrée…
Et puis, après cet instant figé dans l’espace et le temps, un rire.
Que je ne connais pas.
Qui ne ressemble pas à mon adorable filleule.
Et c’est là que je réalise à quel point mon annonce s’est occupée de la transformer, pour toujours et à jamais.
Ce rire, synonyme qu’elle pense que mes propos ne sont qu’une vaste blague. Il me foudroie sur place, me laisse sans voix durant de longues secondes. Mais… bon sang, que lui arrive-t-il?! Je ne sais sur quel pied danser, me contente de la regarder, sans cligner des yeux, complètement pétrifié par une telle réaction.
Putain, manquait plus que ça. Même autodéfense que son père: le déni.
Les Hartley sont définitivement des êtres aux réactions difficilement prévisibles, j’en ai peur… Et puis, j’écoute sa longue tirade. Et découvre de nouvelles informations croustillantes.
Tombant des nues, je demande, tournant la tête sur le côté, tel un chien qu’on siffle afin de jouer avec lui:

Eli, de retour? Je n’en savais rien…

Comment aurais-je pu être au courant étant donné que Connor et moi avons rompu tout contact? La situation ne pouvait être pire, enfin, c’est ce que je croyais profondément… et voilà que la mère adoptive de Harper surgissait du passé!
Elle avait bien choisi son moment, celle là, putain de merde.
Fronçant des sourcils, je ne peux m’empêcher de repenser à cette terrible dispute qui a ébranlé notre amitié, à son père et moi-même. Connor ne vit pas sa meilleure période, le pauvre bougre… et avoir été responsable d’une partie de sa tourmente me tord le cœur. Pourtant, je tente de chasser ma propre peine afin de continuer cette douloureuse conversation et prononce ces mots, d’une voix autoritaire, face à une jeune blonde désemparée:  

Je, euh… Harper, je ne plaisante pas.

Je m’en veux de devoir insister, tandis que ma filleule croque avidement dans une part de pizza, cherche à changer de sujet, d’un ton détaché, léger. Hochant la tête de gauche à droite, terriblement peiné, je murmure, le regard planté vers mon tapis, luttant contre l’envie de fuir à toutes jambes:

Mon trésor, j’adorerais te raconter ce qui se passe dans ma vie, actuellement. J’aurais aimé t’apprendre dans d’autres circonstances à quel point je suis heureux, je vis avec une femme dont je suis fou amoureux, avec sa fille que je considère comme la mienne… Mais ce n’est pas mon moment. C’est le tien, mon coeur. Nous devons avoir cette discussion, tu es une adulte, désormais. Tu en es capable. Écoute-moi.

Comme une supplication, une demande de la plus haute importance. Je ne peux pas fuir, je ne peux pas écarter de la main ce qui semble être pour elle un simple détail.
Alors qu’ici bas se joue le point le plus crucial de son histoire…
Elle mérite de savoir. De connaître la vérité. Même si elle ne la désire pas…

tw :: abandon d'enfant, empoisonnement ayant amené à une insuffisance cardiaque

Lorsque Caleb me dit qu’il n’était pas au courant du retour d’Eli, je hausse un sourcil. Alors pourquoi une telle réaction de sa part ? Mon cerveau semble ne pas vouloir que j’assimile l’information qu’il vient de me dire un peu plus tôt. C'est seulement lorsqu'il parle d'un ton autoritaire, chose rare chez lui, que mon front se plisse. Il est très, mais vraiment très rare que Caleb hausse la voix ainsi.

Mon myocarde bat rapidement. J’ai mal à la poitrine et je pose ma main sur mon cœur. Un bourdonnement incessant résonne dans mes oreilles, et j'ai l'impression de flotter. Mon esprit est engourdi. Un mélange d'incrédulité, de choc et de douleur me submerge, et mon cœur se serre dans ma poitrine. Les émotions tourbillonnent à l'intérieur de moi, créant un véritable tumulte qui me donne l'impression que le sol se dérobe sous mes pieds. Tout devient flou, comme si le monde autour de moi se diluait dans un brouillard épais. Je regarde Caleb, espérant que ce qu'il vient de dire est une mauvaise plaisanterie. Cette nouvelle pèse lourdement sur mes frêles épaules. C'est comme si le temps s'était arrêté, et la seule chose qui compte désormais, c'est comment je vais affronter cette nouvelle réalité qui me submerge. Cependant, je ne veux pas affronter cette réalité.

J'entends la voix de mon parrain me dire qu'il est amoureux et en couple avec une femme. Je suis heureuse pour lui. Mais il veut que nous parlions de ce qu'il vient de me révéler : que Sawyer est ma mère biologique. Pourtant, je n'ai pas envie d'en parler. Je n'ai pas envie que ce soit réel, c'est trop à encaisser. Ma mère adoptive, puis ma mère biologique ? C'est quoi ce destin ou ce karma de merde, comme dirait Caleb ? Et papa... le sait-il ? Non, il m'en aurait parlé quand je suis venue le voir pour son anniversaire.

Sentant ma poitrine se contracter davantage, je ne peux faire autrement que de prendre mon sac pour y fouiller à l’intérieur et en sortir mes médicaments. Suite à un empoisonnement à la digitaline, j'ai encore quelques symptômes d'insuffisance cardiaque. C'est pourquoi j'ai toujours ces médicaments sur moi, en attendant que mes résultats reviennent à la normale.

Je sors ma bouteille d'eau pour prendre ma pilule avec une gorgée, puis je la referme.

- Je… Je suis heureuse que tu aies rencontré quelqu’un… Ce n’est pas l’autre connasse d’Anya au moins ? demandais-je sans filtre. Il faudrait que je la rencontre… oui, que je la rencontre…

Je suis paumée. Je ne sais pas comment réagir face à tout cela. Caleb me dit que je suis une adulte, que je peux avoir cette discussion. Je secoue la tête, et si je n’en ai pas envie, moi ? Pourquoi devrais-je accepter une femme qui m'a finalement abandonnée à deux reprises dans ma vie ? N'ai-je pas déjà assez souffert de l'abandon ? Eli, Sawyer... ma mère biologique... Je ne suis même plus sûre que Sinaya soit vraiment sincère avec moi. Peut-être qu'elle est présente dans ma vie uniquement pour mon père ? Après tout, elle partait souvent en mission, je ne la voyais pas tant que ça, ça devait l’aider à ne pas me fuir à son tour. Je ne suis pas la fille idéale pour une mère. Alors pourquoi ces femmes viennent-elles bouleverser ma vie ? Oui, « elles » au pluriel. Eli et Sawyer.

- Et si je ne veux pas ? demandais-je, les larmes aux yeux en posant mon regard sur lui. Si… Si Sawyer ma mère, je n’en ai rien à foutre. Car elle le sait, hein ? Elle sait que je suis sa fille, c’est ça ? Elle est déçue, et c’est pour ça qu’elle m’a rejeté à nouveau… Alors pourquoi… Pourquoi en parler ? demandais-je à nouveau, laissant une larme couler le long de ma joue, que j’essuie d’un revers de la main.

Je replie mes genoux contre moi, passant mes bras autour de mes jambes. Je le supplie du regard de me dire qu’on oublie tout. Qu'on efface tout et qu'on revient à la pizza, dont j'avais pris une bouchée avant de réaliser que la claque que j'ai reçue était bien réelle.

TW :: Langage fleuri, stérilité.

Ma pauvre petite Harper. Qu’est ce que je viens de lui faire. Quelles souffrances je lui inflige, moi qui ai passé tant d’années à la protéger sans vergogne. En étant son parrain de cœur, je me suis engagé à être à ses côtés pour le restant de mes jours. À être un modèle, un confident, un partenaire dans les conneries et une oreille à son écoute, dès qu’elle le désire. Ai-je trahi ma parole? Mon engagement? Je ne sais pas, je me sens perdu. Comme vaseux. Bien au-delà de la colère qui s’est dégagée de mon échange avec Connor, son père, à cet instant, je ne suis qu’un pauvre con, merdeux. Je me dégoûte de lui balancer une vérité aussi extrême avec si peu de douceur. Pourtant, si j’adopte cette attitude, c’est que je sais qu’au fond, elle est prête à entendre les choses telles qu’elles sont. Je ne remets pas en question le rôle de Connor et d’Eli dans sa vie, bien au contraire. Mon meilleur ami, même si nous nous sommes éloignés ces dernières semaines, reste un homme formidable, un père investi, aimant. Et Eli… Son retour ne me dit rien qui vaille. Putain, mais les emmerdes s’enchaînent en ce moment, ou quoi? Elle a bien choisi son moment pour faire son apparition, celle-là…
Je sens bien qu’elle est perturbée que sa maman adoptive reprenne contact, tout autant qu’apprendre l’identité de celle biologique. Sentant que je dois reprendre ma place de roc solide au profit de ma filleule, je pose ma main sur son épaule et lui demande, d’une voix compatissante:

Harper, ma chérie… Tu veux m’en parler? D’Eli?

Prononcer ce prénom m’écorche la bouche, mais je ne dois pas me défiler. Cette conversation doit avoir lieu et si elle doit durer toute la journée, tant pis. Je préviendrais Madame Cooper que je suis indisponible pour mes clients, j’ai d’autres priorités. Je dois réparer les pots cassés, à ma manière. C’est maladroit, c’est bancal. Mais je suis là, je ne bougerais pas. J’ai semé la panique au sein de ma propre famille de cœur, je dois tenter d’apporter le calme et la sérénité. Ma petite blonde adorée le mérite tellement! Tandis que je la dévisage avec amour et tendresse, je ne peux m’empêcher de remarquer quelques similitudes avec Sawyer. Deux trois mimiques, le même regard flamboyant. Putain, qu’est ce que c’est… perturbant! Reprends tes esprits, Caleb, ce n’est pas le moment de flancher. Harper a besoin de toi, toi tout entier, toi connecté à cet instant.
Fronçant les sourcils quand je l’aperçois avaler quelques comprimés à l’aide d’une gorgée d’eau fraîche, j’attrape le flacon et demande, tel le Parrain Oppressif que je suis:

Qu’est ce que c’est ça, t’es malade?!

Putain, mais j’ai loupé d’autres évènements de ce genre ou quoi? En ce moment, j’ai la tête dans le guidon, je suis si concentré par mon travail, mes enquêtes. Et ma vie personnelle aussi. Le bonheur que je ressens de partager ma vie avec Sio et Maddie m’a occulté du reste de mon entourage et quelque part, je le regrette et en paie les conséquences, désormais. Je ris quand elle évoque Anya et presse ma main un peu plus son épaule, tout en répondant d’une voix douce:

Non, ce n’est pas Anya. Nous sommes officiellement divorcés. Non, c’est… Siobhan, une amie de longue date. Je crois que je suis tombé amoureux d’elle à la seconde où je l’ai rencontrée mais… Tu sais, parfois, dans la vie, tout est une question de temps pour que les sentiments soient enfin révélés…

Quelle sagesse, Caleb. C’est nouveau, ça! Et au fond, je crois que ça me va bien. C’est l’effet Sio: de l’apaisement, du calme, de l’amour et de la compréhension.
Oui, je dois en avoir besoin, tandis que mon pauvre vieux cœur se brise en apercevant Harper lutter contre l’envie de fondre en larmes. Résistant à mon tour, endossant la responsabilité de garder la tête froide et de mener cette discussion à bien, je pose ma main sur mes lèvres tremblantes et réponds, tournant doucement la tête de Harper afin de pouvoir plonger mon regard dans le sien, perdu et embué:

Non, Sawyer n’est pas déçue. Au contraire. Elle est… elle est bouleversée, tout comme toi. Elle ne sait pas quoi faire, comment t’expliquer… Rien n’excuse son absence mais tu dois savoir pourquoi elle en est arrivée là… T’abandonner n’était pas un choix, crois-moi… Et… Mon cœur, je t’aime, tu sais. Ton père t’aime, tes mamans t’aiment. Rien n’est parfait, dans la vie, crois moi, je suis le premier à la connaître, cette foutue vérité. Mais… Tu es forte. Solide. Déterminée. Tu verras, pour le moment, tout est noir… Mais bientôt, la lumière reviendra dans ta vie… Je te le promets…

Et même pour moi, c’est trop. Je l’attrape brutalement, la colle contre mon torse, caressant doucement ses cheveux. Putain, qu’est ce que la vie peut être chienne, bordel de merde. Être adulte, c’est faire des choix. C’est renoncer. En déterrant la vérité, j’ai provoqué un séisme sans nom.
Mais que je suis prêt à assumer, jusqu’au bout.
Sentant que l’air devient irrespirable au sein de ce bureau que j’aime tant mais qui n’est certainement pas le théâtre adéquate pour la suite de cette discussion, je propose à ma filleule, la voix tremblotante:

Bon, qu’est ce que tu dirais si on allait se promener, hein? On a besoin d’air, toi comme moi.

Je tente de retrouver le sourire, de brandir un bouclier protecteur sur ma peine, sur sa détresse.
Mais pourquoi lutter? Parfois, mettre à nue ses émotions est la seule manière de remonter la pente glissante que nous sommes forcés d’emprunter.

tw :: abandon d'enfant, empoisonnement ayant amené à une insuffisance cardiaque

Évoquer Eli ? Pourquoi faire ? Son retour me perturbe, une multitude de sentiments contradictoires s'entremêlent, car je m'étais convaincue qu'elle était peut-être morte. Cette situation me laisse partagée entre le soulagement de la voir en bonne santé et une profonde colère. Quinze ans. Quinze putains d’années où je n'ai reçu qu'une vulgaire montre pour mon anniversaire. Une montre que je n'ai jamais portée, restée dans le tiroir de ma table de chevet. Même après mon accident de voiture, anéantissant mes rêves de devenir danseuse, elle n'a pas pris la peine de se pointer. Qu’avait-elle de plus urgent à faire que de prendre des nouvelles de sa fille ? Enfin, de sa fille adoptive en réalité. Maintenant, voilà que je connais l'identité de ma mère biologique. Celle-ci n'est autre que ma voisine qui m'a fait vivre des moments inoubliables, comme celui où j'ai pu m'asseoir dans une vraie voiture de course, sur un vrai circuit. Puis, du jour au lendemain : plus rien. Ah si, madame était occupée. J'ai bien compris qu'elle me ghostait. C’est finalement l’histoire de ma vie. Les seuls adultes restés autour de moi sont mon père et mon parrain. Il y a Sin aussi, mais je me dis qu'elle doit me supporter grâce à son travail. Souvent en mission à l'autre bout du monde, elle ne doit pas tolérer ma présence très longtemps. Peut-être même se montre-t-elle gentille avec moi pour mon père.

- Non. Parler d’elle, c’est lui donner trop d’importance, dis-je en haussant les épaules.

C'est trop. Ça devient trop difficile à tout encaisser. Il y a quelques semaines, j'ai appris que j'avais été empoisonnée. Quelqu'un veut ma mort et je ne comprends pas pourquoi. Ma mère adoptive réapparaît dans ma vie et maintenant, je découvre l'identité de ma mère biologique. Stop. C’est quand qu’on me laisse souffler et encaisser une nouvelle, avant de m’en annoncer une autre ? Je m'efforce de ne pas craquer, mais les larmes menacent de rouler sur mes joues.

Sentant mon coeur se serrer, je prends mes médicaments, ce qui interpelle Caleb.

- Papa ne t’a rien dit ? demandai-je, levant les yeux vers lui, ignorant que la situation était tendue entre eux. Il y a quelques semaines, j'ai fait une petite crise cardiaque... Les tests ont révélé un empoisonnement à la digitaline… Mais, ça va, je suis sous traitement.

Je ne veux pas l’inquiéter. Nathan et mon père s’en font déjà suffisamment pour moi. Eli aussi, je crois. Mais je ne m’en préoccupe pas.

Après avoir avalé mes cachets, j'apprends qu'il est en couple et heureux. Je suis sincèrement contente pour lui, il le mérite. D’autant que ce n’est pas avec Anya. Remettre le couvert aurait été possible, mais heureusement ce n'est pas le cas. Cette femme... Je ne la supporte pas. Elle l'a jeté comme si de rien n'était. J'ai vu mon parrain sombrer à cause d'elle. Puis, elle ne me porte pas dans son cœur non plus. Existe-t-il une femme adulte qui m'apprécie ? J'en doute de plus en plus.

- Tant mieux, je ne l'ai jamais vraiment aimée celle-là et je pense que c'était réciproque, dis-je en haussant les épaules, déviant mon regard de ma bouteille d'eau que je venais de ranger dans mon sac pour le fixer. Je suis vraiment heureuse pour toi, parrain. J'espère qu'elle se rend compte de la chance qu'elle a de t'avoir. Sinon, je me transforme en une filleule particulièrement chiante, plaisantai-je pour reprendre le contrôle de mes émotions.

Malheureusement pour moi, Caleb évoque Sawyer à nouveau. Il affirme que mes mamans m'aiment, tout comme mon père et lui. Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre comme connerie ? Et entendre Caleb défendre ma génitrice, ça me fait grincer les dents. De quel côté est-il ? Est-ce qu'il la préfère à moi ? Tout comme Eli qui a choisi sa liberté plutôt que de s'occuper de sa fille qu’elle venait d’adopter. Avant que je puisse réagir, il me prend dans ses bras. Je ne bouge pas sur le coup, passant même un bras autour de lui, sentant à nouveau les larmes monter.

Ah non Harper ! Ressaisis-toi, putain ! Cette femme ne mérite pas que tu verses la moindre perle salée.

L'étreinte prend fin avec les paroles de Caleb. Il suggère que nous prenions l'air. Habituellement, j'aurais accepté. J'adore passer du temps avec lui, mais pas aujourd'hui. J'ai besoin d'être seule, de digérer ce qu'il vient de me dire. Malgré tout, je ressens de l'amertume après qu'il a pris la défense de Sawyer.

- C’est gentil, mais… je dois retourner à la caserne. J’ai un entrainement de prévu avec un collègue, soufflai-je en me levant du canapé.

En réalité, ce n'est pas un mensonge total, j'ai effectivement rendez-vous avec l'un des gars de la caserne pour me préparer à l'examen physique en vue de devenir pompier. Cependant, c'est dans une heure, mais j'ai besoin d'être un peu seule.

Enfilant ma veste et attrapant mon sac, après avoir vérifié que je n'ai rien oublié, je me penche vers Caleb pour lui déposer un baiser sur la joue. Je ne veux pas qu'il se sente coupable de tout me révéler. Je préfère la vérité aux dissimulations. Mais je me demande si mon père est au courant de tout cela. Mon parrain ne me l’aurait pas annoncé avant lui, si ? Dans ce cas, pourquoi ne m'a-t-il rien dit lui-même ?

- Je suis désolée de partir comme ça… mais… bref, à bientôt. Et fixe une date avec ta copine, j’aimerais quand même la connaitre.

TW :: Langage fleuri, stérilité.

La vie n’a fait aucun cadeau à Harper Hartley.
Mis à part la fabuleuse capacité de rebondir, quelles que soient les difficultés qui se dresseront sur son chemin.
Pour autant, je ne minimise pas l’état émotionnel de ma filleule. Certes, elle a toujours été une enfant solide et une jeune femme débordant de ressources mais les sucessions de chocs qu’elles vit actuellement en déboussolerait plus d’un.

Incapable de masquer mon inquiétude concernant sa prise de médicaments, elle souligne le fait qu’il est bien étrange que son père ne m’ai informé de rien. Mal à l’aise, je détourne le regard, joue avec un bout de mousse sortant de l’accoudoir défoncé de mon canapé. Mais cette drôle d’attitude, une manière de me défiler en pensant à Connor, son père et mon meilleur ami, ne dure pas bien longtemps. Au contraire, je tourne la tête en sa direction à la vitesse de la lumière et grogne, comme un animal:

Comment ça, un empoisonnement? Qu’est ce que ça veut dire…?

Et brutalement, je réalise à quel point j’ai manqué d’attention envers Harper. Cela faisait bien trop longtemps que je n’avais pas pris de ses nouvelles et fatalement, je manquais des événements importants de sa vie. Je me sens si ridicule! La brouille qui est née entre son père et moi ne devrait pas influer autant dans notre propre relation. L’amour que je lui porte devrait être plus fort que tout et je me sens si stupide d’avoir concentré mon énergie sur une sorte de fuite loin d’être mature.
Déstabilisé, nous abordons pourtant un sujet tout aussi personnel que joyeux: Ma vie amoureuse. Sans même m’en empêcher, j’éclate de rire en l’entendant qualifier Anya de qualificatifs pas forcément flatteurs et ajoute, une main sur l’épaule de Harper:

Ma chérie, le moins que l’on puisse dire, c’est que tu n’as pas ta langue dans ta poche! Je comprends ton point de vue… Mais j’ai aimé Anya, je ne le regrette pas une seule seconde. Ce mariage m’a rendu heureux… Et à présent, Siobhan me comble de bonheur. C’est tout ce qui compte, n’est ce pas…?

Mais les nuages ne sont pas prêts de disparaître, dans le ciel de notre échange chaotique. Harper est littéralement à fleur de peau, ce qui peut aisément se comprendre. Je n’ai pas la prétention de savoir ce qu’elle ressent ni même de la comprendre… Mais j’aimerais simplement qu’elle réalise à quel point je fais tout pour l’aider. Certes, mes intentions restent maladroites et j’imagine que de son point de vue, elle a surtout la sensation que je défends les autres protagonistes de l'histoire, à commencer par Sawyer. Un contact physique visant à rassurer Harper devient spontané et inévitable mais malheureusement pour nous, notre échange s’arrête là. Ma filleule n’a pas plus de temps à m’accorder et je ne lui en veux pas le moins du monde. Elle a un programme chargé, une vie à mener, à cent à l’heure. À son image: flamboyante et décidée. Je ne me mettrais certainement pas en travers de son chemin, concernant sa vie professionnelle. Au contraire, je suis fier d’elle et je la soutiendrais toujours. J’aimerais simplement qu’elle ne l’oublie pas… Je ne serais jamais contre elle mais plutôt un soutien éternel. Je te le promet, Harper.
Tandis qu’elle dépose un baiser retenu sur ma joue, je soupire, hésite à ajouter quelque chose avant de décider de me taire. Bon choix, pour une fois, Adelson, tu risquais de tout faire foirer.
Pourtant, ce n’était pas l’envie qui me manquait d’ajouter ceci:
Ma chérie, tout va bien se passer.
Ton Parrain sera toujours dans les parages pour veiller sur toi, quoi qu’il arrive…



SUJET TERMINÉ, MERCI À NOUVEAU POUR CE RP DÉGOULINANT DE FEELS!