À la recherche du paternel

@Caleb Adelson

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Caleb Adelson, détective privé. Voilà ce qui est indiqué sur cette porte encore fermée, devant elle. Dans ses mains, elle tient un extrait du journal de sa défunte génitrice. Blake a le regard figé sur la porte. Elle sait qu’une fois entrée, la machine sera lancée. Plus de retour en arrière possible. La recherche pour retrouver son père sera en route. Son géniteur. Celui dont sa mère n’a jamais eu l’occasion de lui parler. Enfin, Blake ne le lui a jamais demandé non plus. Trop stone, trop violente, la gamine avait trop peur de ce qui pourrait se passer. Peut-être qu’elle est issue d’une relation non consentie, ce qui expliquerait la haine que Fiona avait envers elle. A-t-elle vraiment envie d’apprendre ça ? Ne préférerait-elle pas rester dans le déni ? Sûrement qu’elle le ferait si elle avait le choix. Ici, il est question de vie ou de mort. Sa propre vie est en jeu.

Atteinte d’un cancer du foie, elle lui reste en moyenne cinq ans à vivre. Un peu plus ou un peu moins en fonction des chimios qu’elle va devoir subir bientôt, mais dont elle repousse l’échéance autant que possible. Aussi nombreux soit son entourage, personne n’est suffisamment compatible pour permettre une greffe. Sa mère étant décédée, elle ne lui reste plus que son père. L’autre moitié de ses gènes. Le pire, c’est qu’il pourrait très bien aussi refuser. Peut-être a-t-il une famille, et qu’il ne voudra pas la mettre en péril à cause d’un coup d’un soir ?

La tête remplie de question, elle a l’impression qu’elle va exploser. Non, il est temps pour elle de connaitre ses origines et d’abattre sa dernière carte pour sauver sa vie. Elle l’a promis à ses frères « adoptive ». Enfin, elle n’a jamais été adoptée légalement, mais à ses yeux, c’est comme si. Elle doit faire tout son possible, elle doit se battre jusqu’à son dernier souffle et ne jamais baisser les bras. C’est une coriace, Blake. Elle ne craint pas grand-chose. On lui a déjà pointé une arme sur le front, elle n’a pas sourcillé, regardant le braqueur droit dans les yeux. La brune a un self-contrôle impressionnant. Ce n’est pas pour rien qu’elle est respectée dans la partie sombre de Monterey et des villes avoisinantes. Blake Rivers ou encore Tinkerbell, c’est connu dans le milieu de la délinquance. Ce n’est pas la recherche de son paternel qui va l’effrayer. Si ça se sait, elle deviendrait la risée et elle perdrait en crédibilité.

« Allez, Blake, tu peux le faire. Faut que tu saches. »

Frappant à la porte du bureau, n’ayant pas vu de secrétaire, elle s’est directement rendue là où elle voulait aller. Fin de journée, elle est sûrement partie. La demoiselle finit par entrer dans le bureau, croisant le regard d’un homme brun et barbu. Un mec parfait dans le rôle du détective privé.

- Bonsoir Monsieur Adelson. Blake Rivers, j’aurais besoin de vos services. Explique-t-elle avant de fermer la porte et de prendre place sur la chaise face au bureau, n’attendant pas son accord. J’vais le payer grassement, après tout. Je suis à la recherche de mon géniteur. Je vais être honnête, je n’ai quasiment pas d’infos sur lui, mais votre prix sera le mien. J’ai de quoi payer le double de vos honoraires, si vous êtes du genre rapide dans vos enquêtes.

Au moins, elle annonce d’emblée la couleur. Si elle a fait appel à lui et pas à un autre, c’est parce qu’elle connait sa réputation. Caleb Adelson est sans doute le meilleur détective privé de la Californie. Autant dire, qu’elle a plus que besoin du meilleur et elle espère qu’en se montrant généreuse dans ses honoraires, il prendra en charge son dossier.

À la recherche du paternel

@Blake Rivers  

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Une journée de boulot incroyablement longue est sur le point de s’achever, enfin. Je dois dire que je suis plutôt satisfait du travail accompli mais pour une fois, je n’ai qu’une envie: rentrer à la maison. Après mon… passage à vide, appelons un chat un chat, qui a durer plusieurs jours, synonymes de souffrance, de peine et de malheur, j’ai retrouvé un certain équilibre entre mon job de détective privé et le plaisir de couper avec le travail, pour retrouver mon appartement bordélique et surtout, la simplicité de sortir et de vaquer à d’autres occupations que de fouiner dans la vie des gens. Attention, loin de moi l’idée de détester mon travail, bien au contraire. Mais après ma terrible peine de coeur, je m’étais tout simplement jeté à corps perdu dans mon travail, acceptant des missions périlleuses, des enquêtes complexes et aux issues douloureuses. Et pas besoin d’un psychologue pour interpréter mes choix: j’étais perdu, seul, terriblement blessé et je me raccrochais tant bien que mal à la seule chose qui ne m’avait jamais déçu, dans mon existence: ma passion. On ne devient pas détective privé, c’est comme un don, acquis à la naissance, qui se travaille au fur et à mesure des années. C’est comme une drogue, qu’il faut apprécier, mais à petites doses, car certaines enquêtes peuvent devenir une obsession, j’en ai la preuve avec ma recherche concernant l’enfant perdu de Sawyer Salomon. Bizarre que je pense à elle, d’ailleurs… et surtout à ce week-end complètement dingue que nous avons vécu, il y a quelques semaines. Enfin, c’est toujours mieux que l’autre femme, celle dont le prénom commence également par un “S”... Putain, on dirait que Harry Potter qui pense à Vol… Non à “Celui-Dont-Le-Nom-Ne-Se-Prononce-Pas” ou un truc du genre… Je suis vraiment vieux, j’y connais rien…

Perdu dans mes pensées, j’entends à peine Madame Cooper me souhaiter une bonne soirée et claquer la porte du bureau. Me redressant, je suis à deux doigts de m’offusquer car techniquement, elle ne devrait quitter son poste qu’une heure plus tard. Mais j’ai bien trop de respect pour ma secrétaire ou alors, j’ai bien trop peur d’elle pour rétorquer quoi que ce soit. Et puis, la connaissant, son travail doit encore être impeccable et elle doit avoir pris de l’avance pour demain… Foutue femme irréprochable. Mes lèvres s’étirent dans un sourire quand je me sers un verre de whisky, rituel avant de partir du bureau. Je suis plongé dans la lecture d’un très long compte rendu quand j’entends la porte de mon bureau s’ouvrir. Haussant les sourcils, le verre dans ma main droite, la gauche s’occupant de tirer sur une cigarette, j’entends une jeune brune, au regard de braise, m’expliquer qu’elle cherche son père, prenant même la liberté de s’installer sur la chaise de l’autre côté de mon bureau. Ne pipant mot, je la laisse terminer son laïus avant de briser un long silence gênant:

Et bien, et bien, et bien… Être rapide, oui, en effet, c’est une de mes qualités, surtout si le chèque comporte suffisamment de zéros pour que je sois de bonne humeur. Mais qui vous dit que je suis disponible, hein?

Pourtant, mon choix était déjà fait, elle avait piqué ma curiosité. Rendre l’impossible crédible était un défi que j’adorais relever mais… j’aimais aussi jouer avec mes futurs clients. Même si la brune, Blake, je crois que c’est son prénom, n’avait pas l’air du genre commode. Montrant du doigt la bouteille, je lui demande:

Vous prenez un verre pendant que vous m’expliquez les informations que vous avez?

Allez, finalement, le temps me manque. L’envie de rentrer chez moi se fait encore très pressante mais je dois dire que je ne refuse pas quelques heures supplémentaires… Étant mon propre patron, je ne pense pas que ça pose problème.

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@Caleb Adelson

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Si ça ne tenait qu’à elle, jamais elle ne serait assise devant ce détective privé. Sa famille, ce sont les Rivers. Ceux qui l’ont pris sous leur aile après qu’elle se soit invitée à leur table, pour se désaltérer lors d’une journée caniculaire. Depuis cette journée, elle fait partie intégrante de cette famille, pour qui elle serait capable de déplacer des montagnes. Savoir que Pierre, Paul ou Jacques est son géniteur, elle s’en bat les ovaires. Royalement. Il faut dire que ça la tue de devoir se sentir redevable envers ce type, si jamais il accepte d’être son donneur. M’enfin, elle a fait une promesse à Maëlan et à Oscar. Elle tiendra sa parole. Maintenant, si le détective ne le trouve pas, ça ne sera pas de sa faute. De toute façon, son oncologue l’a déjà mise sur une liste d’attente pour une greffe de foie. Enfin, encore faudrait-il qu’elle commence sa chimio. Le pauvre, il tente désespérément de la joindre pour fixer une date, mais elle filtre ses appels. Encore trop de choses à régler. Excuse bidon. C’est surtout que mademoiselle angoisse à l’idée de se montrer faible, dépendante. Ça l’énerve rien que d’y penser.

Finalement, le petit ouragan Rivers finit par écouter les paroles de son interlocuteur. Face à sa question, elle ne peut s’empêcher de lâcher un petit ricanement. La disponibilité, ça s’achète. Sortant son chéquier, elle attrape le stylo du détective avant d’y indiquer un montant à cinq chiffres, mais le numéro un, n’est pas du tout le premier chiffre.

- Je pense qu’avec ce montant-là, vous me trouverez bien une petite place dans votre planning si chargé. En sachant qu’il ne s’agit que de la moitié. Le reste sera sur votre compte dès demain si vous prenez mon affaire en charge. Dit-elle tout en retirant le papier du paquet afin de pouvoir le déposer devant lui et reposant son stylo à sa place. Alors ?

L’argent n’est nullement un problème pour elle. Le bar fonctionne très bien et ses affaires moins légales, encore mieux. Après tout, c’est grâce à cet argent qu’elle peut bénéficier des meilleurs soins pour son cancer. Peu importe d’où il provient.

- Il me serait bien impolie de refuser une telle invitation. Répond-elle tout en hochant la tête, face à sa proposition de boire un verre.

Il a donc bien du temps à lui accorder. Tant mieux. Bon, sa visite ne devrait pas s’éterniser. Les éléments qu’elle a à sa disposition sont assez fins malheureusement. Sa mère n’a quasiment rien gardé de sa jeunesse. Heureusement, elle savait au moins qu’elle avait un oncle. Ronnie McAvoy. Puis, plus tard, elle a appris qu’elle avait trois cousins. Dont un qui est décédé malheureusement. Une famille qu’elle a appris à connaitre et qu’elle aime. D’ailleurs, Ronnie et Jax vivent même avec elle. Ce n’est pas simple tous les jours, mais il y a de la vie. Surtout quand Oscar et Maëlan s’incrustent aussi. Sans ce fichu cancer, elle se dirait chanceuse de la vie qu’elle mène. Même si ce n’était pas gagné, il a suffi d’une rencontre pour voir sa vie bouleverser.

Le remerciant pour le verre, elle le prend en main afin de l’apporter à ses lèvres. Elle y boit une gorgée. Le liquide s’empare de son œsophage, le réchauffant au passage.

- Vous avez bon goût. Complimente-t-elle la boisson.

Blake finit par reposer le verre sur le bureau avant de reprendre son sac pour en sortir un petit carnet marron, basique, qui a jauni. La couverture usée témoigne de son voyage à travers les années. Elle l’ouvre dans son milieu afin d’en sortir une photo qu’elle dépose au-dessus du carnet avant de tendre les objets à son interlocuteur.

- Tout ce que j’ai, c’est cette photo dont le visage a été brûlé par une cigarette. Il y a les initiales « AA » qui sont notées à l’arrière. Je suis certaine que ce sont celles de mon géniteur. Parce que c’est la seule photo que ma mère a gardée. De même qu’elle en parle dans son journal intime. Un amour de lycée. Il s’est barré pour l’université avant qu’elle n’ait pu lui dire qu’elle était enceinte. Aucun moyen de le joindre, elle n’a pas eu d’autre choix que de se débrouiller.

Les seuls objets qu’elle a gardés de sa génitrice. Le reste ayant été donné à des associations ou tout simplement jeté. À quoi bon garder des babioles pour se souvenir d’une personne qui a fait de son enfance, un enfer ? Néanmoins, elle ne peut s’empêcher d’espérer qu’elle se sente apaisée là où elle se trouve à présent.

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@Blake Rivers  

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Avec les années, on peut dire que j’en ai vu défiler, des gens, dans ce bureau. Depuis l’époque où c’était mon père et ma mère qui occupaient ce siège dans lequel je prends modestement place à présent, et ce également depuis des générations. Les Adelson, détective privé depuis des générations. Chercheurs de vérité contre quelques billets verts. L’argent appelle les secrets, c’est ce qu’avait l’habitude de me dire ma mère, tout en continuant sagement sa planque, passant sa douce main dans ma tignasse. Oui, des souvenirs heureux, drôles ou bien anecdotiques, j’en nourris des dizaines, depuis bien des années. J’en ai connu, des requêtes peu orthodoxes ou bien au contraire tristement communes.
Et pourtant, à chaque fois, je me sens comme un gosse le matin de Noël.
Si pressé d’en découdre, si impatient d’attaquer mes recherches.
La passion, il n’y a que ça de vrai, dans l’existence d’un homme.

Pourtant, ce vif sentiment, je le conserve jalousement pour moi seul et ne laisse rien paraître. Je ne cligne pas des yeux, ose à peine respirer. C’est ma phase “collecte” qui démarre: je ne peux pas me permettre d’être approximatif ou déconcentré, non, au contraire. Tout se joue durant les prochaines minutes. Mlle Rivers est étonnante et ne manque pas de cran. Ce rire qui se faufile à travers ses lèvres fines, il me… perturbe. Fronçant des sourcils, je croise les bras sur ma poitrine, jouant de ma prestance pour tenter de prendre le dessus. Mais pourquoi faire, en réalité? Pour prouver que je mène d’une main de fer cette conversation? Que tu te trompes lourdement, Caleb. C’est Mlle Rivers qui s’occupe de relancer la donne en me tendant un chèque comportant suffisamment de zéros pour payer des mois durant cette pauvre Mme Cooper, ma fidèle secrétaire et arme redoutable dans les enquêtes les plus coriaces. Haussant les sourcils de manière… exagérée, je rétorque:

C’est parfait, Mlle Rivers. Je vois que nous parlons le même langage, cela facilitera nos échanges.

Je lui souris, me détend d’un demi-millimètre. C’est plus fort que moi, quand je suis Caleb le détective, je reste méfiant, observateur. Tentant de ne pas louper une miette de ce qui se trame autour de ma pauvre carcasse. Mais elle me prend par les sentiments en affirmant que la boisson ravit ses papilles. Tout sourire, je lui réponds:

La qualité de mes boissons alcoolisées reste primordiale. Et je suis ravi que vous l’appréciez, ce whisky est… très précieux à mes yeux.

Je ne peux m’empêcher d’attraper la bouteille, de la porter à hauteur de mon regard, de sourire quand je repense à celle qui m’a déposé ce présent, à l’occasion de mon dernier anniversaire. Sawyer. Une cliente qui a fini par devenir une amie et… bien plus encore. Mais l’heure de la nostalgie n’a pas encore sonné, je le crains. Je suis au travail, bien décidé à en apprendre davantage sur cette future mission. Malgré ce bureau qui nous sépare, je me rapproche un maximum de Blake, prêt à prendre des notes sur toutes les informations qu’elle me confiera. Je n’attends pas bien longtemps et je l’observe, taiseux, sortir un carnet de son sac. Ne quittant pas l’objet des yeux, je l’écoute sagement, tiquant quand elle évoque ces initiales, cette photographie. Mmm… une piste comme une autre: sans doute très intéressante mais une véritable aiguille dans une botte de foin. Surtout quand on connaît le contexte: un mec qui s’est barré quand il a découvert que sa copine était enceinte… Le coup classique. Un bâtard dans l’âme, comme il en existera jusqu’à la fin des temps… N’est ce pas?

Mais dans ma sphère professionnelle, je tente de conserver un poil de… diplomatie. Attrapant la photo de mes doigts épais, je m’éclaircis la gorge avant de la relancer, la questionnant:

Si vous saviez le nombre de fois où je me suis retrouvé avec moins d’informations que ça pour démarrer une enquête… Mais… Ça ne veut pas dire que c’est gagné d’avance. Préparez-vous, Mlle Rivers: ce sera long, bien plus que vous l’imaginez. Et vos questions pourront sans doute se retrouver sans réponses, malgré tous vos espoirs. Je ferai de mon mieux, soyez en sûre. Mais parfois, le mieux est l’ennemi du bien.

Je préfère poser le cadre, faire preuve d’une honnêteté sans faille. Elle est jeune, sans doute pleine d’espoirs et elle a foi en l’avenir. Mais… à la regarder d’un peu plus près, elle semble aussi solide, porte un regard terriblement lucide sur le monde, sur la vie. Ce n’est pas quelque chose qui s’explique, mais que l’on ressent, tout simplement.

Blake Rivers est une dure à la tâche.
Incontestablement.

Attrapant mon verre histoire d’en avaler une longue gorgée qui le vide, je fais claquer ma langue contre mon palais et lui dit, d’une voix bourrue:

Vous m’avez parlé de votre… géniteur. Je suis certain que le terme n’est pas choisi au hasard. Qu’est ce qui motive votre recherche? C’est important que je le sache.

Je m’enfonce dans mon fauteuil, après m’être resservi, ainsi qu’une belle rasade dans le verre de Blake. Je n’en ai pas terminé avec elle: curieusement, elle… n’est pas un simple livre ouvert. Et j’ai besoin d’avoir cette putain de vue d’ensemble qui me manque tant.

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@Caleb Adelson

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L’argent. Le dicton dit « l’argent ne fait pas le bonheur ». C’est utopique de penser ça. Certes, il peut détruire des vies, susciter de la jalousie, mais il permet surtout de vivre bien et sans crainte. Je sais de quoi je parle. Jusqu’à l’âge de huit ans, j’ai vécu dans la misère. Mère toxico et prostituée, l’argent partait surtout dans la drogue. J’étais obligée de voler dans son portefeuille afin de pouvoir aller faire quelques courses et remplir misérablement le frigo qui avait tendance à tomber en panne une semaine par mois. Souvent shootée, Lana ne s’en rendait pas toujours compte que je lui piquais du fric, pour pouvoir nous nourrir un minimum. Mais, lorsque c’était le cas, j’avais droit à être enfermé dans ce placard. Un placard que j’ai craint durant un temps. Devenant même phobique aux endroits clos, mais j’ai fini par prendre sur moi, et j’ai appris à transformer cette peur en une force. J’avais fini par y cacher une lampe de poche et un livre, ainsi que des petits gâteaux. Grâce à ça, la punition devenait un moment agréable. Cette vie passée m’a permis de forger le caractère que j’ai aujourd’hui. Je ne me laisse pas abattre, et jamais je ne baisserais la tête devant qui que ce soit.

Recueillie par les Rivers, ma vie a changé radicalement. Choyée dans une grande famille, deux frères qui m’ont adopté rapidement comme leur sœur… Ne plus devoir aller dormir le ventre vide sur un matelas posé à même le sol du salon, mais avoir un vrai lit et une chambre. Le luxe pour la gamine paumée que j’étais. À présent, je gagne très bien ma vie. Le bar fonctionne bien et mes affaires moins… conventionnelles, encore mieux. Ce sentiment de liberté, je me refuse de la perdre et pourtant, ça va arriver avec mon traitement. Devoir ma vie à de la chimiothérapie, à un potentiel inconnu… C’est difficile pour moi. Même cette démarche dans le but de retrouver mon géniteur, ça l’est encore plus. Car je ne veux rien lui devoir. Les seules personnes envers qui je me sens redevable, c’est envers les Rivers. Ma loyauté leur est toute dévouée. L’ironie du sort veut que justement, cette loyauté m’amène ici. Une promesse faite aux frangins.

Buvant un verre de whisky avec le détective, je lui découvre un certain palet. Ce nectar vient titiller mes papilles au point que j’enregistre mentalement la marque de son précieux, à entendre ses mots.

- Une personne chère à votre cœur qui vous l’a offerte ?

Après m’être une nouvelle fois délecté de ce nectar ambré, je dépose le verre sur le bureau afin de transmettre à Adelson les pauvres informations que j’ai en ma possession. Sincèrement, s’il parvient à trouver mon géniteur, il aura tout son respect. Car même elle, avec le réseau qui grouille autour d’elle, c’est une aiguille dans un tonneau d’aiguilles. Mes avant-bras posés sur le bureau, je pose mon regard sur lui, lorsqu’il se montre honnête envers moi. Je dois avouer que j’apprécie. Il ne tente pas de m’endormir avec de fausses promesses ou encore, de se la jouer grand détective privé ayant un taux de réussites impressionnant. Non, il est conscient que la tâche ne sera pas simple, même s’il a déjà travaillé avec moins que ça. D’ailleurs, il faudrait qu’il me dise comment il fait dans ce cas.

Préparez-vous, Mlle Rivers: ce sera long, bien plus que vous l’imaginez.

Malgré moi, un rictus apparait à la commissure de mes lèvres. Long… Malheureusement, le temps est limité chez moi. Limité à un maximum de quatre ou cinq ans. Peut-être même moins. Heureusement, je ne suis pas du genre rêveur. Au contraire, plutôt terre-à-terre, j’ai les pieds sur terre et je n’ai pas l’intention de me reposer sur des espérances. Je suis de toute façon sur liste d’attente et hormis débuter ma chimio, je ne peux rien faire de plus. Alors, je vais poursuivre ma vie et je verrais bien pour la suite. De toute façon, j’ai fait les papiers nécessaires pour que le bar revienne à Jake, s’il m’arrivait quelque chose. Idem pour la maison. Mes finances seront redistribuées entre mes proches et je laisserais le soin de poursuivre mes affaires illégales, à Jak-Jak, encore une fois.

- Vous savez, je ne suis pas du genre naïf et encore moins à espérer quoi que ce soit. Je suis lucide et sans manquer de respect à votre réputation, je pars du principe que vous ne trouverez pas sa trace. J’essaye, car je l’ai promis, sinon je ne serais pas présente dans votre bureau. Je ne vous mets aucune pression et sachez que je ne vous en tiendrais pas rigueur si vous échouez.

Après tout, je m’en fous assez de qui est mon père biologique. Il est un inconnu à mes yeux et il le restera. Même s’il accepte de faire les démarches et qu’il est compatible, il ne faudra pas qu’il espère quoi que ce soit de ma part. Je n’ai pas envie d’apprendre à le connaitre. Sans ce fichu cancer, je n’aurais pas besoin de lui. M’attendant à diverses questions, il me pose celle que je redoutais. Ma motivation.

Je passe ma langue sur mes lèvres avant de les mordiller doucement. Ma main gauche glisse dans mes cheveux bruns avant que je ne plonge mon regard océanique dans celui de mon interlocuteur, bien curieux.

- Croyez-moi, ma raison ne vous aidera en rien. Si vous avez peur que je veuille me venger de son absence dans ma vie, rassurez-vous, je m’en tape. J’ai déjà un père, c’est celui qui a pris soin de moi depuis que j’ai huit ans. Ce type qui s’est barré, il ne représente rien à mes yeux. Mais... j’ai une seule demande à lui faire, c’est pourquoi je le recherche.

Au moins, il a une infime partie de sa réponse, non ? Bon, c’est une miette de pain, mais de toute façon, savoir que je le cherche, car il est potentiellement ma dernière chance de rester en vie, à quoi ça pourrait l’avancer ? À rien. Et je devrais me coltiner son regard de pitié. Plutôt m’asperger les yeux avec de l’acide, plutôt que de voir ça

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@Blake Rivers  

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On ne connaît jamais vraiment les gens.
Malgré la tonne de qualités qui me compose (et pour la modestie, en effet, on repassera), je n’ai pas celle de clairvoyance totale. Bien entendu, quasiment l'entièreté de mon métier repose sur ce fameux et fidèle sixième sens qui ne trompe personne et suivre mon instinct est quasiment aussi récurrent que de siroter le café infâme que me prépare sans arrêt Madame Cooper, ma secrétaire. Mais je ne connais jamais vraiment mes clients avec justesse et même si Miss Blake Rivers a un joli minois, je sais qu’au fond, elle est bien plus que ce qu’elle ne laisse entendre.
D’ailleurs, elle me questionne sur la bouteille d’alcool, dont elle en savoure chaque précieuse goutte. Osant un timide sourire et mon regard se perdant dans mon propre verre, je réponds, dans un murmure:

On peut dire ça… Une cliente à qui j’ai offert une vérité qu’elle pensait ne jamais connaître. Mais… nous nous égarons.

Penser à Sawyer, là, maintenant, tout de suite: putain de foutue mauvaise idée. Je dois garder mes esprits, malgré l'arôme alcoolisé qui se propage dans ma bouche, malgré l’inconfort de la situation. Je ne sais pas pourquoi mais je me sens… très mal à l’aise. Comme si un courant d’air froid venait de traverser la pièce mais qu’à la fois une tornade chaude déstabilisait chaque aspect de cet échange professionnel. Quelle mouche me pique, nom de Dieu? Je dois retrouver mon sang froid. Ne lâchant pas des yeux ma cliente, je l’écoute avec attention, pas même pour terminer mon verre de whisky. Résumant la situation après m’être éclaircit la gorge, je déclare donc, d’un ton assuré:

Donc… Si je trouve l’identité de votre père, je ressors victorieux de cette quête que vous me confiez. Et si j’échoue… vous ne serez pas déçue. Rien à perdre, tout à gagner, alors? C’est donc que l’argent n’est pas un souci pour vous, Mademoiselle Rivers.

Franchement, qui paierait un privé, signant un chèque avec pas mal de zéros (c’est que le nom Adelson est gage de confiance et de réussite quasi systématique, une réputation, ça se paie) en se foutant du résultat de l’enquête? Sincèrement, je commençais à être de plus en plus intrigué. Intéressé. Touché. Mmm… c’était foutu: j’allais y arriver. J’allais trouver son père, coûte que coûte. Je sortais d’une enquête… émotionnellement très intense, qui avait bousculé plusieurs certitudes de ma vie privée. J’avais besoin de me remettre en scelle, de me lancer à corps perdu dans une nouvelle mission qui pourrait occuper mon esprit tourmenté. Continuant à déblatérer en quasi monologue, je me lève, commence à faire les cent pas et m’exclame:

Vous semblez… indépendante. Calme, raisonnée. Vous avez l’air de mener votre vie de front, sans avoir besoin d’aide… alors, je m’interroge…

Pause théâtrale, où je croise les bras sur ma poitrine, où je lève les yeux au ciel, où je soupire pour ensuite enchaîner:

Qu’est ce que vous souhaitez lui réclamer, si je le trouve? C’est important que je le sache. J’ai besoin d’un minimum de motivation… sinon, je suis bon à rien. Enfin, plus que d’habitude.

Là, Miss Rivers est au pied du mur… je compte bien avoir la vue d’ensemble qui me manque sur cette inextricable situation.
Et puis, c’est comme avec son psychologue: inutile de cacher la vérité à son détective privé, il finit toujours par la découvrir…

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@Caleb Adelson

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Les paroles du détective me prouvent une fois de plus qu’il excelle dans son domaine. S’il est parvenu à aider une cliente qui semblait avoir perdue espoir de découvrir la vérité, alors il est le seul à pouvoir mener à bien ma requête. Le problème, c'est que je ne parviens pas à savoir si c'est vraiment ce que je veux. Je n’ai pas envie que ce géniteur pense qu'il a un droit quelconque sur moi par la suite. Il n’a jamais eu envie de me connaitre, alors ça ne sera pas demain que ça commencera. Je ne me fais aucune illusion, une fois retrouvé, il refusera probablement de faire un test de compatibilité. Mais peut-être a-t-il d’autres enfants ? Des nièces ou des neveux ? Ces derniers voudront peut-être faire un geste désintéressé. Bien sûr, je n’y crois pas. M’enfin, j’ai donné ma parole, alors j’essaye.

Adossée contre ma chaise, mon verre entre les mains que je m’amuse à faire tourner pour observer le liquide ambré danser, je relève les yeux vers le détective. Un sourire vient se glisser à la commissure de mes lèvres tandis que je hausse les épaules avec désinvolture.

- En effet. J’ai promis de tout faire pour tenter de retrouver mon géniteur. Je tiens ma promesse, mais le résultat, je m’en fous. Je suis clairement décidée à ne pas laisser cette personne entrer dans ma vie. S’il n’a jamais voulu me connaitre, très bien. Je n’ai pas eu besoin de lui pendant vingt-six ans, donc qu’il n’espère pas avoir une place dans ma vie aujourd’hui, dis-je sur un ton dur mais ne laissant aucune place au doute.

En le voyant se lever et faire les cent pas, mon regard se pose à nouveau sur le liquide qui continue de tourbillonner. Je croise mes jambes l’une au-dessus de l’autre, et prête une oreille attentive à ce qu’Adelson me dit. Je suis loin, très loin de me douter que ma demande va entraîner des répercussions sur la vie du détective et sur la mienne. Qu’un lien nous unit.

C’est alors que ce que je craignais finit par se produire. Il veut connaitre mes raisons. J’aurais espéré que les nombreux zéros sur le chèque le fassent taire, mais ce n’est pas le cas. Je m’arrête dans mes mouvements circulaires avec le verre. Le regard toujours rivé sur ce liquide, je le lève finalement pour le poser sur le détective. Mon expression se durcit, mais finit par s’adoucir alors que je lâche un léger rire. Le coude appuyé sur l’accoudoir de la chaise, je me pince l’arête du nez avant de reporter mon regard sur lui.

- Vous êtes bien curieux. Mais je suppose que c'est la base de votre métier, n'est-ce pas ? Il faut être curieux, dis-je avant de prendre une profonde inspiration. J’ai un cancer. Un cancer du foie. Selon mon médecin, il devrait me rester environ quatre ou cinq ans. Je suis sur une liste d’attente pour une greffe, mais je ne suis pas en tête. L’avantage de ce cancer, c’est qu’il est possible de faire une greffe à partir d’un donneur vivant. Malheureusement pour moi, j’ai été adoptée et ma génitrice est morte. Elle a été tuée par l’un de ses clients. C’était une junkie et prostituée, dis-je sans détour et d’une manière détachée. Vous savez, la mort ne m’effraie pas. Loin de là. Je n’aurais pas dû survivre au-delà de mes huit ans. Depuis lors, chaque jour est un bonus. Mais apparemment, ma famille ne voit pas les choses de la même manière, c'est pourquoi je suis ici. Est-ce une motivation suffisante, monsieur Adelson ? demandai-je d'une voix sereine.

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@Blake Rivers  

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Brunette au regard d’acier. Assurance qui déborde, confiance qui semble guider chacune de ses actions. Dévisager mes potentiels clients de la sorte n’est pas dans mes habitudes mais dans ce cas précis, je ne peux pas m’en empêcher. Comme si je me sentais attirer par elle…
Oh, bien entendu, rien de sexuel, rien de perfide. Elle pourrait être ma fille! Enfin… je crois? C’est vrai qu’elle paraît jeune. Oui, j’apprends de sa bouche qu’elle a vingt six ans. Une vraie beauté, une silhouette magnifique et un minois particulier, c’est qu’elle a de la gueule et j’ai toujours été très sensible à ce charisme insaisissable. Mais dans mon coeur, mon âme, mon esprit et aussi dans mon caleçon, une seule femme a prit le contrôle: Siobhan.
Non, ce n’est pas ce genre de sentiment qui grandit envers Blake Rivers… Plutôt un questionnement infini qui, je le sens, ne me laissera pas tranquille de sitôt. Comme un air de déjà vu… mais d’où? C’est la question à mille dollars, les amis.
Ses motivations sont toujours floues, tout comme la finalité de mon enquête. Découvrir l’identité de son paternel… Très bien. J’en suis capable et c’est un défi que j’accepte sans hésiter une seule seconde. Mais pour quoi faire, au juste?
…
Et puis, j’apprends. Son sourire captivant qui finit par laisser place à la vérité, brute. Impartiale. La maladie l’a gagnée, ce foutu cancer qui en emporté plus d’une belle âme semble prêt à serrer ses griffes sur sa belle âme. Le souffle coupé, je finis par retrouver mon siège, quelque peu perturbé et lui annonce, déboussolé:

Putain, euh… Ouais, je dirais que la motivation est suffisante, Blake.

Oui, j’abaisse le bouclier, dépose les armes. Inutile de continuer davantage ce numéro ridicule de détective privé imbu de sa personne, il ne pourra la tromper et je n’en suis pas plus convaincu pour autant.
Je secoue la tête, avale une nouvelle gorgée de whisky, attrape la bouteille en arrachant le bouchon de liège grâce à mes dents. Un sauvage, en bonne et dûe forme. Mais à quoi cela pourrait-il servir de continuer cette discussion alambiquée, accompagnée de grands airs qui ne me ressemblent pas et elle non plus, de toute évidence?
Je ne lui demande pas la permission pour lui servir une nouvelle généreuse rasade dans son verre et après m’être fortement raclé la gorge, je finis par lui dire, la voix morne:

Bon, ok… Je ferais au plus vite. Tu permets que je prenne ton numéro de téléphone, histoire de t’avertir quand j’ai du nouveau? Ou alors, t’as un lieu de travail où je peux passer, à l’improviste?

Le tutoiement, nouvelle preuve que je me sens inexorablement proche de la magnétique brune. Et plus le temps avance, plus une idée s'incruste, dans mon cerveau perturbé:
Je dois trouver son père. Il le faut.
Même si Blake paraît indépendante et désireuse de le rester le plus longtemps possible, la solitude ne dure jamais vraiment.
Je vais me charger de lui changer sa vie. Personnellement.
Même si m’investir aussi personnellement dans une enquête ne m’a pas réussi, dernièrement…

À la recherche du paternel

@Caleb Adelson

TW :: cancer, mention décès

La raison pour laquelle je ne parle pas de mon cancer, c’est justement parce que le regard des autres finit par changer. La pitié, la tristesse, l’incompréhension, ce sont des choses qui ont tendance à me filer de l’urticaire. C'est la raison pour laquelle Valeria, Enael (mes meilleurs amis), et Robyn (mon alter ego, ma moitié) ne savent rien de ma maladie. Je veux préserver la légèreté de nos relations, je ne veux pas voir la tristesse ou la colère dans leurs yeux. Je souffre déjà assez de voir ces émotions dans le regard de mes frères et de mes parents. Si seulement je n'avais pas perdu connaissance lors du repas de famille... Ils n'auraient jamais rien su.

Ce détective semble bouleversé et perturbé, au point de m'appeler par mon prénom… et il me tutoie qui plus est. Toutefois, l'aspect positif dans tout ça, c'est que Monsieur "Inspecteur Gadget" va prendre en charge ma demande. Je pourrais ainsi rassurer ma famille en leur disant que quelqu'un est à la recherche de mon géniteur. J’avoue avoir une certaine appréhension. Au fil des années, j'ai dressé plusieurs portraits de lui, allant d'un homme important, droit et menant une vie de rêve avec une famille parfaite, à un homme alcoolique et infidèle, ayant tout raté, un parasite qui risquerait de me coller les basques pour avoir quelques billets. Cela me titille la langue de lui demander de finalement lâcher l’affaire, que j’ai changée d’avis. Or, je finis par me la mordre. Non, Blake, va jusqu’au bout des choses. Dans le pire des scénarios, tu connais suffisamment de monde pour qu’il déserte de ta vie, comme il l’a déjà fait.

Lorsqu’il me sert un autre verre, je lève mon regard vers lui, sortant de mes rêveries. Je le remercie d’un signe de tête avant de prendre le verre en main et de boire une grande gorgée.

- On se tutoie maintenant, Caleb ? demandais-je en haussant un sourcil. Ça ne me dérange pas du tout, mais c'est une nouveauté.

Je dépose mon verre sur le bureau avant de me redresser. Sans lui demander l’autorisation, j’attrape ce qui ressemble le plus à un carnet, ainsi que son stylo pour inscrire mon numéro de téléphone et l’adresse du Wolf Golden sur l’une des pages du carnet, que je lui retourne.

- Voilà. L’adresse est celle de mon bar, je suis là normalement tous les soirs. Si je ne suis pas là, demande à Christy de m’appeler, elle t’offrira un verre en m’attendant.

Après tout, je ne sais pas dans quel état je serais à ce moment-là. Je repousse l’inévitable, mais je devrai bientôt commencer mes séances de chimio. Mon pire cauchemar. Je vais me sentir affaiblie, dépendante... Rien que d'y penser, j'en ai la nausée.

- Par contre, si tu trouves mon géniteur et que c’est un ivrogne, fais-moi plaisir, tourne les talons et ne lui dis rien. Son foie sera trop amoché. Après un cancer, je n’ai pas vraiment envie de me choper une cirrhose. Et si c’est pour me le coltiner, non merci.

Je peux paraitre dure et sans cœur, peut-être que je le suis. Mais, après avoir vécu avec ma mère, je n’ai pas envie de revivre quelque chose de similaire. Les Rivers m’ont sauvé en m’emmenant avec eux, je fais partie d’une famille saine. Certes avec des défauts et peu enclin à rester dans les clous, mais une famille aimante. Je ne veux pas qu’une personne extérieure vienne gâcher tout cela, même pas si c’est pour me sauver la vie.

À la recherche du paternel

@Blake Rivers  

TW :: mention alcool, cigarette et langage fleuri made in Caleb  

Blake semble un peu… perturbé par ce changement d’attitude de ma part. Par ce relâchement, cette barrière qui s’effondre entre le détective privé et sa cliente. Mais au fond, le vouvoiement… c’est une pure connerie. Je m’apprête à passer des semaines à enquêter sur son paternel et quelque part, je vais également décortiquer la vie de la jolie brune au regard de braise. Je vais me faufiler dans son intimité, débusquer ses plus noirs secrets, chercher le responsable d’une de ses plus grandes frayeurs. Alors, pourquoi s’emmerder avec une futilité aussi risible que la politesse? Et puis, je ne pense pas non plus lui manquer de respect. Entre nous, il ne s’agit plus de simples banalités, n’est ce pas? J’ai appris pour son cancer, elle découvre le sale con que je suis. Tout va bien dans le meilleur des mondes. Et elle ne semble pas être le genre de nana à s’attarder sur un détail pareil. Elle en a vu d’autres, ça se sent. Une dure à la tâche, un roc qui se retrouve tiraillé par de nombreuses failles. Mais elle va s’en sortir, ça se sent.
Et même si je ne suis pas parfait, quand il s’agit de mon instinct, il ne me fait jamais défaut.
Blake attrape mon carnet, y inscrit le nom et le numéro de son lieu de travail, ajoutant que je pourrais aisément la joindre là bas. Écarquillant les yeux, ne croyant pas à cette fabuleuse coïncidence, j’ajoute, un peu plus léger:

Oh, tu travailles dans ce bar? Je dois t’avouer un truc: j’ai une sacrée ardoise, chez toi. Promis, je te la rembourserais. Je tiens toujours ma parole, Chrisy le sait, elle me connaît bien.

Oui, on peut dire que je suis un véritable pilier de bar. C’est fou, la vie. Dingue comment le monde peut-être petit. Sans doute même que j’ai déjà croisé Blake, lors d’une de mes soirées improvisées, à me descendre plusieurs dizaines de verre, quand j’étais célibataire, divorcé et malheureux…
Mais on ne veut pas toujours voir ce qui est juste sous notre nez, c’est bien connu.
J’écoute Blake m’avertir quant à l’état potentiel dans lequel je pourrais retrouver son père biologique. Distrait, je fronce les sourcils et réponds, dans un grognement à peine perceptible:

Hum, ouais, ok, pas de problème…

Je réfléchis, pose mes mains sous mon menton, perdu dans mes réflexions. Mon cerveau tourne à vive allure et je rebondis enfin, après une longue léthargie, demandant presque comme une supplication:

Et si c’est un mec bien? Et si… Il t’annonce avoir eu des circonstances atténuantes? Tu feras quoi, hein, Blake? T’es prêt à l’accepter, ce géniteur? Prêt à ce qu’il devienne un père?

Bien sûr, comment ne pas faire le parallèle avec l’enquête sur la fille de Sawyer Salomon, qui s’avère être Harper, ma filleule. Si j’ai bien appris quelque chose, au cours de ce séisme dans ma vie, c’est que les certitudes ne sont jamais prévisibles. Soupirant et prenant des années dans la gueule en me montrant si sage et mystérieux, je murmure:

Tu sais, j’connais bien ça… Vouloir repousser la vérité, n’en tirer que les bons aspects, qui nous arrangent. Mais dès que je trouverais ton père et je te promets que ça arrivera, même si ça doit prendre des mois… Faut que tu sois prête. Peu importe ton état, peu importe son histoire. T’acceptes, ça?

Je me montre bien formel, presque impitoyable. Mais Blake doit savoir dans quoi elle s’engage.
La vérité comporte toujours des conséquences. Et manquerait plus qu’elle soit heureuse de le retrouver, tiens…

À la recherche du paternel

@Caleb Adelson

TW :: cancer, mention décès

- Un client régulier ? Vraiment, le monde est bien petit, dis-je en esquissant un sourire. J’en suis la patronne. Tu sais quoi ? demandais-je en posant mes avant-bras sur son bureau, plongeant mon regard d’acier dans le sien. Si tu parviens à le trouver, en bonus, je t’effacerais ton ardoise, promis-je avant de me redresser.

S'il parvient à retrouver mon géniteur, le moins que je puisse faire est d'effacer ses dettes au bar. J’apprécie de croiser des clients fidèles, cela prouve que le bar est agréable et que les employés sont compétents. Même si je n'ai jamais douté de cela. J'ai une confiance aveugle en eux. Le Wolf Golden, c’est mon bébé. Je l'ai financé de ma poche et je l'ai façonné à ma guise. J'en suis particulièrement fière. Contrairement à mes petites activités illégales, cet endroit est safe. Tout est clean, et personne n'est payé au black. Un écran de fumée de tout ce qu’il y a de plus légal afin de m’assurer que les poulets ne viennent pas trop fouiner dans mes affaires.

Revenant à la discussion initiale, à ce qui m’a poussé à pénétrer dans ce bureau, je ne peux m’empêcher de hausser un sourcil lorsqu’il me pose des questions sur la probabilité que cet homme soit respectable. Je ne comprends pas pourquoi il me demande ça. Avec des suppositions, on pourrait tout imaginer. Je ne veux pas nourrir des espoirs utopiques, me projeter sur un chemin qui pourrait être plus lumineux que celui que j'envisage. La déception serait trop grande.

- Je vais être claire, Caleb, je ne cherche pas un deuxième père, ok ? Cet homme restera un inconnu. Il saura pourquoi je souhaite entrer en contact avec lui, et point barre. J'ai un père, et c'est Killian Rivers. Alors, mec bien ou pas, je m'en fou. Ses excuses ou ses explications sur le fait qu'il m'a laissées entre les mains d'une prostituée junkie, je n'en veux pas. Je ne cherche pas de réponses, je n’en ai rien à foutre. Si je fais cette démarche, c'est uniquement parce que j'ai promis à ma famille de le faire, car il pourrait être ma seule chance de survie. Point barre.

Je peux sembler froide et brutale en disant cela, mais c’est la réalité. Killian me suffit en tant que père, je n'en veux pas un deuxième. Les Rivers sont ma famille. Peut-être même que cet inconnu a d’autres enfants : je n’en ai rien à foutre. Je n'ai aucune envie de les connaître ou d'entrer dans leur vie. De toute façon, ils ne le voudront pas d'eux-mêmes.

Voyant l'heure avancer et à la suite des derniers propos du détective, je décide qu'il est temps de prendre congé. Je suis consciente qu'il cherche à être honnête et à me préparer à toutes les éventualités, et je lui en suis reconnaissante. Mais je n'en ai pas besoin. Je suis claire avec moi-même sur ce que je veux et ce que je ne veux pas. Bien sûr, je suis à mille lieues d’imaginer ce qui va me tomber dessus et sur ma famille. Je finis par me lever de ma chaise, mon sac en main, avant de poser mon regard sur le détective.

- Comme je te l'ai dit, je m’en fous de son histoire. Et crois-moi, même s'il s'avérait être quelqu'un de bien, la dernière chose qu'il voudrait, c'est moi dans sa vie. Je suis loin d'être fréquentable, et puis, qui voudrait d'une fille qui, à seize ans, a fini en centre pour mineurs pour vol de voiture ? demandai-je simplement. Je te laisse fouiller dans ma vie, tu ne découvriras pas tout car je sais très bien cacher ce qui doit l’être, mais tu en apprendras suffisamment pour comprendre que je suis loin d'être la fille idéale pour une personne lambda.

Dans ma voix, pas de tristesse ni de mélancolie. Je n'ai pas honte de mon passé ni de la personne que je suis aujourd'hui. Je suis la patronne d'un bar, je navigue avec assurance et force dans la partie sombre de cette ville et de ses alentours. Je suis respectée dans le milieu criminel de Monterey et j'ai réussi à maintenir les affaires de mon père à flot, alors qu'il est actuellement en prison. Non loin d’être libéré, d’ailleurs. Merci, Darwin. Je suis un véritable couteau suisse sur pattes. Je n'ai peur de rien ni de personne, sauf de perdre un Rivers. Cette force, je la dois à ma famille. Ce n'est pas anodin que j'aie pris le nom « Rivers ».

- Je ne veux pas paraître impolie. Je comprends que tu cherches à être honnête et à me préparer à toute éventualité, et je t'en remercie. Mais crois-moi, je sais très bien pourquoi je suis venue te voir et ce que j'attends de cet homme. Alors, tu pourras le rassurer : je ne veux pas qu'il fasse partie de ma vie ni moi de la sienne. J'ai déjà trouvé mon équilibre chez les Rivers, concluais-je en contournant le fauteuil avant de remettre correctement le col de ma veste en cuir noir.

À la recherche du paternel

@Blake Rivers  

TW :: mention alcool, cigarette et langage fleuri made in Caleb  

Je ne sais pas pourquoi mais je sens que cette affaire sera différente des autres. Et pourtant, dans ma longue et diversifiée carrière de détective privé, j’ai su retenir une chose, essentielle, cruciale même: S’attendre à l’inattendu. Ne jamais se reposer sur ses acquis et être perpétuellement plongé dans des situations aussi cocasses que troublantes. Mais sans le savoir, mon instinct m’informe de la difficulté et à la fois de la complexité de cette recherche. Après tout, débusquer des parents d’enfants non reconnus n’est pas une nouveauté, dans ma profession. Je dirais même que cela est courant et ce constat est malheureux à faire.

La perspective de voir mon ardoise réduite à néant est plus qu’alléchante, voilà pourquoi j’éclate d’un rire sonore avant d’ajouter, tout en me penchant encore davantage en direction de Blake et de son regard captivant:

Marché conclu. Mais ma jolie, sache que je ne résoudrais pas cette enquête pour cette raison. Ma motivation est ailleurs. Tu la mérites, cette putain de vérité.

Comme d’habitude, mon parler est légendaire, ma vulgarité ne peut être étouffée. Mais je crois avoir cerné le personnage, Blake n’est pas offusquée d’une telle attitude. Au contraire, au vu de sa profession, il en faut, du chien. Et oui, tenir un bar, faire en sorte qu’il prospère et qu’il reste dans les clous n’est pas toujours une mince affaire. Bon, mon petit côté fouineur ne peut s’empêcher de fabuler et de prétendre que cette façade protège certaines activités qui s’avèrent plus que douteuses. Mais sincèrement…? J’en ai absolument rien à foutre. Je ne suis pas là pour lui chercher des poux mais plutôt pour protéger son joli minois et lui apporter un soulagement qui changera probablement son regard sur la vie.
Le destin n’est pas réduit qu’à une simple fatalité. Parfois, il regorge de changements imprévus mais putain, qu’est ce qu’ils font du bien. Car ils prouvent, tout simplement, que l’inévitable est parfois salvateur.

Bon, ça va cinq minutes les grands discours silencieux mais là, je sens bien que mes propos d’adulte prenant du recul sur la situation ne plaisent pas à Blake. Ses réactions faciales sont sans équivoque et sa longue tirade réussit l’impensable: me clouer le bec. Enfin, le temps de quelques secondes seulement. Fronçant des sourcils mais ne lâchant pas la guerre de regards que nous avons démarré il y a peu, je finis par grincer des dents et lui répondre, d’une voix maîtrisée mais loin d’être tendre:

Ok, Blake, Ok… On verra bien, de toute manière, ça ne sert à rien de se faire des plans sur la comète.

Putain, Caleb, toi et tes adages d’un autre temps… Ok, t’es vieux, mais t’es pas obligé de paraître aussi pompeux et vieux con, hein… Elle en a autre chose à foutre, la petite Rivers. D’ailleurs, entendre le nom de son père me fait tiquer mais je reste en mode poker face. Killian, je le connais, grâce au club de motards. Et je n’ai pas envie de me brouiller avec, ça serait vraiment con. Décidément, cette enquête devra se mener en mode sous-marin…
Mais j’ai à faire à une véritable coriace. Et lucide, qui plus est. Elle réalise que je vais non seulement devoir farfouiller dans les entrailles de la vie de son père biologique mais également dans les siennes. Hochant la tête, profondément concentré, déployant déjà dans mon esprit mon plan d’attaque afin de démarrer mon enquête, je me lève afin de prendre congé, lui tendant une main assurée et lui affirmant, tout aussi déterminé:

T’en fais pas, Blake, ça va le faire. J'ai tout autant confiance en mes capacités qu’en ta volonté de digérer l’information, quand je te la donnerais. Je fais mon travail et toi, tu t’occupes du reste, n’est ce pas…?

Mais elle tourne déjà les talons, résolument décidée à mener son existence comme elle l’a sans doute toujours déjà vécue.
Seule, avec du monde autour. Indépendante et ne se sentant redevable uniquement envers son clan, les Rivers.
Et certainement pas envers un paternel qui l’a lâchement abandonné et qui ne gagnera probablement jamais son amour et son respect…



SUJET TERMINÉ, MERCI ENCORE POUR CE RP DE DINGUE!