a life, a story
Lettre à Venus
Venus, ma chère Venus, la vie t’a mis sur mon chemin le jour de notre naissance mais elle t’a aussi enlevé à moi ce 11 juin 2018, un accident de voiture et tu es partie, tu m’as abandonné. Ce vide que tu as laissé a été bien trop immense pour moi, je ne savais plus quoi faire pour aller mieux. J’étais malheureux, et Salem l’était aussi mais je n’arrivais déjà pas à me consoler moi-même alors je n’ai pas été capable d’être là pour elle comme je l’aurais dû. Venus, tu n’étais plus là pour me dire quoi faire, toi ma sœur jumelle qui m’a toujours guidé depuis notre naissance. Tu étais mon double, sans toi je n’étais plus rien. J’aimais Salem de tout mon cœur, je crois bien que j’en étais amoureux depuis le premier jour que mon regard avait croisé le sien, quand nous sommes devenus voisins en janvier 2008.

Nous formions un merveilleux trio tous les trois, et rien n’aurait dû nous séparer. Pourtant, tu es partie. Sauf que je ne suis rien sans toi, j’ai l’impression qu’une partie de moi est partie avec toi, que je ne saurais plus jamais être celui que j’étais en ta présence. J’ai eu peur Venus, peur de faire une bêtise. Parce que oui, l’envie de te rejoindre était bien trop grande. Le lien qui unit des jumeaux est puissant, et tout le monde sait qu’il est impossible de vivre l’un sans l’autre. Mais, malgré ton absence, j’avais toujours l’impression d’entendre ta voix me conseiller, et je savais que toi tu m’aurais empêché de faire une bêtise, alors je t’ai écouté. Pour chasser mes idées noires, je n’ai vu qu’une seule solution possible, partir. Il ne m’a pas fallu longtemps pour tout organiser, en l’espace d’un mois j’ai décidé de m’engager dans l’armée, j’ai annoncé mon départ à Salem puis j’ai quitté Monterey, cette ville où nous sommes nés, où nous avons grandis et passés de merveilleux moment, mais aussi cette ville où tu es morte Venus. Je n’étais plus capable de vivre ici, tout me ramenait à toi, et je n’y arrivais plus.

Partir, ça ne m’a pas forcément consolé. Ton absence était toujours difficile à gérer pour moi. C’est grâce à l’armée si j’ai réussi à penser à autre chose. Disons que c’était tellement intense que j’étais bien trop épuisé pour penser, et il me semble que cela m’a fait un bien fou. Je n’ai parlé de toi à personne, je n’y arrivais pas. Ce passé trop douloureux, mon cerveau a voulu l’oublier. Mais je te promets Venus, jamais je ne t’oublierais. Toi et moi, on est liés pour toujours, même si tu n’es plus là. Mais je le redis encore, tu n’avais pas le droit de m’abandonner, et tu n’avais pas le droit d’abandonner Salem non plus. J’ai culpabilisé d’être parti et de l’avoir laissé, je l’ai abandonné moi aussi, alors que je suis sûr qu’elle avait besoin de moi. Tout ça c’est de ta faute Venus...

Je t’en voudrais toujours d’être partie Venus, mais c’est la vie, je dois faire avec. Je crois qu’il est temps pour moi de rentrer à Monterey, je meurs d’envie de revoir Salem, même si je me doute bien qu’elle est passée à autre chose et m’a certainement oublié. J’ai envie de faire autre chose que l’armée, j’ai envie de faire des études, apprendre un métier qui va me plaire. En fait, je crois que j’ai envie de réaliser ton rêve Venus, j’en ai besoin. Alors je crois que je veux devenir instituteur. J’ai conscience que ce ne sera pas facile, mais j’ai besoin de me réconcilier avec toi, parce que je t’en veux d’être partie, et je crois bien que ce serait le meilleur moyen.

T’écrire cette lettre Venus, ça n’a pas été facile, mais sans doute est-ce un bon début pour véritablement commencer mon chemin vers le pardon. Je sais que ce n’est pas de ta faute, toi tu n’aurais jamais voulu nous abandonner. C’est la vie qui a décidé que ça devait se passer comme ça. Pour mon retour à Monterey, j’ai trouvé un emploi de garçon au pair, je pourrais aisément suivre mes études à distance et en présentiel et surtout avoir un toit car je n’ai nulle part où aller. Papa est parti lui aussi, et maman l’a suivi de peu, fichue maladie. Vous m’avez laissé tout seul, tous, j’ai dû faire quelque chose de sacrément mal pour que la vie s’acharne autant sur moi. Mon retour à Monterey ne sera pas simple, j’en ai conscience, tout comme ça risque d’être compliqué avec Salem, mais je crois qu’après tout ce temps, je suis enfin prêt à revenir affronter la réalité, de laquelle j’ai été loin durant toutes ces années, depuis ton départ.