Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Rien ne nous prépare à ce que tout bascule dans notre vie.

Je le sais mieux que personne, c’est une leçon que j’ai appris par la force des choses. Moi qui pensais, aux côtés de Jacob, trouver l’amour de ma vie et vivre heureuse jusqu’à la fin des temps… Je me suis fourvoyée. Et lourdement. J’ai cru toucher du doigt le Paradis mais au lieu de ça, j’ai connu un véritable Enfer que j’ai fini par quitter, pour retrouver le havre de paix qu’a toujours été à mes yeux Monterey. Cette ville natale, qui m’a vu grandir, qui m’a choyé et m’apporte aujourd’hui une seconde chance que j’apprends à mériter. La confiance en soi est une denrée rare qui me fait toujours défaut mais renouer petit à petit avec des aspects d’une vie tranquille m’apaise et je ne cesse de m’émerveiller de ces cadeaux improbables. La liste est formidablement longue, qui plus est: de nouvelles amitiés, telles que Sofia et Caron, profondes et tellement belles, renouer avec mon jumeau Jeremy, son récent mariage et l’annonce de sa paternité, mon étrange relation avec Barthelemy, ce mentor musical avec qui j’échange par de longues et intenses lettres et surtout, ma nouvelle carrière qui décolle de manière aussi inattendue que constructive.

Oui, le constat est aussi simple que cela: je suis heureuse.

Et je me complais dans cette nouvelle routine, j’y trouve mon équilibre et une raison de savourer la Vie, tout simplement. Épanouie, je pose le pied à terre, en sortant de ce lit, dans cette chambre, dans cette maison. Un geste tellement généreux de la part de mon jumeau de m’avoir offert un toit sur ma tête, me sortant ainsi de mon appartement minable dans le centre ville. Les finances reprenant progressivement des couleurs, j’envisage de déménager ailleurs mais je suis effrayée à l’idée de vexer mon jumeau. Je lui serais éternellement reconnaissante de m’avoir apporté un foyer et une sécurité dont je manquais cruellement quand je suis revenue en ville mais j’ai besoin de faire les choses seule. De maîtriser chaque aspect de ma nouvelle existence et d’en être profondément fière.

C’est même devenue un élément capital pour ma survie.

Après m’être rapidement préparé, je rejoins mon shop, au cœur d’une rue animée et commerçante de Monterey. Je salue mes quelques voisins avec qui j’ai sympathisé tout en sortant mon trousseau de clés de mon gigantesque sac à main chiné dans une des boutiques de seconde main du centre ville. Mais malheureusement, je n’ai pas besoin de déverrouiller la serrure.
Étant donné qu’elle est déjà fracturée.
Plissant des yeux, je me questionne sur ce détail loin d’être insignifiant. Poussant la porte, je découvre alors un spectacle qui me foudroie le cœur en l’espace d’une demi-seconde. Tout est sens dessus dessous: mon matériel de tatouage est au sol, les meubles ont été jetés par terre, mes croquis déchirés en des milliers de petits morceaux. Estomaquée, je reste perdue, debout au milieu de ce champ de bataille, tournant autour de moi-même, remarquant un élément de plus qui me fait réaliser l’impensable.
Sortant enfin de ma torpeur, j’attrape mon téléphone portable, appuie sur mon contact d’urgence et tombe sur sa messagerie. Je n’hésite pas à lui laisser ce message vocal qui enfonce le clou de cette triste réalité:

JEREMY?! JEREMY… IL FAUT QUE TU VIENNES! MON SALON… IL A ÉTÉ SACCAGÉ!

Je n’arrive pas à ajouter quoi que ce soit de plus, je laisse mon téléphone glisser le long de mon oreille, finissant à genoux face au désastre impossible à corriger.
Et inévitablement, je me mets à pleurer. Me faisant cette affreuse réflexion:
Qu’une fois de plus, tout s’écroule autour de moi…

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Tu es encore sur un petit nuage et tu as du mal à redescendre. Ça fait plus d’un mois que tu as dit oui à cette femme magnifique et que vous avez annoncé à vos proches la grande nouvelle. Bientôt, vous ne serez pas 3. Un mélange de votre amour grandit petit à petit dans le ventre de Azara et tu es tellement heureux de pouvoir créer la famille que tu as toujours voulu avoir. Tu n’as pas eu la chance de grandir avec deux parents et il est hors de question que le scénario se répète pour ce petit être qui grandit doucement dans le ventre d’Azara. Tout est parfait. Tout est parfait pour l’accueillir dans ce monde… Tu es marié est heureux, ta femme démarre petit à petit sa carrière et tu comptes faire en sorte qu’elle n’abandonne pas ses rêves pour élever cet enfant, professionnellement ça va… qu’est-ce qu’il pourrait arriver de pire ? C’est exactement ce que pensent tes proches, que tout va bien dans ta vie et que rien ne pouvait arriver de pire… Pourtant, s’ils savaient. Ta part d’ombre est bien présente depuis quelques mois maintenant, des mois que devienne longue, mais il est hors de question que tu arrêtes par peur qu’un malheur arrive. Ta femme, ta sœur, tes amis, tous ont été menacer et il est hors de question qu’il se passe un truc grave à cause de tes belles conneries… Franchement, quand tu as commencé ton premier combat, tu ne pensais pas qu’un jour ça finirait comme ça. Toi roulant aux beaux milieux de la nuit pour vendre cette marchandise que tu ne consonnes pas. Bien que tu ne sois pas accepté que ta femme en parle à ton meilleur ami qui travaille dans les stups, aujourd’hui, vous travaillez main dans la main pour démanteler ce putain de réseaux dont tu as les mains enchainer. Tu pensais faire ça correctement, tu contactes Avel pour ce sujet uniquement en appel Discord pendant vos parties, et même lors de ton mariage, tu n’as publié aucune photo de toi et de ton meilleur ami… Pourtant. Tu étais loin d’imaginer ce qu’il allait se passer…
Avec peu d’heures de sommeil, tu te réveilles pour te rendre à ton vrai travaille. Une douche froide pour bien-être réveillé, ta dose de caféine et avant de te prendre la porte pour sortir, tu donnes un doux baiser à Azara qui dort encore profondément.
Clé pour démarrer le moteur, au moment où tu vois un appel et un message sur ta messagerie, tu entends cette voix tremblante de ta sœur. Elle t’explique les faits et sans réfléchir, tu fais un demi-tour pour te rendre à son salon de tatouage. Dans ce genre de moment, tu ne réfléchis pas peu importe si tu ne te rends au travail ta jumelle, la prunelle de tes yeux à besoin de toi. Tu te gares juste devant son salon, sur une place handicapée, mais c’est uniquement parce que c’est une urgence. Tu pousses à peine la porte et tu restes planté comme un piqué en voyant l’ampleur des dégâts. Tu baisses les yeux avant de voir ta sœur appuyer contre un mur avec quelques-uns de ses croquis en mains. Tu te rapproches d’elle avant de te mettre à sa hauteur et de la prendre directement dans tes bras. « Je suis là, ma sœur. » D’une voix calme et pour la réconforter, tu lui donnes un baiser sur le haut de sa tête. « Tu… Tu as une idée de qui aurait pu te faire ça ? » Si tu savais que tout était de ta faute… « Tu as appelé les flics Andréa ? » Et si pour le moment, arrêter avec tes questions. Tu balayes la pièce du regard en « admirant » les dégâts pour essayer de trouver un moindre indice…

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Je n’arrive pas à pleurer. Pas encore. Mais les larmes ne sont pas loin de se fracasser contre mes joues. Je peux les sentir, prêtes à franchir la barrière de mes yeux clos. Je me balance, les bras entourant mes jambes recroquevillées contre ma poitrine, me demandant si je ne suis pas plongée dans un affreux cauchemar qui finira par connaître une fin différente. Telle une poupée désarticulée, je ne ressens rien, ne peut plus me débattre face à ce choc sans précédent. La seule chose dont je suis capable, c’est de réagir en découvrant la silhouette rassurante de mon frère jumeau. À la seconde où il pénètre dans mon salon ravagé, je soupire de soulagement et hurle, sans aucune contenance:

JEREMY! JEREMY…

Telle une petite enfant désolée, je me réfugie dans ses bras, pleurniche contre son torse. Nos cœurs battant à l’unisson, la faute à une naissance quasi simultanée qui s’est occupée de nous lier à tout jamais, je peux sentir mon angoisse se dissiper. Juste un peu. Le souffle toujours coupé, sous le choc du désastre qui s’étale sous nos yeux, je reprends ma respiration et réussis à articuler péniblement:

Non, je… Jeremy, je ne sais pas ce que cela signifie… Je… Je ne sais même pas si quelque chose m’a été volé! Je… Je ne sais pas, je…

Incapable de surmonter ma souffrance, je m’écroule de nouveau sur mon sofa, laisse de chaudes larmes inonder mes joues. Mon regard se pose sur chaque détail de ce massacre sans précédent et je tourne précipitamment la tête à l’écoute de la dernière question de mon frère, le regard étincelant:

La police…? Oui, excellente idée, il faut les avertir!

Ma soif de justice est intarissable depuis l’arrestation et le jugement de Jacob, mon ex futur mari qui s’avérait être un redoutable tueur en série. Je ne supporte plus qu’un crime demeure impuni, voilà pourquoi je me rue jusqu’à mon téléphone portable, abandonné sur le sol, aux pieds de mon jumeau. À ses côtés, rien ne me semble impossible.
Après la colère vient la raison… Oui, la police. Eux seront mettre la main sur l’infâme bandit qui a provoqué ce désastre.
Malgré le coup que je viens de recevoir en pleine poitrine, je refuse d’abdiquer. Je refuse d’accepter d’être mise à mal. Ce salon de tatouage est le symbole de ma nouvelle existence, de la nouvelle Andrea.
Hors de question que je me laisse abattre.
Je ne suis plus cette femme. Plus jamais je ne composerais avec la servitude.
Et que cet inconnu qui a osé s’en prendre à mon bijou craint ma fureur à venir. Elle promet d’être… apocalyptique!

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Dès que tu as entendu le message que ta sœur a laissé sur le répondeur, tu n’as pas cherché à comprendre que de la rejoindre. Il se passe quelque chose de grave et tu ne sais pas quoi, mais tu espères de toute ton âme qu’elle aille bien. Tu ignores encore, que tout ce qu’il s’est passé cette nuit-là est ta faute que le monde de ta sœur s’écroule, car tu es dans une histoire pas propre dont seules deux personnes de ton entourage sont au courant. Pour ta défense, il était hors de question que ta sœur soit mêlée à tout ça. Elle a vécu pas mal de chose difficile loin de toi et tu ne veux pas qu’elle découvre que de ton côté, tu as comblé son absence t’amusant dans les combats. Toute cette histoire est partie trop loin et ça, tu en as pris conscience de ça bien trop tard. Dès que tu trouves la première place de parking, tu rentres dans le salon et après avoir regardé le salon vite fait, tu retrouves ta sœur à terre et totalement paniqué. Sans plus attendre, tu la prends dans tes bras et tu essaies tant bien que mal de la calmer. « Tu n’es plus seule, je suis là, Andréa. » Tu attrapes doucement son visage pour plonger ton regard dans le sien. « Tu n'es pas blessé, tout va bien ? » Tu t’inquiètes pour ta moitié avant de t’inquiéter pour le reste. Tu la prends à nouveau contre toi avant de lui poser des questions. Tu veux savoir ce qu’il sait passer avant d’agir et de trouver une solution. « Ok, ok, déjà, essaie de te calmer, on fera l’inventaire de ton matériel après. » Tu lui caresses le dos doucement pour essayer de la calmer. Tu laisses passer quelques secondes avant de lui demander si elle appelait la police. Tu lui tends ton téléphone pour qu’elle puisse appeler la police. Lui offrant un petit sourire pour l’encourager à la faire. En attendant, tu fais le tour du propriétaire et tu finis par voir ce mot sur feuille plier en deux. « PREMIER AVERTISEMENT HOPKINS » Ton cœur s’arrête quelques secondes. Tu sais ce que ce message caché veut dire et il te fait froid dans le dos. « Andrea, raccroche le téléphone. » Elle te regarde intriguer. Tu as le mot en mains pourtant, tu fais demi-tour pour lui prendre le téléphone et raccrocher avant qu’on ne puisse répondre. « Je sais qui appeler ! » Tu ne lui dis pas grand-chose. Avel étant en vacances à st Tropez, tu finis par appeler le responsable de l’enquête le temps que ton ami profite de tes vacances. Tu t’éloignes un peu de ta sœur, tu parles doucement, mais tu n’es pas vraiment bête, ta sœur doit écouter la conversation. Tu emploies des mots comme « Ils se sont pris à ma sœur »… « Ils sont au courant » et j’en passe. Il te confirme son arrivé avant de te demander d’être discret. Tu raccroches le téléphone avant de soupirer. « Écoute, euh Andréa… Il faut qu’on y aille… Toute suite. » Tu n’as pas envie qu’ils découvrent la vérité et qu’ils te trouvent dans la même pièce que les renseignements leurs doutes seront vrai. « Fais-moi confiance Andréa. »

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

C’est un désastre sans nom et pas seulement sur le plan matériel.

Tremblante, je découvre, à chaque coup d'œil, une nouvelle occasion de geindre. Mes yeux se remplissant à la vitesse grand V de larmes impossibles à retenir, je ne peux m’empêcher d’attraper des morceaux déchirés de dessins, du bout des doigts, vestiges d’une époque où je pensais être heureuse. Construire un nouveau départ ici, à Monterey, semblait impossible et pourtant, cela fait maintenant des mois que je pensais avoir réussi cet exploit. Tout recommencer, vivre de ma passion, fonder ce salon de tatouage à mon image et qui commençait à obtenir une clientèle régulière, qui me fournissait des revenus plus que corrects. Les fondations d’une nouvelle existence semblaient si solides. Mais il semblerait que je n’ai pas le droit d’être heureuse. C’est un privilège réservé aux autres mortels, et je suis une damnée dans cet Enfer qui me poursuit encore et toujours.
Ce qui m’étonne encore plus que cet accident dans mon quotidien pourtant très heureux ces derniers temps, c’est l’attitude de mon jumeau. Certes, il se rue à mon secours, me rassure et ses caresses me réconfortent. Je suis si paniquée, tel un animal qui découvre que son refuge a été visité par un prédateur. Je n’ai aucune idée de ce qu’il s’est passé, je crois tout d’abord à un cambriolage mais je ne pense pas qu’il manque quelque chose. Mais je suis bien trop sous le choc, ma perception est sans doute faussée. Rapidement, je réalise que joindre la police est l’étape suivante, elle est nécessaire et je suis encouragée par mon frère. Qui, quelques instants plus tard, me force à raccrocher et m’apprends qu’il a la situation en main. Rien de tout ceci n’est normal. Jeremy semble si… calme. Et raisonné. Il s’écarte, quelques instants, afin de passer un coup de fil. Intriguée, je me redresse et, sans le vouloir, intercepte des bribes de sa conversation. Et je ne comprends pas grand chose, en réalité. Quand il m’affirme, ensuite, que nous devons quitter le salon, je ne comprends pas. Et la police? Ils doivent venir constater les faits, une plainte doit être déposée et… Pourquoi donc mon frère souhaite-il qu’on s’en aille aussi rapidement?
Et puis, tandis qu’il m’attrape le bras afin de me presser vers la sortie, je réagis telle une marionnette et marmonne, faiblement:

Jeremy… qu’est ce qu’il se passe…?

Et puis, une colère s’insinue dans ma poitrine. Elle gronde subitement, je ne sais même pas comment j’ai pu la faire taire aussi longtemps. C’est quand j’aperçois une de mes plus belles créations réduite en lambeaux sur le sol boueux que cette haine franchit la barrière de mes lèvres et que je répète, sur un tout autre ton:

QU’EST CE QU’IL SE PASSE, DIS LE MOI!

Hausser le ton n’est pas une attitude habituelle, et pourtant, je l’adopte. Je tire mon poignet de l’emprise de Jeremy, je fronce des sourcils et surtout, mon regard est gagné par une farouche détermination. J’exige des explications, j’en ai besoin et je ne bougerais pas d’ici avant d’en avoir obtenu de la part de mon frère jumeau.
C’est mon droit, en tant que femme libre. Ce statut pour lequel je me battrais envers et contre tout, désormais…

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Tu as ce bout de papier entre tes mains. Les mots inscrits dessus, raisonnent comme un écho au milieu des montagnes. Tu as une boule au ventre qui se forme et tu as l’impression d’avoir du mal à avaler ta salive. En fait, le message est clair et tout ce qui s’est passé dans ce salon est entièrement ta faute. Ta sœur, la prunelle de tes yeux à mit toute son âme pour créer cet endroit et en claquement de doigts cette pièce ne ressemble plus à ce qu’elle était. Comment lui dire ? Il faut vraiment que tu lui dises ? Ta part d’ombre est en train de prendre trop d’ampleur. Ça suffit, tu dois mettre fin à tout ça. En voyant le résultat de cette nuit, tu comprends mieux qu’ils n’ont aucune pitié. Qu’est-ce qu’il serait passé si Andrea avait été présent ? Elle se serait retrouvée dans un lit d’hôpital ? Elle aurait été épargnée par leurs violences ? Tu es dos à elle quelques minutes, mais tu restes bloquer dans toutes ses questions. Tu finis par revenir à la réalité. Il faut que tu agisses vite et tu ne veux pas prendre de risque. Et a peine, elle a le temps de composer le numéro que tu décides de prendre les choses en main. En quelques clics, tu appelles les renseignements et tu leur expliques la situation. Tu essaies de rester calme, car tu ne veux pas affoler ta sœur et qu’elle te pose dix mille questions. Tu ne veux pas savoir ce que va être me second avertissement ? Tu as bien trop joué avec eux et tu veux arrêter tout. La sécurité de tes proches est mise en jeu. Tu pensais avoir un coup d’avance sur eux, tu te faisais passer pour un jeune homme malin et finalement, ils t’ont rapidement remis les pieds sur terre. Les consignes aux téléphones sont claires et tu coupes court a la conversation avant de mettre ton téléphone dans ta poche et de saisir la main de ta sœur. Tu ne veux pas que vous soyez présent quand l’équipe arrivera. Tu avances vers la sortir, tenant ta sœur part le bras. Tu sais qu’elle va demander des explications, mais là, ce n’est pas le moment de lui en donnant. Mais ta jumelle en a décidé autrement. Tu te retournes immédiatement avant de soupirer. « Je t’expliquerais quand on sera loin d’ici c’est promis ! » Tu essaies de garder ton calme bien que ton visage soit un peu paniqué. Tu veux qu’elle t’écoute et qu’elle te fasse confiance, sans doute, une dernière fois. Tu sais très bien que tu vas baisser dans son estime quand tu lui diras toute la vérité. Mais tu l’entends et son côté têtu à ne pas vouloir bouger commence sérieusement à t’agacer. Tout en fronçant les sourcils… ET puis en pensant tout haut, tu balances assez secs et presque énerver par toi-même. « TOUT ÇA C’EST MA FAUTE ! OK ? » Tu plonges ton regard fermé. « Et là, le plus important, c’est qu’on s’en aille d’ici sinon, ils vont comprendre que j’ai essayé de les doubler Andréa ! ON S’EN VA ! » Tu sais qu’elle ne va pas totalement comprendre, mais tu lui expliqueras ce qu’il se passe, mais pas ici !

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

C’est un cauchemar, comme j’en connais depuis quasiment toute mon existence.
Je suis abonnée à la malchance, aux événements tragiques, à ce que tout ce qui m’arrive dans la vie se mette à dérailler complètement. Je m’y suis habituée depuis le temps mais la douleur, elle, ne s’estompe jamais vraiment. Si je devais dresser la liste de toutes les fâcheuses choses qui me sont tombées sur le coin du nez, elle serait bien plus longue que la normale: décès de ma mère à ma naissance, perte de mon père le jour de mes dix huits ans, coup de foudre qui s’est avéré être le pire des pièges, un amour toxique dont j’ai réussi à me défaire que depuis quelques années, annonce que Jacob était en réalité un affreux tueur en série, tenir le rôle de témoin à son accablant procès… Et j’en passe. Ce Malheur, j’aimerais m’en défaire, croire que je n’en suis pas à son origine, qu’il ne me colle pas à la peau. Mais alors que je pensais que tout serait derrière moi, enfin, la foudre frappe une fois de plus. Droit sur mon cœur.

J’aimerais pleurer mais j’en suis incapable. Je suis pétrifiée par ma colère qui prend le dessus, qui s’adresse à Jeremy. Car il est présent comme soutien ou un coupable évident que j’aimerais juste ne pas remarquer? Tout s’embrouille dans mon esprit et tandis que je lutte pour rester planté là, observant encore et toujours le saccage de mon salon adoré, mon frère jumeau se fait pressant et n’hésite pas à hausser le ton, réponse sensée face à mon énervement que je n’arrive pas à canaliser. Je perds complètement mes moyens et mon attitude semble rebondir, se propager en écho face à celle de Jeremy qui m’explique qu’il est fautif.
Non… Tout mais pas ça. Il est le seul homme que j’ai certes déçu mais en qui je fondais une confiance aveugle et éternelle. Ce frère envers qui j’ai dû me faire pardonner une longue et déplorable absence… Mais qui ne peut pas me vouloir de mal. Qui ne peut pas être responsable de… ce carnage! Désabusée, je sursaute tandis que Jeremy rétorque, d’une voix puissante et je finis par abdiquer, le suivant comme une petite fille docile, m’engouffrant dans sa voiture tandis qu’il démarre en trombe, loin de mon salon que je regarde s’éloigner, plaquant la paume de ma main contre la vitre. Ayant la sensation que mon âme se déchire en deux, je pousse un cri, une supplication et je demande, bougonne:

Jeremy Hopkins… Je veux des explications. J’en appelle à la loi suprême des jumeaux!

M’enfonçant dans mon siège, je croise les bras sur ma poitrine, agissant comme une sale gosse que je n’ai jamais réellement été. Mon regard est noir, mon humeur massacrante mais je retrouve un semblant de raison tout en demandant, d’une voix plus douce:

Je suis sérieuse, Jeremy… Qu’est ce qu’il se passe? Qui sont-ils? Tu connais ceux qui ont saccagé mon salon…?

Je suis effrayée par la réponse qu’il pourrait m’offrir mais à la fois, j’en ai besoin. J’ai trop longtemps été plongé dans l’ignorance, cette situation ne peut continuer. Je dois savoir, je dois avancer, comprendre, souffrir pour ensuite renaître de mes cendres.
Comme un éternel cycle qui me suit depuis notre naissance…

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Tout ça, c’est ta faute. Cette phrase qui résonne dans ta tête comme écho perdu à travers les montagnes. Tu pensais que tu gérais la situation, mais à croire que tu les sous-estimées. Alors que tu entends parler ta sœur, tu es prise d’une crise de panique. Ton cœur accélère et tu n’entends que ça, mais il faut que tu agisses et au plus vite. Tu ne sais pas ce qu’il peut se passer si vous restez une minute de plus. Quand tu reprends tes esprits, tu ne cherches pas à comprendre, tu sais que la troupe arrive et il est hors de question que tu te retrouves dans la même pièce qu’eux. Tu es aussi têtu que ta sœur et il fallait que tu hausses la voix pour qu’elle finisse par accepter de te suivre. À peine rentré dans la voiture, que tu n’attends pas plus longtemps pour démarrer et partir. Tu l’entends parler, mais tu ne réponds pas ton visage est fermé et tu es concentré sur la route. Tu regardes chaque rétro pour t’assurer que personne ne vous suive, tu changes de direction plus d’une fois. « Oui, je sais qui a fait ça Andrea. Et c’est un message qu’on a voulu m’envoyer. » Tu as honte, tu ne peux pas regarder sœur qui a construit cette entreprise et lui dire ses mots. Tu t’en veux de ce qu’il s’est passé cette nuit. Tu te remémores ses derniers 24 heures, mais tu as eu l’impression d’avoir tout fait comme il faut. « Je travaille pour eux… je vends de la … Bref, tu as compris. » On va éviter d’expliquer ton passé, elle n’a pas besoin de savoir comment tu t’as retrouvé dans cette merde. « Et je travaille également pour les renseignements, je suis ce qu’on appelle une taupe. » Il faut que tu t’arrêtes, tu ne peux pas lui dire ça et ne rien faire d’autres. Tu sais déjà qu’elle va péter un câble. Tu ne dis rien les quelques minutes qui suivent, car tu cherches un endroit pour garer la voiture. Tu finis par rentré dans un parking souterrain et tu te gares. Tu mets le frein à main avant de soupirer. Maintenant, tu dois lui donner de vraies explications, mais tu as peur d’affronter le regard de ta sœur. Tu prends une grande inspiration. « J’ai commencé par des combats illégaux, la première fois, j’ai pu m’en sortir, mais la deuxième fois, j’étais sous contrat. Azara était mêlé à tout ça et j’ai arrêté, seulement, ils m’ont mis sur le dos un paquet de trucs, mais j’ai pu m’en sortir parce que cette enquête est tombée dans les mains d’Avel.. J’ai donné quelques noms et finalement, ils m’ont fait payer tout ça… Ils m’ont menacé, toi, Azara et certains de mes proches si je ne vendais pour lui… Crois-moi, je n'ai pas hésité une seule seconde pour vous protégez. » Tu n’es pas bien et ça se lit dans ton regard. « Ils ont saccagé ton salon, car ils ont du découvert que je jouais double jeu avec eux. Je… » Tu baisses la tête. « Je suis désolé, Andrea, je voulais pas que ça en arrive là ! »

Tout est si fragile. ; ― / Début de l'été, Monterey, CA.

Construire. Pour ensuite admirer les ruines de ce dont j’ai tant rêvé, quand j’étais prisonnière dans la prison d’amour promise par Jacob. Ce salon représente la porte de sortie qui était imaginaire autrefois mais que j’ai réussi à concrétiser, par un nombre incalculable de miracles. Il était mon espoir qu’une existence normale soit enfin à ma portée, que mon quotidien pourrait enfin côtoyer cette perfection que j’estime avoir mérité avec tant d’années de souffrance et de solitude.
Le Paradis après avoir connu les Enfers.

Mais ce songe a fini par s’envoler, détruit par des vandales qui n’ont sans doute pas réalisé le mal qu’ils avaient commis. Ou plutôt, avaient-ils agi exactement dans ce but…? Ce méfait est loin d’être gratuit, j’en apprends plus sur son origine auprès de Jeremy qui m’avoue sa vérité tout en conduisant avec autant de prudence que de méfiance envers de potentiels chauffards à notre fuite. Bégayant quelques mots, loin d’être rassurée, je tente de rassembler les pièces du puzzle en demandant:

Qu’on a voulu t’envoyer… À toi…? Pourquoi…?

Et ma voix qui s’éteint au fur et à mesure que j’écoute Jeremy m’expliquer sa vérité. Qui est désormais la mienne. Car nos destins n’ont jamais cessé d’être liés. Car c’est ça, d’être jumeaux, tout simplement. Vivre l’existence de l’autre, endosser les responsabilités communes, comme un contrat de mariage. Comme une évidence, si naturelle, la beauté des liens du sang, le fondement de notre famille. Ou bien, tout ce qu’il en reste.
Enfermée dans cette voiture, je suis forcée d’apprendre la vérité sur ce traumatisme si frais, que je viens de prendre en plein visage, tel un fracas dans mes certitudes, un grain de sable dans la machine que je pensais si bien huilée. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le choc est plus que violent. Hébétée, je réalise ce que mon frère jumeau vient de me confier et répète, sous le choc:

Une taupe? Dans le milieu de la drogue, si je comprends bien? Jeremy… Jeremy, je…

Je perds complètement pied, je sens que le sol s’écroule et que ma chute est impossible à éviter. Je remarque à peine que nous venons de nous arrêter dans un parking souterrain, du genre angoissant au possible dans un recoin de Monterey très peu fréquenté. La peur battant fortement dans mes tempes, je finis par retrouver un semblant de courage afin de définitivement enfoncer le clou:

Mais… Jeremy… Mon salon… Et toi… Tu… Dis moi que ce n’est pas possible. Qu’ils ne se sont pas vengés de toi… À travers moi…

Et pourtant, Andrea, c’est la vérité dont vient de t’informer ton frère. La seule qui compte, l’explication nécessaire afin que tu puisses avaler ce triste sort qui t’es réservé: tout est fichu. Tes efforts réduits à néant, ton énergie gaspillée de la plus atroce des manières.
Et soudain, une bouffée de haine qui engourdit ma poitrine et me force à m’époumoner, telle une véritable cinglée, rôle que je n’ai jamais occupé de toute ma vie:

LAISSE MOI SORTIR! LAISSE MOI SORTIR, PUTAIN!

Jurer, loin d’être dans mes habitudes. Comme m’énerver de la sorte, hurlant à la mort afin de quitter ce véhicule au sein duquel je n’arrive plus à respirer correctement. Mais je ressens le besoin de m’en aller, d’entretenir une distance raisonnable avec cette vérité impossible à absorber. Je manque d’air, je panique, je cligne frénétiquement des yeux et je lutte contre le besoin de m’écrouler sur le bitum.
Mais je reste forte, le dos droit et je m’éloigne.
Je finis par repartir, je ne sais où, je ne sais comment.
Tout ce qui m’importe, c’est de m’éloigner de mon frère, de ce qu’il représente, de cette aigreur qu’il provoque dans ma gorge.
Alors que quelques heures auparavant, je pensais qu’il était le seul homme qui ne me trahirait jamais…