a life, a story

Assise sur une chaise, l’arrière de la tête posée contre le mur et les yeux fermés, Blake Rivers se laisse bercer par du Peyton Parrish dans ses oreilles, via son casque. Sa main gauche se pose sur ses nombreux colliers. Certains sont plus au ras du cou, tandis que d’autres sont plus longs. Ses doigts s’amusent à jouer avec l’un des pendentifs. Un petit fermoir ovale qui comprend une photo de ses parents adoptifs et de l’autre, ses frères adoptifs. Perdue dans ses pensées, la belle se remémore certains moments de sa vie.

❝ L’enfance malheureuse imprime son sceau sur toute la vie ❞ proverbe suisse

Âgée de quatre ans, une petite fille aux longs cheveux châtains et au regarde de jade, joue avec des petites voitures. Jouets pour les garçons, vous dites ? La petite fille se contentera de vous hausser les épaules. Elle s’amuse nettement plus à faire rouler les voitures sur le vieux tapis plein du petit salon, plutôt que de donner une fausse soupe à une poupée en plastique. Puis ces jeux venaient de la voisine dont le fils devenait doucement un jeune adolescent.

Le bruit assourdissant de la sonnette de la porte d’entrée vient taper dans ses tympans. Son regard se pose sur la porte, tandis que sa mère sort de l’unique chambre de la petite maison vieillotte. Celle-ci était vêtue d’une lingerie rouge, légèrement cachée par un peignoir satiné de la même couleur. Bien qu’elle ne soit pas plus haute que trois pommes, Blake savait déjà ce que ça voulait dire. Maman a un client. Elle la voit se frotter le nez. Maman vient de prendre son « repas », un rail de coke.

- Blake, ton casque, et tu ne me déranges pas. Compris ? Lance la matriarche d’une voix froide et sans douceur.

Sans lui répondre, la gamine part prendre son gros casque noir, qu’elle branche à la télé avant d’aller s’asseoir dans le canapé, avec sa peluche. Un cheval noir qu’elle serre contre elle.

Fiona est tombée enceinte à l’âge de dix-huit ans. Ayant fait un déni de grossesse, à moins qu'elle ait été trop défoncée que pour s'en rendre compte, elle a dépassé le délai légal pour avorter. Paumée, haïssant déjà l’être qui nait en elle, elle s’est plongée davantage dans la drogue et l’alcool, sans se soucier de la santé de cet enfant qu’elle portait. Malgré tout, elle est parvenue à se trouver un petit boulot de serveuse dans un diner au bord d’une autoroute. Vivant chez une amie qui l’a hébergé, celle-ci l’a aidé à accoucher quand le moment fut venu. Dès son apparition, le lien mère-fille ne s’est jamais fait. Fiona n’a jamais voulu la prendre dans ses bras. Blake, c’est le prénom que l’amie de sa mère lui a donné. Une amie qui a fini par quitter la ville, pour une raison, dont Blake n’a jamais su. Dès son plus jeune âge, sa mère n’a cessé de lui reprocher d’avoir bousillé sa vie. Encore aujourd’hui, la brune se demande pourquoi elle ne l’a pas abandonné. Une interrogation, qui restera sans réponse.

Virée du diner après que son patron avait découvert qu’elle se droguait et faisait le tapin durant ses heures de services avec certains routiers, Fiona s’est totalement dévouée à vendre son corps pour quelques billets. Non pas pour nourrir sa progéniture, mais pour acheter ses doses. Si par chance, il restait un peu d’argent, alors à ce moment-là, elle achetait de la nourriture. Heureusement que Blake avait l’école, ça lui permettait de se nourrir grâce à ses amis.

Rapidement, la jeune enfant a compris qu’elle devait doubler d’intelligence et se blinder, si elle voulait survivre dans cette vie. Une vie dont aucun enfant ne devrait subir.

Fiona n’a aucune patience avec son enfant. Si sa fille se mettait à lui répondre ou seulement à faire trop de bruits, elle l’attrapait par les cheveux afin de l’enfermer dans un placard.

- Voilà ce que l’ont fait aux méchantes petites filles qui n’écoutent rien ! gueule-t-elle derrière la porte, avant d’aller se servir un grand verre de vodka et préparer de quoi, se piquer.
- MAMAAAN ! S’IL TE PLAIT ! JE SERAIS SAGE ! PROMIIIS ! supplie la gamine, en pleure.

Ce fut vain.

Après trois séjours au placard, Blake a compris que pleurer et supplier ne changerait rien. Obligée de se blinder, de grandir plus rapidement que les enfants de son âge, la fillette avait caché son livre préféré, sa peluche, une boite de biscuits, ainsi qu’une lampe de poche. Elle avait tout mis dans une petite boite cachée derrière les chaussures. Depuis, la punition du placard, elle s’en fichait bien. Elle prenait sa lampe de poche et elle regardait les images de son livre, tout en mangeant des biscuits. Elle aurait pu s’assagir, mais on n’enferme pas un lion dans une cage, c’est contre nature. Déjà petite, elle savait qu’elle ne voulait pas qu’on la change. Enfant de caractère, il était hors de question que sa mère parvienne à la rendre docile.

❝ Parfois, la vie nous permet de croiser le chemin de personnes formidables. Puis, il suffit d’échanger quelques mots pour comprendre qu’elles ne sont pas comme les autres et qu’elles nous seront vite indispensables. ❞ inconnu(e)

Âgée tout juste de six ans, durant un été caniculaire, la jeune enfant est assoupie dans la vieille voiture de sa mère. Une odeur de tabac froid vient titiller ses narines, ce qui finit par la réveiller. Ses petits poings viennent à frotter ses yeux encore endormis avant d’ouvrir ses yeux. Le soleil passant par les vitres de la vieille voiture de Fiona, l’éblouit au passage, mais lui donne excessivement chaud. Elle se sent à la fois collante et en sueur. Vraiment, elle a très chaud. Elle a soif aussi. Elle tente en vain de trouver une petite bouteille d’eau quelque part, mais rien. Sa main se glisse sur son front humide, avant de la frotter sur sa robe bleu ciel.

- Maman ? appelle-t-elle en regardant par la vitre de la portière arrière de gauche, puis celle de droite.

Elle ne la voit pas. Tout ce qu’elle perçoit c’est une rue déserte. Fiona était partie voir son dealeur pour se payer sa dose. Sans doute était-elle dans un coin, occupée à se piquer. Encore une fois, sans se soucier de sa gamine qui se trouvait dans un habitacle, en plein soleil, sous quarante degrés.

Ayant à la fois un mal de tête, et très soif, l’enfant passe à l’avant, afin de faire klaxonner la voiture. Aucun bruit ne sort. Vraiment bonne pour la casse, cette voiture. Soufflant d’agacement, elle tente d’ouvrir la portière. Yes ! Elle s’ouvre. Sans doute, que dans la précipitation d’aller rencontrer son dealeur, elle a oublié de fermer la voiture. Blake sort rapidement de la voiture. Elle ne se sentait vraiment pas bien, le manque de liquide dans sa gorge, fit que ça la lui grattait et l’énervait en même temps. Sale petit caractère, je vous disais.

Ne sachant pas si elle devait partir à gauche ou droite, elle décide de prendre le chemin qui mettrait le rayonnement du soleil dans son dos. Ça lui sera bien plus agréable de marcher ainsi, et non pas de l’avoir dans les yeux. Au bout d’une vingtaine de minutes de marches, la petite brune tombe sur la terrasse d’un café. Beaucoup de personnes rient, mangent et surtout, boivent. Elle passe sa langue sur ses lèvres, tellement que ces verres lui donnent envie de glisser ses petites lèvres sur le bord afin de laisser le liquide s’emparer de sa gorge et s’hydrater. Bon, à elle, de doubler d’intelligence pour qu’une âme charitable lui offre sa boisson.

À croire que déjà à cet âge-là, elle aimait la complication. Au lieu de se rendre vers un couple ou bien, à la table de deux filles qui semblaient être des amies ou des sœurs, elle se dirige vers la table d’une dizaine de personnes. Elle frotte le bas de sa robe, avant de prendre son petit air de chien battu, laissant les larmes montées à ses yeux. Comédienne et petite manipulatrice de talent. Sachant que les femmes sont plus prédisposées à être touchées par une jeune enfant, elle se dirige vers l’une des jeunes femmes, dont un jeune homme a le bras posé sur le dossier de sa chaise.

- Excusez-moi… Je ne trouve plus ma maman et j’ai très soif. Je me suis endormie dans la voiture où il faisait très chaud. Est-ce que je pourrais boire une petite gorgée dans votre verre, s’il vous plait ? demande-t-elle en sanglotant et serrant le bord de sa robe, avec une timidité dont elle feint à la perfection.

Six ans et déjà un maître dans l’art de la manipulation. Elle ira loin la p’tite. La preuve, la jeune femme lui a lancé un regard si doux, que Blake en a réellement été retourné. Rare ont été les fois où elle eut droit à un regard aussi tendre, et bienveillant, à son égard.

- Mais bien sûr ma puce. Viens, installe toi, ici. Dit-elle pendant que celui qui semble être son amoureux attrape une chaise pour la glisser entre eux. Tu es brûlante. Tu es restée dans une voiture, tu dis ? En plein soleil ?! demande-t-elle choquée, tout en lui donnant son thé glacé.

Blake se met à hocher la tête, tout en se désaltérant avec plaisir. D’ailleurs, ça se voyait à son regard, que ça lui faisait du bien. Elle les entend discuter entre adultes. Mais, la petite fille n’y prête pas attention, vidant le contenu du verre. Oups.

- Pardon madame, j’ai fini votre verre… dit-elle faussement gênée.
- Ne t’inquiète pas, on va en recommander. Je m’appelle Perséphone, mais tu peux m’appeler Persée.
- Je pense qu’elle ne s’inquiète pas vraiment. Lance la voix grave du jeune homme, assis de l’autre côté de la fillette. Je pense que c’est une excellente comédienne. Regarde comment elle se sent à son aise parmi nous, alors que nous sommes nombreux. Elle est partie loin, la fillette timide, hm ? lance-t-il, avec un petit sourire amusé.

McAvoy lève le regard vers le monsieur, avant d’adresser un petit sourire malicieux sur ses lèvres, faisant rire les personnes autour de la table.

- Tu ne manques pas de ressources. Tu veux une glace ?
- Oh oui ! Au chocolat, avec de la chantilly et des pépites de chocolat ! S’il vous plait, monsieur ! demande-t-elle avec une pointe d’excitation dans la voix et le regard pétillant de bonheur.

Pour elle, ce genre de denrée est rarissime. Ce n’est que quand elle est chez des copines ou des copains, qu’elle a une chance d’en manger. Décidément, ces inconnus lui semblent très gentils. Elle se sent bien parmi eux, et autant dire, qu’elle n’a aucune envie de partir.

- Killian, ça suffira. Dit-il en lui faisant un petit clin d’œil.

Pendant qu’elle dévorait sa glace avec appétit, Blake répondit à toutes les questions. Son nom, son âge, comment est-elle sortie de la voiture, où pense-t-elle que se trouve sa mère… Au bout d’une heure, il a été décidé que le couple allait tenter de la ramener chez elle. Sa mère devait se faire un sang d’encre pour elle.

Malgré son jeune âge, Blake détient un sens de l’orientation hors pair. À croire que les rues de Monterey n’ont plus aucun secret pour elle. Il faut croire qu’elle a une excellente mémoire visuelle. Ils s’étaient arrêté où la voiture était garée, mais celle-ci avait disparu. Les deux jeunes gens se sont regardés, trouvant étrange que la mère n’ait pas cherché sa fille. C’est ainsi qu’ils sont arrivés devant la vieille bâtisse. Killian se met à frapper à la porte. Personne ne répond. Il sonne. Personne.

Blake se dirige vers un pot de fleurs qu’elle soulève pour faire apparaitre une clé, avant d’aller ouvrir la porte d’entrée. Débrouillarde, la gamine, pense Killian. Une fois entrés, ils sont directement dans le salon. Fiona est allongée dans le canapé, une aiguille est posée sur la table. Elle est encore défoncée.

- Blake, ta maman est toujours dans cet état ? demande Persée.
- Souvent. Sauf quand elle va dans la chambre avec des messieurs. Dit-elle en haussant les épaules avant de se diriger vers sa mère. Maman…Maman, je suis là. Dit-elle en posant sa main sur son épaule pour la secouer.

Malheureusement, elle se fait repousser violemment par celle-ci, avant de se retourner. L’enfant lance un regard vers Persée et Killian, avant de baisser le regard. Les deux jeunes gens s’isolent brièvement. Il ne faut pas plus de deux minutes pour que Blake les entende dire de préparer un sac avec ses jouets. Qu'elle n'en fut pas sa surprise. Les Rivers ont décidé d’embarquer la fillette avec eux.

Voir cette maison ressembler à un taudis, de la drogue et une aiguille trainés sur la table du salon, des faits de violence envers l’enfant et de plus, ils ont remarqué que la petite brune n’a même pas de chambre à elle, dormant dans un lit posé dans un coin. La chambre appartenant à sa mère pour recevoir ses clients. Persée et Killian n’ont pu se résoudre à la laisser ici. Il faut dire qu’ils sont tombés sous la bouille ravageuse de cette enfant et son côté malicieux les a fait fondre. Killian est resté jusqu’au réveille de la matriarche, qui totalement à l’ouest, elle ne s’était même pas aperçue de l’absence de sa fille. Ne pouvant adopter l’enfant de façon légale, Fiona acceptait de ne plus avoir de contacte avec Blake, contre une grosse somme d’argent. Je peux vous dire qu’elle n’a pas hésité une seule seconde. C’est ainsi que Blake McAvoy est devenu Blake Rivers.

❝ L’adolescence n’est-elle pas une merveille crise de folie qu’il ne faut pas laisser passer sans trancher dans le vif de ses sensations. ❞ Dominique Blondeau

Seize ans à ce jour. Dix années qu’elle vient de passer avec sa nouvelle famille. Génitrice complètement à la ramasse, fillette esseulée et transparente, personne ne s’est rendu compte qu’elle n’était plus sous la garde de Fiona. Ce n’est pas Blake qui va s’en plaindre. Ça fait dix ans qu’elle a l’impression de vivre et de se sentir aimer. Sa nouvelle famille est composée d’une dizaine de personnes, à ce jour. Certains sont liés par le sang, d’autres par le cœur. Peu importe, le plus important c’est qu’ils se considèrent comme une seule et même famille. En revanche, sa famille « adoptive » est quant à elle composée de Persée et de Killian en tant que jeune parent, le ciment de cette bande. Mais également de deux frangins. L’un qui a son âge, environ, et l’autre qui se trouve plus jeune de quelques années. Des frangins qui sont les prunelles de ses yeux. En fait, chaque membre de cette famille hors du commun a une place importante dans sa vie. Elle pourrait se damner pour eux.

Ce qui les relie, c’est le goût du risque et de l’adrénaline. Dingues de voitures et de courses de rue, ils en ont fait leur gagne-pain. Ils leur arrivent de se rendre dans des états voisins afin d’attaquer certains camions. Certains qui transportent du pétrole, d’autres des objets à revendre… Tout ce qui peut finalement, leur rapporter de l’argent. Loin d’être dans la légalité, ils ne sont pas non plus les criminels les plus dangereux. L’utilisation de leurs armes n’est effective que lorsque leurs vies sont menacées. Sinon, elles restent bien au chaud dans leurs étuis.

C’est dans ce cadre que la demoiselle s’est construit et qu’elle est devenue celle qu’elle est aujourd’hui. Une famille qui lui donne beaucoup d’amour, mais qui lui montre les joies d’être en dehors de lois. C’est comme ça qu’avec son frère, ils ont décidé de s’amuser. Elle est parvenue à voler une Lamborghini en chipotant à quelques fils pour éviter de déclencher l’alarme et la mettre en route. Blake s’installe côté passager, pendant que lui prend la place du conducteur. Ils éclatent de rire, il ne se soucie pas de la limite de vitesse. Il est trois heures du mat’ et ils sont seuls sur les routes de Monterey. Enfin, jusqu’à ce qu’un renard traverse la route et que Blake lui crie de faire attention. Par chance, ils avaient déjà un peu ralenti au préalable mais ils ont fini contre un arbre.

- Casse-toi. Lance Blake.
- Attends, quoi ?! T’es ouf ! C’est moi qui…
- Maëlan. T’as déjà un casier, les flics ne vont pas te louper. Alors on va descendre de cette bagnole et je vais prendre ta place. Toi, tu rentres. C’était mon idée de faire ça. Dit-elle en parvenant à se détacher pour quitter, tant bien que mal, la voiture afin de prendre la place de son frère.
- Je ne peux pas ! J’suis pas un lâche, merde !

Rivers lève les yeux au ciel avant de s’approcher de lui. Sa main se pose sur son front qui saigne avant de les poser sur ses joues et de plonger son regard dans le sien.

- T’es pas un lâche. Mais moi, je risque quoi ? Un centre pour jeunes délinquants ? C’est bon, j’ai vécu pire. Toi, ils pourraient vouloir en faire un exemple. Les parents et surtout moi, on ne le supportera pas. Je t’en supplie, fais-le pour moi. Casse-toi. Tout ira bien. J’te promets.

Elle lui fait un bisou sur la joue avant de le pousser plus loin pour l’inciter à partir. Les sirènes de la police et de l’ambulance se font entendre. Maëlan sait très bien à quel point sa frangine peut être butée. Il abdique et il finit par partir. La brunette s’approche alors de la portière du conducteur sans pour autant entrer dedans. Ça ne servirait à rien de toute façon. Hormis une douleur à la poitrine causée par la ceinture et quelques hématomes, elle s’en sort plutôt bien. Ils ont vraiment eu une bonne étoile au-dessus de leurs têtes.

Au procès de la lycéenne, elle écope de trois mois dans un centre de détention pour mineurs. Pensez-vous que Blake craignait ce verdict ? Absolument pas. Trois mois, ça passera vite et elle compte bien transformer cette « punition » en petit moment agréable. Chose dont elle réussit finalement très bien.
Bien que les premiers jours, quelques fortes têtes ont tenter de la mettre au pas et qu’elle baisse les yeux quand elle se déplace, Rivers a rapidement fait comprendre qui elle était. Il ne faut pas se méfier à sa p’tite gueule d’ange. Après une bagarre avec une fille et être passé à deux millimètres du pouce d’un jeune caïd, avec le couteau à beurre du repas du midi, les jeunes ont vite compris qu’il ne faudrait pas trop se frotter à elle. S’en suit trois mois de pure folie. Sa tchatche, son sourire, son répondant piquant et son humour, lui ont permis de se faire quelques amis dans ce lieu. Même parmi les matons, certains l’appréciaient, bien qu’ils ne le diront jamais. C’est presque le cœur lourd, qu’elle a quitté cet endroit après avoir purgé ces trois mois. L’art de la manipulation, lui a été très utile pour se faire un nom parmi ces jeunes, dont elle sait que certains ne l’oublieront pas.

Aujourd’hui, il y en a qui sont toujours ses amis et d’autres qui sont devenus des contacts bien précieux.

❝ Quand le loup rencontre Clochette ❞

Vingt-trois ans et la voilà propriétaire et gérante d’un bar. Un an plus tôt, elle avait signé les papiers et durant ce laps de temps, elle a fait beaucoup de travaux dans cet établissement. Achetée pour une bouchée de pain, elle se sent fière d’y être parvenue seule. Ses parents étaient prêts à le lui offrir, mais elle y tenait fermement à y arriver seule. Une immense fierté s’en part d’elle, quand elle voit la devanture s’éclairer, et le nom « Wolf Golden » percé la noirceur de la nuit. Le loup doré. Elle a toujours eu une profonde tendre pour cet animal. D’où le nom.

Ce bar, elle va le chouchouter, comme on le fait avec un enfant. Elle veut en faire un endroit safe pour tout le monde. Que les demoiselles puissent ne pas craindre de se faire embêter par la gent masculine et vice-versa. Un endroit où les barmans arrêteront de servir des verres quand le client ou la cliente peine à tenir debout, et qu’ils appelleront un taxi pour qu’on le ou la ramène à bon port. Ses employés seront analysés au cas par cas. La moindre embrouille et ce sera la porte. Il est hors de question qu’un membre de son personnel ait un casier lié à un abus. Elle en va de sa responsabilité.

Nous pourrions penser qu’elle s’est rangée. La voilà à faire un boulot normal dans les clous de la loi. Hm. C’est mignon de penser ça. C’est ce que Blake veut faire croire au commun des mortels. Car si l’on regarde de plus près, ce bar cache une partie de son boulot plus officieuse. Le bar n’est qu’un écran de fumée pour son vrai business. Celle qu’elle gère depuis un peu plus de deux ans maintenant. Elle a tout appris de sa famille. Blanchiment d’argent, ventes d’armes, rodéos urbains, darkweb où elle est connue sous le nom de « Clochette » un petit clin d’œil à une vieille amie… Ses méfaits sont nombreux et elle en cache encore bien plus.

Des talents dans la mécanique, elle sait transformer une voiture banale en véritable petit bijou pour de la course automobile. Que celle-ci soit légale ou pas. Aimant l’argent, aimant son indépendance, certaines personnes savent que Blake est capable de réaliser les rêves de chacun, tant qu’ils sont prêts à y mettre le prix. Faux papiers ? Elle vous adressera à Viktor, le russe qui vit dans le nord de Monterey. Besoin d’un mercenaire pour faire peur à un petit ami trop violent ? Hm, Nassim peut se montrer très convaincant. Bref, la demoiselle a des contacts dans toute la ville et même au-delà des frontières. Elle est parvenue à ce qu’un bon nombre de personnes lui doivent un service. Cette sensation de détenir un petit pouvoir, ça la comble de bonheur.

❝ Et maintenant… ❞

Vingt-six ans et la voilà bien installer dans ses différents petits business. Le nom de Rivers et son pseudonyme « Clochette » ou « Tinkerbell » sont à présent réputés dans le milieu, ainsi que dans le darkweb. Il va de soi que le FBI a tenté plus d’une fois de mettre la main sur elle, en vain. À chaque fois, elle est parvenue à se défiler, telle une anguille. Au point d’agacer sérieusement le petit Proc’ Hunter. Il tente à tout prix de la coffrer, mais il mange à chaque fois la poussière. Un petit jeu s’est installé, Blake s’amusant à le faire tourner en bourrique et à le pousser à bout. Néanmoins, dans le fond, elle a un profond respect pour cet homme de loi. Il pourrait tenter de la piéger, mais non. Il reste dans la légalité. Il faut croire que tout le monde n’est pas corruptible. C’est d’ailleurs vers lui qu’anonymement, elle lui envoie des informations concernant des criminels dangereux, sévissant dans la partie sombre du web. Blake n’est pas une enfant de chœur, mais ce n’est pas non plus une criminelle dangereuse. Elle cherche juste à se faire de l’argent facile et sentir l’adrénaline couler dans ses veines.  

Craignant l’amour, et de se retrouver dépendante d’une personne, la grande brune a toujours évité les relations trop sérieuses. Dès qu’elle sentait qu’elle pourrait tomber amoureuse, elle disparaissait tel un courant d’air. Préférant l’intensité d’une nuit charnelle et sans attache, Blake n’en est pas moins naïve. Si un jour l’amour lui tombe dessus sans crier gare, elle pourra faire ce qu’elle veut, elle ne pourra pas y échapper.

Elle vit à présent dans une petite maison à deux kilomètres du ranch familial, où elle se rend régulièrement pour s’occuper des chevaux et pour les nombreux barbecues en famille. Sa vie a totalement changé depuis qu’elle a été recueillie par cette famille. Elle leur doit tellement, et elle compte bien ne jamais les décevoir.

- Mademoiselle Rivers ? Lance une dame qui bouge doucement l’épaule de la demoiselle qui sort de ses rêveries et retire rapidement son casque.
- Oh, pardon. Lance Blake en regardant la salle autour d’elle et passant sa main dans ses cheveux bruns.
- Aucun problème. Vous me suivez ?

La jeune femme attrape son sac avant de se lever de sa chaise et d’éteindre la musique qui sort encore des coussinets de son casque. Elle s’arrête devant la porte du bureau, son regard se pose sur la petite plaque en métal. « Docteur Carter – Cancérologue ». La brune prit une profonde inspiration avant d’entrer dans le bureau dont la porte se referme lentement.

Il y a environs trois semaines, lors d’un repas de famille, Blake ne se sentait pas bien. Ça faisait déjà un moment, mais comme à son habitude, la demoiselle serrait les dents sans se plaindre. Jusqu’à ce fameux jour où prise d’une terrible douleur dans la partie supérieure droite de l’abdomen, elle fut emmenée à l’hôpital. Après une batterie d’examens, le diagnostic est tombé. Cancer du foie. Elle qui ne buvait que modérément, sans trop d’excès… N’est-ce pas là, un coup du karma. Sa seule chance de survie est une transplantation hépatique. Malheureusement, il n’y a que peu de greffons. Là où elle a encore un espoir, c’est un don, d’un donneur vivant. Il va de soi que toute sa famille a passé des tests, mais aucun n’est compatible. N’ayant d’autres choix, Blake est retourné voir sa génitrice. Non pas pour lui demander de passer le test, mais bien pour avoir des informations sur son géniteur. Espérant qu’il soit en vie, il est sans doute sa seule chance de poursuivre sa vie sereinement.

Manque de chance. Fiona est décédée il y a trois mois, tuée par l’un de ses clients jaloux. Bien qu’elle ne se sente pas triste de cette perte, elle s’est malgré tout sentie décontenancée. Les affaires de la défunte ont pu lui être restituées. Peut-être y trouverait-elle des informations. Une photo, un nom… N’importe quoi, qui pourrait lui donner un début de piste. Il est temps pour elle de savoir qui est son père. Que l’enquête commence !

○ En vrac ○
01. Père inconnu, mère toxico et prostituée, elle a vécu une enfance assez houleuse. 02. Elle a été recueillie par un jeune couple, parents de deux enfants et faisant partie d’une famille qui se créée par les liens du cœur. 03. Les Rivers et la bande sont connus pour ne pas être toujours dans la légalité. Rodéos urbains, attaque de camion, blanchiment d’argents, etc. 04. À seize ans, elle a passé trois mois dans un centre de détention pour mineurs, à la place de son frère, pour le vol d’une voiture. 05. Elle a un cancer du foie, ce qui l’a poussé à rechercher son géniteur qu’elle ne connait pas encore. 06. Elle porte de nombreux colliers, de bracelets et de bagues. Elles n’ont pas vraiment de valeurs financières, mais bien plus sentimentales. 07. Quand elle écoute de la musique, c’est toujours avec un casque, elle ne supporte pas les écouteurs. 08. Elle adore tout style de musique. Elle chante et joue du piano et de la guitare. 09. Elle raffole de la glace au chocolat avec de la chantilly et des pépites de chocolat. 10. Les brocolis, c’est immangeable pour elle. 11. Elle ne boit que modérément et fume la clope occasionnellement. Elle fait attention à sa santé, mais ça n’a pas suffi, il faut croire. 12. Sportive, elle fait un tas de sports différents : skate, rollers, footing, surf, boxe, gymnastique, pôle dance… 13. Elle adore les jeux vidéo ainsi que les films sanglants. 14. Son tic de nervosité, c’est de jouer avec ses colliers ou ses bagues. 15. Elle a une sainte horreur du café. Le p’tit déj, c’est du jus d’orange ou de l’eau. 16. Elle va bientôt devoir débuter sa chimio, ce qui l’effraie. Or, elle ne l’avouera jamais.