« Qu'est ce que le passé, sinon du présent qui est en retard? »


ft. @Jeremy Hopkins & Valeria Myers    
Chez Jeremy Hopkins, Monterey, CA.

mise en page made in Psyko

Juste à temps.

Faut dire que j’ai toujours été une merveille d’audace quand il s’agit du timing. Jamais vraiment à l’avance, pas non plus en retard. Celle qu’on attend juste un peu, suffisamment pour ne pas se mettre en rogne contre elle.
Être dans les clous a toujours été un défi de taille, pour la dispersée que je suis. Tout est une question de justesse, dont je n’ai pas manqué quand j’ai décidé de rejoindre Chayanne, dans son village natal. Des semaines de silence radio ont réussi à littéralement me faire péter un câble, me forçant donc à prendre la situation en main. Rester passive n’est pas une option acceptable, alors, j’ai sauté dans un avion, j’ai traversé des centaines de kilomètres afin de le retrouver. Chayanne.

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les retrouvailles ont été… spectaculaires. Dignes d'un film romantique que j'ai toujours détesté. Moi qui pensait avoir tout gâché entre nous, en lui révélant l'impensable au sujet de sa femme et de leur futur foyer... J'ai été plus qu'agréablement surprise, j'ai été soulagée. Enfin, la chance me souriait en amour. Prends ça dans tes dents, Cupidon de merde. L'échec cuisant s'appelant Collin n'était pas une fatalité, j'ai réussi à me prouver que j'étais capable d'aimer... et de l'être en retour. J'ai vécu un vrai rêve éveillé mais...
Monterey me manque, c’est un fait, mais je me suis littéralement sentie en phase, lors de mon séjour. Plus de problématiques du quotidien, seule l’incroyable perspective de profiter de l’homme que j’aime, sans peur, ni reproches, ni parasites quelconque.
Mais j’avais une excellente raison de revenir au bercail, et fissa, qui plus est. La tête dans les nuages brésiliens, j’ai pourtant retrouvé la terre ferme de la Californie afin de retrouver l’autre homme de ma vie, mon meilleur ami, ma moitié amicale: Jeremy.
Qui deviendra, dès le lendemain, bien plus qu’un homme lambda. Il va devenir un époux dévoué et je me dois d'assister à cette union. Paraît-il que je suis témoin, vous y croyez?!

À peine débarquée à l'aéroport, me voilà repartie, impatiente de rejoindre Jeremy. Je ne me sens pas en forme, depuis mon retour du Brésil, qui date de… il y a à peine quelques heures. Je suis dans la lune, pas très en phase avec le monde. Mais je ne m’en préoccupe pas, je suis simplement fatiguée à cause du jet lage, du trajet… Oui, aucun doute possible, ces foutues heures de vol ont eu raison de mon énergie. Mais certainement pas de ma motivation.  
Nous sommes à la veille d’une putain de journée de dingue.
Et je ne raterais ça pour rien au monde.
Le souffle court à cause de ma longue marche, je m’accorde quelques secondes pour reprendre mes esprits. Putain, qu’est ce que ma tête tourne. À la limite de voir des étoiles… Val’, allez, reprends-toi! Tu dois être au taquet, là, Jeremy ne s’attend pas à ton retour, enfin si… Enfin j’espère! Bref. Il est temps de se manifester, nous n’avons plus une minute à perdre.
Toquant avec force à la porte d'entrée de Jeremy, je pousse un glapissement de joie, me jetant dans ses bras, tout en lui disant, d'une voix extrêmement excitée:

Ding dong! Paraît-il qu’un futur marié passe sa dernière nuit en tant que célibataire, par ici, hein…?

Sourire éclatant, regard qui en dit long.
Espérons simplement que Jeremy ne remarquera pas mon état de fatigue considérable et qu’il se concentrera sur l’essentiel:
Que sa putain de meilleure amie est de retour en ville.
Juste à temps!

« Qu'est ce que le passé, sinon du présent qui est en retard? »


ft. @Jeremy Hopkins & Valeria Myers    
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Putain, quel bien fou ça me fait de retrouver mon meilleur ami. Je me sens complète, enfin en phase avec le monde. Je me rapproche d’une partie de moi, un homme que je respecte et avec qui j’ai partagé bien des choses. Des rires, des instants de complicité suivis par des pleurs, une déception sans appel qui m’a ravagé le cœur. Et puis… Non, inutile de mentionner cette nuit. Ce dérapage incontrôlé qui n’a eu aucune incidence sur notre relation, mis à part renforcer notre amitié. Jeremy est une des personnes qui compte le plus au monde à mes yeux, je ne pourrais pas me passer de lui. Il m’a tant manqué pendant ce séjour à l’autre bout du continent, voilà pourquoi je m’empresse de me jeter dans ses bras pour une étreinte digne de nos retrouvailles. Je suis encore faible, pas non plus à l’article de la mort, mais je n’en mène pas large. Des gouttes de sueur perlent sur mon front, mes mains tremblent de manière déraisonnée et pourtant, je souris à Jeremy tout en répondant à sa première phrase, mon aspect drama queen remontant à la surface, jouant théâtralement avec une mèche de mes cheveux:

Ouaaaaais, je sais, j’ai un peu tardé… Mais bon, le meilleur pour la fin, hein, comme on dit!

Putain, Val’, t’as pas honte, sérieux?! En réalité, je ressens un vif pincement au cœur à l’idée que Jeremy ai préparé son mariage sans mon aide. J’ai tenté, par tous les moyens, de lui apporter mon soutien, à distance. Mais l’Amour en appelant un autre, j’ai répondu aux urgences de mon âme, à ce cri que je ne pouvais faire taire. J’ai pris des risques, j’ai couru le danger de me faire remballer. Mais ce n’était pas le sort qui m’était réservé. Non, ma décision ne m’a pas coûté aussi cher que prévu, j’en ressors même gagnante, au grand loto de l’Univers.
Mais ce n’est pas à mon tour de briller, bien au contraire. Me sentant terriblement coupable, je baisse les yeux vers le sol, sentant l’agacement mêlé au sentiment de sous merde en série me conquérir la poitrine tout en gromellant:

Je sais, je sais, je sais. Pardon mais…

Mais quoi, hein, Val? En réalité, je n’ai aucune excuse valable. Ou plutôt, la seule que Jeremy est capable d’entendre? Je sais qu’il me comprendra. Je sais qu’il saura. Que je n’ai pas besoin de m’étendre dans un long discours, alors, je me contente de lâcher, mon regard planté dans celui qui peut lire dans mon âme comme personne:

… J’étais dans ma bulle, au Brésil.

Mon sourire vaut mille mots et quelque peu mal à l’aise, je m’empresse de changer de sujet, tout en me jetant dans le canapé de Jeremy, faisant comme chez moi et en profitant pour prendre le temps de respirer, véritablement exténuée:

Bon, et toi, alors?! T’es prêt, Bichon? Demain, tu te passes la corde au cou. Putain, ça va être génial! T’as hâte?

Quelle question de merde, Val’, sérieusement, t’as pas honte, hein?
Mais quelque part, je n’ai pas besoin d’entendre la réponse de mon meilleur ami. Je peux le deviner, putain, qu’il est démangé par l’impatience de l’instant. Sa vie ne tardera pas à basculer, son sort sera scellé et de la plus belle des manières.
Reste à savoir ce qu’il va penser de mon cavalier surprise et quelque peu imposé…

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ft. @Jeremy Hopkins & Valeria Myers    
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J’sais à quel point Jerem’ adore quand je suis insupportable.

C’est le premier homme à m’avoir inspiré une confiance sans égale et je dois l’avouer, j’adore le faire tourner en bourrique. Je l’étudie longuement me raconter à quel point je l’énerve et pinçant les lèvres, haussant les sourcils, je lui réponds, avec mon culot légendaire:

Mooooooh… T’es tellement mignon quand tu t’énerves, Jerem’. T’inquiète, je prévois un resto à quatre pour que tu le rencontres officiellement. J’préfère qu’il y ai Az’, elle t’empêchera de t’énerver.

Je pouffe de rire, je tente de donner le change malgré mon état de plus en plus faible au fur et à mesure des secondes. J’ai la sensation d’expulser toute la tension qui m’a animé durant les semaines ayant précédé mon départ, comme si mon corps agissait en décalage par rapport au temps qui s’écoule. C’est si étrange et surtout, ça ne me ressemble pas. Et puis, je tente de minimiser mon angoisse quant à la prochaine rencontre entre les deux hommes de ma vie. Et si quelque chose se passait mal? Je ne le supporterais pas, ils doivent bien s’entendre, c’est une question de vie ou de mort. Ravie que la discussion prenne une nouvelle tournure, j’étudie l’échographie que me tend mon meilleur ami et m’exclame, après un long sifflement d’admiration:

Woooooooooow, Bébé Jerem’! Ou Bébé Az’? Peu importe au final, tant qu’il est en bonne santé, ce bébé.

Ça aussi, j’ai encore du mal à l’avaler: il va bientôt devenir père. On peut dire que les choses s’accélèrent de son côté, pour mon plus grand bonheur. Je suis tellement fière de lui et soudainement très émotive, je le force à s’installer à mes côtés, sur son canapé, afin d’entendre cette confession que je lui offre:

Bon, j’sais que j’vais devoir me faire pardonner pour mon silence, pour mon retard… T’en fais pas, je te payerais une paire de baskets pour ça. Mais tout d’abord, je dois te dire quelque chose…

Pause solennelle tandis que je mordille ma lèvre inférieure, effrayée à l’idée de me livrer. En réalité, on ne dirait pas, mais je suis une pudique maladive, quand il s’agit des émotions. Mais il est trop tard pour faire machine arrière, alors, je me lance:

Jeremy, tu es mon meilleur ami. Celui qui m’a aidé quand je pensais que tout était perdu, celui qui a su me montrer que la vie, au final, c’était pas trop de la merde. Je devais te dire merci pour ça, merci d’être un homme de confiance, formidable. Te dire aussi que ton mariage serait une franche réussite… Et que je devrais vraiment me préparer, là!

Je viens de remarquer l’heure grâce à l’horloge murale installée derrière Jeremy et le timing se fait de plus en plus serré. En moins d’une heure, je suis prête, lavée, coiffée, maquillée, habillée. D'ailleurs, quand je sors de la salle de bain, je m’arrête devant Jeremy et lui demande, ne cessant de tirer sur ma robe, très inquiète de la qualité du rendu:

Alors, t’en dis quoi? Ça le fait ou pas? Tu crois que Chayanne me trouvera à la hauteur? Parce qu’il m’accompagne et il a un de ces costumes…

Nerveuse, je pose deux doigts sur mes lèvres tremblantes, sentant que je suis prête à rendre le maigre petit déjeuner que j’ai avalé au saut du lit. Je me sens si stressée, si nauséeuse. Et ce qui m’effraie par-dessus tout, c’est de ne pas être à la hauteur pour la journée la plus importante dans la vie de Jeremy.
J’suis qu’une calamité, une déception. Pardonne moi mon ami, je risque de ne pas être au rendez-vous de tes attentes…

« Qu'est ce que le passé, sinon du présent qui est en retard? »


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Chez Jeremy Hopkins, Monterey, CA.

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Demain, à la même heure, Jeremy sera marié.

Putain, qu’est ce que ça fait drôle de le penser, de le dire, de le réaliser. Mais il est sans doute la personne qui mérite le plus ce nouveau statut, aussi effrayant soit-il. Il en a connu, des galères sentimentales, je suis bien placé pour le savoir, j’étais là pour les supporter à ses côtés. Mais il donne, sans recevoir en retour, et c’est ce qui fait de lui un homme profondément bon. Le voir heureux dans sa relation, épanoui malgré les embûches qui se sont dressées sur leur chemin… Et qui s’appelle Valeria, parfois, juste quelques fois, hein. Ils ont réussi à dépasser tout ça, à se retrouver malgré l’adversité et la fin de leur chapitre donne envie de sourire et de croire que tout est possible tant qu’on le désire, tant qu’on se bat pour cette putain de béatitude. D’ailleurs, je me sens forcée d’expliquer mes choix plutôt radicaux de ces derniers temps, souhaitant également apporter une réponse à la question légitime de Jeremy:

J’ai… Je suis fatiguée, j’ai choppé un petit virus, ça passera. Mais faut que je te parle, Jerem’... Que je m’explique, en face à face. Tu sais, je devais le faire. Je devais le rejoindre. Je ne pouvais pas laisser le silence durer sans réagir. Je ne pouvais pas encaisser un nouveau départ…

Et je n’ai pas besoin de préciser de qui je parle, il suffit d’un simple échange de regard pour que le prénom soit pensé sans jamais être prononcé à haute voix. Tel un démon qui passe, je suis dérangée par un frisson qui parcourt ma colonne vertébrale. Putain, ce petit con, même quand il n’est plus là, il insuffle sa putain de présence… Mais ces mauvaises ondes, je n’en ai pas besoin. Je me suis sortie de cette tourmente, grâce à Chayanne mais aussi à Jeremy. Enroulant mes bras autour de mes genoux, je me balance doucement sur le canapé, dans ma si jolie robe qui a trouvé grâce aux yeux de l’homme dont je serais le témoin, et explique, sans réellement comprendre mon aveu:

Peut-être que… Mon corps me fait comprendre que j’ai trop donné. Qu’il est temps de recevoir. Je veux simplement aller mieux, tu sais, j’estime que ce n’est pas trop demandé…

Mon Dieu, c’est quoi ce comportement de petite gamine émotive, hein? Mais c’est sans doute l’aura du mariage à venir qui m’adoucit et j’ajoute, le coeur semblable à une guimauve, complètement sous le charme en faisant défiler les merveilleux souvenirs que je partage désormais avec un homme dont je suis raide dingue:

Jerem’, tu sais, je… Je suis très amoureuse de Chayanne. J’aimerais que tu me dises si tu estimes que le “très” est peut-être “trop”. Tu m’as vu, après ma rupture et…

… et il est hors de question que je redevienne ce pauvre loque. Je ne laisserais plus jamais un homme me foutre à terre et j’ai toute confiance en Jeremy et en son jugement sans appel. Il saura me prévenir si jamais je m’égards bien trop loin dans la forêt de l’apaisement… Mais pour le moment, il est temps de se nourrir d’autres choses que d’amour et tandis que le livreur se manifeste en tapant à la porte, je bondis hors du canapé, fait quelques pas de travers à cause d’un micro malaise mais affirme d’une voix assurée:

Oh, les pizzas! Je vais payer et ne cherche même pas à m’en dissuader.

Inutile de préciser que j’accompagne ce festin de roi par deux bières bien fraîches que je dégote dans le frigo et on se contentera de cette dose: inutile de nous rendre minable la veille de son union, j’ai une réputation à tenir moi, je ne peux pas avoir la gueule de bois. Je me dois d’être parfaite et tandis que je trinque, je laisse un rire s’échapper et lui dit, mon autre main agrippant son épaule:

Allez, tchin, copain, demain, finito les soirées célib’, tu seras mariéééééééé! Et je suis bien contente que Baby Boy se porte à merveille. Vous avez réfléchi, pour le prénom? Attention, hein, faut un truc qui claque avec Hopkins… Et pas Anthony, hein, on évitera de l’appeler comme un acteur qui a joué un tueur en série.

Je ris, je me fous de sa gueule, en apparence seulement.
Que je l’envie, lui qui a trouvé sa moitié et qui s’apprête à lui promettre une éternité de bonheur et de réalisations communes…