tw ::mention de guerre

Appuyé sur une canne, je m’avance dans cette rue du quartier est de Monterey. Sawyer, même si elle n’en était pas enchantée, à réussi à me dégoter l’adresse où vit actuellement Délia et j’ai décidé d’aller lui rendre visite. Sur le chemin, comme je n’avance pas très vite, je repense à tout ce qui s’est passé depuis que j’ai reçu ce message de Délia au mois de juillet, depuis que je lui ai proposé qu’on arrête de se voir. Elle n’avait alors même pas répondu à mon message et finalement elle a sans doute eu raison, peut-être que les choses auraient été différentes, peut-être que nous n’aurions pas réussi à ne pas nous voir tous les deux et si j’ai bien compris quelque chose ce jour-là c’est qu’elle avait besoin de temps. Forcément ce jour là Sawyer a bien vu que je n’allais pas bien et j’en ai profité pour lui avouer que je n’étais pas père d’un enfant mais de deux. Elle a semblé surprise et je crois que c’est pour ça que ma sœur a accepté de m’aider à trouver cette adresse, elle ne veut pas que je sois privé de ce deuxième enfant comme je l’ai été pour Apollo. Sawyer m’a aussi donné un excellent conseil ce jour là, elle m’a dit de partir, de m’éloigner quelques temps et c’est ce que j’ai fait. Je sais qu’elle ne me chassait pas de sa maison, d’ailleurs je suis de retour en ville depuis deux jours et je suis de retour chez elle mais je lui ai promis de commencer à chercher une maison pour moi. Pourtant elle avait raison, partir m’a fait le plus grand bien. Je suis retourné à New York et j’en ai profité pour aller voir le chirurgien qui m’a opéré. Il a été très surpris de voir que je n’avais toujours pas de prothèse et en un mois avec lui, me voilà équipé d’une prothèse et je marche simplement à l’aide d’une canne. Je dois bien l’avouer, j’avais fini par désespérer, je pensais que jamais je n’aurai plus la chance de marcher… alors pas comme avant bien entendu mais au moins j’ai l’impression de pouvoir me déplacer plus librement. En plus, je n’ai plus ces regards irrespectueux que j’avais quand je me baladais et que je n’étais pas encore équipé de ma prothèse. J’en ai aussi profité pour reprendre contact avec un supérieur de l’armée et comme je ne peux pas retourner sur le terrain, ils m’ont proposé un poste sur la base de Monterey, un poste de formateur. Je dois bien l’avouer, j’ai un peu hésité, et puis finalement je me suis dit après tout ça me permettra de continuer à travailler là où j’ai toujours voulu être… donc j’ai fini par accepter.

Je sors de mes pensées un instant alors que j’arrive au croisement de deux rues. L’adresse toujours entrée sur mon téléphone, je prends la bonne direction et je continue à avancer. Je suis bien décidé à parler à Délia et ce que j’ai à lui dire, je préfère le faire de vive voix. Lorsque j’étais avec mon kiné à New York, j’ai réalisé quelque chose d’important, quelque chose dont m’avait déjà parlé Sawyer, mais parfois on a besoin de le sentir par soi même pour vraiment en prendre conscience. Je ne veux pas passer à côté de la vie de mon fils. Je ne pourrai jamais rattraper ce que j’ai perdu avec Apollo, j’en ai bien conscience, mais je ne veux pas revivre cela avec Jacob, donc on doit discuter, je veux pouvoir le voir, je veux pouvoir passer du temps avec lui, qu’on apprenne à se connaître tous les deux, comme un père et son fils. Je sais que j’ai perdu déjà un peu de temps, qu’il a un an et demi, mais justement, je ne veux pas en perdre davantage. Je ne sais pas où en est Délia, nous n’avons échangé aucun message, mais Sawyer m’a affirmé qu’elle vivait toujours à l’adresse qu’elle m’a donné. Il n’y a qu’un mois, et quelques jours, qui se sont écoulés depuis mon dernier message, donc je ne pense pas que sa vie soit chamboulée comme elle l’était quand nous nous sommes retrouvés il y a de ça presqu’un an. J’inspire un grand coup car je sens des émotions négatives remonter à la surface et ce n’est pas le moment. A New York, on m’a proposé de voir un psychologue, que ce soit le chirurgien qui m’a opéré, ou mon supérieur de l’armée mais j’ai refusé, en leur faisant croire que j’étais déjà suivi à Monterey. J’ai coupé les ponts il y a longtemps avec ma famille et pourtant parfois j’ai l’impression que leur apriori, leur jugement sont toujours en moi et m’empêche de faire ce que je devrais. Mes parents ont toujours été contre toute cette médecine, qui pour eux n’est pas vraiment de la médecin d’ailleurs et ils me répétaient sans cesse que la seule personne à qui l’on peut tout confier c’est une personne de Dieu. Je suis entré dans une église au mois d’août d’ailleurs après avoir fait de nouveaux d’horribles cauchemars mais je n’ai pas réussi à parler à qui que ce soit, je me suis simplement assis sur un banc tout au fond de l’église. Je n’ai pas réussi à prier non plus, prier qui, prier quoi ? Je ne dis pas que je ne crois plus en rien mais s’il existe réellement un être supérieur, où était-il tout ce temps où je me suis fait torturé ? Tout ce temps où je voyais mes frères d’armes mourir les uns après les autres sans savoir quand mon calvaire à moi prendrait fin ? Je suis alors ressorti de cette église et je n’y suis jamais retourné. Malheureusement, les cauchemars sont toujours là, les nuits blanches aussi… Et finalement j’inspire à nouveau un grand coup en arrivant devant l’immeuble.

J’entre à l’intérieur, je prends l’ascenseur et je me retrouve devant la porte de son appartement. Mes mains sont moites, mon cœur bat la chamade et je sens mes jambes flageolées. Ce que je ressens pour elle est tellement intense mais le principal aujourd’hui c’est mon fils, notre fils, nos fils, alors je frappe à la porte au cas où Jacob ferait la sieste en serrant très fort la canne qui m’aide à avancer.

tw : aucun.

Tout s’est accéléré dans ma tête, dans ma vie, depuis mon retour à la maison.
Connor et moi avons rompu.
J’ai emménagé dans l’appartement de Charlie.
Je me suis rendue compte que j’avais toujours des sentiments pour Matt,
J’ai préféré fuir.
Je ne veux pas me tromper. Je ne veux pas faire n’importe quoi.
Mes garçons sont ma priorité absolue et ce n’est pas des papillons dans le ventre qui vont me dicter le reste de ma vie.

Alors oui, Matt et moi, nous avons un passif plutôt chargé. Il a été mon collègue avant de devenir mon amant. J’ai fait les choses de manière irresponsable, je suis tombée enceinte et j'ai trompé mon mari pendant des années. Et quand je dis trompé, c’est dans tous les sens du terme. J’avais une relation extra-conjugale et je lui ai menti à propos d’Apollo. Comme j’ai aussi menti à Matt à propos de mon fils. Qui est également le sien. Peu importe l’impact qu’à eu la guerre sur moi, je suis bien décidée à faire de mon mieux pour réparer la plupart de mes erreurs, à commencer par ne pas donner de faux espoirs à Matt. Même si mon affection à son égard demeure, je dois d’abord prendre soin de moi pour prendre soin de mes fils et envisager une relation amoureuse. Qu’elle soit d’ailleurs avec Matt ou non, je ne sais pas du tout où nous en sommes tous les deux et j’avoue que depuis juillet, j’y pense beaucoup. J’y pense tout en prenant le recul nécessaire pour ne pas commettre les mêmes erreurs. Je n’ai pas voulu répondre au dernier message qu’il m’a envoyé. J’veux vraiment être sûre de moi. Je me sens vulnérable. Je me suis accrochée à Connor en pensant être réellement amoureuse mais je me suis rendue compte qu’il s’agissait surtout d’une expansion de ce que j’ai ressenti pour lui quand j’étais une petite fille. J’avais littéralement des coeurs dans les yeux dés qu’il arrivait chez nous pour Caleb. Le pire, c’est quand il me disait bonjour, j’avais la sensation de m’évanouir. J’aurais pu, oui. J’étais vraiment en amour mais les sentiments d’une gamine de douze ans ne sont pas du tout comparable à. Une femme de plus de trente ans. Ce n’est pas le même amour, ce n’est pas les mêmes désirs et je sais qu’aujourd’hui mon amour pour l’un n’est pas aussi fort que l’autre. Il est question de ne pas tout bousiller, en sachant que j’ai des enfants qui ont besoin de stabilité dans leur vie. Tout comme moi, évidemment. Et cet éloignement avec Matt m’a été bénéfique autant que cruel. Je me sens loin, seule, incomplète…

Depuis plusieurs jours, je regarde son dernier message et j’ai envie de l’appeler. Entendre sa voix pourrait me faire totalement basculé, je le sais mais j’ai toujours autant besoin de lui qu’il y a deux mois. Et nous n’avons toujours pas discuté de nos enfants et de ce qu’on compte faire tous les deux. Parce qu’il est question de ça aussi, maintenant. Il connaît, certes, mon point de vue vis-à-vis d’Apollo mais je ne veux pas qu’il s’imagine que je ferais de même pour Jacob. Je lui ai dit, je ne commettrais pas les mêmes erreurs, je veux faire ça bien. Alors, je suis sur le point de l’appeler quand je reçois un appel provenant de la caserne des pompiers de Monterey. Au bout du fil, c’est le capitaine en personne qui souhaite un entretien. Il connaît bien notre famille ainsi que mon ex-petit ami faisant partie de la brigade d’intervention. Ma filleule compte parmi les rangs également. Il y a quatre semaines, j’ai envoyé mon dossier. Je me suis demandé longtemps ce que je pourrais faire de mon temps, pour aider mon prochain. Je suis faite pour ça, c’est dans mes gênes. J’ai besoin d’aider les autres coûte que coûte mais je ne retournerai pas en mission, ça c’est une certitude. Ceci dit, aller de l’avant m’aidera sans doute à passer un cap difficile, celui de croire que je suis morte à la guerre, parce que je suis toujours là et bien décidée à ne laisser personne derrière moi. Alors quand le capitaine des pompiers me propose de rejoindre l’unité de sauvetage parce que j’ai de l’expérience sur le terrain en milieu de guerre, c’est comme une évidence. Ma place est là. J’accepte sans vraiment y avoir réfléchi, quand on frappe à la porte. Le capitaine m’informe cependant que je vais devoir passer par une formation de remise à niveau, pendant plusieurs semaines avant de rejoindre officiellement l’équipe et je le remercie avant de raccrocher. Ce dernier va m’envoyer tout ce que j’ai besoin de savoir et je me précipite vers l’entrée sans m’imaginer une seule seconde que je vais me retrouver nez-à-nez avec Matt, dans trois…deux…un…

— Matt ? Comment tu… ?

Comment sait-il où j’habite ? Je suis agréablement surprise de le voir, un peu nerveuse aussi. Je remarque tout de suite son allure, sa canne, son… sa… ? Il n’y a qu’avec lui que j’attache une très grande importance aux détails. Passant l’une de mes mains derrière une oreille afin de replacer une mèche rebelle, je lui lance :

— Depuis quand as-tu ta prothèse ? … Entre, reste pas là…

Dis-je en marchant à reculons pour le laisser entrer.

tw ::mention de guerre

Les quelques instants qui s’écoulent entre le moment où je frappe à la porte et où Délia l’ouvre me paraissent, longs, très longs. Je me demande même si je ne me suis pas trompé d’appartement, ou peut-être qu’elle n’est pas là. Après tout, elle est peut-être au parc avec son… enfin notre fils. J’imagine que Apollo a repris l’école de son côté mais clairement Jacob est trop petit. Ma main serre encore davantage la canne que je tiens, pas seulement parce que j’ai peur de tomber, mais aussi comme pour évacuer toute la frustration que je ressens à cet instant, en pensant que je n’ai encore jamais pu faire de rentrée avec mon fils. Je l’avoue, j’ai encore du mal à réaliser que je suis papa, et deux fois en plus. D’habitude on a neuf mois pour s’y habituer, moi, il a fallut que j’encaisse comme ça. Forcément, la première fois qu’elle me l’a annoncé, enfin pour Apollo, lorsqu’elle m’a appris la nouvelle, je n’ai pas vraiment pu digérer l’information puisque je suis parti en mission directement après, même si les longs mois que j’ai passé là bas m’ont permis de me faire à cette idée, mais là pour Jacob, ça recommence. Hop, je suis papa !! Et pas de neuf mois, ou autre ! C’est direct comme ça !!

Je suis encore perdu dans mes pensées quand la porte s’ouvre enfin sur elle. Délia semble aller bien. Elle est toujours aussi belle. Et je réalise que ce n’était peut-être pas une si bonne idée que ça d’avoir cette discussion en tête à tête, au téléphone ça aurait été bien aussi. Je lui ai promis de ne plus l’embrasser, je tiendrai cette promesse… mais pourquoi je pense à ça maintenant moi ?? Voilà que maintenant, je n’ai plus qu’une envie l’embrasser. Mon regard vient immédiatement se poser sur ses lèvres, alors qu’elle semble surprise de me voir. Elle se demande comment, j’imagine que sa véritable question est comment j’ai fait pour avoir son adresse. Son regard semble me dévisager aussi et sa première question se porte sur ma prothèse. J’inspire sans doute un peu fort, lorsqu’elle me propose d’entrer tout en reculant pour me laisser passer. Ce n’est pas que je ne veux pas entrer, mais je me connais, je connais surtout mes sentiments pour elle. Je ne sais pas si je vais réussir à tenir ma promesse de ne pas l’embrasser à nouveau, alors que nous sommes, visiblement, seuls dans cet appartement, somme tout cosy, il faut bien l’admettre. Mais je ne reculerai pas, je suis venu pour parler de nos fils, nous allons en parler. J’entre alors, en m’appuyant sur ma canne et je referme la porte derrière moi. L’appartement ne semble pas très grand, mais suffisamment pour que rien ne traîne, en même temps je crois que la vie militaire a laissé des traces sur nous. Sawyer, est un peu trop bordélique pour moi, mais je crois que je suis aussi un peu trop maniaque dans le rangement pour elle. Pourtant j’apprécie sincèrement notre cohabitation.

Je pose mon regard sur Délia juste après avoir refermé la porte et m’être remis face à elle et je lui lance :

Ne lui en veut pas mais c’est Sawyer qui m’a donné ton adresse… par ton frère j’imagine… et oui j’ai une prothèse… c’est une longue histoire …

Toutefois je sais que je ne suis pas venu ici cet après-midi pour parler de moi, ou de ce qui m’est arrivé pendant ce mois où nous n’avons pas été en contact du tout. Il est vrai que moi aussi j’aimerai lui poser des questions, du genre, a-t-elle réussi à faire le point ? A-t-elle toujours des sentiments pour moi ? Est-ce que je suis encore et toujours de trop dans sa vie ? Est-ce qu’un jour elle me fera entrer dans sa vie réellement ? Mais je n’ai pas envie de partir sur ce terrain là, car j’ai peur de ne pas réussir à revenir au sujet important, celui qui compte plus que tout aujourd’hui, nos enfants. Nous sommes toujours dans sa petite entrée, quand j’ajoute rapidement :

Je veux bien te raconter… je pense aussi qu’il faut qu’on parle tous les deux… mais aujourd’hui, j’aimerai surtout qu’on parle de… de nos enfants… j’ai envie… non j’ai besoin… de passer du temps avec eux…

Voilà c’est dit !! C’est vrai que j’aurai pu attendre qu’on soit installé dans son salon, ou à une table mais je n’ai pas réussi à attendre. Je veux qu’elle sache que j’ai besoin de passer du temps avec mes, avec nos enfants.

tw : aucun.

Faire partie de la brigade d’intervention en première ligne chez les pompiers est un accomplissement personnel qui va au-delà de tout ce que j’imaginais; Alors certes, je ne suis pas prête à rejoindre le pôle sauvetage dans l’immédiat parce qu’il y a tout un protocole à suivre et des entraînements à commencer avant d’y arriver, mais le capitaine semble confiant et tout à fait disposé à attendre la fin de ma formation pour officialiser mon intégration dans l’équipe. L’appel a été plutôt solennel, un brun émotif pour ma part parce que je ne pensais pas faire bonne impression chez le capitaine en sachant mes problèmes actuels. Revenir chez moi, après cette mission suicide, j’avoue que j’ai beaucoup de mal à retrouver mes repères. Je fais n’importe quoi sans arrêt, je ne sais plus qui je suis et ce que je fais encore là mais une chose est certaine, c’est que je veux donner le meilleur de moi-même pour mes enfants, qu’ils sachent que je ne les abandonne pas et que je serais toujours présente pour eux.

Et c’est en prenant ma vie professionnelle en main que j’arriverai à leur prouver qu’ils n’ont pas retrouvé qu’un déchet, à la maison. Je ne peux pas leur donner cette mauvaise image de moi parce que je n’ai jamais été ainsi. Il fut un temps où mon travail comptait plus que ma vie de famille et j’ai appris à mes dépends. Aujourd’hui, j’ai changé et je dois continuer à changer si je veux être une meilleure personne pour mon entourage. Quand on frappe à la porte, je suis loin de me douter un seul instant que je vais me retrouver face à Matt. Ancien collègue, ancien amant. Ancien… ? Le passé est constamment derrière moi, mais sans doute pour une bonne raison. Matt ne représente pas seulement mon passé. Il est aussi mon présent, et qui sait ? Sans doute mon futur ? seul le temps me le confirmera. En attendant, je remarque beaucoup de choses à son sujet. Des détails qui pourraient passer inaperçu si la personne ne comptait pas réellement à mes yeux. Pourtant, je remarque qu’il sait où j’habite alors que je ne lui ai rien dit. Je remarque aussi la prothèse qu’il n’avait pas, la dernière fois qu’on s’est vus. Je l’invite à entrer et je l’écoute sans dire un mot.

Je comprends tout de suite, alors je ne peux m’empêcher de rouler des yeux au ciel en entendant le prénom de sa sœur, ou l’allusion à mon frère. Je soupire. J’avais oublié à quel point ces deux-là s’entendaient à merveille. Et à quel point ils sont grossiers. De quoi ils se mêlent tous les deux ? Sûrement qu’ils veulent bien faire, dans notre intérêt, n’est-ce pas ? Je ne dis rien, j’inspire simplement, écoutant Matt qui souhaite qu’on discute de nos enfants. Il veut passer du temps avec eux. Alors, le plus doux possible, je réponds :

— D’accord, Matt.

Je n’ai jamais été contre le fait qu’il passe du temps avec ses garçons. Bon, j’avoue que là, ça risque d’être difficile, aucun des garçons n’est présent à la maison. Apollo est à l’école et Jacob au jardin d’enfants. Mon regard dans le sien, je ne peux m’empêcher de sourire. Ça me fait du bien, de le voir. J’aimerais le toucher, le sentir contre moi, humer son odeur… le prendre dans mes bras… enfin… j’aimerais beaucoup de choses concernant Matt mais je me rappelle aussi que je lui ai dit que j’avais besoin de temps et de distance, pour me retrouver moi, en tant qu’individu.

— D’autres requêtes à formuler, soldat ?

Tant qu’on y est… je lui souris, afin de lui faire comprendre qu’il n(y a aucune forme de reproche dans mes paroles, seulement de la bienveillance.

tw ::mention de guerre

Face à Délia, je sens que je pourrai rapidement penser à autre chose, dire autre chose, faire autre chose, alors pour éviter de me perdre dans mes pensées, des images de notre baiser me revenant à l’esprit, je lui lance rapidement que j’aimerai passer plus de temps avec nos enfants. Nous sommes toujours dans son entrée et il est vrai que le fait de venir en marchant jusqu’ici m’a fatigué mais au moins c’est dit ! Je dois bien l’avouer, je m’attends à une multitude de réactions de sa part, mais quand elle me lâche un simple d’accord, je suis un peu pris au dépourvu. Car j’avais imaginé tout et son contraire, qu’elle veuille négocier, qu’elle ne soit pas d’accord, qu’elle préfère qu’on attende mais absolument pas qu’elle soit d’accord comme ça sans contrepartie… Je suis tellement surpris que je ne sais pas vraiment quoi lui répondre et c’est Délia qui reprend la parole avant moi en me demandant si j’ai d’autres requêtes, son sourire me fait fondre, même si l’évocation de l’armée me fait me tendre légèrement. Non je n’ai pas besoin de psy !! Juste, je n’aime pas trop qu’on évoque le fait que j’ai été soldat ou que je le suis encore, puisque finalement, je vais maintenant former de jeunes recrus. Je sais que c’est important mais lorsque je ne dors pas la nuit, je ne peux m’empêcher de penser que je vais former de jeunes soldats à vivre ce que j’ai vécu et ça me ronge littéralement de l’intérieur.

Enfin, je reviens à Délia qui se trouve toujours face à moi. Mon regard s’attarde sur ses lèvres, mais non j’ai promis, je ne l’embrasserai plus, enfin si… mais je vais attendre que ce soit elle qui me le demande. Je ne peux pas être celui qui provoque ces moments à chaque fois, surtout si c’est pour qu’elle me dise ensuite qu’elle ne veut plus que je le fasse, c’est trop dur à vivre, trop dur à encaisser, c’est la goutte d’eau qui pourrait très clairement faire déborder le vase de tout ce que je retiens à l’intérieur depuis trop longtemps. Je passe alors ma langue sur mes lèvres avant de tenter de me reconcentrer. Ce qui n’est finalement pas si dur que ça à faire car la douleur à mon pied commence vraiment à être insupportable. Je lui réponds alors :

Ce n’est pas vraiment une requête mais… est-ce que cela te dérange si je m’assieds un peu… je n’ai pas cette prothèse depuis longtemps alors je commence à avoir mal…

Puis je reviens à l’accord qu’elle m’a donné. Cela m’a tellement surpris que je n’ai rien ajouté mais il faut quand même que j’en sache plus. Je ne souhaite plus être un inconnu pour eux, je veux vraiment faire partie de leur vie à part entière. Et je sais qu’un jour Apollo finira par savoir la vérité, alors je veux que nous ayons des souvenirs ensemble afin qu’il ne puisse jamais m’en vouloir. J’ajoute alors rapidement :

Et je suis vraiment soulagé que tu sois d’accord pour les enfants…mais du coup j’ai quelques questions… quand est-ce que je pourrai les voir ? Combien de temps ? Chez toi ? Est-ce que j’aurai le droit de dire à Jacob que je suis son papa ?