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2062, if we had suceeded ↯ Victori

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Victor Nash

Victor Nash
312
spf (il)
Chris Evans
harleystuff
//

39 ans en avril. Vigueur des muscles, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
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☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
2062, if we had suceeded ↯ Victori Xzov
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy.



gold member
https://basique.forumactif.com/t92-victor-where-we-fall-are-the- https://basique.forumactif.com/t146-victor-folks
MessageSujet: 2062, if we had suceeded ↯ Victori 2062, if we had suceeded ↯ Victori EmptySam 3 Juin - 12:22#

2062, if we had suceeded * Victori
Multiverse

Thèmes sensibles évoqués : crise climatique et environnementale, pathologies du grand âge, mort.

Une réalité alternative dans laquelle Victor Nash et Tori Espinoza n’ont pas échoué. Ensemble, le militaire et la linguiste ont déjoué le destin funeste du frère cadet, Ruben Espinoza. Les criminels ont fini derrière les barreaux, les plus acharnés d’entre eux à la morgue. Victor et Tori ne se sont guère séparés dans les larmes, après une terrible vendetta qui a ensanglanté leurs âmes. Dans cette minuscule déviation de la réalité, « Victori » ont triomphé sans heurts et ne se sont plus jamais quittés. Tous deux ont rompu leur contrat avec l’armée avant de s’unir devant l’autel, à Monterey. Ils ont planté des oliviers dans les collines, bâti un moulin. L’huilerie Victori approvisionne les restaurants et rayons bio des commerces locaux, mais sa production décline…




Mains croisées derrière le dos, frémissantes, Victor arpente les allées de la grande serre expérimentale. À l’intérieur, plongés dans un environnement contrôlé qui simule les rudes conditions climatiques de cette seconde moitié du XXIe siècle, des jeunes plants d’olivier poussent en silence. Il les examine patiemment, l’un après l’autre. Un travail minutieux qu’entrave sa vue déclinante, mais le vieil homme se refuse à porter des lunettes. Victor Nash a toujours voulu contempler la réalité brute, authentique, plutôt qu’à travers un filtre grossissant ou réducteur.
La réalité qu’il observe ne suggère aucun optimisme. La plupart des arbrisseaux n’ont pas tenu : branches desséchées durant les cycles arides ; feuillages pourris lors des abondantes précipitations générées artificiellement ; jeunes troncs piqués mortellement par des insectes ravageurs, ceux-là mêmes qui ont déjà ruiné 60% de l’oliveraie Victori. Les plants ayant survécu à ces calamités ne montrent aucun signe de fertilité. Des arbres stériles, à l’image d’une part croissante du paysage californien après un siècle de pollution et d’exploitation abusive de ses précieuses ressources. Du bois d’olivier sans les fruits goûteux gorgés d’huile. Il fut un temps où Victor sculptait la matière ligneuse, mais ses gestes sont devenus trop malhabiles pour lui conférer des formes harmonieuses.
Soudain, les yeux de l’oléiculteur s’écarquillent. Devant lui, un spécimen parfait d’olivier en pot. Il avance une main fébrile, ridée, craignant que sa vue déficiente lui joue un mauvais tour. Le tronc est vaillant, ferme au toucher, avec ce qu’il faut de souplesse pour résister à des bourrasques dévastatrices. Six rameaux vivaces s’élèvent vers le ciel, évoquant les splendides étamines d’une Étoile de Bethléem – la fleur favorite de Tori. Victor y voit la métaphore d’une main ouverte priant avec humilité vers le ciel, la réponse providentielle à des années d’espérance et de travail acharné. Deux cochenilles noires trainent leur carapace menaçante sur l’écorce brunâtre, sans la piquer pour en prélever la sève. Des bourgeons plantureux essaiment parmi les feuilles d’un vert profond.
Pour la première fois depuis l’an 2058, Victor Nash pousse des cris de joie.
— On a réussi ! Tori, on a réussi !
Seul dans la grande serre, le vieil homme essaie d’attraper la petite étiquette blanche pendue au bord du pot. Il doit s’y prendre à cinq reprises pour déplier l’inscription, mais la joie fait barrage à son agacement.
Variété Huichol, lit-il.
Une lourde émotion écrase sa cage thoracique. Ses yeux s’embuent. Il respire avec difficulté, touche le large bracelet de petites perles colorées qui ceint son poignet gauche.
Laissée entrouverte, la porte de la serre s’écarte. Un ouragan à quatre pattes fuse à travers les allées, bondit autour de Victor en jappant. La queue de l’animal frétille énergiquement ; sa langue pend comiquement sur le côté. Le vieil homme pose un genou à terre, flatte gaiement le pelage doux du Beagle et reçoit un nettoyage intégral du visage.
— Je perdais espoir, Juanito, mais j’ai… on a réussi.
La voix de Victor se brise. Il serre l’animal entre ses bras. Juanino accueille les sanglots de l’humain avec un son plaintif.
Enfin, l’oléiculteur se redresse :
— Ne trainons pas, sac à puces. On va voir Tori ?
Les oreilles tombantes du Beagle se dressent à l’horizontale alors qu’il aboie, phénomène miraculeux qui se produit uniquement en cas d’émotion intense. C’est madame Nash qui a recueilli Juanito et lui a donné son nom.
Victor donne à boire à l’animal, puis s’hydrate à son tour. Dehors, c’est la fournaise. Il charge précautionneusement le pot du Huichol dans une charrette à bras, puis remplit un bidon d’arrosage et ajoute les outils pour creuser.


Victor ahane. Les goulées d’air brûlantes pénètrent à grand-peine ses poumons exténués. Mois après mois, la pente de la colline semble plus raide. Une impression fausse, subjective. Réalité brute, authentique : le dénivelé est resté le même depuis leur arrivée, en 2023. À l’époque, l’ancien sergent d’infanterie tractait le triple de son poids, plaisantant avec Tori qui admirait sa force et sa robustesse. Taisant ses courbatures comme des générations d’anciens militaires avant lui. À soixante-dix ans, Victor gravissait encore le sommet avec sa bienaimée sur les épaules. L’amour greffe des ailes.
Aujourd’hui, la charrette en bois grince péniblement derrière le dos fourbu. Les grandes roues gémissent à chaque pas. Victor lève la tête vers l’objectif : le sommet de la colline où Tori l’attend. Ses bras tirés en arrière projettent des décharges électriques à travers son corps endolori. Ses cuisses rabougries brûlent comme des tisons ardents, de même que ses fesses émaciées sous le vieux pantalon de travail, devenu trop ample. Inspiration, expiration. Un pas, deux pas de plus. Depuis le bandeau imbibé de sueur noué autour de son front, de grosses gouttes salées coulent dans ses yeux. Le vieil homme est trempé, lessivé tel un marin sous la tempête. Inspiration, expiration. Juanito trotte à côté de lui, le soutenant de son regard pur. Autour d’eux, une vaste étendue d’oliviers muets et moribonds. Le travail d’une vie – de deux vies. Un soleil de plomb écrase le paysage vallonné. Quelques insectes résistants bourdonnent et stridulent ; peu d’oiseaux ont survécu. Inspiration, expir…
— Pas maintenant ! Non !
Des secousses frappent les muscles du vieil homme. Il serre les dents, déploie sa volonté sur ses membres agités de tremblements. En vain. Les genoux oscillent à leur tour, les os s’entrechoquent. Victor se sent comme un étranger dans son propre corps. Impuissant à endiguer les mouvements erratiques qui le traversent à la manière d’une onde. Il serre les brancards de la charrette de toutes ses forces. Juanito aboie.
— Ça va aller, grogne le vieil homme. On va y arriver, Juanito. Tori sera fière de nous, tu vas voir.
Profonde inspiration, puissante expiration. Victor accélère la cadence, pareil à une locomotive à vapeur à l’assaut d’une montagne. L’infanterie lui a appris à braver l’adversité, à faire front et avancer. Tori a toujours aimé cet esprit combatif ; c’est pour elle que Victor se bat depuis le jour de leur rencontre. C’est pour Tori qu’il va encore remporter cette bataille.
Les lourdes chaussures de montagnard s’enfoncent dans le sol hostile, rocailleux. Les mollets secs se tendent comme des cordes. Victor souffle, éructe, gémit sous l’effort. Juanito sautille de part et d’autre, l’encourage de ses aboiements. Les tremblements musculaires diminuent. Miraculeusement, la crise passe. Le vieil homme crie victoire, rouge comme une pivoine. Juanito fuse joyeusement entre ses jambes. Victor trébuche sur un gros caillou. Lâche la charrette. Entrainé par la gravité, le chargement redescend la pente et accélère.
— Non ! Non ! Non !
Victor tend désespérément le bras. Tentative illusoire d’endiguer la chute. La charrette met plusieurs secondes avant d’atteindre le pied de la colline, puis se retourne dans un vacarme du diable. Pupilles dilatées par l’horreur, Victor contemple la réalité brute, authentique. Le tronc du jeune olivier Huichol brisé en deux sous le poids de la charrette. Des branches fertiles massacrées par le tranchant des outils. Le porte-greffe écrasé sous le réservoir d’eau qui déverse son précieux liquide dans la terre aride.
Victor lève un poing vibrant de rage en direction du Beagle.
— Tout ça, c’est ta faute. C’est arrivé à cause de toi !
L’animal, penaud, file vers le chariot accidenté. Sa mignonne petite tête oscille latéralement, en panique. Il trébuche à deux reprises. Renifle l’arbre accidenté avec affolement. Saisit la partie supérieure du tronc entre ses mâchoires, tente de l’extirper de sous la charrette. Juanito réussit seulement à séparer l’olivier en deux. Une plainte déchirante résonne dans les collines.
— Je suis désolé, croasse Victor, sa colère envolée. Reviens, Juanito ! Reviens, on va voir Tori !
Rien à faire.
L’animal court à toute vitesse en direction du moulin, rasant le sol comme une âme en peine.
Victor soupire, le cœur lourd. Porte son regard au sommet de la colline, une main en visière. Se relève, grimaçant, puis reprend la douloureuse ascension.


À bout de force, Victor s’appuie contre la branche principale du roi de la colline. Un grand olivier. Massif, majestueux. Le premier arbre qu’il a planté, béni des rires de Tori et de leurs espoirs. Autrefois le plus productif de l’oliveraie. Aujourd’hui, la paume de Victor repose sur une écorce noire et desséchée. Le roi de la colline est mourant. Il a fourni ses dernières olives en 2058.
Alors qu’il reprend son souffle, le regard de Victor rencontre la pierre érigée sous son ombre.
— Bonjour, mon ange.
La réalité brute, authentique, figure sur les inscriptions de la stèle :

Tori Nash, née Espinoza
28.04.1986 – 03.06.2058
Eternally Beloved

Victor Nash se traine jusqu’au discret monument funéraire. Le chagrin s’abat sur son corps frêle chaque fois qu’il vient ici. Il tombe à genoux, ses douleurs physiques devenues dérisoires, puis embrasse le nom gravé dans la pierre de ses lèvres tremblantes. Sa voix déformée semble jaillir d’une caverne.
— Je suis désolé, mon ange, terriblement désolé… Je voulais te faire une belle surprise, planter la nouvelle génération à l’endroit de ton repos afin qu’il te couvre de son ombre, comme notre premier olivier avant lui. C’est le Huichol.
Victor fait tourner les perles du bracelet mexicain à son poignet. Le même que Tori portait trente-huit ans plus tôt lorsqu’ils étaient partis à la recherche de Ruben. Un objet sacré. Tori lui avait attribué un pouvoir magique après les confidences de Victor sur ses croyances spirituelles.
— C’était forcément le Huichol, notre espoir. J’aurais dû le prédire.
Un vent sec et poussiéreux balaie le paysage. L’oliveraie Victori est plongée dans la torpeur. Indifférente à la magie. Indifférente à la douleur du vieil homme.
— J’ai essayé, mon ange, je te promets. Mais j’ai encore échoué. Je n’arrive à rien sans toi. Tu as toujours été mon guide, l’étoile de mon ciel. Je n’arrive même pas à mourir pour te rejoindre enfin. Quand serons-nous réunis ?
Nouvelles secousses dans les muscles. Victor sèche maladroitement ses larmes à l’aide d’un mouchoir en tissu. Qu’il utilise ensuite pour chasser les poussières de la tombe.
— J’ai encore crié après Juanito. Son absence aujourd’hui est ma faute. J’essaie d’offrir à ce chien l’amour que tu n’es plus en mesure de lui donner, vraiment. Ce n’est pas facile tous les jours. Je sais qu’il n’est pas responsable, cependant une part de moi ne cessera jamais de lui reprocher l’accident.
Le cœur de Victor se serre douloureusement alors qu’il repense au jour fatidique. Intriguée par les jappements du chiot qu’elle avait adopté, Tori avait glissé du toit du moulin. Morte sur le coup, la nuque brisée. Juanito avait léché le visage inanimé, poussé une complainte à fendre l’âme. Mordillé la main attendrie qui lui prodiguait jusqu’alors caresses et affection. Victor avait hurlé comme une bête. La scène de la charrette fut une répétition du drame, l’écho d’une souffrance et d’une colère jamais éteintes.
— Juanito aussi souffre d’une terrible culpabilité. Tu n’approuverais pas, j’en suis sûr, mais je crois que ce sentiment nous unit plus fortement que notre amour envers toi. (Silence.) J’étais ton mari. C’est moi qui aurais dû monter sur le toit. La maladie en était seulement au stade précoce. (Silence.) J’en étais encore capable. (Long silence.) Ce mal qui me détruit de l’intérieur est un juste châtiment pour ma faute.
Lentement, Victor avale la boule de chagrin qui obstrue sa gorge. Il reprend le nettoyage de la tombe et se force à sourire.
— La grossesse de Carla se passe bien. Ruben et June seront bientôt grands-parents, tu te rends compte ? (Le mouvement de son bras s’interrompt alors qu’il déterre des souvenirs de sa mémoire. Un gloussement rauque résonne au fond de sa gorge.) Je me rappelle encore la première fois que tu as entendu parler de June, dans le club de striptease à Colorado Springs. Tu étais furieuse que ton frère s’amourache d’une fille de la nuit ! C’était quoi, son nom de scène ? (Victor écoute le souffle du vent.) Ah oui, Goldie ! Goldie aux cheveux d’or ! (Il rigole, faisant fi des douleurs de poitrine.) Pauvre June, tu lui as fait passer un véritable procès en inquisition. Mais au final, tu as su détecter la sincérité de leur affection et même la faire accepter de vos parents. Tu ne t’es jamais trompée au sujet de la famille. Fiable comme une boussole. Leur mariage fut presque aussi réussi que le nôtre. Enfin, je crois – je n’avais d’yeux que pour toi dans ta belle robe rouge.
Victor inspecte lentement son travail. La tombe est propre. Raidi par la position accroupie, le vieil homme se traine à quatre pattes jusqu’à un rocher bas. Chaleur brûlante sous les paumes. Une aspérité écorche un genou. Il se hisse tant bien que mal, s’assoit face à la stèle. Ses mains rougies et sa voix tremblent.
— Je ne suis pas sûr de tenir jusqu’à la naissance du bébé, mon ange. (À l’aide de ses manches sales, Victor essuie piteusement son visage en sueur.) Je ne suis plus capable d’utiliser un couteau quand je mange. Diantre, je n’arrive même plus à viser ma bouche avec une cuillère ! Et j’ai dû abandonner la fourchette à cause des trous sur les lèvres…
Long silence.
Une vague d’apathie engourdit le corps malade. Les endormissements surviennent de plus en plus fréquemment. Victor se dit que son âme cherche à s'extirper de son enveloppe charnelle, impatiente de rejoindre sa bienaimée. Il espère qu’elle réussira. Le plus tôt possible. Mais il n’est pas certain.
— Tu sais, j’ai encore le Sig Sauer que ton père t’avait confié.
Silence.
Portée par un vent léger, la poussière souille déjà la pierre tombale.
— Je songe à m’en servir avant qu’il soit trop tard. Je ne veux pas devenir… charge… pour…
Le vieil homme s’assoupit.


— Papa ! Papa !
Victor ouvre les yeux. La lumière vive éblouit ses rétines. Crâne en feu. Gorge sèche.
— Papa ! Papa !
L’appel monte depuis l’autre versant de la colline, un terrain ombragé où les Nash ont rénové une ancienne habitation.
Le vieil homme se frotte les paupières, sourit à la pierre tombale.
— Estella va encore me gronder parce que je suis sorti sans mon chapeau.
— Papa, t’as encore oublié ton chapeau ! Si t’es encore là-haut à risquer une insolation, je jure que je t’étrangle et que je t’enterre à côté de maman !
Gloussement du fautif.
— Notre fille te ressemble de plus en plus. Quand je la regarde aujourd’hui, je te revois l’année de notre rencontre. Un visage sublime et fier, le cœur noble et généreux – et quel caractère !
Il rit, mais rapidement le rire se brise en une toux rauque.
— Je suis heureux qu’elle tienne de toi. Tu lui as transmis ta belle énergie, ta sensibilité. Ce sont vos qualités qui font et qui feront la différence dans notre monde en crise.
Le regard de Victor se perd dans le lointain, contemplant l’âge révolu où il portait l’uniforme avec fierté.
— On m’a façonné pour le combat, Tori. Ce fut mon seul talent. Puis ton amour a conquis mon être et m’a offert le cadeau inestimable de la paix. Sans toi, je serais tombé il y a longtemps loin de notre patrie. Fauché par une rafale haineuse ou une déflagration vouée à l’anéantissement des peuples libres. Je n’ai jamais regretté les décennies de bonheur à tes côtés. Pas un seul jour. Mais je n’ai été pour vous qu’un époux et un père ordinaire. Un homme ordinaire. Toi et Estella, vous êtes des femmes hors du commun.
— Papa ! Réponds !
Bruits de pas sur la pente caillouteuse. Impatients, fougueux. Estella n’est même pas essoufflée. Le dynamisme de la jeunesse.
Victor embrasse l’extrémité de ses doigts, qu’il pose tendrement sur la stèle chauffée par le soleil. Un phénomène étrange se produit. La pierre transmute. Elle n’est plus faite de matière minérale – inanimée, dure et rêche. Victor touche une substance douce, organique et vivante. La sensation merveilleuse, incroyable, lui coupe le souffle. C’est la peau de Tori. Exhalant son parfum délicat de fleur du désert, imprimant son goût sur les lèvres sidérées de Victor. La voix aimée résonne à l’intérieur de sa tête, mélodieuse et résolue.
Quand on se bat, on peut perdre, mais ceux qui ne se battent pas ont déjà perdu.
La vision de Victor s’obscurcit. Il se remémore la nuit, le motel où Tori lui a transmis l’adage des Espinoza pour la première fois.
Retour au présent, sur la colline. La stèle a retrouvé sa texture pierreuse, funèbre, immuable. Une flagrance subtile de feuilles d’olivier flotte dans l’air, fraîche et porteuse d’espoir. L’ancien militaire se redresse. Buste droit, menton fier. Il enserre le bracelet à son poignet.
— Variété Huichol. On peut la recréer. On peut la reproduire en masse. Si l’univers m’accorde un répit, on peut réussir. On peut tout replanter. Estella saura la faire fructifier.
Lueur pugnace dans les iris bleutés. Ce fut mon seul talent. Un dernier combat avant l’éternité.
— Papa, t’es impossible !
Victor se tourne vers sa fille, plus vif qu’il n’a été depuis le déclenchement de sa maladie.
— Dans l’univers de Victori, rien n’est impossible, ma chérie.


FIN.

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☆ The purpose of life is not to have fun.
It is to be useful, to be honorable, to be compassionate,
to have it make some difference that you have lived and lived well.
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