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| Thunderbird (Victor & Thelma) | |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Thunderbird (Victor & Thelma) Lun 20 Mai - 12:01# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.Milieu de matinée. Adossé à un bar-restaurant au coin de la rue, Victor épie la vitrine de la pâtisserie Cranachan. Les addicts au sucre et au gras ont déjà fait leurs emplettes. De jolis emballages en carton portant le logo appétissant de la boutique, que des employés au palais gourmand défendent bec et ongles contre la voracité de leurs collègues. Le militaire se demande combien de clients prétextent une hypoglycémie chronique pour justifier l’apport de ces foyers d’émeute, combien assument leurs sournoises visées perturbatrices, et combien reçoivent une commission du Cranachan pour faire de la pub. Une cliente âgée trainasse à l’intérieur. Indécise. Bavarde. Mordue de relations humaines plus que de viennoiseries. Victor patiente sagement. Observe la silhouette pâle de la vendeuse à la chevelure cuivrée. S’interroge sur ses origines, ses rêves, la place que lui attribue le destin. Peut-être la fille d’un électricien et d’une coiffeuse, ayant uni leurs talents pour planter des centaines de filaments conducteurs sur un crâne humain. Effet garanti les jours d’orage, ou en cuisine après le déclenchement d’un four à micro-ondes. Le spectacle doit valoir le détour. Bien sûr, Victor sait que sa théorie ne tient pas la route. Avec des cheveux en cuivre authentique, Thelma ne travaillerait pas dans une pâtisserie. Elle travaillerait dans un cirque, ou dans un relais secret de transmission. L’armée américaine paierait cher l’atout stratégique apte à saisir les communications de l’ennemi avec plus d’efficacité qu’une antenne parabolique. Thelma, serveuse au Cranachan, la trentaine. Victor ne sait rien d’autre à son sujet. Un prénom, un métier, un âge approximatif, et le motif de sa curiosité : un origami déposé dans sa boite aux lettres.
Madame Bavarde quitte enfin la boutique. Petit carton entre ses doigts osseux, sourire radieux traversant son visage flétri. Elle s’arrête, lève la tête vers le ciel azur, ferme les yeux, hume doucement l’air marin mêlé aux arômes pâtissiers. Son visage ridé s’éclaire comme le minois candide d’une jeune nymphe. Les plaisirs simples et éternels de la vie. Ceux qu’on oublie trop tôt et qu’on réapprend trop tard à savourer réellement. Le cœur de Victor s’attendrit. Il avance d’un pas cadencé, jambes actionnées avec la précision d’un mécanisme d’horlogerie. Le sergent se sent heureux pour elle. Il se sent heureux pour chaque personne heureuse – des rayons de lumière qui viennent réchauffer son visage fourbu –, et trouve son propre bonheur dans la contribution infime qu’il apporte à celui des autres. Habituellement, il doit endosser le fardeau de la violence pour jouer son rôle. Pas cette fois. Rien de violent dans une tarte aux fraises. Sauf pour les fraises cruellement découpées en morceaux, les œufs éclatés puis battus sans pitié, la crème fouettée comme un attelage de diligence à l’époque mouvementée du Far West. Il faut ce qu’il faut. En revanche, Victor n’a aucune idée du chemin que l’oiseau-tonnerre lui montre. — Bonjour madame, dit-il poliment en croisant la Bavarde qui a tout compris à l’existence. Elle toise le militaire charpenté au mieux de sa presbytie. Son cou manque de souplesse pour dresser l’inventaire complet de l’imposante silhouette. — Albert ? tente-t-elle. — Non, un admirateur anonyme qui vous souhaite une agréable journée. Victor reprend sa route jusqu’au Cranachan. Pousse la porte avec une vigueur maitrisée. Main droite en avant, main gauche dissimulée derrière le dos, comme un braqueur. Une clochette tintinnabule joyeusement au-dessus de ses oreilles. Des flagrances sucrées embaument l’atmosphère. Les papilles du soldat frugal s’émoustillent comme si elles découvraient un nouvel univers de saveurs. Conséquence d’un régime alimentaire qui fait abstraction des produits non favorables à l’optimisation de ses performances sportives, sauf en de très rares occasions. Quelques pas décidés, puis Victor se campe devant le comptoir. — Bonjour, dit-il d’une voix neutre, mais ferme. Il fixe les yeux clairs de Thelma, serveuse au Cranachan, la trentaine. La main gauche se détache de son dos, se plante avec autorité sur le comptoir. Sur la paume : un origami bleu ciel dont même un profane devine la patience et le niveau de technicité nécessaires à sa confection. Un frisson parcourt Victor tandis qu’il contemple l’œuvre remarquable, déployant sa triple paire d’ailes entre sa créatrice et son destinataire. Il voit un oiseau-tonnerre glorieux, mystique, investi d’un pouvoir légendaire. Il voit un guide qui prend son envol. — Vous avez déposé ceci dans ma boite aux lettres. Je voudrais savoir pourquoi. _________________ ☆ The purpose of life is not to have fun. It is to be useful, to be honorable, to be compassionate, to have it make some difference that you have lived and lived well. |
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Thelma Appelbaum 653
Sillage + elle
Jane Levy
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mar 21 Mai - 1:55# | |
| Le sens de la vie tient peut-être à ça : veiller à ce que chaque petite dame âgée ait le cœur léger. C'est la conclusion à laquelle parvient Thelma, à la tâche derrière le comptoir du Cranachan. Dans son cas, cela consiste à demander comment vont les petits-enfants et à sélectionner la tarte aux fraises la plus brillante. Une mission rondement menée pour cette fois. À se demander pourquoi elle a cherché le sens de l'existence toutes ces années, alors que la réponse se trouvait entre elle et grand-mère gâteaux, qui s'éloigne en lui souhaitant trois fois une bonne journée. La vendeuse se dit qu'elle pourra expliquer ça à son prochain date, lorsque l'inconnu en face d'elle lui demandera immanquablement ce qu'elle « fait dans la vie ». Je rends les petites mamies heureuses. La formulation est peut-être à revoir. Mais elle n'a pas le temps de réfléchir davantage au slogan parfait qui la rendrait fascinante : un imposant gaillard a franchi le seuil de la boutique. Thelma esquisse un sourire mutin en le saluant. Les clients atypiques sont ses préférés. Avec eux, le jeu du « quel gâteau va-t-il demander ? » est toujours plus ardu et donc, plus amusant. À l'évidence — mesurée ici à la circonférence des biceps de ce monsieur — ce n'est pas un habitué de la pâtisserie. Alors qu'il s'approche, Thelma baisse encore les yeux, à la recherche d’un anneau scintillant à la main gauche de son client. Main qu’il cache suspicieusement derrière son dos. Elle en est certaine désormais : Monsieur s’est fâché avec Madame. Il s’est dit que les fleurs pour se faire pardonner, c'est vu et revu. Un peu d'audace mon petit. Alors il a jeté son dévolu sur la meilleure pâtisserie de Monterey pour tenter de recoller les morceaux avec un peu de sucre. La dissimulation de sa main est un acte manqué : chaque fois qu’il pose les yeux sur cet anneau symbolique, les mots qui lui ont échappé hier soir lui reviennent en tête. Et la honte qui va avec. Alors il la cache, cette main. Il va choisir quelque chose au chocolat, pour montrer à sa précieuse que sa vie mérite d’être remplie des plaisirs les plus exquis, il y veillera dorénavant. Aussi parce que ça ne rate jamais, le chocolat. Il ne peut pas se permettre de prendre des risques aujourd’hui. Son mariage avec Olivia en dépend et… Thelma cligne des yeux pour se reconnecter à la réalité, croise ceux de son interlocuteur, soutient ce regard déterminé. Du chocolat. Elle en est certaine. « Vous avez déposé ceci dans ma boite aux lettres. Je voudrais savoir pourquoi. » Une demi-seconde lui suffit pour reconnaître le petit oiseau qui vient d’atterrir sur son comptoir, lové au creux de cette fameuse main gauche. Un retentissant « ah ! » résonne dans le crâne de la rouquine. Ses sourcils se hissent haut sur son front, ses lèvres se pincent. L’art de la dissimulation ne fait pas partie de sa formation de marchande de douceurs. C'est regrettable et elle en touchera deux mots à Thomas, le patron du Cranachan. En attendant elle ouvre la bouche, mais aucun son ne semble motivé à en sortir. Le destinataire d'un de ses pliages l'a retrouvée. Ça ne lui est jamais arrivé, ça n’est pas censé lui arriver. Elle est une semeuse de papiers anonyme, qui est ce blond aux gros bras pour se permettre de venir mettre à jour son identité secrète ? Si elle n'était pas aussi abasourdie, elle serait scandalisée. Elle croise alors ses bras — moins musclés mais tout aussi vaillants — et ce simple geste suffit à lui redonner un peu de consistance. « Je… crois que vous… faites erreur ? » Bravo Thelma, cette défense hésitante et ce regard fuyant n'auraient pas convaincu le plus crédule des muffins à la myrtille. Mais comment saurait-il qu'elle est bien la mère de cette créature de papier ? À coup sûr, son oiseau-tonnerre sentait la vanille ou la fève tonka, ce qui a permis de la traquer jusqu'à l'intérieur de son antre-pâtisserie. Ça lui apprendra, à stocker ses œuvres dans sa boîte à cookies. Animée par un vague instinct de survie, Thelma désigne le comptoir d'un geste approximatif et mime une grimace. « Et puis c'est quoi au juste ce truc, un... crapaud ? » Elle n'en revient pas d'avoir prononcé ces mots. Cet oiseau lui a demandé des heures de travail minutieux, c'est comme si elle insultait son enfant.
Dernière édition par Thelma Appelbaum le Jeu 30 Mai - 23:03, édité 1 fois |
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Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
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gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Sam 25 Mai - 11:27# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.Nouvelle information sur Thelma : femme expressive qu’un rien perturbe. Habituellement, les gens paniquent devant Victor lorsqu’il évoque la manière forte d’obtenir ses réponses. Avec la vendeuse, il s’est montré poli. Il a dit bonjour, sans allusion ou menace cachée. Lorsqu’il se déplace pour une mission, ses interlocuteurs n’ont pas tous ce privilège. Loin de là. — Je… crois que vous… faites erreur ? Bras croisés tels deux bâtons d’allumette faisant obstacle à un obus de 155mm. Joues teintées de groseille, mimant les tartelettes à sa droite. Mignon. Mignonne. Dommage qu’elle se prend pour une marchande de feuilles potagères et raconte des salades. Victor déteste – la tromperie, pas la laitue relevée d’une bonne vinaigrette maison. Elle baisse les yeux sur l’oiseau-tonnerre posé sur le comptoir. Victor garde les siens rivés sur le visage blême taché d’écarlate. Il sait ce qu’il a apporté. Ce qu’elle a apporté. — Et puis c'est quoi au juste ce truc, un... crapaud ? Défense risible, désespérée. Victor a presque envie de garder le silence pour que Thelma s’enfonce davantage. Les petits plaisirs mesquins de la vie, comme faire le pied de grue devant une patinoire et se gausser de chaque chute maladroite. Cédant à la commisération, il rétorque : — Un crapaud avec six ailes, une queue, un long cou fin et un bec ? Nul besoin d’une expertise en zoologie pour cerner l’impossibilité de la chose. La nature est friande de singularités, de bizarreries, toutefois celles-ci ont des limites. — Vous mentez terriblement mal. Vos collègues ne vous l’ont jamais dit ? Une vendeuse en pâtisserie doit être capable de vendre un gâteau au crottin et persuader le client qu’il a un goût de chocolat. Vous êtes loin du compte. Visage impassible de Victor, qui se surprend à sourire intérieurement. En matière de singularités, Thelma en tient une belle couche. Moins bizarre qu’une grenouille ailée avec une queue et un bec, mais de meilleur aloi que l’adjudant Krett avec son crâne rasé, traversé d’avant en arrière par une bande centrale de cheveux vaniteux. Parce qu’aucune personne ordinaire ne mentirait pour un origami – d’excellente facture – glissé dans une boite aux lettres. Durant sa jeunesse iconoclaste, Victor en avait bourré quelques-unes de boules puantes. Il niait parce qu’il était odieux et malfaisant. Rien de tel chez Thelma. Une personne odieuse et malfaisante ne déposerait pas un bel ouvrage mystique dans la boite aux lettres d’un inconnu. À moins que… — Laissez-moi vous exposer la vérité. Tendant le bras vers l’ouest, Victor livre une adresse précise, coordonnées GPS incluses, ainsi qu’un intervalle horaire de douze secondes – la durée totale du larcin. Douze secondes, c’est beaucoup. Un chrono anormalement élevé. Victor met seulement trois secondes à prélever son courrier : une seconde pour l’ouverture de la boite aux lettres, une seconde pour la collecte, une seconde pour la fermeture. Pas besoin de plus. La lenteur insistante de Thelma atteste que la mission du Guide ailé est d’une importance cruciale. — Vous avez posté cet oiseau-tonnerre majestueux, la création d’une artiste inspirée. Ma caméra de surveillance a capturé votre faciès fripon ainsi qu’une partie de votre silhouette. En plus d’une piètre menteuse, vous êtes désopilante en maraudage. Dissimuler son visage sous une cagoule ou un sombrero, c’est la base lorsqu’on furète aux abords des habitations. Mais vous vouliez peut-être que je vous retrouve. Consciemment ou inconsciemment. Silence. Suspens. Tic-tac de l’horloge. Un coup de klaxon impatient dans la rue. Victor rouvre la bouche : — Vous vous souvenez peut-être de moi. Pâques 2023, le concours de pâtisserie que le Carnachan a organisé avec le soutien de la mairie. J’y étais, candidat Victor Nash. Vous y étiez aussi, Thelma.
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
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diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Jeu 30 Mai - 23:02# | |
| L'énergie du désespoir. Le chant du cygne. Et malgré tout, fatalement, cette sentence implacable : la défense de Thelma n'a servi à rien, son crapaud ailé est tourné en dérision par l'homme de l'autre côté du comptoir. Ce qui est un moindre mal comparé à ce qu'il s'apprête à rajouter. — Vous mentez terriblement mal. Vos collègues ne vous l’ont jamais dit ? Une vendeuse en pâtisserie doit être capable de vendre un gâteau au crottin et persuader le client qu’il a un goût de chocolat. Vous êtes loin du compte. La mine renfrognée, les bras toujours croisés, la vendeuse ne peut que subir la deuxième attaque qui s'abat sur elle. Même l'oiseau-tonnerre ne peut rien y faire. Après une seconde de stupéfaction, Thelma articule un « wow » silencieux en fixant son interlocuteur. Son cœur s'emballe un peu, alors elle prend une grande bouffée d'air. Inspirer. Expirer. Des clients difficiles, elle en gère tous les jours ou presque. Mais des clients qui ne sont même pas des clients, et qui viennent en plus lui expliquer comment faire son métier, c'est un parfait détonateur pour la bombe à émotion qu'elle représente. Heureusement pour eux deux, l'homme se décide à lui « exposer la vérité ». À grand renfort de coordonnées spatiales et temporelles, et autre explications très terre à terre. — Vous avez posté cet oiseau-tonnerre majestueux, la création d’une artiste inspirée. Ma caméra de surveillance a capturé votre faciès fripon ainsi qu’une partie de votre silhouette. En plus d’une piètre menteuse, vous êtes désopilante en maraudage. Dissimuler son visage sous une cagoule ou un sombrero, c’est la base lorsqu’on furète aux abords des habitations. Mais vous vouliez peut-être que je vous retrouve. Consciemment ou inconsciemment. Moins charmant que la piste remontée grâce à un sillage vanillé. Mais soit : Thelma s'est fait avoir à cause d'une stupide caméra de surveillance. Dans un geste nerveux, elle se gratte l'arrière de la tête en écoutant ce résumé de la situation. Cette façon de glisser un compliment entre deux critiques est déstabilisante. Puis zut, que cherche cet inconnu, à la fin ? Elle n'a fait de mal à personne. Ce papier plié n'était pas censé causer de trouble, tout au mieux un peu de joie. Voulait-elle qu'on la retrouve ? Elle n'a pas vraiment réfléchi aux conséquences de ses semis de papier. Elle ne réfléchit jamais vraiment à rien, sa sœur a passé ces vingt dernières années à le lui répéter, après tout. Thelma va expliquer ce simple fait à ce monsieur peu commode, qu'aura-t-il à répondre à ça ? Il semble déjà penser qu'elle est un peu idiote, ça ne fera que le conforter dans cette idée et il la laissera tranquille, elle la vendeuse qui ne sait pas mentir, et... — Vous vous souvenez peut-être de moi. Pâques 2023, le concours de pâtisserie que le Cranachan a organisé avec le soutien de la mairie. J’y étais, candidat Victor Nash. Vous y étiez aussi, Thelma. Une seconde pour se rappeler. Le corps de la vendeuse se décrispe un peu. Puis sa bouche s'arrondit. Bien sûr. — Oh mon dieu, mais vous êtes le Roi des Braises ! Le Prince du Charbon, c'est vous, débite-t-elle à toute vitesse. Elle se surprend à sourire, pour la première fois depuis que ce Victor Nash a fait irruption avec son oiseau de papier. Je peux enfin mettre un visage sur ce gâteau. Incroyable. Sentant que son expression est un peu trop malicieuse, Thelma baisse la tête et cache le bas de son visage avec sa main droite. Toute l'équipe du Cranachan s'en rappelle, de ce gâteau — ou plutôt de cet ODNI, Objet Dégustatif Non Identifié. Il a fait sensation lors du concours 2023 mais pas pour les raisons attendues. Avant qu'elle puisse ajouter autre chose, la sonnette de la pâtisserie tinte. Thelma relève la tête, reprend son sérieux, avise le petit groupe qui vient de franchir le seuil de la boutique. Cette arrivée l'aide à reprendre tous ses moyens, le rose de ses joues s'atténue. Elle prend appui sur le comptoir et se penche vers le plus-totalement-inconnu avant de lui parler à voix basse, sur le ton qu'elle imagine approprié aux confidences mystérieuses. — Écoutez. Afin de ménager l'attente, et savoir ce qu'elle va dire, Thelma fait une pause avant d'enchaîner. Soit vous prenez des pâtisseries, et pendant que je les prépare, je vous explique pourquoi l'oiseau-tonnerre vous a choisi. Soit il va falloir attendre que je m'occupe de ces messieurs-dames... Victor. Elle aussi, elle peut mettre un prénom à la fin de ses phrases pour asseoir son autorité, et après tout, le Cranachan, c'est son royaume. Elle est la marquise de la meringue, la reine des tartelettes. S'il y a une personne qui doit dicter les règles ici, c'est elle. Elle et son oiseau de papier, qui a su suivre la voie pour la retrouver.
Dernière édition par Thelma Appelbaum le Ven 7 Juin - 17:23, édité 1 fois |
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Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
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gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 2 Juin - 12:09# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.Elle se souvient de lui. De son brûlé suprême au chocolat au concours, conservé ensuite dans un coin de remise – aucune souris n’ayant les dents assez solides pour grignoter ce bloc fuligineux massif –, puis jeté dans un poële à charbon au cœur de l’hiver, répandant d’exquises flagrances aromatiques lors de sa combustion finale. Victor n’a pas honte de sa création culinaire. Elle a apporté chaleur et douceur au sein d’un foyer, en sus de fumées toxiques qui ont rappelé à l’ordre un voisin tapageur. Triple bénéfice. Maintes créations concurrentes n’avaient rien de mieux à offrir qu’une satisfaction éphémère du palais doublée d’une stéatose hépatique. — Oh mon dieu, mais vous êtes le Roi des Braises ! Le Prince du Charbon, c'est vous. Je peux enfin mettre un visage sur ce gâteau. Incroyable. Quatrième bénéfice : la remémoration du gâteau carbonisé dessine un charmant sourire sur le visage de Thelma. Un sourire spontané, gentiment moqueur, de ceux qui égayent l’atmosphère et se propagent telle la douce lueur de l’aube. Pourquoi le réprimer sous sa paume ? L’onde guillerette atteint et traverse le militaire, qui sourit à son tour. — Vous flagornez, Thelma. Achever ses phrases avec le prénom de la vendeuse, c’est comme marquer un point final en écrasant la mine d’un stylo sur le papier. Ça percute, ça donne du style, c’est rigolo. Victor embraye : — Les braises nous fascinent, le rougeoiement d’un feu au cœur de la nuit offre un spectacle saisissant. Quant au carbone résiduel, il est à la base de la vie sur notre belle planète. Ses atomes forment la matrice des arbres, des fleurs, des papillons et des canetons, ainsi que de nos propres corps. Le carbone est aussi le principal constituant des sucres que vous utilisez en abondance dans cette boutique, ce qui en théorie fait de moi un prince de ce lieu. Et vous place ainsi dans l’obligation de me répondre, Thelma. Fin de phrase percutante, stylée, rigolote. Victor sourit toujours. Il sourit parce qu’il garde l’avantage – et pas qu’un peu. Le système d’alerte rudimentaire à l’entrée fait entendre son tintement métallique. Thelma capitule, se vautre sur le comptoir telle une pécheresse au confessionnal, l’oiseau-tonnerre sacral pour témoin. En ce jour béni, la providence sert les intérêts de Victor et il ne boude pas son plaisir. — Écoutez. Victor approche une oreille. Ses bras veineux croisés devant lui. Le sergent évalue que l’interrogatoire a duré moins de trois minutes trente. Fastoche de chez fastoche. Avec une vendeuse pareille, le proclamé Roi des braises pourrait négocier l’achat d’une forêt-noire au tarif d’un cookie. Ce qu’il ne fera pas. Victor préfère l’odeur des pins baignés de soleil aux crèmes saturées de sucre. En outre, abuser de la candeur d’une ingénue serait un affront aux valeurs du drapeau étoilé. — Soit vous prenez des pâtisseries, et pendant que je les prépare, je vous explique pourquoi l'oiseau-tonnerre vous a choisi. Soit il va falloir attendre que je m'occupe de ces messieurs-dames... Victor. Fin de phrase percutante, stylée, pas franchement rigolote. Le Roi déchu déchante. La maitresse des lieux, c’est Thelma aux cheveux de cuivre et elle le fait bien sentir. Pas si ingénue, la vendeuse. Victor déplie les bras et recule en silence. En jargon militaire : il opère un repli stratégique. Inutile de mêler des civils à leur affaire d’origami mystique. Bienséant, il salue les quatre visages mornes venus troquer leurs maigres économies contre des miettes de bonheur.
Les secondes s’écoulent. Le militaire longe les étals et lorgne les gourmandises, mimant l’intérêt d’un client hésitant. Victor connait peu de choses aux pâtisseries. Le sujet ne figure pas au programme de la formation militaire. Certains produits ont des noms étranges affichés sur une étiquette, certains ne donnent pas l’impression d’être comestibles. Un gâteau en forme de ziggourat chapeautée d’une coulée verte le rend particulièrement dubitatif. Du coin de l’œil, il observe Thelma et ses ouailles. Il observe surtout Thelma. Avenante, aimable, enjouée. Une frimousse qui s’anime jusqu’à la pointe des sourcils, étonnamment mobiles. Drôle d’oiseau. Elle a peu en commun avec les bonimenteurs de sa profession, leurs rictus de façade et leurs duperies mercantiles. Quelles conséquences sur les finances du Cranachan et la qualité de son offre ? Victor poursuit l’examen des pâtisseries à la vente, cette fois avec un intérêt non feint.
Les secondes s’écoulent. Des emplettes bon marché plein les mains, le quatuor salue chaleureusement la vendeuse et se dirige vers la sortie. Une expression de gaieté éclaire leurs visages détendus. Tous. Symptômes identiques à madame Bavarde, la doyenne qui a tout compris. Victor leur ouvre la porte. Tintinnabulement joyeux au-dessus de sa tête. Défilé de mines réjouies et de remerciements spontanés. Épatant. Dans la rue, aucun nouveau client en approche. Le militaire referme la porte, puis repart à l’assaut du comptoir. — Vous avez un truc. Son bras épais se tend à l’horizontale, l’index se déplie comme une lame de couteau, la voix tranche : — Je vais prendre ceci. Un gâteau au format familial, appétissant et coloré, mais pas frimeur. Le plus onéreux de sa catégorie. Un petit oiseau meringué semble chanter en son centre. — Il m’en faut trois. Cela vous donnera le temps de m’expliquer pourquoi l’oiseau-tonnerre vous a choisie vous, avant de me choisir moi.
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célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
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diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Ven 7 Juin - 16:28# | |
| Le gaillard recule et cela procure à Thelma, 1m57, une satisfaction au goût de victoire. Plus douce encore qu'une ganache au chocolat. Pas le temps de savourer cependant : elle a quatre clients à satisfaire et une explication à trouver. Si ses calculs sont bons, cela fait un total de cinq missions à relever. Alors la vendeuse affiche son sourire le plus avenant et se met à la tâche. Ses mains habiles indiquent les valeurs sûres aux indécis en quête de conseil, soulèvent avec précautions les créations sucrées, plient les boîtes en cartons. Les mots que M. Gros Bras a prononcés quelques instants auparavant lui reviennent en tête. « Vous flagornez, Thelma » Qui parle comme ça ? Qu'est-ce que ça veut dire déjà, flagorner ? Et puis est-ce bien sérieux, cette histoire de carbone, de canetons et d'obligation de lui répondre ? N'importe quoi, ce Victor. D'un œil, elle le surveille. Il a l'air de se tenir. N'importe qui serait fasciné par les beautés du Cranachan, mais sur ce coup rien n'était gagné d'avance. Que va-t-elle pouvoir bien pouvoir lui raconter ? L'oiseau-tonnerre vous a choisi. C'est elle qui a prononcé sa propre sentence. Et vu le phénomène en face d'elle, aucune chance qu'il lâche l'affaire avant d'avoir eu une réponse. Thelma doit gagner du temps. Elle ralentit ses gestes et demande au petit groupe ce qui les amène à Monterey car elle ne pense pas les connaître : un quatuor aussi joyeux, elle s'en souviendrait. Aaah, leurs enfants respectifs, en couple depuis 8 ans, les ont convoqués car ils ont une annonce à leur faire. Une nouvelle joyeuse, sans doute ? Elle écoute distraitement leur réponse et guette Victor, qui est en pleine inspection des vitrines à gâteaux. L'oiseau-tonnerre semble avoir une importance particulière à ses yeux. Elle ne peut pas lui avouer la vérité. La fin d'une journée intense, la fatigue qui allait avec, Chaussette qui ronronnait sur elle. Le défilement apathique de son écran de téléphone, la photo de bague de fiançailles d'une de ses connaissances du lycée qui est apparue devant elle. La panique qui a assailli Thelma, lorsqu'elle s'est demandée ce qu'elle aurait à annoncer, si elle était du genre à étaler son intimité sur les réseaux. La suite de la nuit avait pour seul objectif de lui occuper l'esprit pour arrêter le flot de ses pensées. Elle a arrêté son zapping télé sur un reportage pointu à propos des oiseaux légendaires, et ne trouvant toujours pas le sommeil, elle s'est lancée dans un des pliages les plus complexes qu'elle ait réalisé jusque-là : le fameux oiseau qui a atterri plus tard dans la boîte aux lettres de Victor Nash. Une simple histoire d'insomnie un peu navrante. Thelma a tout donné. Les quatre sympathiques ont les bras qui débordent de douceurs, ils sont heureux, ils l'abandonnent. La vendeuse observe le Roi des Braises fermer la porte de la pâtisserie et revenir vers elle. Il va lui faire une remarque sur la symétrie imparfaite de gâteaux. C'est certain. Elle l'entend déjà. L'angle supérieur droit de ce gâteau est de 87° au lieu de 90°, Thelma. C'est inacceptable. — Vous avez un truc. Un... truc ? Thelma s'essuie le visage d'un revers de la main, de peur que ce « truc » soit une miette du pain au chocolat qu'elle a boulotté avant le début du service. Mais Victor n'a pas l'air d'être focalisé sur elle. Il désigne un gâteau devant lui. — Il m’en faut trois. Cela vous donnera le temps de m’expliquer pourquoi l’oiseau-tonnerre vous a choisie vous, avant de me choisir moi. Toujours cette façon autoritaire — et un peu énervante — de formuler les choses. Thelma s'approche. Un Paradiso, grand format, par trois. Monsieur va s'en sortir avec une petite addition. Ce n'est pas elle qui va s'en plaindre. Elle se penche sur les gâteaux pour s'en saisir avec délicatesse. — Pourquoi il m'a choisie, je ne peux pas vous dire. Il est venu à moi. C'est tout, expose-t-elle avec un petit haussement d'épaules, comme s'il n'y avait vraiment aucun sujet. Inutile de lui rappeler la façon dont ce Victor lui a parlé quand elle lui a livré un mensonge pathétique, quelques minutes plus tôt. Cette fois-ci, ce n'est pas vraiment un mensonge. L'univers a conspiré pour qu'elle se retrouve devant ce reportage, l'autre nuit, seule avec ses angoisses. L'oiseau-tonnerre est venu à elle. Concentrée sur ces gestes, la rouquine garde les yeux sur les pâtisseries qu'elle manipule. Elle tente de se remémorer des bribes du reportage. Protecteur des humains, exécuteur de la justice divine, gardien de l'harmonie... Sacrées missions. Sa mission à elle, plus modeste, consiste à cet instant à se saisir de trois grandes boîtes en carton pour y glisser les pâtisseries. — Quant à pourquoi l'oiseau-tonnerre vous a choisi vous... C'est difficile à expliquer. Je l'avais entre mes mains. Et j'ai ressenti... des ondes ? Une perception ? Appelez ça comme vous voulez. Quelque chose m'a fait m'arrêter devant chez vous. Bien sûr je ne savais pas que c'était chez vous, juste, ça l'était. Chez vous. Bref. Qu'est-elle en train de raconter ? Thelma secoue la tête en refermant la première des trois boîtes. Sans plus réfléchir, elle enchaîne rapidement. L'improvisation est toujours le style qui lui a le plus réussi dans la vie. — Je crois que l'oiseau-tonnerre a une mission pour vous, Victor. Et je pense que je peux vous aider. Malicieuse, elle a relevé les yeux au moment où elle a prononcé son prénom. Elle n'a pas pu s'en empêcher, et lutte maintenant pour réprimer un sourire en coin. Ils sont bêtes, à ponctuer chacune de leurs phrases ainsi. Ils sont bêtes et ça commence à l'amuser, Thelma.
Dernière édition par Thelma Appelbaum le Dim 23 Juin - 10:37, édité 1 fois |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
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Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mer 12 Juin - 20:58# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.Le calme baigné d’arômes gourmands fournit un environnement propice aux confidences. Pour une civile, du moins : de mémoire de soldat, les pépites au chocolat et les fruits confits n’ont jamais fait parler un combattant ennemi. La gestuelle alanguie de Thelma annonce des aveux étirés, entrecoupés de longues pauses. La célérité n’est point son point fort. Victor le savait avant même de franchir la porte tintante du Cranachan : le temps passé devant sa boite aux lettres l’attestait. Crénom, douze secondes ! Le temps de chanter le premier couplet de l’hymne national, en se grattant le nez entre chaque parole. Le temps de courir un cent mètres et conclure par un salto avant, en luttant contre un vent de face. En revanche, la vendeuse-artiste est très habile de ses mains. Indubitablement. Ce qu’elle perd en fuite anarchique de picosecondes, elle le gagne en maitrise de l’espace. Aucune chance qu’un gâteau tombe par terre, invite une colonie de bactéries à son bord, puis fermente dans une boite en carton avant de revendiquer une prime de performance au lobby des fabricants de papier-toilette. Après douze secondes – manifestement son chrono fétiche –, Thelma aux doigts de fée confesse : — Pourquoi il m'a choisie, je ne peux pas vous dire. Il est venu à moi. C'est tout. Ça commence bien. Cent mètres et un salto, vent de face, pour une confession qui ne confesse rien. À ce rythme, la barbe du sergent touchera le sol avant qu’il reçoive le message complet de l’oiseau-tonnerre. Thelma joue la carte du mystère, probablement en parfaite bonne foi. On saisit rarement l’origine des signes, l’intrication sibylline des événements. En particulier des événements qui n’ont pas encore eu lieu. Victor pose un coude sur le comptoir et fixe la vendeuse. — Imprécis, mais intéressant. Vous n’avez pas l’air de pipeauter. La vérité réussit mieux à votre teint, Thelma. Un minuscule tir de semonce – percutant, stylé, vaguement rigolo – servi avec un sourire en coin. Le coin opposé affichant un pli sévère, résolument hostile aux boniments. Une chose est sûre : il y a forcément une raison. Pléthore de génies humains l’ont proclamé sous une forme ou autre : Le hasard, c’est le destin qui se promène incognito.. Destin auquel certains croyants attribuent le nom de Dieu. Thelma, quant à elle, ne semble pas s’encombrer de dogmes. Aucun signe religieux, aucun verbiage de bénitier. Une artiste inspirée, dotée d’esprit ouvert et sensible, qui prend simplement les choses comme elles viennent. Ce qu’elle démontre : — Quant à pourquoi l'oiseau-tonnerre vous a choisi vous... C'est difficile à expliquer. Je l'avais entre mes mains. Et j'ai ressenti... des ondes ? Une perception ? Appelez ça comme vous voulez. Quelque chose m'a fait m'arrêter devant chez vous. Bien sûr je ne savais pas que c'était chez vous, juste, ça l'était. Chez vous. Bref. Victor hoche la tête. Plisse le front, puis les yeux, comme pour tenter de voir au-delà des apparences. Il ne distingue rien d’autre qu’une vendeuse et trois gâteaux similaires. Thelma, contrairement à lui, est peut-être extralucide. Potentiellement la réincarnation d’une chamane ojibwée. Potentiellement une descendante des inventeurs du GPS, parce que la fumette sous une tente de sudation n’a jamais prodigué une précision géographique aussi aiguë. La théorie des cheveux en cuivre capteurs d’ondes invisibles n’était pas si farfelue, en fin de compte. Il commente : — Je comprends. Vous avez perçu son battement d’ailes occulte, puis son vol vous a guidée jusqu’à ma boite aux lettres. Cela m’est arrivé quelques fois. Mais j’avais toujours une intention initiale, une épreuve à surmonter, une question. Vous m’avez expliqué le comment, quel est selon vous le pourquoi ? Victor baisse les yeux sur le comptoir. Contemple l’origami qui les a réunis pour une raison encore nébuleuse. Assurément, l’oiseau-tonnerre n’est pas un coup d’essai en matière de pliage. Impossible. Il faut apprendre à mettre un pied devant l’autre et se casser la gueule une bonne centaine de fois avant de bondir jusqu’au ciel et chevaucher les éclairs. Pourquoi maintenant ? Pourquoi elle ? Pourquoi lui ? Mystère. Victor se rappelle la première fois que l’animal légendaire lui est apparu dans la tempête au-dessus de l’océan, les batailles et les drames qui ont succédé. Son cœur et son poing se serrent. Non, pas cette fois, se rassure-t-il en relevant les yeux sur Thelma. Le Grand Oiseau n’aurait pas niché entre ses petites mains délicates pour accomplir ce type de mission. Il y a un truc chez elle, étranger à la fureur et inné, qui refoule vaillamment les ténèbres telle la flamme douce d’une bougie. Qui ramène un sourire sur les visages moroses. — Je crois que l'oiseau-tonnerre a une mission pour vous, Victor. Et je pense que je peux vous aider. Une vive lueur d’intérêt s’allume dans l’œil du militaire. Le mot-clé Mission produit chez lui le même effet que la formule on va promener ? à un animal de compagnie, ça brille ! à un chercheur d’or, ou hé, salut à un ermite cloitré dans sa grotte depuis le dernier concert au Pérou des Cranberries. Il se penche davantage sur le comptoir, dégaine sa carte de paiement pour confirmer la transaction des trois machins qu’elle appelle Paradiso grand format. — Dites-moi tout, Thelma. Endossez votre rôle de guide et révélez le message.
_________________ ☆ The purpose of life is not to have fun. It is to be useful, to be honorable, to be compassionate, to have it make some difference that you have lived and lived well. |
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Thelma Appelbaum 653
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
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diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 23 Juin - 11:09# | |
| Pourquoi. Victor souhaite savoir pourquoi. Thelma aussi aimerait savoir. Mais on n'obtient pas toujours ce que l'on veut dans la vie : elle en a la confirmation, chaque jour, quand un impitoyable parent refuse de céder à la supplication de son adorable bambin, alors que celui-ci tente en vain d'obtenir une viennoiserie supplémentaire. La vendeuse espère qu'avec l'affaire qui les occupe ce matin, il n'y aura ni larmes ni cris aigus. À jauger l'homme en face d'elle, ça serait surprenant. Lui parle d'intention initiale et d'épreuve à surmonter, avec l'oiseau-tonnerre qui l'a aidé à naviguer au milieu de tout cela. Il a l'air sérieux. Elle a vraiment du mal à saisir le personnage. Si pointilleux, si pragmatique, si... enclin à lui faire remarquer que la vérité sied mieux à son teint, et pourtant persuadé qu'une créature mystique l'a guidé jusqu'ici. Peut-être a-t-il raison. Au fond, elle commence à y croire. — Dites-moi tout, Thelma. Endossez votre rôle de guide et révélez le message. Son rôle. Thelma fronce discrètement des sourcils en refermant la dernière des trois boîtes en carton. Son rôle c'est d'emballer des gâteaux, d'être l'enfant un peu artiste de sa fratrie et, quand l'occasion se présente, de répandre un peu de joie autour d'elle. À 34 ans et demi, sa plus grande responsabilité consiste à indiquer aux femmes enceintes quelles pâtisseries du Cranachan sont sans risque pour elles — et c'est déjà beaucoup pour ses frêles épaules. Désormais, elle se retrouve avec un rôle de guide. Son horoscope du matin aurait au moins pu avoir l'obligeance de la prévenir, avec une phrase du style : « Des responsabilités inattendues pourraient vous tomber dessus. Fuyez. » Elle ne va pas flancher pour autant. Après tout, elle a voulu jouer et s'imposer comme une alliée dans cette mission cosmique, alors ils vont jouer. Attentive, elle empile les boîtes dans un sac aux couleurs du Cranachan et le dépose avec délicatesse sur le comptoir face à son étrange client. Il lui tend sa carte de paiement. Elle s'en empare sans se presser — elle ne veut pas se laisser déborder par les émotions et la lenteur lui permet de se canaliser — tape le montant dû sur son terminal de paiement, y insère la carte. — Résumons les faits, Victor. Je... je pense qu’une mission évidente, que vous avez remplie à la perfection, c’était de me retrouver. Thelma hoche la tête d'un air approbatif et esquisse un sourire, tandis qu'elle tourne le terminal vers son client. Son père lui a souvent dit que la flatterie lui ouvrirait toutes les portes. Elle ne fait qu'appliquer ses précieux conseils. Mais elle le pense sincèrement : être traquée puis retrouvée par une caméra de surveillance, c'est une grande première dans son existence et ça l'a assez impressionnée. Flippant, mais impressionnant. L’oiseau-tonnerre savait que cela vous mènerait ici, au Cranachan… O-on peut donc en déduire qu’il voulait que vous mettiez les pieds ici car quelque chose vous attendait… Du regard et d'un geste des mains à la façon d'un détective dans une série B, Thelma balaie la pièce. Quelle vérité se trouve dans ce temple des douceurs ? La mission ne peut pas juste consister à la trouver elle, Thelma Appelbaum, Ire du nom. Elle n'est qu'une banale employée de commerce. Certes, elle est aussi la créatrice de l'oiseau tout-puissant qui les réunit ici aujourd'hui. Mais elle n'est qu'une adjuvante dans une quête plus grande qu'elle, elle en est persuadée. Son regard passe des vitrines achalandées, à Victor, à l'oiseau bleu ciel qui se trouve toujours sur le comptoir, au sac rempli de pâtisseries juste à côté de lui... — Oh ! Thelma se fige, frappée d'une illumination, avant de s'animer à nouveau et de faire des moulinets avec ses mains à mesure qu'elle réfléchit à voix haute. Vous avez pris le temps d'inspecter les gâteaux, mais votre attention s'est portée spécifiquement sur le Paradiso. Ça ne peut pas être un hasard, l'oiseau-tonnerre vous a guidé dans ce choix. « Paradiso » c'est quoi, espagnol ? Italien ? P-portu...gais ? Thelma fait une grimace un peu plus marquée à chaque langue qu'elle énumère. Ces langues existent-elles vraiment ? La géographie n'a jamais été son fort et les parties de Trivial Pursuit sont toujours un long moment d'agonie pour elle. Maudite soit-elle de ne pas avoir écouté Thomas lorsqu'il leur a expliqué l'idée de ce gâteau, inspiré de ses vacances d'enfance quelque part en Europe. Elle sent son pouls s'accélérer sous le coup de l'embarras, alors elle poursuit à toute allure. — Un gâteau, d'autant plus en format familial, et d'autant plus en trois exemplaires, c'est synonyme de partage. P-peut-être que l'oiseau-tonnerre souhaite vous réunir avec une personne espagnole ! Ou italienne... Ou... Hmm. Et voilà que cela recommence : elle ne sait plus ce qu'elle raconte. Thelma serre les dents et croise les bras, dans une tentative pour reprendre un peu de contenance. Elle observe Victor. « Je peux vous aider », qu'elle lui a assuré. Elle n'en est plus certaine. Être la messagère d'une créature légendaire, c'est pas de la tarte. |
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Victor Nash 418
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39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
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gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Jeu 27 Juin - 21:04# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.Thelma réfléchit beaucoup. Longuement. Lentement. Ou peut-être qu’elle donne juste l’impression de réfléchir. Qu’en réalité, elle capte les ondes mystérieuses du cosmos à l’aide de sa tignasse flamboyante. Victor ne lui en demande pas tant. Il réclame le message de l’oiseau-tonnerre, dans la langue de George Washington de préférence. Les piaillements et caquètements lui parlent peu – sauf en morse. Il aurait été plus simple de griffonner son ordre de mission sur une feuille de papier, au lieu d’en effectuer un pliage savant, toutefois les quêtes mystiques recèlent un charme ineffable dont l’efficacité militaire est totalement dépourvue. Toujours est-il que le délai de douze secondes lui a donné le temps de taper son code sur le terminal de paiement. La transaction a hésité, comme si la carte de Victor manifestait son désaccord à valider l’acquisition de bombes glycémiques, puis le rouleau compresseur des banques éternellement assoiffées de devises a mis le holà et fébrilement débité. — Résumons les faits, Victor. Je... je pense qu’une mission évidente, que vous avez remplie à la perfection, c’était de me retrouver. Victor opine, sans conviction. Afin d’encourager la guide à poursuivre sa guidance. Pour un militaire, « mission » et « évidente » forment une liaison aussi déplorable que « couteau » et « émoussé ». Une aberration. Un truc de civils. Une mission doit impliquer un challenge, une difficulté, un séjour à l’hôpital ou, plus héroïque encore, un défi d’intelligence. Or, le destin lui a mâché tout le travail : Victor a installé une caméra de surveillance après sa rencontre avec Jayson et ses récits effarants de vandalisme ; la caméra a capturé le visage de Thelma parce que celle-ci ne raffole pas des chapeaux de paille à larges bords ; Thelma lui était familière parce qu’il a démontré ses talents de chauffagiste à un concours de pâtisserie. Rien de glorieux là-dedans. Zéro difficulté. Enfin, la prophétesse entre dans le vif du sujet : — L’oiseau-tonnerre savait que cela vous mènerait ici, au Cranachan… O-on peut donc en déduire qu’il voulait que vous mettiez les pieds ici car quelque chose vous attendait… Bégaiement mis à part – des interférences dans le flux cosmique, assurément –, les propos sont très clairs. La gestuelle de Thelma également. Tel un musicien obéissant à la baguette de sa cheffe d’orchestre, la tête du militaire pivote de gauche à droite, embrassant un éventail de directions. Murs, étagères, présentoirs, pâtisseries en tout genre, étiquettes, serveuse inspirée, comptoir, origami, sac de courses. Aucune pancarte portant l’inscription : « Victor Nash ». — Vous êtes fichtrement perspicace, encourage-t-il avec une pointe d’admiration dans la voix. Poursuivez. Thelma réfléchit beaucoup. Longuement. Lentement. Puis capte. — Oh ! Victor parie qu’Isaac Newton a eu la même réaction lorsqu’une pomme lui est tombée sur le crâne, ouvrant la voie à la théorie de la gravité. De manière plus prosaïque, une mère de famille a soufflé le même « Oh ! » au centre commercial, juste avant de précipiter son cadis au rayon des couches infantiles. Thelma étant la porte-voix de l’oiseau-tonnerre, Victor parie sur une révélation mémorable plutôt qu’une anecdote en rapport avec la santé gastrique des nourrissons. Il humecte ses lèvres, suspendu à celles de la serveuse. — Que voyez-vous ? — Vous avez pris le temps d'inspecter les gâteaux, mais votre attention s'est portée spécifiquement sur le Paradiso. Ça ne peut pas être un hasard, l'oiseau-tonnerre vous a guidé dans ce choix. « Paradiso » c'est quoi, espagnol ? Italien ? P-portu...gais ? Victor fixe le paquet. Répond un battement de paupières plus tard – il n’a pas besoin de douze secondes pour réfléchir, lui. — Aucune idée. Je suis nul en langues étrangères. En outre, son choix de gâteau n’avait rien d’inspiré. Il résultait d’un amalgame de critères précis répondant à un objectif précis. Mais soit, les voies du destin sont impénétrables. La voix de l’oiseau-tonnerre aussi, manifestement. — Un gâteau, d'autant plus en format familial, et d'autant plus en trois exemplaires, c'est synonyme de partage. P-peut-être que l'oiseau-tonnerre souhaite vous réunir avec une personne espagnole ! Ou italienne... Ou... Hmm. Le visage du militaire se durcit soudainement. Blêmit. D’anciennes souffrances envahissent son esprit, compriment sa poitrine, brûlent des zones de sa peau – partout où gisent les cicatrices d’une bataille jamais oubliée. Dans sa conscience, une association s’opère inévitablement entre l’oiseau-tonnerre et une famille hispanique. D’origine mexicaine. — Attendez, ordonne-t-il sèchement. Il dégaine son téléphone. Tape « Paradissot » sur Wiktionary. Rien. Rectifie l’orthographe : « Paradiso ». Succès de la recherche. Il déchiffre le résultat. Soupire de soulagement. — C’est de l’italien. Cela signifie « Paradis » ou « Lieu paradisiaque ». C’est aussi une ville en Suisse, un pays merveilleux à ce qu’il parait. Avec des vaches qui rient et des rivières de chocolat. Aucun rapport avec les Espinoza. Son pouls retrouve une cadence régulière. Il range son téléphone, puis relève les yeux sur Thelma. — J’ai choisi ces trois gâteaux pour me livrer à une expérience. Je voulais les apporter au club de jeux pour personnes âgées qui se trouvent à quatre-vingt-neuf mètres d’ici, direction ouest, puis observer leurs réactions. Je voulais voir s’ils suffisent à égayer leurs journées. S’il y a un « truc » particulier dans les pâtisseries ou les emballages du Cranachan, ou si le « truc » vient essentiellement de vous. Maintenant, je sais. Il attrape le sac d’une poigne vigoureuse et décrète avec autorité, façon pistolet de gros calibre sur la tempe : — Vous allez venir avec moi, Thelma. Tout de suite. Le militaire réalise alors qu’il s’adresse à Son Altesse Sérénissime, Impératrice du Cranachan, Prêtresse de l’Oiseau-tonnerre. Revirement de stratégie : il porte le sac sous son menton, mains accolées et suppliantes, oreilles rabattues – sportif accompli, Victor contrôle chaque micromuscle et nanotendon de son corps, incluant ceux qui n’existent pas chez le commun des mortels –, puis dilate ses pupilles au maximum dans une imitation stupéfiante du Chat Potté. L’accent italien est une moindre réussite, avec une saveur de pizza trop cuite : — S’il vous plait, guide. Je subodore qu’une famille italienne en accointance avec ce club est dans la m…ouise, le festin à calliphoridés, la fosse d’aisances, le cake démoulé. (Victor Potté juge qu’après la métaphore pâtissière, Thelma a compris de quoi il retourne.) J’ai besoin de vous pour accomplir cette mission.
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
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diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mer 3 Juil - 12:16# | |
| Quand un monsieur pas commode vous ordonne d'attendre, vous attendez. C'est du moins le principe prudent qu'applique Thelma, alors qu'elle observe un Victor agité pianoter sur son téléphone portable. Les prophéties approximatives ont eu l'air de le perturber : il n'a pas dit « Attendez, Thelma », juste « Attendez ». Inquiétant. Heureusement, ils n'ont pas à patienter bien longtemps avant que la magie fiable et rationnelle de l'Internet n'opère. — C’est de l’italien. Cela signifie « Paradis » ou « Lieu paradisiaque ». C’est aussi une ville en Suisse, un pays merveilleux à ce qu’il paraît. Avec des vaches qui rient et des rivières de chocolat. La vendeuse écoute attentivement ces explications, puis hoche la tête et laisse échapper un « hmm » d'acquiescement. Ça se tient. Si un village est traversé par une rivière de chocolat, nul doute qu'un pâtissier a pu y mettre les pieds et y puiser de l'inspiration. Elle se fait malgré tout la note d'en toucher deux mots à son patron : si un tel endroit existe, pourquoi n'a-t-il pas jugé bon de lui en parler avant ? Elle pensait qu'ils étaient amis. Et entre amis, on se partage ce genre de bon plan. Elle règlera cette histoire plus tard. Son regard se pose de nouveau sur l'oiseau-tonnerre. Où essaie-t-il de les mener ? Vers ce « lieu paradisiaque » dont ils viennent d'apprendre l'existence ? Et pourquoi ses hypothèses ont-elles eu un effet sur Victor ? Ce n'était pas vraiment des révélations mystiques, tout au plus des déductions parfaitement logiques basées sur une observations des faits, et après tout Sherlock Holmes n'en fait pas davan… — J’ai choisi ces trois gâteaux pour me livrer à une expérience. Je voulais les apporter au club de jeux pour personnes âgées qui se trouve à quatre-vingt-neuf mètres d’ici, direction ouest, puis observer leurs réactions. Je voulais voir s’ils suffisent à égayer leurs journées. S’il y a un « truc » particulier dans les pâtisseries ou les emballages du Cranachan, ou si le « truc » vient essentiellement de vous. Maintenant, je sais. Il sait quoi, au juste ? Thelma fait la moue. Plusieurs choses l'alertent dans ce qu'il lui décrit. De ses lointains cours de sciences du vivant, elle a retenu que rien de bon ne peut suivre les mots « faire une expérience », du moins quand ils sont prononcés par quelqu'un de tout à fait pragmatique et porté sur les résultats. Et Victor — comme Mrs Greenleaf , sa professeure de 6th grade — est la définition même de pragmatique. À peine le temps d'ouvrir la bouche pour protester, la rouquine est devancée. — Vous allez venir avec moi, Thelma. Tout de suite. Et flûte. Il avait saisi le sac, pourtant. Elle a cru une seconde qu'il allait partir, qu'en ayant trois créations sucrées au bout du bras, la révélation lui était apparue, simple, formelle : le bonheur se trouve dans le beurre. Il aurait suffit d'ouvrir n'importe quel livre de cuisine pour le constater, mais Victor Gros Bras n'ouvre pas les livres de cuisine, sa participation au concours de pâtisserie 2023 en est la preuve. Son expédition au Cranachan aurait au moins pu lui apprendre ça. Mais ça n'a pas l'air de lui suffire. Devant les yeux ébahis de Thelma, il se met alors à faire des choses… étranges avec son visage, adopte un accent indéfinissable et mime une prière. — S’il vous plait, guide. Je subodore qu’une famille italienne en accointance avec ce club est dans la m…ouise, le festin à calliphoridés, la fosse d’aisances, le cake démoulé. J’ai besoin de vous pour accomplir cette mission. Cette fois-ci, la réaction de Thelma ne se fait pas attendre. Sourcils froncés, paumes tournées vers le plafond, les mots lui échappent. — Qu… Qu'est-ce que vous racontez ? Elle a compris environ une parole sur deux prononcées par cet homme, mais pense avoir saisi le sens général de sa supplication. Au fond, elle n'est pas certaine d'avoir vraiment envie de tout comprendre. — Je ne peux pas, lâche-t-elle avec un mouvement d'épaules, détournant le regard. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais je travaille. Son ton s'est fait plus sarcastique que voulu. Pour joindre le geste à la parole, Thelma se tourne vers la vitrine à sa gauche pour y réajuster des gâteaux, s'éloignant de quelques pas de Victor et l'oiseau de papier. Elle sent ses joues chauffer. On ne peut pas dire qu'elle travaille vraiment ces dernières minutes, mais tout de même. Elle a un poste à tenir. La vérité, c'est qu'elle n'a aucune envie de se rendre à ce club pour personnes du troisième âge. Elle ne va pas l'avouer car elle ne veut pas passer pour un monstre, mais si elle a un faible pour les papy et mamie gâteaux lorsqu'ils sont de passage au Cranachan, elle a horreur des endroits fermés où sont concentrées plusieurs personnes âgées. Elle n'a jamais oublié les odeurs de naphtaline et d'eau de Cologne qui accompagnaient ses visites à son grand-père Abe, il y a des années de cela, à la maison de retraite de Cypress Ridge. Et ça ne peut pas être ça, le Paradiso prophétisé par… L'oiseau-tonnerre. Thelma revient sur ses pas lentement, en fixant la créature posée sur le comptoir. Elle s'en saisit avec précaution. Au moment où ses mains entrent en contact avec le papier, un frisson la parcourt. Courant d'air ? Connexion mystique ? Second effet banal des retrouvailles d'une mère avec son enfant après une séparation ? La stupéfaction la fige une seconde, puis elle relève la tête vers Victor. — Allez-y, vous, suggère-t-elle d'un ton plus posé en tendant sa main droite vers son interlocuteur, l'oiseau lové au creux de sa paume. Ces gens ont peut-être besoin de vous. Vous ne serez pas seul, vous me raconterez. Thelma sent qu'il manque qu'il manque quelque chose, avant de réaliser et d'ajouter précipitamment, avec un léger sourire : — …Victor. Perturbée par les forces occultes à l'œuvre, elle en oublierait presque ses bonnes manières.
Dernière édition par Thelma Appelbaum le Sam 13 Juil - 11:29, édité 1 fois |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 7 Juil - 13:01# | |
| Fin mai. Centre de Monterey. Pâtisserie Cranachan.— Qu… Qu'est-ce que vous racontez ? Victor se raconte que son parlé italien ne vaut pas un quartier de pizza industrielle. On est nul en langues étrangères ou on ne l’est pas. — Je ne peux pas, se défile Thelma. Le militaire cligne des yeux. Accuse le coup. Ça, l’élue de l’oiseau-tonnerre ? L’illustre guide de sa mission ? Dégonflée, se dit Victor. Il a vu des poussins de basse-cour plus audacieux à leur sortie de l’œuf. — Vous ne voulez pas, corrige-t-il, renonçant à son imitation soi-disant irrésistible du Chat Potté. Il ira en toucher deux mots au studio DreamWorks, en singeant cette fois la posture effrayante du loup sanguinaire. Les joues de la vendeuse se teintent à nouveau d’écarlate. — Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais je travaille. Fadaises. Écran de fumée. Poudre de perlimpinpin. Avec Thelma, nul besoin d’un détecteur de mensonges à électrodes pour l’affirmer. Des capteurs optiques sensibles aux longueurs d’onde comprises entre 620 et 750 nanomètres suffisent. Victor ouvre la bouche avec l’intention de rétorquer que son temps de travail serait mieux employé dans une opération marketing au club. Pourquoi secouer des gâteaux qui jouissent paisiblement de leur dernier repos avant d’être découpés, réduits en miettes, puis en bouillie organique par des consommateurs voraces ? Il y a un terme pour ça : la cruauté pâtissière. Pourtant, le militaire se ravise. Songeant que Thelma est en droit de rester planquée derrière son comptoir telle une impératrice vissée à son foutu trône. Songeant qu’il préfère agir seul que s’encombrer d’une alliée timorée. Bon gré mal gré, elle a joué son rôle de messagère. C’est déjà un cadeau du ciel. — OK Thelma, lance-t-il avec un petit boom de déception. Il recule d’un pas, sac à la main. — Allez-y, vous. Elle lui offre l’origami sacré. — Ces gens ont peut-être besoin de vous. Vous ne serez pas seul, vous me raconterez. …Victor. — Hmm, merci. Il tend son bras de combattant vers celui de Thelma, fin et pâle. Pince la crête en papier entre le pouce et l’index, hochant la tête avec déférence, puis fait décoller le volatile légendaire de la petite paume. Braquant ses yeux pénétrants sur la vendeuse, Victor professe : — Un oiseau est à l’abri dans son nid, mais ses ailes sont faites pour d’autres horizons. Puis il s’en va.
Les quatre-vingt-neuf mètres sont couverts en trente-six secondes. Terrain plat, rythme de marche commando. En trois fois douze secondes, songe le militaire, Thelma glisserait trois origamis dans une boite aux lettres. Ou derrière son comptoir, elle alignerait trois phrases. Elle rougirait une fois, à cause de sa vilaine manie de pipeauter. Ensuite, elle balbutierait puis afficherait son mignon petit sourire, comme pour s’excuser. Victor élève la paume devant son nez et déclare au somptueux oiseau de papier posé dessus : — Ta messagère est franchement bizarre. J’ignore ce que tu mijotes, mais je suis sûr que vous dissimulez quelque chose. Il replie la main, puis franchit l’entrée du club.
La salle ressemble à une halle de brocante. La surface s’étend sur environ quatre fois le Cranachan, avec moitié moins d’espaces vides. L’encombrement donnerait un infarctus à un officier militaire de logistique. De vieilles tables de jeu mal alignées se répartissent l’espace central, garnies de banquettes et chaises disparates. Aucune n’est semblable à l’autre. Les hauteurs varient de la table basse au grand tabouret de bar. Un escabeau pliable en aluminium repose sous un néon mural à l’inclinaison douteuse. Un guéridon vintage trinque avec ce qui ressemble à une table de massage. Des étagères branlantes croulent sous un panel de jeux de société populaires au cours du XXe siècle, longent les murs sans aucune logique apparente. Des haut-parleurs datés diffusent du Frank Sinatra depuis une platine vinyle. Une vingtaine de personnes déplacent des pions, manipulent des cartes, lancent des dés avec une absence éloquente de souplesse. Quelques cannes appuyées sur les tables. Un vieillard en fauteuil motorisé, chapeau de feutre et dentier de requins, plume ses congénères autour d’un plateau de Monopoly. Moyenne d’âge dans la salle : autour de soixante-quinze ans. Soixante-quatorze depuis que Victor est entré. — Bonjour ! J’apporte des gâteaux du Cranachan, la pâtisserie à l’autre bout de la rue. Servez-vous, il y a du Paradiso pour tout le monde ! Des visages ridés se tournent vers l’intrus au sourire sans joie. Leurs yeux vitreux clignent avec perplexité, puis se reportent à leurs cartes et plateaux de jeu. Prévisible. Victor n’est pas Thelma. Il ne possède pas le truc. Le don de rendre les gens heureux. La magie de la vendeuse ne réside pas dans une dosette de sucre ou un logo écossais, tout comme l’origami n’héberge aucun esprit mystique. Les objets détiennent le pouvoir que les humains leur confèrent. Victor croit aussi que certains acquièrent une étincelle de conscience. Les objets sont des assemblages d’atomes rudimentaires ; les circonvolutions du cerveau humain abritent la complexité d’une galaxie. — Excusez-moi, demande-t-il à une vieille dame courbée devant la machine à café. Connaissez-vous des individus d’origine italienne dans la salle ? Elle s’interrompt, étudie Victor d’un regard myope, hausse les épaules, puis s’éloigne avec son gobelet fumant. Le militaire se renseigne auprès d’un sosie chauve de Joe Biden qui lui répond un borborygme avant de rejoindre un bureau ovale. Prévisible. Sur ce coup-là, Thelma n’aurait pas fait mieux. À la table de bridge, une primo-septuagénaire aux yeux plissés répond : « Tsé ! Je ressemble à une Italienne ? » puis elle glousse : « Baka. » Victor s’est fié au sac Gucci pendant à sa chaise. Dépité, le militaire s’assoit à une petite table usée au fond de la salle. Dans le coin opposé, un vieil homme solitaire assemble une maquette d’avion à hélice plus grande que la main de Victor. Au moins cent pièces assemblées avec minutie. Peut-être deux cents. À sa gauche, un classieux coffret en bois de pin recèle les éléments restants. À sa droite, un téléphone mobile. Il ne semble pas remarquer le nouveau venu. Concentré, dans sa bulle. Un visage large et clair, ridé et tacheté, type européen de l’est. Pas davantage italien que les Nash. Victor jette un regard circulaire à travers la salle, l’oiseau-tonnerre de Thelma dressant son long cou entre ses mains. Ces gens ont peut-être besoin de vous. Vous ne serez pas seul, vous me raconterez. Non seulement personne n’a besoin de lui, mais ces gens âgés l’ignorent et se débrouillent très bien à leur manière. Le militaire se sent inutile. Inopportun. Esseulé. Rien de nouveau : ce sentiment le ronge depuis son exil à Monterey. L’exaltation d’une mission ou d’une aventure parmi les civils répond à son besoin de sens et d’action, mais il en faut sans cesse de nouvelles. Quant à la compagnie, un bout de papier plié ne remplacera jamais une présence humaine. Thelma s’est foutue de lui. Si elle croyait réellement en la mission, elle serait venue. Victor reporte son attention sur la maquette, impressionné par le niveau de détails. Loin d’être un expert en aviation, il reconnait cependant le chasseur iconique de la Seconde Guerre mondiale. — Belle reproduction de P-51 Mustang. Les yeux céruléens se lèvent derrière les lunettes épaisses. Il répond d’une voix enrouée : — Merci, jeune homme. Dans les clubs pour personnes âgées, la jeunesse dure jusqu’à quarante ans. Formidable – pour qui en a quelque chose à faire. Victor, qui assume ses premiers poils blancs, relance : — Vous en avez piloté ? — Je ne suis pas si vieux ! — Pardon, je voulais dire… Les lèvres du modéliste s’étirent, creusant les sillons de sa peau. — Je vous fais marcher, c’est de l’humour troisième âge. Et pour répondre à votre question : je suis juste un passionné. Je n’ai jamais piloté. (Des cliquetis résonnent tandis qu’il fouille l’intérieur du coffret.) Mais j’avais un oncle qui a combattu l’Axe à bord de ces appareils. Un homme bien plus courageux que moi. Ils l’ont descendu au-dessus de la Lybie, en 42. J’avais un an. Il saisit un volet mobile de quelques millimètres à l’aide d’une pince, puis le présente à l’arrière de l’aile droite. — C’est une belle façon de lui rendre hommage. L’octogénaire acquiesce, concentré sur ses gestes. Après avoir fixé la pièce et vérifié sa stabilité, il saisit le deuxième volet entre les fines mâchoires de sa pince et reprend : — Vous êtes dans l’armée, n’est-ce pas ? — Ça se voit ? — Je dirais, autant que j’ai passé l’âge de voler. Victor sourit. — Je crois qu’il n’est jamais trop tard pour voler. Soupir du vieil homme. — Ma petite-fille Italia n’arrête pas de me le rabâcher. Victor se tend, une étincelle dans le regard. — Italia ? Haussement d’épaules. — Ma belle-fille est férue de l’Italie, c’est elle qui a choisi le prénom. On a plutôt le type polonais chez les Kabacinski, mais quand une femme a une idée en tête… — Elle ne l’a pas ailleurs, complète Victor obligeamment. Deuxième volet glissé dans les minuscules tiges métalliques de l’aile gauche. — Vous la voyez souvent, votre petite-fille ? Le vieil homme repose son bras raidi sur la table. Désigne l’origami de sa pince. — C’est un condor ? Victor baisse les yeux sur la création de Thelma. — Pas exactement. C’est un oiseau-tonnerre, une créature de légende. Certaines peuplades le représentaient toutefois sous l’apparence d’un condor. Monsieur Kabacinski hoche la tête. — Italia est une passionnée des condors. Elle a promis de me rendre visite après un arrêt au parc national des Pinnacles, pour les observer. (Il jette un œil anxieux vers son téléphone.) J’attends son appel. Victor apprend qu’Italia était censée appeler son grand-père la veille au soir, afin de confirmer sa venue dans la matinée. L’accès ouest du parc se trouve à une heure de route de Monterey. Vingt-cinq minutes de plus pour le campement situé à l’est. Monsieur Kabacinski dissimule pudiquement son inquiétude. Il décrit sa petite-fille en termes de sérieux et de ponctualité. Quarante-deux ans, mariée, un garçon en première année universitaire. Un poste à responsabilité dans une entreprise de transport. Un petit goût pour l’aventure qui lui a valu quelques désagréments mineurs, des souvenirs qu’on évoque avec le sourire. Rien de grave jusqu’à aujourd’hui. Il montre à Victor une photo d’Italia sur l’écran de son téléphone, prise lors d’un voyage au Mexique. Comme pour se rassurer. Kabacinski a fait le lien. Forcément. Un oncle disparu à bord de son avion en 42 au-dessus de la Libye, un pays sous le joug de l’Italie mussolinienne à cette période. Italia, 42 ans, férue de condors, un retard qui ne lui ressemble guère. Et un oiseau-tonnerre en papier, quelquefois assimilé à l’espèce charognarde, posé face au P-51 miniature à cause des révélations sibyllines d’une vendeuse inspirée. Famille. Italie. Réunir. Ces gens ont peut-être besoin de vous. Victor se lève de sa chaise. — C’est une belle journée, monsieur Kabacinski. Le ciel est dégagé. Je parie qu’Italia a voulu profiter de sa dernière chance d’observer les condors. Quand elle viendra, vous pourrez lui montrer le P-51 et votre capacité à voler avec lui, comme elle le fait certainement avec ses rapaces aux longues ailes. Victor se dirige vers la sortie. — Jeune homme ? Vous oubliez votre oiseau-tonnerre. Victor avise l’origami resté sur la table. — Il n’est pas à moi. Il n’appartient à personne et va où bon lui semble. À présent, c’est vous qu’il a choisi. Traitez-le avec respect et il vous guidera. Il guidera à vous les âmes des personnes que vous aimez.
Quatre-vingt-neuf mètres en sens inverse. Quarante-huit secondes. Aucun embouteillage sur le trottoir : Victor a cogité jusqu’à la façade du Cranachan. Tintement du système d’alerte rudimentaire. Zéro client dans la boutique. Personne à l’exception de je ne sais pas si vous avez remarqué, mais je travaille. Les gâteaux oscillent autour de leur axe de 180 degrés, sans toutefois y parvenir : 179,5 degrés par-ci, 181 degrés par là. Manque flagrant de rectitude. Le militaire se campe devant le comptoir. — Thelma. Il fait son rapport. Rapide, précis, dépouillé des anecdotes superflues. — Je pars au parc national des Pinnacles à 13h00. Objectif de la mission : trouver Italia Kabacinski et l’emmener chez son grand-père. Si vous pouvez libérer votre vendredi après-midi et voulez vous joindre à cette expédition, vous savez où me trouver. Autrement, je vous raconterai à mon retour.
_________________ ☆ The purpose of life is not to have fun. It is to be useful, to be honorable, to be compassionate, to have it make some difference that you have lived and lived well. |
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Thelma Appelbaum 653
Sillage + elle
Jane Levy
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 14 Juil - 1:47# | |
| Thelma s’est condamnée à une longue, une interminable attente. Toute seule, comme une grande. Il ne lui reste rien d'autre à accomplir que de tenir compagnie à ses gâteaux en attendant des nouvelles du front, à quatre-vingt-neuf mètres de là. Victor est parti, et même si c’était l’issue logique, attendue, peut-être un peu espérée, il est parti déçu et le lui a bien fait comprendre. Et ça la met en boule, Thelma. S'entendre dire qu'on manque d'audace n'est jamais agréable, quand bien même c'est tout à fait correct. Elle espère au moins que la mission au club du troisième âge apportera son lot de surprises. Ce n’est pas gagné. Elle ne sera pas là pour interpréter les signes du cosmos, et la réalité est parfois décevante pour qui ne saurait remarquer les hasards heureux de l’univers. Pour occuper le temps, la vendeuse se lance dans un grand nettoyage de plans de travail qui n’avaient pas besoin d’être nettoyés, un réarrangement de cookies qui n’avaient pas besoin d’être réarrangés, puis une vérification de commandes qui n'avaient pas besoin d'être vérifiées. Deux clients — ou trois ? — viennent la distraire entre-temps. Mais ses pensées sont ailleurs et son service s’en ressent. Bientôt, la solitude la rattrape. Alors qu’elle étudie l’idée d'initier un inventaire fastidieux des sachets en papier de la boutique, la sonnette du Cranachan tinte. Thelma relève la tête de son carton de fournitures et aperçoit la silhouette robuste qu’elle espérait voir. Son cœur s’emballe un peu alors que Victor s’avance vers elle. Plus de sac à gâteaux, plus d’oiseau-tonnerre dans ses mains. Elle observe son visage mais n'arrive pas à décrypter son humeur. En tout état de cause, rien ne laisse penser que des personnes âgées ont été blessées au cours d'une expérience impliquant un Paradiso et une créature légendaire. C'est plutôt bon signe. « Thelma. » Le suspense est insoutenable. — Je pars au parc national des Pinnacles à 13h00. Objectif de la mission : trouver Italia Kabacinski et l’emmener chez son grand-père. Si vous pouvez libérer votre vendredi après-midi et voulez vous joindre à cette expédition, vous savez où me trouver. Autrement, je vous raconterai à mon retour. Puis il s’en va. En silence, elle le regarde s'éloigner. À 12h29, Thelma ne tient plus en place. Elle a les yeux rivés à l'horloge du Cranachan et à la seconde où la grande aiguille s'aligne parfaitement à la verticale, c'est une mini tornade rousse qui abandonne son tablier, passe le relais de son royaume sucré, remplit un petit sac de chouquettes à la va-vite, claque un au revoir à son équipe. Elle file vers l'extérieur sans se retourner, sa robe vert trèfle voletant au rythme de ses foulées. Nord-ouest de Monterey
Le souffle court, Thelma inspecte la boîte aux lettres devant elle. Cette fois-ci, c’est la bonne. Du moins le croit-elle. Pourquoi les boîtes aux lettres de ce quartier se ressemblent-elles toutes, au juste ? Rien n'est fait pour faciliter la traque des gens, dans ce pays. En inspectant les alentours, elle se revoit dans cette rue, son oiseau de papier à la main, mais ne saurait plus dire si c'était la veille ou il y a 100 ans tant de choses semblent s'être passées depuis. Pour la blague, elle aurait bien mis une cagoule pour fureter devant chez Victor, comme il lui a lui-même suggéré plus tôt dans la journée. Malheureusement, elle n'avait ni cagoule sur elle, ni le courage de découvrir comment sont traitées les personnes masquées qui auraient l'audace de s'aventurer devant la caméra de surveillance de M. Victor Nash. Au moins, avec sa robe courte, ses baskets en toile et sa vieille veste en denim deux fois trop ample pour elle — plus grand est le vêtement, plus grandes sont les poches — pas de risque d'être prise pour une brigande. Elle aurait sans doute eu davantage d'allure en cagoule mais enfin, elle n'a même pas eu le temps de passer chez elle pour faire un bisou à Chaussette, alors coudre un vêtement de justicière masquée était hors de portée pour cette fois. Dans sa main gauche, le sachet de chouquettes, à moitié vide désormais. À son épaule droite, un sac en tissu acheté il y a des années au Monterey Bay Aquarium, aujourd’hui support de ses élans créatifs nocturnes : broderies fleuries, phrase « Fries before guys » en point de croix et autres poches façon patchwork forment un joyeux n’importe quoi créatif. Thelma farfouille dedans pour en extraire son portable. 12h59. Elle est pile à l’heure. |
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Victor Nash 418
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Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
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Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Sam 20 Juil - 12:13# | |
| Fin mai. Chez Victor.12h58. Études préliminaires accomplies. Organisme sustenté en nutriments essentiels. Godillots autour des chevilles, pantalon de treillis doctement équipé, tee-shirt de l’US Army assorti aux couleurs de la roche, casquette militaire sur le crâne. Victor avance en direction de la porte d’entrée. Mouvement par-delà la fenêtre du salon. Il approche et observe à travers le rideau blanc, plisse les yeux. — Mazette. Il n’est pas foncièrement étonné d’apercevoir Thelma papillonner devant sa boite aux lettres. Pas plus que son absence l’aurait étonné. Une chance sur deux ; l’enjeu du libre arbitre ; les ramifications du destin. Victor s’est donc préparé aux deux éventualités : agir seul ou avec sa guide. En revanche, il n’imaginait pas la vendeuse du Cranachan aussi petite. Elle paraissait plus grande, juchée derrière son comptoir pareille à une comédienne sur une scène de théâtre. Jouant une monarque impériale très occupée à ne rien faire. Ce que Thelma a perdu en prestance, elle le gagne cependant en drôlerie. Baskets basses et légères inadaptées aux sentiers rocailleux, robe courte exposant ses mollets délicats à la végétation épineuse et aux insectes gourmands, veste assez grande pour servir de voile à une honnête embarcation et piquer de belles pointes de vitesse, petit sac chamarré affirmant la supériorité des lipides sur la gent masculine. Drôle, partant en expédition tels un koala et son bâton de pèlerin au bord d’un grand canyon aride. A-t-elle conscience que le parc national des Pinnacles ne ressemble en rien au parc Paraiso où les familles de Monterey promènent leurs bambins et animaux domestiques ? Les imposants condors ne nichent pas dans des arbres au feuillage doux, un joli massif de fleurs ornementales sous leurs griffes acérées. Ils pourraient même trouver Thelma appétissante. Victor sourit, puis songe à monsieur Kabacinski et sa petite-fille. 12h59. Avec une synchronicité mesurable en picosecondes, les deux élus de l’oiseau-tonnerre consultent leur téléphone. Puis, d’un mouvement souple, Victor attrape son barda de 23 kilos et le met à l’épaule. Une paille quand on a parcouru des centaines de kilomètres avec des charges deux fois plus lourdes. L’ancien sergent d’infanterie lance joyeusement sa clé de voiture dans les airs et la rattrape au vol. — Peloton, en avant ! 13h00. La Camaro SS bleue bondit hors du garage en vrombissant et freine devant Thelma. La portière passager s’ouvre brusquement de l’intérieur. — Montez. Puis, de manière conciliante : — Merci d’être venue, guide.
Sur la route.D’emblée, le militaire confie une tâche importante à sa coéquipière : — La mission commence maintenant, Thelma. Prête à exercer vos talents d’enquêteuse ? Il n’y a pas foultitude d’activités pour s’occuper en voiture : roupiller, se gratter le nez, roupiller, remplir des grilles de sudoku, roupiller, passer le buste à travers la portière et faire peur aux automobilistes en face, roupiller. Une perte de temps dramatique quand on possède les extraordinaires – mais lentes – capacités de perceptions/analyses/déductions de Thelma. — Prenez votre téléphone mobile et dénichez des informations utiles sur Italia Kabacinski. Elle a 42 ans, mariée, son nom d’usage a certainement changé. Orientez vos recherches sur sa passion des condors, essayez d’obtenir une idée de ses aptitudes et de ses faiblesses physiques, ses problèmes de santé éventuels. Une photo récente nous aidera énormément. Sortie de l’agglomération urbaine. Un long ruban d’asphalte brillant sous le soleil se déroule vers les montagnes de l’est. Victor complète : — Contactez aussi le camp des Pinnacles et tâchez de savoir si elle a réservé une cabane ou une tente pour la nuit. Si c’est le cas, demandez-leur d’aller vérifier. Autorisez-vous à broder une histoire pour les motiver, par exemple un problème de santé qui vous rend inquiète au sujet de votre amie Italia. (Il coule un regard mi-joueur mi-accusateur sur l’experte en relation clientèle.) Je suis sûr que vous vous débrouillerez très bien ; personne ne verra votre teint virer à l’écarlate. Autre surprise – de taille – que Victor n’a pas anticipée : Thelma s’avère une pipelette en voiture. Plus précisément : une questionneuse. Possiblement une vie antérieure dans la Sainte Inquisition, en accord avec sa curieuse fascination envers la pâtisserie de Victor noircie sur le bûcher. Résonne bientôt un concerto dissonant où pour une question qu’il pose, Thelma en pose vingt. Dont dix-neuf On arrive dans combien de temps ? vouées à éprouver sa patience – une vertu que tout militaire issu du rang développe après un mois de garde au centre de nulle part. Thelma décline sa question fétiche en variantes imaginatives. Elle plie les mots comme elle plie le papier, jouant de tous les angles possibles pour atteindre son objectif. Têtue comme une ânesse. Une capacité remarquable, selon Victor. Il apprécie la ténacité et l’ingéniosité. En général. Quand elles ne le contraignent pas à rabâcher. Ses longs postes de garde commencent à dater et sa patience subit les affres d’une érosion lente et irréversible. Après 12 kilomètres et un énième Bientôt, Thelma qu’il aurait mieux fait d’enregistrer et jouer en boucle, Victor pose la-question-qui-tue. Non qu’il souhaite le décès prématuré de Thelma. Pour les civils qui représentent l’immense majorité de la population de Monterey, la vendeuse du Cranachan est un baume de douceur, un phare d’allégresse qui illumine les mornes crépuscules inhérents à l’existence humaine. Victor aspire simplement à une conversation riche et variée. En pis-aller : un silence d’airain jusqu’à l’entrée du parc national. — Pourquoi êtes-vous montée dans cette voiture ? Qu’attendez-vous de cette mission, Thelma ? Selon la doctrine militaire, deux-questions-qui-tuent valent mieux qu’une.
_________________ ☆ The purpose of life is not to have fun. It is to be useful, to be honorable, to be compassionate, to have it make some difference that you have lived and lived well. |
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Thelma Appelbaum 653
Sillage + elle
Jane Levy
nono · zoeysplaylistgifs · alcara (cat) /
35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mar 30 Juil - 23:29# | |
| Si le destin bascule à certains instants, celui de Thelma se joue sans doute là, à 13 heures précises, devant cette voiture excentrique. Partir. Ne pas partir. Un instant, elle se fait la remarque que, sur le cercle chromatique, le bleu de ce bolide est le parfait opposé du roux de ses cheveux. D'aucuns y auraient vu un signe funeste, elle sait qu'on appelle cela des couleurs complémentaires. La portière s'ouvre. Après une seconde d'hésitation, elle monte à bord. Elle retrouve Victor, habillé comme s'il… partait au front ? Un militaire, damn. Tant de choses prennent sens pour Thelma quand elle capte cette information, mais un vent de panique la saisit quand elle boucle sa ceinture et que la voiture démarre. Elle s'est enfermée dans un espace confiné roulant, avec un presqu'inconnu qui, en plus d'avoir des gros bras, a sans doute les capacités pour les utiliser à des fins létales. Ses petites mains à elle se crispent sur son sachet de chouquettes. — La mission commence maintenant, Thelma. Prête à exercer vos talents d’enquêteuse ? Le temps pour elle de marmonner un « hmrrm » inquiet, Victor enchaîne avec les instructions. Thelma écoute. Les informations sont nombreuses. Indulgente, elle se retient de faire remarquer que personne ne dit plus « téléphone mobile » depuis au moins quinze ans. Un regard vers son conducteur lui suffit pour lui confirmer que le rapport de force n'est pas en sa faveur. Elle prend une inspiration puis, docile, se saisit de son portable pour ouvrir un paquet d'applications. Comment a-t-elle pu se retrouver dans cette situation, avec ce qui semble être une vraie mission à accomplir ? Retrouver Italia Quelquechose née Kabacinski. Les personnes au nom peu commun sont souvent faciles à tracer, les longues heures de background check pour les prétendant·es de ses copines lui ont au moins appris cela. Elle commence à taper des noms sur les réseaux sociaux, ajoute des filtres, essaie des diminutifs. Le nez sur son téléphone, elle sent un léger haut-le-cœur monter en elle. La voiture, c'est pas son truc, et la nervosité causée par cette situation inattendue n'aide pas non plus. Pour se distraire, Thelma relève la tête et commence à poser des questions à Victor. Ce qu'elle aurait dû faire avant même de le laisser partir du Cranachan, à vrai dire. Le parc des Pinnacles, hm ? Italia, hm ? L'armée, hm ? Il faut qu'elle respire et qu'elle regarde la route. Quand devrions-nous arriver, Victor ? En même temps, il s'agit de donner le change, elle n'a aucune envie de montrer qu'elle n'est pas la guide qu'il pense avoir à ses côtés. Thelma reprend le fil de sa mission quand elle sent son début de nausée se dissiper. Les profils défilent au bout de ses doigts. Elle va trouver ces infos sur Italia dans les instants qui suivent, elle en est persuadée. C'est sans compter sur Victor, qui complète les instructions : — Contactez aussi le camp des Pinnacles et tâchez de savoir si elle a réservé une cabane ou une tente pour la nuit. Si c’est le cas, demandez-leur d’aller vérifier. Autorisez-vous à broder une histoire pour les motiver, par exemple un problème de santé qui vous rend inquiète au sujet de votre amie Italia. Je suis sûr que vous vous débrouillerez très bien ; personne ne verra votre teint virer à l’écarlate. — Eh ! s'indigne Thelma lorsqu'elle entend les derniers mots. Elle se tourne vers sa gauche. On se calme, Roi des Braises. Puis elle se renfonce dans son siège, la mine bougonne, et se concentre sur son portable. Elle a beau protester, Victor est dans le vrai : ses joues tournent immédiatement tarte-à-la-fraise. Cela a au moins le mérite de lui redonner un peu de couleurs. Peut-être ne font-ils pas une si mauvaise équipe, après tout. Entre deux nouvelles questions — Grand-père Kabacinski, hm ? Et comment s'annonce le trajet ? — deux coups d'œil à la route et deux grandes inspirations-expirations, un profil attire l'attention de Thelma sur l'écran de son portable. Une certaine "ita82" dont la photo de profil est une femme de dos, en tenue de randonnée, dans un paysage grandiose. God bless les millennials qui se sentent obligés de mettre les chiffres de leur année de naissance dans tous leurs pseudos. Thelma fait défiler rapidement les photos : principalement des paysages, des fleurs… et des oiseaux. Elle laisse échapper un « Gotcha, Italia ». Sous le cliché d'un bord de mer, elle lit des commentaires complices échangés avec un certain Matt Hill. Elle tape "Italia Hill" dans un moteur de recherche et tombe sur un article de presse régionale, datant de l'année dernière : "Les condors, trésor fragile de Californie". Dans un encart dédié à une interview, le portrait d'une femme souriante. — Bonjour, Italia Hill, bénévole des Friends of California Condors Wild and Free, lance Thelma, histoire de signifier à Victor qu'elle avance dans la liste de choses à faire. Elle enregistre la photo et, presque machinalement, pour ne pas laisser le silence s'installer, s'enquiert une nouvelle fois de l'heure prévue d'arrivée. Puis elle demande au chauffeur de lui raconter à nouveau la scène avec M. Kabacinski. Mais Victor, se contentant de répondre patiemment jusque-là, décide que lui aussi peut en poser, des questions. — Pourquoi êtes-vous montée dans cette voiture ? Qu’attendez-vous de cette mission, Thelma ? Elle fronce les sourcils et lui jette un regard en coin, avant de se recroqueviller imperceptiblement dans son siège. Pourquoi est-elle montée dans cette voiture, c'est une question à laquelle elle a mis un soin particulier à ne pas réfléchir. Son service se terminait pile à temps pour être au rendez-vous, elle n'avait rien d'autre de prévu pour l'après-midi que trier par couleur les dizaines d'échevettes de fils à broder qui traînaient dans son appartement, et surtout, quelqu'un semblait avoir besoin d'aide. Les signes étaient suffisants. Parce que j’ai besoin de me sentir vivante. Voilà une réponse qu’elle aurait pu fournir, si elle était assez honnête pour la formuler à elle-même. — Je… hmm, fait Thelma en regardant au loin. Je… Je sais pas trop, en fait. Vous n'auriez pas été dans cette situation sans mes… déductions. Ça semblait être la bonne chose à faire. Et puis… Elle tourne la tête vers Victor, un sourire subtil au coin des lèvres. Je sais vraiment pas comment vous auriez pu vous en sortir sans moi jusque-là, je pouvais pas vous laisser comme ça. Et puis si par hasard vous aviez réussi, Italia aurait sûrement eu peur, en vous voyant débarquer seul. N'importe qui aurait été intimidé — et peut-être un peu effrayé — par son compagnon d'aventure, surtout habillé comme ça. Les yeux à nouveau rivés sur son téléphone, Thelma se met à la recherche d'un numéro auquel joindre le parc, en s'adressant à son tour à Victor. — Et vous, Victor. Ça vous arrive souvent, d'embarquer des inconnues en mission ? Ou vous faites ça seulement quand un adorable papy vous le demande ? Mutine, elle observe son partenaire d'un jour. Avant d'entendre une voix étouffée, un peu robotique. Thelma jette un coup d'œil à son portable et se rend compte qu'en voulant faire la maligne, elle a appuyé par mégarde sur le numéro d'accueil des Pinnacles. Sans même avoir le temps de répéter ce qu'elle allait dire. Et flûte. — Oh, m… Elle ramène le téléphone à son oreille précipitamment. Oui, bonjour, je… Voilà, j'espérais que vous pourriez m'aider. Mon… mon amie Italia est partie randonner dans le parc, je n'arrive pas à la joindre et je… Thelma fait une pause comme pour prendre son élan, puis elle enchaîne avec une histoire d'insuline qu'Italia n'a pas emmenée avec elle, alors elle est inquiète pour son amie, elle voudrait vraiment savoir si elle va bien, a-t-elle dormir au camp hier soir ? La meilleure inspiration de la vendeuse : les clients plaintifs du Cranachan qui n'acceptent pas d'entendre que non, une commande pour 200 personnes pour le lendemain ne va pas être possible. Elle parlemente, est redirigée deux fois, patiente, insiste. Elle veille aussi à ne pas trop faire attention à Victor, elle est déjà suffisamment distraite comme ça. Finalement, quand il semble qu'elle ne peut pas obtenir davantage d'informations de l'homme au bout du fil, elle le remercie chaleureusement et veille à bien raccrocher. Elle se tourne vers son camarade d'expédition. — Pas de trace d'Italia dans les registres pour la nuit. Mais elle est passée dans la matinée au bureau d'informations à l'est, c'est une habituée, un certain Bobby l'a reconnue, ou croit l'avoir reconnue, enfin, il était en pause café et n'a pas pu me confirmer lui-même, mais il a dit être certain à 90 % que c'était elle. Donc… ça doit être elle ? Son rapport est un peu confus, mais tout le monde n'a pas l'entraînement militaire pour rendre compte. Au moins, elle essaie de s'impliquer, tous les employeurs de Thelma n'ont pas eu cette chance-là. |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mer 7 Aoû - 21:07# | |
| Fin mai. Sur la route du Parc national des Pinnacles.Victor écoute les babillages de Thelma d’une oreille, hochant la tête à chaque découverte majeure : une année de naissance coïncidant avec la sortie en salles de Rambo First Blood, film chéri des vétérans ; un nom évoquant de belles randonnées ainsi qu’un acteur italo-américain ayant brillé dans le western spaghetti potache ; un groupe de bénévoles qui vénèrent le condor californien en tant qu’animal totem. Toutes les informations se recoupent avec un cohérence remarquable. De haut vol. L’oiseau-tonnerre prend manifestement soin de ses ouailles et son élue progresse – étonnamment – vite et bien, au point que Victor se sent obligé d’appuyer en catimini sur le champignon pour soutenir son formidable élan. La vitesse l’oblige à slalomer entre des automobilistes qui boivent, mangent, chantent faux, dansent sur leur siège avec la musique à fond, remplissent des grilles de sudoku sur fond de musique zen, se maquillent, se brossent les dents, se liment les ongles autour de l’anneau du volant, passent des appels en mains-libres, envoient des fichus textos sans regarder la route. Tout le monde s’occupe en conduisant. Victor s’occupe en questionnant sa passagère sur ses motivations à rejoindre cette expédition à (bas) risque : — Ça semblait être la bonne chose à faire. Victor acquiesce. Thelma prêche un convaincu. Dimanche dernier, il s’est dit la même chose en brisant quatre phalanges à un fieffé voleur. — Et puis… À la périphérie de son champ de vision, dans la zone de basse altitude du siège passager, Victor détecte la rotation du visage pâle et roux dans sa direction. Tel un gymnaste pratiquant le grand écart latéral avec la désinvolture de l’habitude, il garde l’œil gauche sur la route et dévie le droit sur le minois espiègle. — Oui ? — Je sais vraiment pas comment vous auriez pu vous en sortir sans moi jusque-là, je pouvais pas vous laisser comme ça. Et puis si par hasard vous aviez réussi, Italia aurait sûrement eu peur, en vous voyant débarquer seul. Nouveau grand écart, non pas oculaire, mais labial. — La sagesse habite vos paroles, ô guide. Le militaire vérifie néanmoins son reflet dans le rétro intérieur afin d’évaluer le niveau de frayeur qu’il suscite. Visage commun et soigné, habits de travail communs et propres, carrure peu commune rendant superflu l’emploi d’une arme – parmi les quatre dissimulées à l’intérieur du véhicule. Rien de particulièrement effrayant, donc, à moins qu’Italia et ses amis s’adonnent à d’antiques rites sacrificiels visant à rapprocher l’espèce humaine des majestueux charognards. — Et vous, Victor. Ça vous arrive souvent, d'embarquer des inconnues en mission ? Ou vous faites ça seulement quand un adorable papy vous le demande ? Si Thelma savait, elle commanderait de rebrousser chemin sur-le-champ. Non négociable. Prétextant une injonction soudaine de l’oiseau-tonnerre. Ou peut-être que la rouquine débloquerait sa portière fissa et bondirait de la voiture propulsée à 120 km/h, emportant ses chouquettes dans sa fuite. Ça semblait être la bonne chose à faire, dirait-elle à l’hôpital. Mais Thelma ne sait pas. Elle sait que son chauffeur carbonise des pâtisseries et place sa boite aux lettres sous vidéosurveillance. Rien d’original ou d’inquiétant, pas comme cette coutume suspecte manie de verser le lait avant les céréales. Après une manœuvre de dépassement sur une vieille Buick conduite par une survivante de Woodstock, cheveux argent et bigoudis, Victor souffle avec enthousiasme : — Je ne sais pas non plus dire non aux mamies. Un appel au campement du parc le sauve d’un interrogatoire poussé. La vendeuse semble exceller dans l’art du baratin. Rusée, appliquée, motivée. Elle résume : — Pas de trace d'Italia dans les registres pour la nuit. Mais elle est passée dans la matinée au bureau d'informations à l'est, c'est une habituée, un certain Bobby l'a reconnue, ou croit l'avoir reconnue, enfin, il était en pause café et n'a pas pu me confirmer lui-même, mais il a dit être certain à 90 % que c'était elle. Donc… ça doit être elle ? Victor hausse les épaules. — Dépend s’il l’a entrevue avant d’avoir bu son café ou après. Certains ont tellement la tête dans le cul au petit matin qu’ils affirmeraient avoir vu la fée des dents finir sa tournée. Je suis certain à 90% que ce Bobby n’est certain de rien du tout. Le militaire réfléchit. Demande à Thelma de vérifier l’agenda des Friends of California Condors Wild and Free : rien. — Nos informations indiquent qu’Italia Hill s’est aventurée aux Pinnacles aujourd’hui, qu’elle connait bien le parc naturel et qu’elle bénéficie d’une condition physique au minimum correcte. Nul besoin de tergiverser sur les « peut-être » ou les « oui mais ». J’avais songé à un accident, et bien que personne ne soit à l’abri, ce n’est pas l’option à privilégier. Nous devons supposer qu’une affaire personnelle l’occupe là-bas. Une affaire soudaine et embarrassante qui l’a détourné de son rendez-vous avec son grand-père sans explication. Il y a anguille sous roche. Ou condor sur la falaise, pour adhérer à son mode de pensée. Il gratifie sa guide d’un signe de tête laudatif, puis tonne : — Vous avez très bien investigué, guide. Vous rendez honneur à l’intérêt que l’oiseau-tonnerre vous porte. Après 12 secondes, il ajoute d’une voix adoucie : — Je ne vous considère plus comme une inconnue, Thelma. Selon une croyance cree, une personne devient familière lorsqu’on prononce son nom 50 fois en sa présence. J’ai tenu le compte : 57. Sans bégayer une seule fois, ce qui, vous en conviendrez, relèverait de la triche. 1957 : l’année de sortie au cinéma de Singin' in the Rain. Victor allume l’autoradio. Assez fort pour tarir le flot de questions triviales jusqu’à l’entrée l’ouest du parc des Pinnacles. Le campement de l’est ne détient plus d’informations déterminantes sur Italia, à la manière d’un citron passablement pressé. Ils ne vont pas effectuer un détour de 42 minutes pour récupérer quelques gouttes supplémentaires. Objectif à faible intérêt tactique, dit-on dans l’infanterie. Le militaire suit la route ensoleillée jusqu’à 14h03.
BIENVENUE AU PARC NATIONAL DES PINNACLES. Un panneau d’information annonce sous quelles conditions tarifaires : 15 dollars pour une personne à pied ou en vélo, 30 dollars en voiture. Zone urbaine ou espace naturel, les pauvres ne sont jamais les bienvenus. La voiture roule lentement vers le parking à ciel ouvert. Rempli à 20% de sa capacité. Six véhicules, dont deux tout-terrain inutiles puisque les engins motorisés sont bannis à l’intérieur du parc. — Je m’occupe de nous mettre en règle. Ne vous souciez pas des frais, Thelma. Les militaires bénéficient d’exonérations pour les parcs nationaux. Un des privilèges de travailler pour le gouvernement. Une des méthodes de l’Oncle Sam pour compenser le salaire peu attrayant qui va avec l’uniforme. D’un geste de la tête, Victor désigne le terre-plein herbacé à leur gauche. Un petit groupe de promeneurs, répartis sur deux bancs pierreux, cassent la croûte autour d’une table en bois massif. — Demandez-leur s’ils ont croisé Italia ou aperçu des condors aujourd’hui, on ne sait jamais. (La Camaro s’immobilise entre deux bandes blanches délavées.) Vous pouvez emprunter le chapeau de paille sur la banquette arrière. (Sourire en coin.) C’est celui que j’utilise pour fureter incognito aux abords des habitations. Il jette un dernier regard au sac en toile de la vendeuse : Fries before guys. Question friture, madame va être servie. Puis il sort de la voiture. Paysage minéral. Chaleur raisonnable, autour de 28°C, le soleil de fin printemps ne tape pas encore très fort. Aucune ombre dans un rayon de 50 mètres. Enveloppée d’une peau laiteuse, Thelma survivra peut-être à l’après-midi sans muter en écrevisse. Moins de chance qu’elle résiste à une liquéfaction sous sa veste en denim mal ajustée. Le bitume chauffe comme une plaque de cuisson et l’absence de vent accroit la sensation de fournaise. Fries before guys. C’est ce qu’on va voir. — Bonne chance, Thelma. On se retrouve ici pour faire le point.
Habitué aux conditions extrêmes, Victor se dirige vers le bâtiment principal d’un pas nonchalant. À la guérite des rangers, un jeune planton rougeot avise son accoutrement militaire et salue respectueusement de la tête. Victor l’imite. Inutile d’élaguer son capital sympathie en posant des questions sur Italia Hill : l’amie des condors est entrée par l’est et n’est pas officiellement disparue. Le bâtiment en dur ne paye pas de mine depuis l’extérieur. Deux rangs de panneaux solaires sur le toit apportent l’unique touche de soin et de modernité. L’intérieur offre un contraste saisissant. Air frais, odorant, agréable. Sol propre, à température très inférieure au seuil de cuisson. Des photos époustouflantes du parc tapissent les murs. Derrière un bureau, une hôtesse apprêtée fredonne derrière un vieil ordinateur. Les haut-parleurs intégrés crapotent une musique métallique. Ambiance conviviale, un brin vieillotte et sans prétention, comme Victor les aime. Semelles silencieuses, il approche du bureau – une table blanche renforcée de petits caissons à roulettes. — We would hit the town on Friday night ♫ Stay in bed until Sunday ♫ Une activité que Thelma envie certainement depuis quelques minutes, songe Victor. — Just my imagination ? s’enquiert-il. L’hôtesse détourne la tête de l’écran avec un immense sourire. Cheveux acajou aux racines grisonnantes, joues fardées, paupières bleu pervenche, assez de baume fuchsia sur les lèvres pour repeindre le toit de la Camaro. Perchée sur un nez long, des lunettes surdimensionnées agrandissant une paire d’yeux en mouvement. Betty, informe un badge pendu à la bretelle gauche d’une robe colorée. — Vous êtes fan des Cranberries ? demande-t-elle d’une voix haut perché. — Jusqu’à la mort. Les gros yeux mobiles dansent avec intérêt sur la silhouette du militaire. — Votre chanson préférée ? — Dépendante de mon humeur. La vôtre ? — Free to decide, répond-elle sans hésiter. — La chanson des esprits libres et indépendants. Les lèvres pimpantes s’étirent. Les cils battent comme dans un cartoon. La, la-la-la, la, la-la-la-la, crachent les enceintes. — Il me faudrait un passe pour la journée, Betty. Elle tressaute sur son fauteuil. — Bien sûr ! Tout ce que vous voulez, monsieur… ? — Nash, répond-il tout sourire en posant sa carte militaire sur le bureau. Le truc du prénom à la fin marche du tonnerre. Sans besoin d’attendre la 50e fois pour devenir familiers. Il faudra qu’il trouve le moyen de remercier Thelma pour cette trouvaille. — Mais je préfère que vous m’appeliez Victor, si cela vous convient. — Avec plaisir, Victor ! Et de un. Encore 49 avant d’écouter The Cranberries en partageant une paire d’écouteurs, selon l’ancienne croyance cree. Betty se dévoue pour remplir elle-même le formulaire d’exonération parce qu’elle n’a rien de mieux à faire. Le passe sera valable toute l’année, afin que Victor puisse revenir quand il veut. Accueil cinq étoiles. Service rapide et efficace. Son zèle contraste avec la langueur impériale de la vendeuse du Cranachan. Son clavier mécanique génère un bruit plaisant de mitraillette. — C’est très gentil à vous, Betty. — Je vous en prie, Victor. Et de deux. Quelques rougeurs apparaissent sur les rares parcelles de peau ayant échappé au maquillage. Betty reprend son boulot. Clavier-mitraillette. Silencieux, le militaire contemple la grande carte murale du parc. La même qu’il a téléchargée sur son téléphone et mémorisée. — J’imagine que vous connaissez le parc et ses secrets sur le bout des ongles, Betty. Je m’intéresse aux condors. Les gros yeux se détachent de l’écran. Betty attrape une brochure et la déplie sur un espace dégagé du bureau. À l’endroit pour Victor, à l’envers pour elle. Sur le bout des ongles, lesquels, longs et rouge vermillon, pointent avec précision une zone au centre-ouest de la carte. De sa voix de crécelle, Betty explique que les High Peaks offrent les meilleurs points d’observation, spécialement au lever et au coucher du soleil. Mais une ligne de crête au sud-est du camp offre également des courants chauds qu’apprécient les grandes ailes des vautours. Des télescopes d’observation ont été placés à Bench Trail afin de saisir leurs longs vols planés. — Le soir, quand la lumière faiblit, les condors majestueux se perchent sur leur arbre favori et contemplent leur royaume crépusculaire. — Vous êtes une poétesse, Betty. Elle glousse. L’ongle vermillon de son index tapote un paragraphe au bas de la brochure. — C’est écrit quelque part ici, Victor. Lequel ne quitte pas l’hôtesse des yeux. — Votre équipe de rédaction a fait du bon boulot. Vous aussi, Betty. Battements de paupières bleu pervenche. — Oh, merci, Victor. Elle lui remet son passe annuel. Petit rectangle de carton recyclé, couleur ocre, nominatif, date d’expiration : mai 2025. — Le mérite vous revient. Puis-je vous demander un dernier service ? Il me faudrait un deuxième passe. Le modèle standard, valable aujourd’hui, pour une civile. Betty hoche la tête, l’air de dire ben tiens, au fond je m’en doutais. — Votre amoureuse ? — Ma guide. Gros yeux éberlués derrière les lunettes.
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
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quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Mar 10 Sep - 19:39# | |
| Cette mission n'aura jamais de fin. C'est du moins ce que commence à se dire Thelma, alors que la batterie de son portable chute dangereusement au fil des tâches à effectuer. Baratiner un pauvre employé au téléphone s'avère insuffisant, il faut aussi vérifier des calendriers en ligne, recouper les informations, réfléchir à des hypothèses… Heureusement, tout ça n'est pas vain : Victor a l'air satisfait des données qu'ils ont recueillies jusqu'ici, et d'après lui, rien de grave ne serait arrivé à Italia. En sa qualité de « ô guide », Thelma est à deux doigts de suggérer de faire demi-tour puisque tout va bien pour Italia, quand son compagnon de route lui adresse une remarque inattendue. — Je ne vous considère plus comme une inconnue, Thelma. Selon une croyance cree, une personne devient familière lorsqu’on prononce son nom 50 fois en sa présence. J’ai tenu le compte : 57. Sans bégayer une seule fois, ce qui, vous en conviendrez, relèverait de la triche. Thelma se tourne et fixe son conducteur. Longuement. Elle tente un rapide calcul mental, mais est incapable d'en déduire s'il a pu prononcer son prénom autant de fois. Elle aurait tendance à penser qu'il se fiche d'elle. Sauf que ce gars a l'air attaché aux coordonnées GPS et autres mesures précises de ce genre. Et pourrait sans doute évaluer une distance de plusieurs kilomètres au centimètre près, si on le mettait au défi. Alors ça pourrait bien être vrai, tout ça. Elle tourne la tête pour se reconcentrer sur le tracé de la route, droit devant elle. — Ok… Victor. Elle se renfonce dans son siège. Il allume la radio. Les paysages défilent. Parc national des Pinnacles
Sur le point de perdre tout espoir d'arriver un jour à destination, Thelma s'anime à nouveau quand le panneau d'accueil du parc des Pinnacles se dresse enfin devant eux. Un hoquet de surprise lui échappe quand elle lit le prix d'admission par personne. Saperlipopette, l'air sera bientôt payant, dans ce pays. — Je m’occupe de nous mettre en règle. Ne vous souciez pas des frais, Thelma. Les militaires bénéficient d’exonérations pour les parcs nationaux. Elle affiche une moue approbatrice, l'air de dire « pas mal », mais remercie intérieurement le gouvernement d'accorder des miettes de privilèges à ses troupes. À cet instant précis, son porte-monnaie à elle compte 12 dollars et 20 cents — elle a fait les comptes plus tôt, sur le chemin entre le Cranachan et chez Victor — alors la mission a failli connaître un arrêt brutal. Agrippée à la poignée de la porte, Thelma n'attend plus qu'une chose : poser le pied à terre dès que le véhicule se sera immobilisé. Enfin, si Victor se décide un jour à garer cette fichue voiture, lui qui semble avoir un coup d'avance sur les prochaines étapes de la mission. Un groupe de randonneurs semble l'intéresser. — Demandez-leur s’ils ont croisé Italia ou aperçu des condors aujourd’hui, on ne sait jamais. Vous pouvez emprunter le chapeau de paille sur la banquette arrière. C’est celui que j’utilise pour fureter incognito aux abords des habitations. Sourire malicieux de Victor. Froncement de sourcils circonspect de Thelma. Elle ne va pas se retourner, certaine qu'aucun chapeau ne se trouve dans cette voiture — enfin arrêtée — et encore moins un chapeau qui sert à fureter incognito, bon sang. Secouant la tête, elle ouvre la portière et sort du véhicule. Il lui suffit d'une demi-seconde à l'extérieur pour déjà regretter de ne plus être à l'intérieur. Thelma plisse les yeux et porte une main au-dessus de son front pour se protéger du soleil et examiner les environs. La bouffée d'air frais dont elle rêvait semble bien loin. L'atmosphère est lourde et poussiéreuse : c'est une certaine idée de l'enfer, un enfer facturé 30 dollars tout de même. De son côté, Victor n'a pas l'air perturbé et se dirige vers le bâtiment d'accueil des promeneurs. — Bonne chance, Thelma. On se retrouve ici pour faire le point. La rouquine secoue la main vers lui. — Ok, Victor. À croire qu'elle ne sait plus aligner que ces deux mots, toute son énergie étant passée dans les investigations et la lutte contre la chaleur. Elle pousse un soupir puis se tourne vers les membres du groupe qu'elle s'apprête à aborder. Feignant de faire quelques pas vers eux, Thelma jette des coups d'œil par-dessus son épaule et rebrousse chemin dès qu’elle estime que Victor est suffisamment éloigné. Elle farfouille un moment dans son sac, modeste en taille mais qui n’aurait rien à envier à celui de Mary Poppins, puis elle finit par trouver le Graal : le tube de crème solaire qui ne la quitte jamais de mars à octobre, ainsi qu'un ruban de satin brun-rosé qui va lui servir d'élastique de fortune. Arrivée au niveau de la Camaro, elle ôte sa veste, la fourre tant bien que mal dans son tote bag, s'attache les cheveux en une queue-de-cheval négligée puis se penche pour examiner son reflet dans le rétroviseur. Ainsi démarre l’opération Zéro Coup de Soleil. Elle ne lésine pas sur la quantité : elle a déjà assez entendu de remarques sur son teint pour aujourd’hui. Pour les trois prochains mois, à vrai dire. À des fins d'efficacité, elle aurait certes pu s'acquitter de cette tâche avant d’arriver au parc. Mais Victor a vraiment l’air de croire qu’elle est une espèce de guide envoyée par l’oiseau-tonnerre, or on n’a jamais observé de créature mystique se tartiner d’indice 50. La peau exhalant désormais le monoi, Thelma se demande si les ours ne sont pas attirés par l'odeur de la crème solaire, mais balaie vite cette pensée. Il n'y a pas d'ours, dans le parc des Pinnacles. N'est-ce pas ? Victor en aurait fait mention. Elle glisse le tube dans son sac et ressert la pression du nœud dans ses cheveux. Prête à l'abordage du groupe de randonneurs. Ils sont quatre, en plein pique-nique. À la vue des sandwichs, salades de patate et sacs de chips répartis sur la table, une information se réveille dans le cerveau de Thelma : elle n'a pas mangé ce midi. Son ventre émet un gargouillement grandiose. Elle décide d'ignorer ce besoin primaire pour le moment et se concentre sur le fait de garder un air avenant. — Bonjour ! Deux visages sur quatre daignent se tourner vers elle, alors qu'elle n'aurait pas pu livrer un bonjour plus enthousiaste. Peut-être trop enthousiaste ? Soit. — Belle… journée, n'est-ce pas ? Une belle journée pour apercevoir des condors. Avez-vous… aperçu des condors ce matin, à tout hasard ? La question semble avoir du mal à atteindre les cerveaux des pique-niqueurs, qui continuent de mâchonner leur sandwichs en lui accordant aussi peu d'attention que possible. Ils sont jeunes, tous des garçons : Thelma aurait du mal à affirmer avec certitude qu'ils sont tous majeurs. L'un deux, un blondinet avec des mèches qui lui tombent dans les yeux, boit bruyamment une gorgée de soda avant de se tourner vers elle. — Nan. C'est tout. Ses compères n'ont pas l'air plus décidés à converser avec elle. Thelma sent l'angoisse monter. Elle se gratte le haut du crâne mais ne se départit pas de son sourire. — Écoutez… J'ai besoin d'un renseignement, et je suis sûre que vous pouvez m'aider. Elle glisse une main dans son sac et en tire son téléphone. Elle trouve au passage le sachet de chouquettes entamé, qu'elle pose sur la table, au milieu des autres denrées — entamées elles aussi, tout se tient. Tenez. C'est… français. Un argument qui va sûrement leur passer au-dessus de la tête, mais enfin, il faudrait être un monstre pour ne pas apprécier une offrande de nourriture, c'est quand même un truc qui marche depuis la nuit des temps. La photo d'Italia affichée sur son portable, Thelma tourne l'écran vers la tablée. Je suis à la recherche de mon amie. Elle est au parc aujourd'hui, on se fait du souci pour elle. Est-ce que vous l'avez croisée ? Regards vides dans sa direction, presque aussitôt détournés. Seul Blondie continue de la toiser. — Nan. On n'a pas croisé de Karen dans le coin, nan. Thelma tique. Retourne la photo vers elle. Heureusement, elle a une copine en charge de sa culture slang, elle sait donc ce qu'est une « Karen ». Force est de constater que Blondie n'a pas tord. Avec son carré impeccable et son sourire parfait, Italia a toutes les caractéristiques physiques d'une Karen. Mais de ce que Thelma en sait, cette inconnue est loin d'être une quarantenaire égoïste qui pense avoir tous les droits sur son prochain. — Son nom c'est Italia, et c'est tout sauf une Karen, elle est m… — On dirait une Karen, pourtant, la coupe le jeune homme, sous les ricanements de ses acolytes. Un rire nerveux échappe à la rouquine. Elle baisse les yeux, prend une inspiration et balaie la poussière du bout du pied. Le peu de patience qui lui restait semble s'envoler à cet instant, dans l'air chaud des Pinnacles. Elle relève la tête, lâche son portable dans son sac de façon dramatique, et s'appuie sur la table en bois pour se pencher vers son interlocuteur. Thelma a faim. Thelma n'a pas bu de café depuis trois heures. Thelma n'a qu'une envie à cet instant, se trouver dans son lit et ne plus en bouger jusqu'au dimanche. Malheureusement pour Blondie, elle n'est pas en train de se prélasser sur le moelleux de son matelas, mais bien de lui faire face. — Italia n'est pas une Karen, ok ? lâche-t-elle en détachant exagérément chaque syllabe, histoire qu'il la comprenne bien. Tu sais pourquoi elle est dans le parc aujourd'hui ? Parce qu'elle trouve que c'est pas ok qu'une espèce disparaisse parce que les hommes ravagent tout ce qu'ils touchent, et qu'elle a décidé de consacrer son temps non pas à son petit bonheur personnel, mais à faire en sorte de rendre le monde un peu meilleur. Elle a un job avec des responsabilités et un enfant, et un mari qui est sûrement incapable de lancer une machine lui-même, alors en plus de sauver le monde, elle se retrouve aussi à faire le linge pour non pas une, ni deux, mais trois personnes ! Oh, et elle a un grand-père dont elle s'occupe, aussi, et malgré tout ça, tu sais quoi ? Elle se bat pour que les condors ne s'éteignent pas totalement, et grâce à elle, des p'tits… « Petits cons » est le terme qui lui vient à l'esprit, mais il lui reste encore une once de discernement pour se retenir de partager cette pensée à voix haute. Elle balaie l'air avec ses bras pour trouver ses mots, avant de pointer Blondie du doigt. Des… des… des gens comme toi peuvent venir les admirer, ces oiseaux, et se dire que la nature, c'est quand même pas si mal, alors peut-être qu'on va arrêter de jeter nos canettes de Coca par la fenêtre, hein, la prochaine fois qu'on a un long trajet, histoire de pas tout bousiller définitivement ? Hors d'haleine, Thelma s'interrompt. La pression fait pulser ses tempes. Face à elle, Blondie déglutit et pose sa canette rouge avec délicatesse devant lui, avant de baisser les yeux. La vendeuse se redresse. Les trois autres comparses lui accordent enfin un peu d'attention et la dévisagent, l'air sidéré. — Voilà ce qu'elle fait, Italia. Si vous pouvez encore observer des condors c'est grâce à elle, alors un peu de respect, ok ? Et remerciez-la quand vous apercevrez ces fichus piafs. Sur ce, elle tourne les talons. Son cœur va probablement s'échapper de sa poitrine. À moins qu'elle ne s'évanouisse avant. Déjà éloignée de quelques mètres, elle fait demi-tour et revient vers la table d'un pas rageur. — Et rendez-moi ça ! Elle s'empare du sachet qu'elle leur a proposé en offrande quelques instants plus tôt. Puis elle s'éloigne à nouveau, pour de bon cette fois-ci. Du côté opposé à la table de pique-nique, Thelma s'adosse à la Camaro, laisse tomber sa tête en arrière et pousse un long grognement. Cette fois c'est bon, elle a envie de disparaître. Elle va dire à Victor que c'est fini. Terminé. Elle rentre, il rentre, ils rentrent tous avant de se faire croquer par des ours, elle ne devrait de toute façon pas être autorisée à vivre sous le soleil californien avec un teint pareil. Voilà, elle a critiqué son propre teint, il n'y a plus rien à sauver dans cette journée. Pas même Italia Hill, qui de toute façon est sûrement en train d'apprécier sa randonnée sans penser une seule seconde qu'un militaire et une vendeuse de tartelettes sont à sa recherche. Thelma fait glisser son tote bag à terre, à bout de force. Elle croque une chouquette du paquet qu'elle tient toujours à la main, puis deux, puis trois. Dévorer pour ne plus penser. Il fait si chaud, elle va probablement fondre comme les perles de sucre de ces pâtes à choux soufflées. Et quand Victor reviendra, il ne retrouvera que sa robe verte et son sac rempli de bouts de papiers pliés, de crème solaire mortelle et de fatras sans queue ni tête. Thelma baisse les yeux sur ledit sac. Un journal en dépasse. Elle se penche pour s'en saisir, pose le sachet à côté d'elle sur le capot de la Camaro, et entreprend de s'éventer avec la gazette quotidienne de Monterey. L'air remué ainsi et de toute façon étouffant, alors à quoi bon ? Et Victor qui ne revient toujours pas… Elle hausse les épaules et, à bout d'imagination pour s'occuper, se lance dans la lecture du Monterey Herald. Le journal est ouvert à la page où elle l'a laissé ce matin : l'horoscope. Ses yeux glissent machinalement vers la case des Scorpions et les mots défilent sous ses yeux. À propos de l'humeur, journée perturbée et perturbante ! Thelma ne peut s'empêcher de rire. D'abord discrètement, puis moins. Tant pis si Blondie et ses amis l'entendent glousser toute seule, ils doivent déjà penser qu'elle est timbrée. Elle poursuit sa lecture. …adopterez une attitude plus responsable… prendrez de très bonnes décisions… Alors comme ça, son horoscope l'a bel et bien avertie qu'elle deviendrait une guide pour la journée ? Pourquoi n'y a-t-elle pas fait attention ? Sûrement car elle est en général plus intéressée par la rubrique « amour » et que son cerveau efface instantanément toute mention du mot « responsable », mais tout de même… Elle était prévenue. …possible qu'une proposition inattendue vienne perturber vos projets… ne saurez plus pour quel choix opter… Les prophéties astrales se terminent sur une note encourageante. Notre conseil du jour : sachez tirer le meilleur parti de vos atouts. Baisser les bras n'est pas une option. Quand elle relève la tête, elle aperçoit Victor qui revient vers elle. Thelma laisse échapper un soupir de soulagement. Elle reprend ses esprits et se redresse. Avec un peu de chance, il n'a pas remarqué qu'elle était à moitié affalée sur sa voiture. D'un geste étonnamment vif, elle retire aussi du capot de la Camaro le sachet luisant de gras, avant de le tendre vers son compagnon d'aventure, une fois qu'il est assez proche d'elle. Deux ultimes chouquettes se battent en duel dans le petit paquet en kraft. — Vous en voulez ? C'est… français. Je peux vous lire votre horoscope, aussi, propose-t-elle en secouant le Monterey Herald qu'elle tient dans son autre main. C'est étonnant, j'vous assure. Les joues rougies par l'émotion et le soleil, Thelma se fend d'un sourire confus. Victor ne sait rien de l'épreuve qu'elle vient d'endurer, sinon il comprendrait. |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 6 Oct - 14:54# | |
| Fin mai. Parc national des Pinnacles.Victor quitte le centre d’accueil, sifflotant Sunday qui résonne sur le bureau de Betty avec un sens du timing mystifiant. La brochure enroulée dans sa main tapote sa cuisse en rythme tandis qu’il longe le bâtiment, regard braqué sur les hautes cimes baignées de soleil. High Peaks, ou Bench Trail ? Seul en mission, le choix de sa destination se serait imposé de lui-même. High Peaks offre un défi sportif, pas l’autre. À condition d’ignorer les sentes paresseuses et d’opérer un tracé direct à travers le paysage sauvage. Marche droite et rapide, acmé des Pinnacles en ligne de mire, franchissement des petits rochers et des gros prédateurs endormis en saute-mouton, contournement des obstacles plus imposants en pas de côté habiles, sauts en longueur par-dessus les crevasses sombres et profondes, contorsions entre les failles taillées dans les falaises à coups de sabre, escalade à mains nues des parois abruptes et brûlantes. Constamment les sens en alerte, le cœur palpitant de joie sous l’effort, l’esprit uni au vent et à la montagne. Un parcours physique, beau et pur, transcendé par l’expérience spirituelle. Très éloigné de ses missions parmi la fange urbaine. Victor songe à l’oiseau-tonnerre et son élue ; un sentiment de gratitude l’étreint. Puis il songe à Italia, au grand-père esseulé qui assemble un P-51 miniature, à l’amour et à la passion des cieux qui unissent ces deux êtres ; le sens du devoir affute sa volonté, son pas s’allonge. — Psst ! Le jeune ranger, sorti de sa guérite à l’entrée du parc. Figure rougeote sous son chapeau à large bord, levant un index tel un écolier timide. Victor sourit en imaginant la réaction de Betty face à son collègue poupin quémandant l’autorisation d’utiliser les toilettes. Il répond d’un signe de main amical, rejoint la guérite à une allure rapide, mais décontractée. Milton, indique la bande patronymique sur la chemise à manches courtes. Victor lui donne vingt-deux, vingt-trois ans maximum. Il ignorait qu’on puisse endosser l’habit des rangers à cet âge. — Ça va comme vous voulez, Milton ? Milton s’avère volubile et généreux en postillons. Il s’ennuie dans sa guérite, aimerait patrouiller au sein du parc comme ses « collègues titulaires ». Avec vingt fois plus de culot et de vulgarité, songe Victor campé à distance de sécurité hygiénique, il pourrait prétendre à un poste plus animé dans le domaine exigeant de l’instruction militaire. Car les facéties de la génétique ont doté Milton d’organes sensoriels remarquables – notamment les oreilles, deux pavillons aux dimensions étonnantes, capables de percevoir le rot d’une mouche repue à trois mètres de distance. Rien ne leur échappe. Les deux employés de l’Oncle Sam tiennent un conciliabule intéressant. Victor assimile les informations, présente des remerciements, puis se dirige vers le parking. Il ne sifflote plus. Ne sourit plus. Observe que Thelma a muté durant son absence. Tout d’abord, elle luit au soleil. Pas à la manière des vampires de Twilight, lesquels ont peaufiné au cours des siècles divers stratagèmes visant à éblouir les minettes de 18 ans1. La luisance de Thelma est plus rudimentaire, moins scintillante. Pour une optique calibrée sur les champs d’entrainement de l’infanterie, sa peau luit comme une mitrailleuse lourde fraichement huilée2. Ensuite, confirmant des affinités avec l’arme automatique de forte puissance, ses rougeurs dermiques trahissent un déchainement récent de salves furibondes. Impossible à confondre avec la dérobade, la flagornerie ou la supercherie. Le visage de Thelma se colore tels les papiers pH des cours de chimie : blanc immaculé lorsqu’elle flâne parmi sa base sucrée, feignant d’abattre une quelconque besogne, rose fambroise quand elle se met à pipeauter avec un talent acidulé, puis fraise précoce à cerise bien mûre alors que s’élèvent la température et l’acidité de son fluide sanguin3. Cette fois le faciès vultueux, piqueté d’éruptions rubicondes, dénote un épanchement de haute intensité. Le froncement des sourcils de Victor s’accentue sur les derniers mètres le séparant de sa Camaro. Parce que Thelma s’est négligemment affalée sur la carrosserie peinte aux couleurs patriotiques. Un acte sacrilège qui revient à poser son séant sur le drapeau national et dégazer quand personne ne regarde. Jadis, on menait des mécréants à la potence pour moins que ça. Dans les temps d’abondance où l’on débitait des arbres à tire-larigot, les autorités organisaient une grande flambée festive sur la place du village. Une ancêtre de Thelma fut peut-être l’attraction centrale de ces feux de joie populaires4, motivant son réflexe de retrouver une posture plus digne face à un sous-officier de l’armée américaine. Elle n’a pourtant rien à craindre. Victor n’a jamais cautionné ces pratiques tape-à-l’œil et polluantes : un plissement de front sévère, appuyé dans les cas graves d’une vive projection en avant sur le nez de l’hérétique, corrige les comportements impies sans aggraver le réchauffement planétaire. Mais Victor fronçait les sourcils avant de surprendre sa guide en inconvenante posture. Il les fronce depuis que Milton lui a rapporté ce qu’il a vu et entendu à la table des randonneurs.
Le sergent s’arrête derrière le coffre sans un mot, ouvre, attrape son barda de 23 kilos d’une main, referme de l’autre, gagne l’avant de la Camaro avec une expression impassible. Thelma lui tend un petit paquet luisant à l’aspect inoffensif. — Vous en voulez ? C'est… français. Victor fait la moue. L’équivalent barbu d’un ado face à une assiette fumante d’algues-courgettes-rutabagas-aubergines5. — Je me méfierais de la nourriture française, à votre place. On y cuisine des grenouilles et des escargots à toutes les sauces. On boit des litres de vin pour aseptiser les remugles des fromages-qui-puent traditionnels. Ça vous inspire confiance, vous ? Allez savoir les ingrédients qu’ils cherchent à masquer avec du sucre de betterave en quantité faramineuse. L’aspect butyreux de Thelma confirme ses soupçons6. Corrobore la rumeur selon laquelle les légionnaires français graissent leur matériel avec du beurre dont sont richement pourvues leurs rations. Vieux continent, vieilles coutumes. La vendeuse du Cranachan dégage en outre une curieuse odeur des îles pacifiques qu’elle n’avait pas tout à l’heure. Milton l’a flairée depuis sa guérite. Organes sensoriels remarquables. Victor consentirait à avaler cette friandise véreuse dans une seule et unique circonstance : un concours de glissade en petite tenue. L’enduit lipidique suintant des pores de la peau offrirait un avantage tactique incontournable. Autre motif de refus : Thelma a besoin de boulotter. Or, le contenant est presque vide. Le militaire pose son sac sur le bitume ardent, plie les genoux, reçoit l’air chaud qu’elle brasse à l’aide du Monterey Herald – torchon à potins que Victor épluche de temps à autre pour rester vaguement dans le coup. — Je peux vous lire votre horoscope, aussi. C'est étonnant, j'vous assure. Il dresse la tête et plante ses yeux dans les iris cristallins de la prophétesse. — Je n’ai pas besoin d’un horoscope pour me renseigner sur ce que je fais, sur ce que je dois faire, ou pour m’indiquer la direction à prendre. Pour ça, j’ai placé ma confiance en vous. Vos paroles me suffisent. Il pioche une gourde en inox remplie d’eau claire, exempte de phtalates et microplastiques, la confie à sa partenaire qui subit peut-être déjà les prémices de la déshydratation. Eau et huile ne font pas bon ménage. — Du nouveau sur Italia Hill ? Rien. Personne ne l’a vue depuis son départ du campement. Victor avise la table des randonneurs. Les quatre garçons lèvent le camp sans se presser, deux rigolent en agitant leur téléphone, aucun ne contemple dans un silence émerveillé les reliefs majestueux qu’ils viennent d’explorer. Qu’est-ce qui les a motivés à faire le déplacement ? Un exposé scolaire ? Des selfies pour épater les copains et les copines ? Leurs mains hésitent sur les plastiques et emballages de leur repas, n’emportent finalement que les canettes rouges de Coca vers la poubelle. Victor extrait une paire de jumelles militaires, un étui à couteau, puis referme sèchement le sac. Il glisse soigneusement la lanière de l’instrument optique autour du cou délicat de Thelma, lui remet la brochure de Betty et son passe pour la journée. Leurs doigts se touchent. Ceux de Victor s’attardent afin de signifier son respect acquis ainsi que son soutien inflexible. — L’hôtesse d’accueil m’a dit qu’on a plus de chance d’observer les condors dans les High Peaks, ou le long de Bench Trail. Mais les points indiqués sur la carte sont des panoramas à touristes. (Il tourne la tête en direction des Pinnacles majestueux.) Italia est une passionnée, elle connait les habitudes et les secrets des condors mieux que les autres. La passion nous attire immuablement au cœur des choses, par-delà le voile des apparences, là où pulsent les vérités cachées. (Il reporte son attention sur Thelma.) L’oiseau-tonnerre que vous avez brillamment confectionné ne nous a pas réunis pour une banale promenade touristique. C’est une certitude. Il est à la fois le messager du soleil qui éclaire nos vies et la foudre qui déchire nos ténèbres intérieures. Il sait de quoi Italia, vous et moi avons besoin. Il lit directement dans nos âmes, sans les faux-semblants dont nous les enveloppons. D’une manière ou d’une autre, nous avons invoqué son pouvoir et son pouvoir réalise nos aspirations. Il fixe l’étui du couteau tactique à droite de son ceinturon, charge le sac sur ses larges épaules, ajuste les sangles. — Vous trouverez le chemin, Thelma. Vos ailes se déploient et je suis honoré d’accompagner à votre envol. Il tend le bras. Sourire engageant, orné d’un pli facétieux. — Voulez-vous me suivre jusqu’à l’entrée du parc, ô guide ?
L’allure est rapide. Le temps presse. Le duo de visiteurs s’arrête devant la guérite et présente leur passe respectif. Milton entreprend un rappel des consignes : pas de feu, ne pas nourrir les animaux, n’abandonner aucun déchet… — Ces gars-là n’ont pas assimilé le message, coupe Victor en pointant le pouce derrière lui, vers la table souillée de détritus. Sauf pour les canettes de Coca. Et nous savons tous les trois que ce n’est pas grâce à vous. Les regards des deux hommes en uniforme, l’un fier et l’autre embarrassé, convergent vers la silhouette menue de Thelma. Vous ne jetterez point vos canettes de Coca au nez et à la barbe des nains de jardin, a décrété, en substance, la prophétesse7. Grâce à ses oreilles en pavillon, Milton l’a parfaitement entendue. Sa figure ronde s’empourpre comme une pivoine. Contrairement à Thelma, le rouge semble sa couleur de base. Un papier pH à faible spectre. — Techniquement, bredouille-t-il, le parking ne fait pas partie du parc. La juridiction des Rangers se limite à… — Foutaises. C’est vous qui vous limitez, Milton. Vous avez prêté serment de protéger les espaces naturels, c’est la noble mission qui doit guider vos actes. Pas le fichu règlement. Si vous ne faites pas ce qui est juste, vous moisirez dans l’ombre confortable de votre guérite. Vous ne gagnerez jamais le respect de vos collègues titulaires ; ils vous utiliseront pour les tâches ingrates. La frustration et les regrets rongeront votre conscience. Vous ne connaitrez pas la joie d’unir votre âme à l’esprit sauvage qui habite ces terres ancestrales. Pire que tout, vous ne ferez jamais l’expérience vibrante de la liberté. Alors bougez-vous. Prenez exemple sur une citadine qui a vissé ces quatre bourricots et débrouillez-vous pour faire mieux. Redressez la tête, bombez le torse, et au boulot. Milton se gonfle d’audace tandis qu’il toise les quatre garçons sur le départ. — Je vais leur dire de ramasser leurs déchets, clame-t-il avec un début de panache. Le jeune ranger s’élance d’un pas décidé. Victor lui saisit le bras avec autorité. — Pas seulement leurs déchets. — Comment ça ? Le regard de Victor se pose sur sa guide colorée, petite en taille mais grande à d’autres égards – suppose-t-il, espère-t-il. Puis glisse sur le ranger poupin. Pas étonnant qu’il voit rouge. — Le respect du vivant commence par les membres de sa propre espèce ; cette loi s’applique particulièrement dans les lieux publics sous autorité fédérale. Le rappel de ces bons principes prendra un peu de temps. Temps qu’ils pourront employer de façon utile en nettoyant le périmètre. Je suis sûr que Betty se fera une joie de vous épauler. Elle aime sincèrement cet endroit et écoute The Cranberries. Vous ne pouvez pas espérer meilleure alliée, ces gamins garderont de leur visite un souvenir indélébile. Il relâche l’employé du gouvernement. Sourit aimablement à sa partenaire parfumée au monoï. — Ces fichus piafs, Thelma ? J’espère que notre vénérable oiseau-tonnerre, seigneur des cieux et roi de ces terres, a le sens de l’humour. Les entités légendaires sont traditionnellement décrites avec un caractère susceptible. Et mordant. Le duo s’engage sur le sentier montant vers les Pinnacles. À 412 mètres de là, le museau d’un prédateur frétille.
Petit recueil d’inepties contextuelles : 1 Consécutivement à la vague #metoo, les vampires transformés avant 1900 se sont engagés à ne plus siroter goulument l’hémoglobine des mineures. Une contrevague de fanfictions mordues en a découlé. Lord Bô Gauss, londonien magnétique, mis au caveau le soir du 31 décembre 1899 après une Saint-Sylvestre mémorable, a fait appel de cette règle qu’il juge discriminatoire. « Empêche-t-on vos boomers humains d’écluser un jeune piccolo qui n’a pas encore tourné au vinaigre ? », questionne-t-il. Des millions de followers soutiennent sa position sur X, parmi lesquels un certain nombre de bôts, de groupies, et d’utilisateurs de dentiers exubérants. 2 Une mitrailleuse en fer-blanc coiffée de limailles de cuivre. 3 Le sang de Thelma fait l’objet de recherches poussées dans le laboratoire secret du Cranachan. Il servirait à confectionner des pâtisseries addictives pour la clientèle vampirique transformée avant 1900, frustrée par les us du monde moderne et par conséquent frappée de boulimie sucrée. Un filon juteux que l’équipe marketing compte exploiter jusqu’à plus soif. 4 Les croyances attribuaient aux rousses toutes sortes de facultés plus ou moins surnaturelles, dont celles d’ensorceler les hommes avec un sourire avenant et de produire des flammes spectaculaires. Les survivantes ont appris à faire la gueule et bannir la crémation de leurs rites funéraires, popularisant l’expression tirer une tronche d’enterrement. 5 Recette sans luisanse. Comestible avec trois feuilles de basilic, deux clous de girofle, une pincée de muscade et un tour de moulin à poivre. L’ajout immodéré de sel ne fait qu’empirer le goût. 6 L’idée que la vendeuse de beignets se tartine de crème – solaire ou brûlée – ne l’effleure à aucun moment. La finesse d’esprit d’un sergent d’infanterie en mission se compare aux réflexions ontologiques d’un sanglier au milieu d’un festin de glands. 7 De temps à autre, quand la bêtise de l’humanité lui tape sur le système, Dieu profère des rectificatifs et addendums à ses fameux Dix Commandements. Ses hérauts, doués pour le pliage pour une raison que Dieu seul connait, sont des individus abracadabrants selon les dogmes religieux en vigueur. On les prend rarement au sérieux, au contraire des vieux barbus polygames en sandales qui fumaient l’herbe du désert il y a plus de 3000 ans.
_________________ ☆ The purpose of life is not to have fun. It is to be useful, to be honorable, to be compassionate, to have it make some difference that you have lived and lived well. |
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Thelma Appelbaum 653
Sillage + elle
Jane Levy
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: > Dim 13 Oct - 21:31# | |
| Ni chouquette, ni horoscope. Des choix de vie étranges. Victor fait confiance en Thelma pour le guider. Thelma, elle, s'en remet aux prévisions astrologiques pour se guider. Au fond, ça revient au même : leur chemin à tous les deux sera tracé par un texte généré aléatoirement et imprimé sur du papier de mauvaise qualité. Plus qu'à espérer que l'oiseau-tonnerre se manifeste. Son élue glisse le Monterey Herald dans le sac qui gît à ses pieds. Près d'elle, Victor s'agite. En observant l'imposant barda de son partenaire, Thelma réalise à quel point elle n'a pensé à rien. Si elle avait emporté les trois objets les plus utiles de son chez-elle, ils se seraient de toute façon retrouvés avec un shampoing à l'huile essentielle de menthe poivrée, un plaid douillet grignoté par son chat et un micro-ondes défectueux. La vendeuse se saisit de la gourde que Victor lui tend, avoue avoir fait chou blanc dans sa quête d'informations sur Italia, grignote nerveusement ses dernières réserves en repensant à sa rencontre avec les imbéciles de la table de pique-nique. Son compagnon d'aventure s'approche d'elle. Thelma suspend son mâchouillement, se tient tranquille, attrape les choses que Victor lui remet. Leurs mains entrent en contact, elle a l'impression que c'est voulu : sans doute s'attendait-il à être frappé d'une vision prophétique au contact de la peau de l'élue. Une prémonition un peu floue aux couleurs saturées, avec des flashs lumineux et un murmure mystérieux. Mais lorsqu'il reprend la parole, Victor n'a pas l'air plus perturbé que cela. Si la vision a eu lieu, son contenu n'a pas été très déroutant. Sans se laisser décourager, la prophétesse de papier avale enfin sa dernière bouchée de chouquette. En dépliant la carte que Victor lui a remise, elle écoute d'une oreille ses théories. — Italia est une passionnée, elle connait les habitudes et les secrets des condors mieux que les autres. La passion nous attire immuablement au cœur des choses, par-delà le voile des apparences, là où pulsent les vérités cachées. L’oiseau-tonnerre que vous avez brillamment confectionné ne nous a pas réunis pour une banale promenade touristique. C’est une certitude. Il est à la fois le messager du soleil qui éclaire nos vies et la foudre qui déchire nos ténèbres intérieures. Il sait de quoi Italia, vous et moi avons besoin. Il lit directement dans nos âmes, sans les faux-semblants dont nous les enveloppons. D’une manière ou d’une autre, nous avons invoqué son pouvoir et son pouvoir réalise nos aspirations. Thelma relève la tête et hausse les sourcils. « Intense, le gars » sont les seuls mots qui lui viennent à l'esprit. — Le messager du soleil, oui, marmonne-t-elle, plus pour s'en convaincre qu'autre chose, puis elle replie la brochure. Si ça ne tenait qu'à elle, elle aurait convoqué le messager de nuages duveteux accompagnés d'une brise légère. — Vous trouverez le chemin, Thelma. Vos ailes se déploient et je suis honoré d’accompagner à votre envol. Voulez-vous me suivre jusqu’à l’entrée du parc, ô guide ? Les lèvres de l'oiseau-guide s'étirent en un sourire discret alors qu'elle se met en marche. Sourire qui s'évapore bien vite lorsqu'ils font face à un nouvel obstacle. Pas de souci au niveau de leurs papiers — sans surprise, Victor a rempli cette mission haut la main — le problème réside ailleurs, Thelma met plusieurs secondes à comprendre. Il s'agit encore de ces fichus randonneurs, c'est pas vrai. Elle étouffe un soupir. Et se fait une promesse de ne plus jamais acheter la moindre canette de Coca. Victor, lui, semble déterminé à transformer Milton-le-ranger en un impitoyable justicier des Pinnacles. — Foutaises. C’est vous qui vous limitez, Milton. Est-ce que c'est un truc de militaire, de venir faire la leçon à tous les employés qui croisent leur chemin ? Ne peut-on pas simplement faire son travail, sans faire de zèle ni y chercher une expérience vibrante de la liberté ? Désemparée, Thelma assiste à la scène. Elle se frotte la nuque, a un peu envie de disparaître. Se concentre sur des détails. Les pommettes de Milton, de l'exacte couleur cranberry bliss du blush préféré de Thelma. Le pli qui ne quitte jamais le front de Victor, seul signe qu'un robot n'est pas aux commandes de ce corps qui ne cherche jamais ses mots, ne s'énerve jamais vraiment, ne dévie jamais de la mission qu'il s'est fixé. Sa main ferme sur le bras frêle de Milton. Par un mystère que Thelma s'explique difficilement, les semonces de Victor semblent avoir insufflé une confiance nouvelle au candide ranger. Il leur jette un dernier coup d'œil avant de s'éloigner, elle croise son regard et prononce un « dé-so-lée » muet, puis lève un poing en l'air pour l'encourager. Poing qu'elle abaisse dès que Victor se retourne vers elle. Il lui sourit mais elle comprend le message : il faut partir. Elle sait. — Ces fichus piafs, Thelma ? J’espère que notre vénérable oiseau-tonnerre, seigneur des cieux et roi de ces terres, a le sens de l’humour. Les entités légendaires sont traditionnellement décrites avec un caractère susceptible. Et mordant. La rouquine lui jette un regard en coin. Elle rêve, ou il est en train d'insinuer qu'elle pourrait se faire croquer par ce piaf céleste ? Et il l'a mise sur écoute, pour être au courant des moindres mots qu'elle a prononcés alors qu'il était même pas là, ou bien ? — J'espère surtout que notre vénérable oiseau ne fait pas attention à ce que peut raconter une petite… Thelma s'interrompt, cherche un qualificatif pour se décrire — dealeuse de Paradiso/California girl/trentenaire à la ramasse sont des termes qui lui viennent en tête — mais s'en tient finalement à un factuel : …humaine. Enfin, humaine/guide. Mais humaine. Trop d'humains sur cette Terre pour que l'oiseau-to… Enfin—pas trop d'humains sur Terre ! Tous les humains sur Terre sont bienvenus, juste… trop d'humains qui disent… trop de choses. Confuse par sa propre tirade, Thelma fait la moue. Après tout, elle peut bien raconter ce qu'elle veut : elle est la guide de leur mission, la vérité arrivera par elle, ou quelque chose comme ça, et ils trouveront Italia. Or, le chemin rugueux, escarpé, réel, commence ici. C'est peut-être le moment où jamais de raconter n'importe quoi. Elle fait attention où elle met les pieds, examine les environs. Les rochers et les broussailles, c'est pas vraiment son truc. Elle est une enfant de l'asphalte et de la mer. Au parc national des Pinnacles, pas de trace ni de l'une, ni de l'autre. En revanche, on pourrait croire que Victor fait partie du paysage. Une sorte de gros escargot avec sa maison sur le dos, costaud et surarmé. Thelma réprime un sourire et déplie à nouveau la carte pour paraître un minimum impliquée. Aucune idée de ce qu'elle regarde, des distances que cela peut représenter, de l'endroit où ils se trouvent à cet instant. Italia ne serait de toute façon pas près des points d'observation, alors à quoi ça peut bien leur servir, un plan ? « Prendrez de très bonnes décisions », a prédit l'horoscope. Un bruissement à leur gauche. Thelma se retourne. Elle s'arrête et laisse échapper un petit couinement attendri. Une sorte d'écureuil grassouillet lui fait face une seconde avant de repartir à la hâte. Le cœur plus léger, la rouquine replie l'inutile carte et trottine pour rattraper Victor. Ses pas sont deux fois plus petits que ceux du militaire. Si elle effectue un arrêt ne serait-ce qu'une seconde, il lui met dix mètres dans la vue. Et ça, c'est mauvais pour ses chances de survie en terrain hostile. Revenue à la hauteur de son partenaire, elle se saisit de la paire de jumelles que Victor lui a glissée autour du cou tout à l'heure, et tente de la régler à sa vue. Elle a regagné des points de vie et se sent d'humeur bavarde. — Qu'est-ce qu'on va lui dire, à Italia ? Je veux dire… Parce qu'on va la trouver, n'est-ce pas ? Et il faudra bien qu'on lui parle. Si j'étais elle et que je nous voyais débarquer tous les deux, je serais… Elle abaisse les jumelles et tourne la tête à droite. Victor ne l'écoute pas. Il fixe un point devant eux. Thelma suit son regard. Et alors, elle comprend. Un mini-loup, bon sang ? À moitié caché derrière un buisson, sur le bord du chemin, l'animal se trouve à bonne distance et observe le duo de randonneurs. Il semble hésitant. Mais il a la gueule ouverte, prêt à les croquer. Thelma se fige et sent son cœur s'emballer. Curieusement, sa dernière pensée est pour Chaussette. |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 20 Oct - 12:09# | |
| Fin mai. Parc national des Pinnacles.— J'espère surtout que notre vénérable oiseau ne fait pas attention à ce que peut raconter une petite… Victor baisse la tête, observe un point roux en contrebas. Pour sûr, Thelma n’évolue guère parmi les hautes altitudes des condors. — …humaine. Enfin, humaine/guide. Mais humaine. Trop d'humains sur cette Terre pour que l'oiseau-to… Enfin—pas trop d'humains sur Terre ! Tous les humains sur Terre sont bienvenus, juste… trop d'humains qui disent… trop de choses. Le militaire réfléchit. Regrette de ne pas avoir sous la main un traducteur Thelma → phrases intelligibles. Songe qu’il est dans la nature des prophétesses – pythies, humaines/guides, etc. – d’exprimer leur sagesse supérieure au moyen de paroles sibyllines. Conséquences : des nœuds coulants au cerveau, des déclarations de guerre opportunes et des sacrifices de vierges adultères1. Il s’en est passé, des événements fâcheux, sur des malentendus2. Peut-être parce que les humains racontent trop de choses futiles et ne disent pas suffisamment les choses importantes. Consciente de ces écueils, l’armée prône la clarté : — Je crois que l’oiseau-tonnerre entend et écoute tout ce que nous disons. Je crois que ses oreilles captent encore mieux que celles de Milton, et que sa vue perçante n’est pas en reste. On surveille chacun de nos faits et gestes, Thelma. Une bulle de silence se forme autour du duo bigarré. Loin d’éprouver une quelconque gêne, Victor savoure.
Durant sa petite enfance dans le plat Kentucky, il croyait dur comme fer que les montagnes étaient de gros cailloux tombés sur la Terre. Des fragments de planètes lancés comme des billes à travers le vide intersidéral, par des Titans cosmiques génocidaires qui s’ennuient ferme entre deux parties de poker avinées autour d’une nova sur laquelle grésille une marmite de cassoulet. La seconde révélation vint de nanars préhistoriques à la télé. Victor comprit alors que des dinosaures amateurs d’art avaient ciselé la roche en forme de dents de mégalodon, en hommage à ces créatures phénoménales qui continuent à inspirer le cinéma des millions d’années après leur disparition supposée3. Ensuite, des troupeaux de chèvres à barbiche avaient escaladé les pentes et refaçonné les reliefs. L’école publique du Kentucky dressait un autre portrait des montagnes, ces paysages impies. On y trouve plus de Pépito Déliros que de pépites d’or. Les riches promoteurs miniers y exploitent de pauvres hères à l’espérance de vie diminuée. Des troupeaux masochistes torturent leurs gambettes en gravissant les pentes au pas de course. Des hordes suicidaires grimpent les parois abruptes à l’aide de pics d’escalade, ou pire encore, sans aucun matériel. L’hiver, des hordes de drogués glissent sur la poudreuse. Le manque d’oxygène fait faire n’importe quoi ; couler un bronze à 8000 mètres d’altitude est devenu l’accomplissement d’une vie. Puis Victor s’est enrôlé dans l’infanterie. L’infanterie américaine raffole des longues balades en montagne. À train d’enfer, 45 kilos d’équipement par soldat. Après avoir expectoré des nuages de vapeur et transpiré des ruisseaux d’effort, le regard de Victor sur les hauts reliefs a évolué. Bravache, il raillait ces satanés massifs quant à eux infoutus de se déplacer à une distance d’un jet de pierre, tout juste bons à vomir des éboulis. Quand une ascension lui paraissait interminable, il réfléchissait à la quantité de bombes H nécessaires au terrassement de la crête en lac de galets radioactifs. Enfin, depuis quelques années, Victor s’est mis à lire. Notamment la brochure du parc national des Pinnacles. Des informations savantes y contredisent tout ce qu’il croyait savoir sur les montagnes : elles vieillissent et se dégradent, certes beaucoup moins vite que – par exemple – Thelma ou Victor. Leur robustesse minérale ne les protège guère des étirements sournois d’une faille géologique et certaines flottent sur des océans de magma, pareilles à de gigantesques radeaux à la dérive. En substance, c’est le sort qui frappa le volcan de Neenach il y a 23 millions d’années. Scindé par la faille de San Andreas tel un cœur déchiré en deux, ses ventricules se sont lentement éloignés. Plusieurs centaines de kilomètres les séparent aujourd’hui et elles dérivent encore, en vagues mélancoliques qu’aucune force ne peut endiguer. La partie occidentale, prévue pour emboutir San Francisco dans 6 millions d’années, a subi l’érosion des pluies acides, des vents chargés de particules abrasives, des excréments de volatiles en tous genres, ainsi que, plus récemment, de hordes avides munies de têtes de pioche. De même qu’un squelette humain résiste mieux aux becquetés des charognards que les tissus mous, l’andésite et la rhyolite sont restées intactes quand les roches tendres ont peu à peu disparu, sculptant une forêt de pinacles, cavités, crevasses, canyons et éboulis. La vie s’y est établie, riche et diverse. Résultat : un trésor naturel que le gouvernement fédéral a choisi de préserver.
Victor embrasse du regard le paysage somptueux qui s’élève, les reliefs étonnants de la roche, les ondulations versicolores de la végétation offerte au vent et au soleil. Au loin, les ailes brun-doré d’un couple d’aigles royaux gonflent et paradent avec grâce à travers le ciel azuré. Le parc respire la paix et l’harmonie ; l’âme du soldat scarifié par les affres de la guerre s’émeut. Il hume l’odeur chaleureuse de la terre, les exhalaisons doucereuses des arbres et des fleurs. La tendre caresse des éléments sur son visage stoïque lui rappelle d’anciennes sensations. Sous le crissement de ses pas assurés, il lui semble percevoir le chant profond du demi-volcan enfoui. La cantilène assourdie d’un cœur meurtri. À moins qu’il s’agisse d’une résonance, ténue mais persistante, sous sa cage thoracique trop souvent malmenée pour battre en silence. Soudain, le couinement proche d’une créature incongrue alerte ses sens. Du coin de l’œil, il avise Thelma figée dans une expression de mignonerie béate. C’est sur la guide que se porte l’attention première du sergent, constamment en alerte. Elle est la Voie et sa responsabilité, lui que le destin a consigné dans un rôle de logistique4. Leur allure, gastéropodesque selon les standards de l’infanterie, suit une progression rapide mais soutenable pour les gambettes menues de la citadine. Rapide à condition de ne pas s’arrêter devant chaque bellâtre à fourrure. Apprenez à bouger la tête tout en continuant à actionner vos jambes, a-t-il envie de professer, Inspirez-vous d’un char Abrams qui manœuvre sa tourelle et ses chenilles indépendamment : visée, destination, objectif. Néanmoins ses lèvres demeurent closes. La figure de Thelma se teinte d’une couleur douteuse chaque fois qu’il expose un concept militaire. Les civiles y sont peu réceptives de manière générale. À présent, elle affiche un surprenant rouge health points de jeu vidéo. Et retrouve l’usage de la parole : — Qu'est-ce qu'on va lui dire, à Italia ? Je veux dire… Parce qu'on va la trouver, n'est-ce pas ? Et il faudra bien qu'on lui parle. Si j'étais elle et que je nous voyais débarquer tous les deux, je serais… Si Italia possède une acuité visuelle identique à celle de Thelma boostée d’une paire de jumelles, elle ne risque pas de les voir venir. Jeune coyote sur le chemin. Long corps, longues pattes griffues, longue queue, longue tête en forme d’entonnoir étroit. Poil gris-brunâtre, adapté à son environnement. Pas plus de dix kilos. Crocs d’environ 3 centimètres. Mâchoires béantes, posture d’approche n’excluant pas une fuite précipitée. Niveau de menace : ridiculement faible. Les coyotes craignent l’espèce humaine. À raison. Victor se place devant Thelma. — Salut. Il fixe le jeune coyote, mais ce n’est pas au canidé qu’il s’adresse. — C’est ce que nous dirons à Italia Hill : salut. Simple. Avenant. Efficace. Valable à toute heure du jour et de la nuit. Compréhensible de chaque être humain5. Préconisé par le manuel du parfait soldat, chapitre sympathiser avec la population civile. — Ne bougez pas. J’ai l’habitude des prédateurs. Bipèdes et armés pour la plupart, souvent plus hostiles et sauvages que les bêtes qualifiées comme telles. Mais pas toujours. Droit, solide, affable comme une tour de garde, Victor dirige ostensiblement la main droite sur le manche de son couteau, rangé dans son étui à la cuisse. Le coyote baisse la tête et grogne. Pattes en appui. Paré à bondir. Pas mal, évalue Victor. Jolie caisse de résonance pour un petit gabarit. Le militaire penche la tête sur sa gauche. Fait craquer sa nuque. Le coyote penche l’oreille gauche à son tour. Aucun craquement. Son grondement dérape ; l’animal s’étrangle. Petite graine d’amateur. Ma grand-mère percluse d’arthrite faisait mieux que ça. Pour enfoncer le clou, le soldat penche la tête du côté opposé. Nouveau craquement, spectaculaire. L’onde de choc fait vibrer ses gencives avec l’impétuosité d’une brosse à dents sonique. Le coyote s’emploie à l’imiter. Effort indéniable. Résultat pitoyable. Il ressemble à un chien en peluche dont un gamin cruel a tordu le cou. Supériorité d’Homo Sapiens établie. Victor écarte la main de son couteau et se détend. — Oust. Du balai et va en paix, frère montagnard. D’un coup de menton autoritaire, il désigne des reliefs broussailleux où foisonnent les petits animaux dont se nourrit le canidé. Le jeune coyote ne part pas. Raté. La petite tête fine bascule. À droite, à gauche, en haut, en bas. Cherchant Thelma du regard. — Cet animal est un chasseur d’oiseaux extrêmement tenace, commente placidement Victor. Je l’ai vu dans Bip Bip et Coyote. Un épisode du fameux dessin animé est resté gravé dans sa mémoire. Coyote, jamais à court d’idée pour attraper sa proie, fait l’acquisition d’un missile balistique apte à courser le véloce oiseau bleu. Victor, âgé de sept ans et déjà pragmatique, interrogea sa mère : « S’il a faim, Coyote, pourquoi y va pas au magasin se payer un steak ? Ça coûte super cher une fusée de la Nasa, nan ? » Madame Nash, coutumière des réflexions affutées de son fils, répondit du tac au tac : « Parce que c’est plus marrant comme ça. » Ce jour-là, Victor se fit la promesse de faire de l’humour bon marché. Trente-deux ans plus tard, il effectue un pas de côté et offre l’oiseau-guide au coyote juvénile. — Laissez-vous faire, Thelma, préconise-t-il avec aplomb. Restez calme. Criez seulement s’il vous arrache un morceau de chair. L’animal avance prudemment sous l’œil attentif du militaire. Renifle Thelma avec curiosité. Tourne autour de la robe verte, se frotte en émettant un petit grondement sourd et régulier. Chat alors, se dit Victor, impressionné. Passant du félin au canin, puis au câlin, l’animal léchouille gentiment les doigts sucrés, la paume crémeuse. Victor secoue la tête. La gourmandise te perdra, mon ami, tu vas glisser sur tes coussinets comme du beurre fondu sur une patinoire. Après un jappement satisfait, le coyote s’éloigne, gambade joyeusement en direction des High Peak. S’arrête à 12 mètres de la piste, parmi les herbes et les fleurs frémissantes, tord le cou vers les humains et jappe avec impatience. Victor lance à sa partenaire : — Je crois qu’on a un nouveau guide. Vous avez de la chance. L’oiseau-tonnerre vous aime bien ; les animaux et les gens aussi. (Il repense aux randonneurs.) Quand vous ne leur criez pas dessus. Il plisse les yeux, prélève un poil soyeux sur la robe émeraude, trop haut pour être issu du coyote. Un prompt examen affine son analyse : — Vous habitez avec un raton laveur ?
* * * Quelque part dans les High Peaks, loin des sentiers connus et points d’observation prisés, un conclave de pinacles s’élève tel un bosquet minéral au creux d’un canyon isolé. Sur les sommets exigus de ces élévations rocheuses, de grands vautours aux ailes noires et blanches bâillent et chuintent de concert. Il ne s’agit guère d’une sieste collective, bien que Gymnogyps californianus soit expert en bain de soleil paresseux. Les têtes orange-rouge6 convergent avec curiosité vers la cime centrale, plus lisse et étendue que les autres, plantée là comme un autel immémoriel entouré de colonnades rhyolitiques grossièrement taillées. Assise en tailleur sur la surface rocheuse, une femme habillée d’un costume cérémonial chantonne des incantations. Au début de chaque envolée spirituelle : Animikii, Culloo, Huhuk, Omaxsapiteau, Yello-kin, ou une quelconque dénomination capricieusement articulée du mythique oiseau-tonnerre. Devant la quadragénaire à la coiffe de plumes, un bol vide ayant contenu une mixture aux vertus divinatoires selon les uns, hallucinogènes selon les autres.
1 Le signe astro le plus meurtri de l’histoire, avec des disparités régionales importantes. Ainsi les taureaux ont payé le prix fort autour des arènes de corrida, tandis que les balances subirent un esclavage exponentiel au sein des marchés, des commerces, des cabinets de médecine et QG de dealeurs. Depuis l’essor des restaurants de sushi et des élevages intensifs de saumon, ce sont désormais les poissons que l’espèce humaine charcute le plus. 2 Très récemment, tout près d’ici : quatre jeunes randonneurs mis aux travaux forcés par un ranger zélé et une hôtesse aux paupières bleu pervenche. 3 Si les recherches du loch Ness n’ont soi-disant rien donné, c’est parce qu’un mégalodon affamé de chair humaine attire moins les touristes qu’un hippopotame géant pourvu d’un long cou et d’une petite tête sympa. 4 Rôle dans lequel, pour rester poli, son potentiel de progrès impressionne. Victor n’a même pas pris l’initiative d’emporter un thermos de café, breuvage pourtant indispensable au fonctionnement optimal de ô guide. 5 Une pensée pour : les sourds, le syndicat des casques antibruit, les canaux auditifs obstrués d’épais bouchons de cérumen, les fans de black metal après un concert. Quant aux locuteurs ignorant le b.a.-ba de la langue américaine, seuls les vampires francophones sont susceptibles de sortir les crocs après un Hi ! enthousiaste. 6 Bien qu’ils soient chauves, les condors passent pour les rouquins de l’ordre des vautours. D’où les pouvoirs surnaturels qu’on leur attribue.
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Thelma Appelbaum 653
Sillage + elle
Jane Levy
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35 ans, le vertige des années qui commence, avec la réalisation qu'elle n'a encore rien construit de sérieux (9 novembre)
célibataire, elle utilise vaguement une appli de rencontre pour remédier à la situation. Ça l'amuse, ça lui donne de l'espoir, ça l'exaspère. Au fond, elle pense toujours, un peu bêtement, qu'elle va croiser l'âme-sœur chez le fleuriste, quand the one voudra acheter en même temps qu'elle les dernières pivoines de la boutique et qu'ils échangeront leurs premiers mots… bref. Célibataire.
vendeuse au Cranachan, objectivement la meilleure pâtisserie de Monterey
un appartement — tout petit mais cosy — dans le centre-ville
quotidienne (j'essaie héhé)
diamond member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Sam 9 Nov - 18:32# | |
| Pour ses derniers instants de vie, Thelma assiste à un étrange spectacle. Victor a l'air résigné. Il se contente d'un austère « salut » en guise d'adieu puis mentionne Italia ; peut-être pense-t-il qu'ils la croiseront dans l'au-delà. Pour finir, il entame une danse à distance avec la bête qui va les croquer. Si la vendeuse s'est souvent imaginé son ultime moment sur Terre, peu de scénarios impliquaient un loup et un militaire exécutant ensemble un ballet à base de mouvements de tête. Tendue, confuse, elle s'agrippe au sac en toile qu'elle porte à son épaule, et observe la scène sans même songer à s'enfuir. Finalement, Victor brise le silence. — Oust. Du balai et va en paix, frère montagnard. Frère ? Frère montagnard ? C'est comme ça qu'il qualifie leur adversaire ? Thelma lève les paumes vers le ciel, dans un élan d'incompréhension sincère. Puis elle se penche pour mieux apercevoir la bête, en partie dissimulé par Victor. Les yeux de la guide rencontrent ceux du frère montagnard. Qui n'a pas compris la signification subtile du mot « oust », semble-t-il. Hmm. Elle ignore si c'est parce que le militaire se dresse entre elle et le loup, mais elle n'a soudain plus l'impression que sa mort est si imminente que cela. Son regard se pose sur Victor. — Cet animal est un chasseur d’oiseaux extrêmement tenace. Je l’ai vu dans Bip Bip et Coyote. Un coyote. C'est donc ça, le mammifère féroce qui leur fait face ? La vigilance de Thelma redescend encore d'un cran. Ses épaules s'affaissent, sa mâchoire se dessert. Elle se demande où situer le coyote sur une échelle allant du Loulou de Poméranie au loup-tout-court, et, avec un brin d'optimiste, choisit de le placer quelque part au milieu. Et elle a rêvé, ou Victor vient de faire une plaisanterie ? Alors qu'elle songe que cela n'augure rien de bon, ses craintes se confirment aussitôt. Le soldat se décale : la bête a désormais Thelma en pleine ligne de mire. — Laissez-vous faire, Thelma. Restez calme. Criez seulement s’il vous arrache un morceau de chair. Il vient délibérément de la livrer à l'ennemi. Et en plus il se permet de tourner la situation en dérision. La rouquine lui adresse un regard furibond, mais son attention se reporte vite sur le coyote. Ne pas bouger. Elle peut le faire. Elle le fait chaque fois que retentit la sonnette de son appartement alors qu'elle n'attend aucune visite ; il s'agit alors d'éviter tout bruit ou ombre mouvante sous la porte qui trahirait sa présence. Trente secondes sont généralement suffisantes pour que l'intrus lâche l'affaire. Trente secondes. Les yeux rivés sur le coyote en approche, Thelma inspire profondément et se tient droite comme un piquet. Vingt-sept secondes. Reniflage, montrez-moi-vos-papiers-s'il-vous-plaît. L'oiseau-guide habite avec un chat, elle a l'habitude, elle coopère. L'animal est calme. L'humaine sent sa respiration ralentir. — Salut… murmure-t-elle dans un souffle, alors que le coyote se frotte à ses jambes. Ce contact pelucheux produit un effet étrange : Thelma a soudain l'impression que tous ses sens sont en éveil. Elle perçoit chaque nuance de gris-brun qui se déploie dans la fourrure mouvante autour d'elle, sent sur sa nuque moite la caresse d'une brise imperceptible, capte l’odeur tiède de la terre réchauffée par le soleil. Et, au loin, elle jurerait avoir perçu le cri d'oiseaux. Douze secondes. Pour une raison ou une autre, l'animal curieux semble particulièrement intéressé par la main droite de Thelma. Celle-ci a un petit sursaut lorsqu'elle sent une léchouille sur ses doigts. Les extraits de chouquettes goût monoï ont l'air de contenter le coyote, qui couine avant de s'éloigner. C'est fini. Thelma suit l'animal des yeux, elle ne comprend pas pourquoi il s'arrête avant de se retourner vers Victor et elle. Et voilà qu'il leur aboie dessus. De mieux en mieux. Heureusement, son partenaire de mission semble parler couramment le langage coyote, lui. — Je crois qu’on a un nouveau guide. Vous avez de la chance. L’oiseau-tonnerre vous aime bien ; les animaux et les gens aussi. Quand vous ne leur criez pas dessus. — Hrmm, grommelle Thelma qui, en cet instant, n'a ni envie de repenser au moment embarrassant de tout à l'heure, ni le courage de décider si c'est un don ou une malédiction, d'attirer la sympathie des créatures légendaires, mamies accros aux pâtisseries et autre faune des Pinnacles. Si elle criait plus souvent sur tous ceux qui croisent sa route, il est à peu près certain qu'elle ne se trouverait pas ici, à jouer un remake californien du Petit Chaperon rouge. Alors qu'elle se rapproche de Victor, elle sent son regard posé sur elle. Elle se laisse faire lorsqu'il tend la main pour prélever quelque chose sur sa robe. — Vous habitez avec un raton laveur ? Serait-ce… de l'humour ? Encore ? Thelma plisse les yeux, suspicieuse. Une mouche endémique des Pinnacles a peut-être piqué Victor, causant des dommages irréparables à son sérieux à toute épreuve. Pour en avoir le cœur net, elle prend appui d'une main sur l'épaule de son acolyte, se hausse sur la pointe des pieds et penche la tête d'un côté puis de l'autre afin d'inspecter le cou du soldat. Pas trace de piqûre suspecte. Redescente à son altitude habituelle. À la prochaine once de plaisanterie, il faudra qu'elle s'inquiète réellement. — Un raton laveur ? s'offusque mollement Thelma en gardant un œil sur le coyote, qui attend toujours quelques mètres plus loin. Je sais pas ce que vous êtes en train de suggérer, mais je ne vis pas dans une benne. « Deux-pièces encombré mais charmant » serait un terme plus approprié pour décrire son chez-elle. Et aucun raton laveur n'y a élu domicile. Du moins à sa connaissance. Il y a bien un placard dans sa cuisine qu'elle n'ouvre jamais, et qui en plus se situe à côté de la cachette à biscuits. « Emplacement stratégique pour les individus ratonlaveuriens », dirait Victor. Thelma se fait note d'y jeter un coup d'œil à en rentrant. — Chaussette n'est pas un raton laveur, poursuit-elle avec tout le sérieux du monde. C'est un chat tout ce qu'il y a de plus chat. Gris, pas très sportif, et i-il… L'évocation de son compagnon de vie provoque une vague d'effets bizarres sur Thelma. Elle sent sa gorge se serrer, son estomac se nouer. Ses yeux se détournent du coyote pour se poser sur sa main droite, celle que l'animal a lapée plus tôt. Un sentiment profond de trahison la saisit. Peut-être Chaussette ne la reconnaîtra-t-il plus, comme les mères abandonnent leurs bébés faons s'ils ont eu le malheur d'entrer en contact avec les êtres humains. « Je ne vous connais pas. Je ne reconnais que l'odeur pestilentielle d'un mini-loup sur vous », lui dira M. Catppelbaum en la reniflant. Avant de la chasser de chez eux, chez lui. Thelma relève la tête. Le soleil est en train de lui monter à la caboche, à moins que ce ne soit le manque de café, le fait d'être au milieu de nulle part avec un inconnu, ou peut-être tout ça à la fois. Elle se tapote la tête pour en contrôler la température, ressert le nœud qui maintient ses cheveux, puis s'affaire pour trouver la gourde que Victor lui a confiée un peu plus tôt. Elle la sort de son tote bag, boit une longue gorgée d'eau à toute vitesse. Puis elle se tourne vers son coéquipier. — Suivez-moi, s'entend-elle dire d'une voix assurée en refermant le bouchon. Elle va suivre le coyote, faire du hors-piste s'il le faut, se faire griffer les mollets par les herbes hautes. Mais elle va la trouver, Italia Hill. Ils vont trouver Italia Hill, elle, la guide qui n'a rien demandé, son escargot militaire et son coyote amateur de pâtisseries françaises. - Dé:
Pair : Thelma, mue par une force mystique, un brin de chance et un canidé au sens de l'orientation mirifique, dirige notre duo droit vers les High Peaks.
Impair : désorientée (par le soleil, les émotions, son inaptitude à lire une carte), Thelma n'a aucune idée d'où elle met les pieds. Face à cette guide à trois francs six sous, le coyote se carapate rapidement.
Dernière édition par Thelma Appelbaum le Mer 13 Nov - 10:21, édité 1 fois |
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Maître du jeu 1768
Maître du jeu de Basique.
Aucune célébrité
Version 35 : Panic station Aucune autre compte
On ne demande jamais l'âge d'un maître du jeu.
Je suis avec vous tous !
Je vais vérifier régulièrement si tout est correct sur le forum.
Toujours là pour vous !
staff - pnj de Basique | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Sam 9 Nov - 18:32# | |
| Le membre ' Thelma Appelbaum' a effectué l'action suivante : Lancer de dés
'Les dés du hasard' : |
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Victor Nash 418
spf (il)
Chris Evans
Skeyde In Somnia //
39 ans en avril. Vigueur du corps, expérience de l’âme, tourments de l’esprit.
Célibataire. Il a aimé et fut aimé en retour, des cadeaux de la vie qu’il chérit en son cœur. Amours impossibles, d’intensités diverses, étouffées par son dévouement envers l’US Army, plusieurs fois ensevelies sous le tombeau de la tragédie. Il chemine aujourd’hui avec la froide solitude, ressent parfois l’envie d’une compagne de voyage plus chaleureuse.
Sergent d’infanterie muté début 2022 au Presidio de Monterey, base militaire dépourvue d’unité de combat. Affairé à des tâches profondément ennuyeuses d’intendance et logistique. Victor a toujours eu la bougeotte et le goût de l’action ; il a passé une grande part de sa vie adulte sur les théâtres d’opération de l’US Army – sa famille de cœur. Et comme dans toutes les familles… il y a des couacs. Un sauvetage interdit en Afghanistan, jugé comme acte d’insubordination, lui a valu cette mise au placard qu’il espérait temporaire. Redresseur de torts depuis septembre 2022. Des rencontres et événements inopinés le poussent à se battre hors des lois, mais toujours en accord avec son code de conduite.
Une vieille bâtisse spacieuse au nord-ouest de la ville.
☾⋆⁺₊⋆ VICTORI ⋆⁺₊⋆☽
Our meeting was fate,
Our pairing was symbiosis,
Our love was serendipity,
Our story was tragedy. Présence minimale pour une durée indéterminée.
gold member | Sujet: Re: Thunderbird (Victor & Thelma) Dim 24 Nov - 21:01# | |
| Fin mai. Parc national des Pinnacles.Aucune intention comique dans le questionnement de Victor. Simple curiosité. D’abord zoologique, puis textile. — Chaussette n'est pas un raton laveur. Évidemment. On a rarement vu un raton laveur pratiquer le massage des petons ou servir de dépôt sécurisé aux cadeaux de Noël. Les yeux du militaire louchent sur le poil cendré. Étrange chaussette, tout de même. Tissée en fil court, épais, inextensible. Imitation fourrure ? s’apprête-t-il à demander quand Thelma révèle le pot aux roses – ou plus exactement : la litière aux attributs peu floraux. — C'est un chat tout ce qu'il y a de plus chat. Gris, pas très sportif, et i-il… Décevant. D’après certains récits mythologiques, des ancêtres de Chaussette ont tiré le char de la déesse guerrière Freya. Durant l’Égypte antique, le félin sacré protégeait le foyer du mauvais œil ; pas les pieds froids. Rien à voir avec les matous paresseux de l’Amérique moderne. Victor abandonne le banal concentré de kératine au courant d’air qui s’écoule des hauts reliefs. — Les chats se lavent. Raton laveur, chaton laveur, c’est du pareil au même. Il y en a un des deux qui porte un masque de Batman, c’est tout. La voix tranche, suffisamment péremptoire pour rendre superflu l’adjonction d’un Thelma affuté. De toute façon, Thelma ne semble plus l’entendre. La prophétesse parait en transe, en train de capter les ondes mystiques à la manière d’un poste radio, se dit Victor, figé comme une figurine animée qu’on a mise sur pause afin de ne pas gêner la transmission. Mieux : d’un geste fulgurant, il attrape au vol une mouche bourdonnante qu’attire l’haleine sucrée de la vendeuse. Mieux vaut passer pour un insecticide qu’un perturbateur. De retour dans le monde réel, inspirée, hydratée, tignasse domestiquée, la rage1 au ventre, l’impératrice-guide claironne : — Suivez-moi. Le sergent Nash, au garde-à-vous, acquiesce et se met au pas.
Un pas lent, opérant des trajectoires erratiques lorsque le coyote-boussole bondit après un lézard, ponctué d’arrêts anti-insolation et pose de sutures aux mollets, qui casse un peu l’ambiance quête glorieuse à travers les Pinnacles d’une vendeuse en pâtisserie et de son portefaix. Un pas qui les mène pourtant à la plus étrange réunion de condors qu’ils aient jamais vue2. Une assemblée des plus grands rapaces de la planète a de quoi impressionner, spécialement quand ils nichent sur des pinacles rocheux hauts comme des termitières géantes fossilisées. Le spectacle insolite, unique, ferait piquer une crise de jalousie aux Friends of California Condors. À l’exception d’Italia Hill, née Kabacinski, assise en tailleur sur le pic central et à un éternuement de finir en pizza napolitaine aux pieds des secours envoyés par l’oiseau-tonnerre. — La vue doit être superbe de là-haut, commente Victor en se déboitant le cou. Il enveloppe sa bouche des deux mains, créant un mégaphone assez puissant pour déboucher les oreilles d’un plombier. — SALUT ? Le chant d’Italia Hill et ses échos enrichis du mystérieux langage des condors lui répondent. Le site offre une réverbération spectaculaire. Plusieurs milliers de millénaires avant les processeurs quantiques et les compositions générées par IA, les Pinnacles étaient déjà capables de rythmer un raclement de gorge en opéra grandiose. D’une poussée de museau, le coyote-boussole resté là parce qu’il trouve ces deux humains rigolos, incite Victor à y mettre plus de cœur. Obéissant, le militaire s’exécute. — SAALUUUT ! Hu-hu-hu ! répètent avec moquerie les éminences rocheuses. Les grands rapaces toisent l’étrange bipède en contrebas avec dédain et bayent aux corneilles. Le manuel du parfait soldat, chapitre sympathiser avec la population civile, ne tarit pourtant pas d’éloges sur l’armée du salut. Victor se tape la poitrine – façon Donkey Kong – afin de relancer son souffle. Puis se tourne vers Thelma3. — Fauhhh. Monhh-téhh, haleta-t-il piteusement. Entre deux longues et profondes inhhhalations, Victor exhhhale que non, un thé au gingembre n’est aucunement indispensable à la poursuite de la mission. — Nous devons escalader afin d’atteindre notre cible, complète-t-il lorsque l’oxygène réalimente enfin correctement son organisme. L’enthousiasme de Thelma semble refroidir comme un orteil plongé dans un trou de phoque au milieu de la banquise. — J’ai tout ce qu’il faut, la rassure Victor en posant son sac à terre. Il l’ouvre et tire fièrement un bandeau en tissu aux motifs guerriers. — Plaquez-le sur votre front et nouez à l’arrière de votre crâne. C’est pour la transpiration. Pour éviter que les chutes du Niagara dégouline dans vos yeux. En outre, toute personne ayant déjà visionné une rediffusion des Gremlins sait qu’un bandeau est capable de métamorphoser une boule de poils inoffensive en machine de guerre inarrêtable. Avec ses longs poils roux sur le crâne, Thelma détient le potentiel d’une maitresse suprême de la grimpe. Victor extrait ensuite du matériel d’escalade. Cordes certifiées pendaison sans douleur, harnais d’alpiniste qui n’a jamais harnaché dans les Alpes, mousquetons en superalliage de titane : tout y est. Seul, ses mains et ses pieds lui suffiraient. Italia Hill a manifestement grimpé à nu – mais habillée – et un examen avisé de l’éminence rocheuse révèle un couloir d’ascension praticable et sûr. Problème : Victor doute que Thelma ait jamais pratiqué l’escalade d’une échelle. Un tabouret, sans aucun doute, à en juger par sa hauteur bras levés. Une échelle de trois mètres représente un autre défi et le pic rocheux s’élève à environ 16,38 mètres4. — Glissez vos bras là-dedans, comme ça, montre-t-il. Complication supplémentaire : la robe, avec le kilt écossais, est le seul vêtement qui entrave la pose d’un harnais en bonne et due forme. Une fois sanglée, Thelma ressemble à une parachutiste sans voilure. — Rassurez-vous, j’ai déjà fait ça auparavant. Sourire aux lèvres, il se rappelle une mémorable ascension en duo, au cours d’une randonnée montagnarde avec une novice. Une habitante de Monterey aux cheveux roux, elle aussi. Ils avaient frôlé la mort à seulement trois reprises. Victor roule les épaules puis se presse contre la paroi, bras levés. — Je passe devant, essayez de faire comme moi. Main pied, pied main, en gardant toujours trois appuis. Agrippez-vous du mieux que vous pouvez. (D’un mouvement souple, il se hisse sur la roche.) Si vous glissez, je vous retiendrai. Mais si je tombe, on tombe tous les deux5. Alors essayez de ne pas trop vous agiter là-dessous. Prenez votre temps et souvenez-vous de bien respirer. En avant, Thelma !
Victor grimpe avec enthousiasme, lié à la prophétesse par un solide cordon. Gestes lents, précis, éloquents, dévoués à sa partenaire et in fine à la mission. Au sommet du pic rocheux, les paroles incantatoires d’Italia Hill se précisent. Elle demande conseil à l’oiseau-tonnerre. Animikii, Culloo, Huhuk, Omaxsapiteau, Yello-kin. Donnant l’impression de parler à la figure mythique, implorant sa guidance. Au sujet d’un long voyage en Amérique Centrale qu’elle projette depuis des années. Avec ses deux enfants désormais à l’université, les conditions sont enfin réunies. Cependant, elle aime son mari et souffrirait d’être séparée de lui, de l’abandonner alors que son travail, exigeant, l’épuise. Que faire, ô guide ?
1 Sous forme de bouillie de chouquettes. 2 Facile à prétendre, lorsqu’on observe des condors en becs et en plumes pour la toute première fois. 3 Une façon polie de décrire que lui aussi regarde l’étrange bipède en contrebas. 4 Estimation réalisée d’après un calcul savant impliquant la longueur de l’ombre projetée au sol et l’heure indiquée par le cadran de sa montre G-Shock. 5 Il omet de préciser que son corps à lui touchera le sol en premier, offrant un matelas de chair inanimée apte à amortir le choc du corps suivant, de surcroît ralenti par une abondante chevelure-parachute. La vendeuse serait bien capable d’utiliser cette information pour avoir enfin la paix et retourner à ses tartelettes à la groseille.
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