Voilà une autre journée qui s’annonçait comme les autres enfin c’est ce que tu espérais. Depuis maintenant deux ans, tu étais devenu l’heureuse propriétaire de la librairie du centre. Avec l’aide de ton père, tu avais ouvert cette boutique, car tu avais toujours eu une passion pour les livres. Tu essayais même d’en écrire, même si tu n’étais jamais satisfaite. Un jour peut-être tu arriverais à surpasser ton côté perfectionniste pour envoyer un de tes essais à une maison d’édition. Cette libraire c’était un moyen de te rapprocher de ton rêve. Les livres, il n’y avait rien de mieux dans la vie. Depuis, tu adorais aller travailler, même s’il arrivait souvent que ce soit calme. Aujourd’hui de plus en plus de monde achetait leurs livres sur le net et n’achetais plus de livre version papier et pourtant sentir le livre entre tes mains, sentir l’odeur parfois pas très bonne du papier. Pour toi c’était le pur bonheur. Comme c’était le week-end, tu ouvrais la boutique à dix heures du matin, mais tu arrivais toujours vers neuf heures trente afin de prendre le temps de faire un petit ménage, ranger quelques livres et une fois que c’est fait, tu ouvres la boutique et tu attends les premiers clients. Comme il était encore tôt, tu en profitas pour faire un peu de comptabilité. Chose que tu n’appréciais pas, mais dont tu avais suivi une formation pour bien gérer ta boutique.

Des jours et des jours que je traîne autour de cette librairie comme un stalkeur, un de ces mecs instables, qui veille sur les lieux ou sur une personne. Tous les jours, dès que j'ai le courage de sortir, je m'y rends. Je reste à l'extérieur, dans l'espoir d'avoir le courage d'y pénétrer et de la croiser. Birdie. Cette vieille amie. Vieille parce que notre amitié s'est créée, il y a une autre vie, de cela. J'étais à l'université, dans une section pas mal opposée à la sienne. Tous les deux, presque forcés de nous rendre à cette soirée d'intégration pour les nouveaux étudiants, histoire de nous faire des amis. Ça plutôt bien marché. Je l'ai trouvé elle. A des années lumières des autres étudiants, franchement trop stupides, superficiels et imbus d'eux-mêmes pour que j'ai le courage de les supporter plus de trois heures dans la journée. Birdie s'est démarquée de toutes ces personnes.

Je l'ai vraiment bien aimé. Peut-être plus qu'une amie ? Je n'en sais rien... A vrai dire, c'est ce sentiment dont j'ignore la nature profonde qui m'a emmené ici. Devant cette librairie. Peut-être aussi la culpabilité ? La culpabilité d'être parti comme un voleur, d'avoir cessé de donner des nouvelles, d'avoir arrêté de répondre aux messages. Tout s'est terminé si brutalement. Comme ça, du jour au lendemain, alors que nous passions avant le plus clair de notre temps ensemble. Nous faisions tout ensemble. Le retour a une vie sans elle, ça a été particulier, spécialement vide, sans intérêt. Oh, disons-le, après avoir cessé de répondre à ses SMS, puis en voyant qu'elle cessait, de son côté, de m'envoyer, j'ai fait une petite dépression. Tous disaient que j'avais le cœur brisé, un chagrin d'amour. Certainement ? Peut-être ? Je n'en sais rien.

En tout cas, au petit matin, je suis là, des viennoiseries à la main droite, un café dans la main gauche. Ses préférés dans les deux cas. Je m'en souviens encore. Je ne l'ai jamais réellement oublier. Plantée devant la devanture de la librairie, encore fermée. Je me dis qu'en étant devant, fatalement, en ouvrant les portes, elle va me remarquer et je ne pourrais pas me défiler comme toutes les autres fois. Il faut que je m'excuse. Que je rattrape les conneries que j'ai fait, dans le passé, par peur.


Plus qu'une minute avant qu'elle n'ouvre l'établissement. Je sens mon cœur battre à une vitesse folle. Mes mains commencent à trembler, rapidement rejoint par le reste de mon corps. Je veux partir. Je veux m'enfuir. Je veux prendre les jambes à mon cou et me barrer le plus vite possible… jusqu'à ce que je la vois, au loin, à travers les vitres, que je la vois s'approcher de l'entrée. A partir de là, impossible pour moi de partir. Je suis coincé sur place.

Tu t’attendais à ce que je la journée sois tranquille. De nos jours, peu de gens lisaient des livres autres que sur une tablette numérique, mais cela ne te dérangeait pas. Tu avais des fidèles et cela te convenait. Après tout, ce n’était pas une grande librairie. Elle était juste parfaite pour toi et ta clientèle. Elle offrait une bonne variété de documents, allant de documentaires aux romans policier, passant par les romans d’amour. Tu avais toute une collection de livres, parfois même il en trainait par terre au bout de certaines rangées. Quelques présentoirs offraient une variété de livres de poche et à la caisse quelques babioles. Cela faisait deux ans, mais tu n’avais rien touché à ce qui avait été fait. Pourtant, tu avais plein d’idées en têtes pour la rendre plus agréable et vivante, mais quelque chose faisait en sorte que tu n’arrivais pas à défaire ce qui avait été fait par ton prédécesseur.

Toujours en train de faire un peu de ménage, tu ne remarquas pas l’heure. Bientôt dix heures. Il te restait encore quelques minutes pour finaliser ce que tu faisais. Tu défis une boite et allas la porter dans l’arrière-boutique. Celle-ci n’était pas énorme, mais elle possédait assez de place pour entreposer quelques exemplaires supplémentaires de certains livres et une salle de détente. Tu avais même un bureau, mais tu n’y passais que peu de temps lorsque tu devais faire la comptabilité ou la promotion de la librairie. La plupart du temps, tu aimais mieux être sur le plancher afin de surveiller les clients et discuter avec certains. Une fois la boite défaite et rangée dans un bac, tu décidas de te faire un café. Manque de chance, il n’en restait plus. Tu allais donc devoir te passer d’un bon café chaud ce matin. Tu n’avais pas le temps d’aller à ton café préféré pour t’en prendre un.

En passant devant ton bureau, tu remarquas une photo sur le mur. En fait, elle y était depuis que tu avais pris possession de la librairie. Il s’agissait de Naveen et de toi. à l’époque de l’université, alors que vous étiez dans des cursus différents, vous vous étiez rapproché lors d’une fête. Depuis vous étiez devenus amis au point de passer chaque moment ensemble. Justement cette photo représentait un moment inoubliable avec lui. Tu étais tombée amoureuse de lui à l’époque. Peut-être parce que vous passiez du temps ensemble, trop de temps, mais tu sentais qu’il y avait plus entre vous. Vous vous êtes rapproché, puis il a fui... sans laisser de traces. Il avait complètement disparu de ta vie. Tu n’avais que cette photo comme souvenir. Soupirant, tu retournas à l’avant. L’heure était venue d’ouvrir la boutique.

Voilà, les dix heures avaient sonné avec le petit coucou de la boutique. Tu te dirigeas vers la porte et vis une silhouette qui semblait attendre depuis un moment avec café dans une main et un sac de... viennoiseries dans l’autre ? Enfin, tu affichas un sourire pensant que c’était un habitué qui t’amenait ce dont tu avais besoin en ce moment. En ouvrant la porte, tu laissas sortir un « Bon matin ! » Puis tu remarquas la personne devant toi. « Naveen. » Il était revenu ? Il ne t’avait même pas laissé un mot lors de son départ et le voilà qu’il apparait devant toi comme par magie ?. Tu ne savais pas trop comment réagir. Tu lui en voulais encore bien que la douleur ne fût plus aussi forte qu’avant. Tu le regardas droit dans les yeux, tourna les talons et retourna au comptoir. Il pouvait te suivre s’il le voulait, mais toi tu ne savais pas trop quoi lui dire.