Le mois de Juin venait de tomber mais j'avais la sensation d'être toujours coincé en Mai. Ce fameux jour où j'avais appris la terrible nouvelle. La voix à l'autre bout du fil qui m'annonçait que mon petit ami n'était plus. Elle était toujours aussi nette dans ma tête ainsi que la douleur lancinante qui me transperçait parfois. Surtout lorsque je me retrouvais seul dans ma villa, dans cette chambre qui n'accueillera plus jamais Paul. J'avais eu peur qu'il m'abandonne lorsqu'il m'avait annoncé son souhait de partir faire de l'humanitaire mais je n'avais jamais imaginé qu'il allait disparaître, ne plus respirer. J'avais l'impression d'être mort avec lui, sans savoir quoi faire pour ne plus avoir cette sensation. Je ramais pour survivre parce que je ne pouvais pas laisser mes amis ni mon manager. J'y avais pensé, quelques secondes à le rejoindre. A quoi bon rester s'il n'était plus là ? Des pensées sombres que j'avais gardées pour moi, ne souhaitant pas alarmer Cass' ou Hyun-Jin. Ce dernier passait beaucoup de temps avec moi pour me changer les idées, m'apportait à manger même si je n'avais pas vraiment faim. Je pouvais aussi compter sur ma meilleure amie mais elle avait aussi une vie à côté de notre amitié. Je ne lui en voulais donc pas d'être absente. J'essayais de m'occuper l'esprit, travaillant sur le script de la prochaine série que j'allai faire et valider avec mon manager. C'était toutefois dur de me concentrer, surtout de ne pas replonger lorsque je tombais par hasard sur un objet qui appartenait à Paul. Sur des vêtements qu'il avait laissés chez moi. C'était terrible. L'obscurité constante, les larmes qui ne voulaient pas cesser de couler. Est-ce qu'il y aura un jour une fin ?
Délaissant le scénario dont les mots ne voulaient de toute manière pas rentrée, j'envoyais un message à Cass' pour savoir si elle était disponible. J'avais besoin de souffler un peu, de boire un verre en bonne compagnie. Hyun-Jin ne buvait pas ou très peu. Et de toute manière il m'avait dit qu'il avait quelque chose à faire, et de le contacter uniquement en cas d'urgence. Vouloir se saouler n'en faisait pas partie. Ma meilleure amie ne tarda pas à me répondre, qu'elle serait chez elle dans 5 minutes. Parfait. Cela me laissait le temps de me préparer et de maquiller ma sale tronche de zombie.

Je garais ma voiture sur le parking de l'immeuble avant d'en sortir. Lunette de soleil sur le nez pour dissimuler mes cernes et mes yeux qui ne voulaient pas dégonflés. Connaissant le code pour entrer, je tapais les numéros sur le clavier avant de monter les escaliers - la panne de l'ascenseur de l'autre jour m'avais refroidi - jusqu’à l'appartement des Uccello. Si j'étais proche de Cass', c'était différent avec sa sœur jumelle et leur demi-frère. Pas facile de se faire accepter par un ancien mafieux. Je me moquais bien de leur passé, on avait chacun son histoire. Tant qu'elle ne me mettait pas dans la panade. J'appuyais sur la sonnette près de la porte, attendant patiemment qu'on vienne ouvrir.

- Oh bonjour Dario, Cassiopéa est là ?

Demandais-je alors que je me retrouvais face à l'homme de l'appartement. Il ne me faisait pas du tout peur malgré son apparence et son visage peu aimable.

Ces derniers mois ont été particulièrement intenses pour l'italien, entre son accident de moto et ses retrouvailles avec son amour de jeunesse. Aussi longtemps qu'il s'en souvienne, Sawyer a toujours eu une place importante dans sa vie. Ne travaillant pas avant plusieurs semaines parce qu'il n'était pas encore complètement remis de ses blessures, Dario s'ennuyait souvent dans l'appartement qu'il partage avec Cassiopéa sa demi-sœur. La brune lui faussait beaucoup trop compagnie sortir avec des amis. S'il a les bikers de son côté, il a gardé ce côté solitaire et un peu rustre qui peut faire peur ou agacer.  Celle-ci étant sortie quelques minutes plutôt, il s'apprêtait à se faire un café lorsqu'il fut surpris par la sonnette. A t-elle oublier ses clés ? Il n'attendait personne ce soir après tout. Laissant donc tomber la préparation de son café, il se dirigea vers la porte.

Reconnaissant Cain, il se montra étonné de le voir. Après tout, il était persuadé que Caph serait en sa compagnie. Tâchant de ne pas paraitre face à l'ami de sa sœur, il le salua en prenant un air qui se voulait amical.

« Bonsoir, Cain. Elle vient juste de sortir. » déclara-t-il, alors.

Pas franchement habitué à échanger avec les amis de sa sœur bien que ce ne soit pas la première fois qu'il voit le jeune homme, il n'était pas franchement à l'aise et ignorait comment agir. Se faisant presque violence, il s'écarta finalement de la porte pour le laisser rentrer.

« Tu veux rentrer ? Je m'apprêtais à me faire un café mais je peux aussi t'offrir une bière. » proposa-t-il, ensuite.

Le brun qui lui faisait face semblait avoir bien besoin d'un peu d'alcool, l'observant du coin de l'œil tout en se demandant pourquoi il garde ses lunettes de soleil à l'intérieur, l'agent de sécurité sortait alors quelques amuse-gueules d'un placard et les disposa dans un petit bol avant de revenir avec deux bouteilles bien fraiches. Le café pouvait attendre encore quelques minutes ou heures.

« Caph ne t'as pas dit avec qui elle est sortie ? » questionna-t-il, curieux de le savoir.

Après tout, peut-être que Cain savait plus de choses que lui concernant les fréquentations de la jeune femme. Ou peut-être pas mais il ne put s'empêcher de poser la question. Ouvrant les bières avec un briquet, il hésita à s'alluma une cigarette avant de se contenter de boire quelques gorgées. Le regard tourné vers l'acteur, il s'interrogea quelques secondes pour trouver quoi dire de plus. Cassiopéa ne pouvait pas être leur seul sujet de discussion après tout.

HJ:

Malgré mes lunettes de soleil ma déception devait être visible en apprenant que Cass' n'était pas encore retourné chez elle. Je pouvais l'attendre dehors mais je n'avais pas envie que les passants me dévisagent. Rester avec Dario me plaisait bien plus même si je n'avais jamais eu de longue discussion avec le frère de mon amie. Il n'avait pas l'air d'être une personne loquace de ce que j'avais pu analyser depuis qu'on s'était rencontré. Pas étonnant cela dit, vu d'où cette famille venait. En tous les cas, Dario ne semblait pas vouloir bouger de devant le passage, et je n'avais pas envie de rester planté là pendant des heures. C'était surement surprenant de me voir ici, d'habitude on se voyait chez moi ou à l'extérieur avec Cass'. Mon interlocuteur avait fini par se rebrancher pour m'inviter enfin à entrer.

- Une bière ça me va

Ce n'était pas d'un café dont j'avais besoin en ce moment. Je cherchais justement le sommeil mais il ne faisait que s'enfuir constamment. Entrant dans l'appartement, je laissais toutefois Dario me donner l'autorisation de m'installer pour ne pas non plus mettre en colère mon hôte. Je voyais bien qu'il faisait déjà des efforts d'hospitalités à mon égard. Je finissais par retirer mes lunettes en espérant que le fond de teint effaçait aux moins un peu mes cernes.

- Non, elle m'a juste dit qu'elle serait là dans cinq minutes. Elle a dû avoir une urgence...

Une urgence plus importante que ma venue visiblement. Etonnant que Dario ne sache pas où sa sœur était partie. Je prenais ma bière préalablement ouverte avant de boire une longue gorgée.

- Je crois que c'est la première fois qu'on se retrouve en tête à tête

Soufflais-je avec un demi-sourire. D'habitude il y avait Cass' en fond qui guettait que son frère ne tente pas de m'étrangler ou autre chose pour me faire peur. La seule chose qui m'effrayait en ce moment c'était mes cauchemars et le silence qui s'était installé. Si je ne parlais pas, Dario ne le ferait pas non plus et un long silence allait s'installer. Ce qui n'était pas bon pour mes pensées.

- Ce n'est pas trop dur de vivre avec deux femmes ?

Demandais-je au bout d'un moment. J'avais tenté de me souvenir ce que Cass' m’avait raconté à son sujet mais je n'étais pas un fan de poker et encore moins de voiture.