Fire and Ice ☽ Something's burning
inside my chest,
can be pain, can be regret
but i sure know that's its rage @Meera Pravesh    

Quelques semaines plus tôt…


Chaleur insoutenable, Reyner savait que la journée allait être longue, très longue. Comme la précédente, et celle d’avant encore… Un cycle qui ne s’en finissait plus. Il fût un temps où l’homme comptait encore, cela lui permettait d’avoir encore un semblant de contrôle sur sa vie, comme s’il pouvait encore choisir ce qu’il s’y passait. Mais la vérité était tout autre. Il savait au fond de lui qu’il y était pour un moment, pour très longtemps même. Piégé dans une cage qui était la sienne. Il ne manquait plus que son nom à l’entrée de cette dernière pour verrouiller cette pensée, cette conclusion… Depuis qu’il s’y trouvait, Fox avait bien eu le temps de se faire tous les scénarios, rejouant dans sa tête ce qu’il s’était passé, produit quelques temps plus tôt, années. Lui qui était grand, destiné à être l’un des plus grands de sa rue, voir même du pays peut-être. Il avait tout, même ce couteau bien planté dans son dos. Il lui avait fait mal, c’était bien plus douloureux que tous les coups qu’il avait pris, toutes ces fois où il en avait souffert, des coups au début, puis d’autres plus puissants. Des balles ensuite sans jamais le laisser sur le carreau. Il était devenu robuste avec le temps, il jouait son rôle, celui de l’homme sans coeur, celui qui n’avait aucun sentiment à aller voler, aller taper une banque… Et qu’il était bon. C’était certain ça même, les autres le voyaient agir, certains le pensaient déjà même comme étant le futur OG du coin, le prochain leader. Les coups les plus dangereux et les plus fous ? Il y était sans la moindre hésitation. Il y fonçait même. Comme un chien cherchant son os, comme un fou ayant besoin de son adrénaline. Il avait de tout, de la violence, le comportement qu’il fallait, dur, menaçant. Avant de revenir avec la récompense. Puis… Un jour, le niveau montait d’un cran, les petits braquages de quartier prenait une plus grosse tournure, celle où les armes n’étaient plus là pour faire peur, mais être utilisées… Et c’était aussi durant ces moments que l’homme faisait l’impensable, c’était la première fois qu’il venait éteindre la vie de quelqu’un d’autre. Ce qui pourrait choquer n’importe qui, ne l’était pas pour lui. Il n’y trouvait pas non plus de la satisfaction à le faire, mais plutôt comme un gage de son appartenance à son groupe, à son gang. Comment pouvait-il prouver d’autant plus qu’avec ce genre d’action? Un, deux, trois… La liste commençait à s’allonger, tout comme ses responsabilités. Avant d’avoir la douche froide de sa vie. Un battement de cils, et l’homme qui était respecté, craint par beaucoup, se retrouvait entre quatre murs…

Il était en prison, pour des crimes qu’il avait commis, mais aussi pour d’autres qui n’était pas de son fait. Mais dans la rue, dans son esprit, il aurait bien pris les crimes de ses frères. Si et seulement si ils n’étaient pas la raison de sa chute, la raison de sa captivité. Et ce qui était l’un de leur meilleur élément se trouvait piégé, ce retrouvait trahis. Bloqué. Il ne lui fallait que peu de temps pour ruminer, pour pester, les détester, au point d’en prier pour sortir, et simplement les chasser, les faire tomber un à un. Un doux souhait qu’il savait impossible à réaliser. Il avait échapé de peu à la peine de mort, ce n’était pas pour sortir quelques mois, années ensuite. Il se savait consigné à cet endroit encore pour de longues années, voir décennie. Alors… Il faisait ce qu’il pouvait, les quelques actions possibles. Du sport, maudir ces hommes, et voir le temps passer. Il n’avait plus de famille. Ses parents adoptifs lui avaient tournés le dos, il n’avait plus personne. Bien qu’il savait qu’il avait une soeur quelque part, il lui était impossible d’imaginer la contacter dans cet état. Il ne voulait même pas qu’elle connaisse son existence, qu’elle sache que son frère était cette personne en prison… Il n’avait plus qu'à attendre… Et laisser sa rage, sa haine le consumer alors que la prison consumait sa vie…

Un jour, un garde qu’il connaissait de vue venait le chercher, pour l’amener à une endroit bien connu de tous, sauf de lui. N’ayant personne pour venir le voir, pourquoi irait-il là-bas ? Mais d’après ce dernier, quelqu’un voulait le voir. Une femme… Qui pouvait-elle être ?

 

Fire and Ice ☽ Something's burning
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can be pain, can be regret
but i sure know that's its rage @Reyner Fox    

Queue de cheval, tailleur bien strict, visage fermé, tu traverses la cour de la prison derrière les grillages, avec l’allure la plus austère possible mais ça ne suffit pas à t’éviter les sifflements, les quolibets et les propositions les plus indécentes. Les détenus se massent derrière les grilles, n’ayant pas de meilleure distraction que ton passage. Bordel, qu’est-ce que tu détestais venir dans ce genre d’endroit… Ici, toute velléité de décence et d’humanité semble avoir disparu, laissant juste place au désespoir d’hommes parqués comme des animaux et réduits à crier comme tels… La tête haute, tu continues ton chemin, sans leur accorder un regard, concentrée sur ta mission du jour. Mission que tu n’approuves pas du tout mais comme tu es un bon soldat, tu vas obéir à ta hiérarchie et essayer de la mener à bien… Enfin, si tu veux être tout à fait honnête, si tu es prête à le faire, c’est parce que tu as potentiellement un intérêt personnel dans l’histoire. Sans ça, tu aurais beaucoup de mal  à agir à l’encontre de tous tes principes et convictions… Parce que tu ne vois pas comment qualifier autrement le fait de devoir convaincre un criminel reconnu de travailler avec toi. Cette idée d'association ne te plaît pas du tout, pour ne pas dire qu’elle te dégoûte. A tes yeux, il y a des solutions plus éthiques pour que la DEA reste pertinente dans sa lutte contre le trafic de drogue mais tout le monde se fiche bien de ton avis…

Une fois arrivée au sein de la prison, les gardiens te conduisent dans une salle isolée, sans doute un espace réservé pour les rencontres entre les détenus et leurs avocats. Tu prends place d’un côté de la table, disposant tes dossiers devant toi. Tu fais en sorte de bien occuper l’espace, pressentant déjà que c’est une lutte de pouvoir qui va se jouer dans quelques instants… Le bruit des grilles qui s’ouvrent et se referment retentit, tandis que des bruits de pas se rapprochent. Ton charmant rendez-vous est en train d'arriver… Dès qu’il franchit la porte, encadré de deux gardiens, tu le jauges, avec la force de l’habitude. Homme, la trentaine, type afro-américain, 1m83, environ 80 kilos, l’air de ceux qui en ont déjà trop vu et trop fait. La même colère, la même haine que les autres dans le regard. Tout sauf inoffensif en somme. Pourtant, il ne t’impressionne pas. Les gardiens le font asseoir face à toi, passant les maillons de ses menottes dans l’anneau scellé à la table avant de quitter la pièce. Vous vous toisez brièvement puis tu prends la parole immédiatement.   “ Reyner Fox ?” Demandes-tu de manière purement rhétorique. Car il y a peu de chances pour qu’ils t’aient amené le mauvais bonhomme… “ A moins que vous ne préfériez que je vous appelle T-R ? Apparemment, c’était votre petit nom avant que vous n’arriviez ici. Même si j’imagine que vous en avez gagné d’autres depuis. ” Tu accompagnes ta provocation d’un sourire froid, ironique, tapotant le dossier devant toi pour lui indiquer que tu en sais déjà beaucoup sur lui. On t’avait ordonné de parler et de négocier avec lui, mais rien ne t’a été indiqué sur le fait de le ménager. Or, tu ne comptes pas cacher le peu de respect qu’il t’inspire. “ Je suis l’agent spécial Meera Pravesh. J’aimerai dire que je suis enchantée de faire votre connaissance mais j’ai lu la liste de vos exploits avant de venir ici…” Ajoutes-tu, faisant les présentations à ton tour, pour dissiper tout éventuel malentendu. Pas qu’il pense que tu es sa nouvelle avocate ou une connerie du genre… Non, tu vas droit au but, comme toujours.   “ Je suis ici parce que j’ai été mandatée pour avoir un entretien avec vous pour le compte de la Drug Enforcement Administration et dans une certaine mesure pour vous faire des propositions relatives à votre peine si notre échange s’annonce concluant.” Débites-tu ensuite d’une voix plus protocolaire, commençant par le bordel juridique. Tu détestais ça mais il n’y avait pas meilleure que toi, niveau procédure. “ A la lumière de cette information, acceptez-vous la tenue de cet entretien aujourd’hui, avec moi, en reconnaissant que votre consentement n’a ni été trompé, ni forcé ?”

 

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le bruit de la chaîne qui claquait au sol, il entrait dans une unité sensible, la tenue d’une double chaîne était nécessaire. Il ne comptait pas s’évader, mais il n’allait pas non plus contester, il s’en foutait à vrai dire, ce qu’il voulait, c’était que tout ça se termine le plus rapidement possible, lui permettant de repartir dans sa petite vie qui n’avait plus de sens, qui était bien trop calme, bien trop insignifiante maintenant. Mais, une partie de lui devait bien avouer qu’il était curieux, savoir ce qui allait se produire, ce qui rimait avec tout ça. Puisqu’il n’avait personne de l’extérieur, et personne de son ancienne vie n’allait prendre le risque de venir ici, pas après tout ce qui s’était passé. Et surtout pas dans un milieu aussi hostile qu’ici. Il n’était clairement pas présentable lorsqu’il entrait dans la pièce, des dreads qui tombaient sur le côté, un sourcil mal taillé qui faisait un petit style à son image. La couleur orangée qui lui était permis de porter sur lui tous les jours lors de ces derniers mois. Mais il n’avait pas réellement de raison non plus de faire attention à son apparence, il n’y avait réellement rien à y gagner.

Reyner était surpris de voir qu’une femme s’y trouvait. Elle n’était clairement pas repoussante, tout à fait le contraire, mais il se doutait bien qu’elle n’était pas venue ici parce qu’il lui avait tapé dans l'œil. Elle avait l’apparence des femmes bien trop rigides, trop sérieuses, ceux auxquels Reyner n'aurait pas donné l’heure. Elle était d’un monde qui n’était clairement pas celui de l’homme. Ça en crevait les yeux. Mais il ne venait pas réagir d’une quelconque façon, il venait juste s’approcher, avant de s’asseoir, avançant ses poignées pour qu’ils puissent venir les lier au centre de la table, comme pour montrer qu’il n’allait pas l’attaquer, un gage de confiance dont il était obligé de se soumettre. Il n’y avait pas d’autres alternatives, et Reyner n’avait pas le temps ni l’envie d’aller contre, il allait juste l’écouter et c’était tout. Une fois assis, il tournait un peu la tête, avant de l’entendre prononcer son nom. Jusqu’ici, rien de folichon, mais le regard de l’homme changeait du tout au tout lorsqu’elle venait l’appeler par son ancien nom, celui qu’aujourd’hui il ne voulait plus entendre. Un nom d’un passé qui n’est plus, un Reyner qui n’est plus le même. Il ne disait rien pour le moment, son visage se fermait, et il ne laissait rien paraître à par de l’agacement. Elle venait ensuite se présenter, tout en faisant son speech d’agent qui ne voulait pas être là. Reyner manquait de faire rouler ses yeux, pour ensuite répondre. Il répondait, presqu’en crachant. “Si tu l’as vraiment lu ce dossier, t’aurais compris que m’appeler comme ça serait la meilleure façon pour te dire de repartir d’où tu viens.” Il avait un regard noir, savant probablement qu’elle venait de faire ça pour le faire réagir, le provoquer, l’obliger à avoir un échange avec elle.

Son sourcil se relevait quand elle lui annonçait la raison de sa venue. Les forces de l’ordre ? Pourquoi. Même s’il n’était plus du tout en bon terme avec eux, il n’était pas une balance. “Donc m’insulter c’était juste que le début ? Maintenant tu m’prends pour quoi? Une snitch? T’as vraiment lu le dossier avec des grammes en trop ma belle.” Il tournait la tête, elle finissait. Il devait bien s’avouer être curieux tout de même par ce qu’elle pouvait lui avancer. Dans tous les cas, il ne dirait rien. Mais il pouvait toujours entendre. Il était là, bloqué à cette table en face d’elle. Quitte à être tout ça, quelques minutes de plus n’allait pas le tuer. Il venait regarder le cadenas, avant de faire une petite grimace, et venir planter son regard dans celui de l’agent Pravesh. “Faut que je le récite votre truc ou on peut commencer ?” Finissait-il, avec un mouvement de tête pour lui confirmer qu’il était prêt à entendre la suite.  

 

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Ta petite introduction ne plaît pas du tout à ton interlocuteur. Son regard s’assombrit encore plus, si c’est possible, et maintenant, il est véritablement en train de toiser. Les réponses ne tardent pas à fuser non plus, violentes, vulgaires, presque crachées en ta direction. Lui non plus n’est pas impressionné, ne te témoignant aucune sorte de respect.  Pour un peu, ça te donne juste envie de sourire encore plus. De toute façon, il y avait bien longtemps que plaire aux autres était devenu le cadet de tes soucis... En revanche, tu ne vas pas le laisser sous-entendre que tu n’as pas été professionnelle en lisant mal son dossier. « Je l’ai parfaitement lu. Juste, c’est un dossier criminel, pas ton profil sur un site de rencontres. Ça ne précise pas comment tu aimes qu’on te surnomme ou quelles céréales tu manges au petit-déjeuner. » Dis-tu avec froideur, ayant recours à ton mode favori d’expression : le sarcasme. Même si cela te faisait souvent passer pour la reine des pestes... Pour autant, tu notes méthodiquement dans ta tête que cette histoire de surnom lui déplaît. Normalement, les criminels adoraient avoir ce genre de petite réputation, accolant à leurs noms, presque comme une particule de noblesse, le fameux « dit » suivi de tout un tas de surnoms imaginatifs. Mais celui-ci semble décidé à ne pas faire comme les autres... « Et arrête ça, je te garantis que tu ne veux pas que je reparte d’où je viens. » Assènes-tu ensuite avec calme. Lui aussi te provoquait. Normal qu’il ait envie de te tester aussi. Et normal qu’il essaye de reprendre un peu de pouvoir. Après tout de vous deux, c’est lui qui est enchaîné à cette table, contraint de t’écouter qu’il le veuille ou non.

Hélas, dès que tu commences à mentionner la DEA, tu vois qu’il s’agite, pour ne pas dire qu’il se cabre. Il est suffisamment intelligent pour comprendre ce que ta présence ici implique. Tu n’es pas venue faire un brin de causette, tu vas forcément lui demander des informations. Il s’écrie d’ailleurs qu’il n’est pas une balance, continuant à mal te parler, te donnant même du « ma belle ». C’est à ton tour de hausser un sourcil bien haut. « Je ne suis pas « ta belle ». Et je n’ai rien fait d’autre qu’énumérer des faits. Je ne vois pas où sont les insultes. » Tu es bien décidée à rien lui laisser passer. Si la fantaisie de ton patron devenait concrète, tu allais devoir subir ce type au quotidien. Il était donc important que tu traces des limites tout de suite. Or, tu ne supportes déjà pas la condescendance avec laquelle il s’adresse à toi... « T’es pas une balance. Félicitations à toi. » Tu tapes  dans tes mains comme si tu l’applaudissais puis tu te penches vers lui, comme pour mieux le sonder. « Est-ce que tu reçois une médaille pour ça ? J’espère au moins qu’il y a une compensation pour ça et que ça t’aide à dormir la nuit de le savoir, vu le nombre d’années qu’il te reste à passer ici. » L’affaire n’est définitivement pas très bien engagée mais tu quitteras pas cette pièce tant que tu n’auras pas ferré ton poisson. Et tout n’est pas perdu, parce que pour le moment, il ne t’oppose pas de fin de non-recevoir ferme, lorsque tu entames ton blabla juridique. Bien qu’il ne consente pas vraiment, répondant à ta question par une autre question. Tu pousses un soupir. Ce type était clairement un emmerdeur. Tu ouvres la première chemise en carton, attrapant le formulaire qui résume tout ce que tu viens de dire en des termes bien plus alambiqués.   « Non, contente-toi de me signer ça. » Tu pousses le papier vers lui ainsi qu’un stylo.

Tu sais qu’à présent, tu vas devoir choisir les mots qui suivent avec soin. Vu le caractère volatile du type, tu sens que le moindre faux pas peut le faire totalement vriller et mettre fin à l’entrevue. Mais tu dis aussi que cette colère que tu ressens en lui peut devenir un atout pour toi. Tu es pratiquement sûre que c’est ce qui l’alimente, ce qui l’aide à tenir. Et surtout, tu as parfaitement lu son dossier comme tu l’as dit, alors tu sais potentiellement sur quel bouton appuyer pour obtenir son adhésion. Tu sors donc une photo de ton dossier, la poussant également vers lui. « Tu le reconnais ? » Encore de la rhétorique car il s’agissait d’une bonne connaissance à lui, un membre de son ancien gang. Celui qui l’avait potentiellement trahi même si pour ce point, c’était plus une intuition de ta part qu’une véritable certitude. Malgré un travail important, vous aviez du mal à saisir le fonctionnement de leur organisation... Mais tu suis ton instinct quand même. « Il a sacrément gravi les échelons de votre joyeuse petite bande depuis que tu es ici. A tel point qu’on le soupçonne d’être carrément à la tête, maintenant. Les affaires sont de plus en plus florissantes pour lui. C’est comme ça qu’il est arrivé dans notre viseur. » Tu dégaines d’autres photos, du type mais aussi d’autres membres du gang, y allant volontairement avec tes commentaires. « Et pour eux aussi ça va, comme tu peux le voir... Tu ne trouves pas ça un tout petit peu énervant ? »