C’est au près de l’air marin qu’elle avait trouvé refuge. A croire qu’elle ne faisait que ça ces derniers jours. Juste les bruit de l’océan couvrant sa souffrance. Après une rapide visite, presque expéditive à sa sœur ainée, un peu trop intrusive, tout comme leur mère présente aussi. Le mariage, un véritable casse-tête dont Mara ne voulait ni entendre parler et encore moins tenter de le résoudre. La première fois, ça ne lui avait pas sembler si dur, ou douloureux, mais Jona s’était montré présent, et riait avec elle à la moindre occasion pour détendre l’atmosphère pesante d’une préparation de mariage. Soupirer était devenu son nouveau mode de vie. Elle sauta du petit muret où elle s’était assise, pour fixer l’horizon et se secoua comme se donner du courage d’avancer. Il allait être l’heure. L’heure d’un rendez-vous chez un faiseur de miracles mécaniques. Depuis quelques jours, Becky sa fidèle compagne à deux roues faisait des siennes. Refusant de démarrer du premier coup, toussoter. Le palpitant de sa moto adorée n’était pas de première jeunesse, mais elle en prenait grand soin et ce, grâce à son magicien mécanique : Hayden. Il l’avait dépanné un jour, alors qu’elle était en galère sur le bord de la route. D’abord méfiante, et peu entrain à confier son bijou mécanique à un parfait inconnu, elle l’avait laissé faire, car il savait lui parler. Ils avaient parlé des heures de pistons, boulon et huile pendant des heures, interrompu juste par le coucher du soleil. Depuis l’homme était celui vers qui elle se tournait pour Becky dès que ça la dépasser.

Elle remonta ses cheveux en une queue qu’elle attacha avant de remettre son casque tout en avançant vers son destrier de métal, qu’elle enfourcha et tenta de démarrer. Le premier coup ne fut pas une réussite, elle dû s’y remettre à trois fois, ce qui lui procura des sueurs froides. Elle se voyait faire venir Hayden, dans ce coin de plage paumé sans âme qui vive. Ce ne fut pas le cas heureusement. Le trajet fut court, mais pas très reposant. Les bruits que Becky tentait d’émettre n’augurait rien de bon, et ça lui provoquait déjà de l’anxiété. Mara arriva tout de même à bon port, se gara à l’avant du garage. Elle retira son casque après avoir coupé le moteur et mis la béquille. « Salut Chef. Cette vieille dame fait des caprices, et me donne des sueurs froides. » Elle descendit de sa moto pour se poster au côté du grand gaillard à côté d’elle. « Je crois qu’il va falloir lui faire un checkup complet, car adieu ronronnement, j’ai une vieille dame tuberculeuse à l’heure qu’il est. Et le démarreur rend l’âme j’ai l’impression. » Elle caressa tendrement le guidon de sa bien aimée Becky. « Elle a vraiment besoin de mains experte. » Elle lui laissa la place pour l’inspection en se reculant vers l’encadrement de la porte du garage et s’y adossa.

Emmener son premier enfant au médecin, voilà ce à quoi pensait Mara. Becky s’était son bébé, son précieux cadeau de papa fait un peu à contre cœur, dont elle prenait grand soin. Elle la trainait sa Becky. Déjà douze ans d’amour fou. Elle l’a emmené sur des routes insoupçonnées, sa précieuse. Seule ou accompagnée, Becky était toujours fidèle, prête à prendre la route pour n’importe quelle raison, mais pas autant ces derniers jours. Mara était une maman inquiète, qui aurait bien fait les cents pas en se rongeant les ongles, si cela était nécessaire à faire comprendre son anxiété face à la situation. « Mais…. L’écoute pas Becky… ce monsieur est très vilain, mais il est doué. » Lança-t-elle en caressant sa bécane, tout en jugeant d’un regard froid Hayden qui se marrait déjà de sa réaction. « Surveille tes paroles, veux-tu. Tu as en face de toi une vieille dame qui mérite tout le respect. » Elle s’écarta en fixant Hayden d’un air qui se voulait menaçant. Puis l’inquiétude repeint ses traits encore. Ce qu’il annonçait ne semblait pas emballer la Rivera qui se faisait encore plus de mouron pour sa Becky.  « C’est grave docteur ? Ça va me couter… Non fait ce que tu as faire, je payerai ce qu’il faudra mais sauve Becky ! » Un brin théâtral vous dites ? Son côté latina était intimant lier à son côté maternel, ce qui ne pouvait pas ne pas la rendre théâtrale. Elle suivait chacun des mouvements du mécanicien autour de sa beauté, et n’hésita pas un instant à le suivre dans l’intérieur du garage. Elle prit place sur un petit tabouret laissé à l’abandon et fixa sa Becky se faisant des films sans bonne fin. Prise dans ses pensées, elle manqua presque la question d’Hayden. « La vie ? Argh tu sais, ça fait aller. » Phrase bateau dont elle avait recours bien trop de fois ces derniers temps, et puis merde. Elle laissa tomber le masque, elle n’avait pas d’intérêt à mentir au mécanicien. « En fait non, si j’ai repoussé ma venue au garage c’est que j’avais besoin de fuir la maison et j’en ai peut être trop demander à Becky. » Pas sa maison, la maison. Celle où elle restait des heures seule, où elle élevait sous le regard sévère de sa belle-mère deux magnifiques enfants qui n’étaient pas les siennes. Elle en avait gros, plus gros qu’elle ne se l’admettait. Elle se fit silencieuse, en proie pour la première fois à ses vraies émotions qu’elle cachait, ou ignorer en bloc. La gorge nouée, elle déglutit difficilement face à la réalité de son état. « Tu as déjà eu envie si fort de remonter le temps, de changer juste un truc qui a merdé dans ta vie ? Ce truc il te fait douter de tout ce qu’est ta vie actuelle ? » Elle regarder ses bottes, déblatérant comme si elle parlait à un ami imaginaire, pauvre enfant seule. Quand elle prit conscience de ses paroles, elle se ressaisit. « C’est ridicule, oublies ce que j’ai dit. » Et elle se plongea dans le silence. Ce silence qui l’effritait peu à peu. Ce silence qui tuait ce soleil, un peu moins brillant chaque jour.

Le vague à l’âme. Elle l’avait lu quelque part, un sentiment d’un manque de quelque chose qu’on a eu et qui nous manque, mais ce manque revient par vague, tout avec une sensation de se perdre, de ne pas se reconnaitre. Etre mélancolique dans le fond. Cette expression française qu’elle avait lui elle ne sait où, lui revenait en mémoire depuis quelques jours et avait finalement fini par éclater comme elle le craignait. Elle le regretta, se renferma comme une huître par pudeur de trop dévoiler ses failles. Mara s’attendait même à ce que le garagiste ne relève pas, vu son flegme et sa réponse la surprit plus qu’elle ne s’y attendait. Elle regarda un instant la bouteille hésitante. Noyer ses problèmes ? Et puis merde elle la saisit et en bu une longue gorgée, elle était là pour un moment de toute manière, et puis personne ne l’attendait. Elle ne débuta pas aussitôt qu’il lui proposa, laissa peser le silence et le bruit des outils. Ce n’était pas volontaire de sa part, c’était plus qu’elle ne savait pas par où commencer. Ses fiançailles ? Son divorce ? Le manque ? La pression qu’elle se mettait pour être ce que les autres attendent, qui lui fait vriller la tête ? « En fait je sais pas vraiment où ça a commencé à foirer. Nos fiançailles ? Notre rencontre ou même avant… surement avant … » Elle essayer toujours de mettre le doigt dessus, la cause de tout ses maux, mais à par le nom de Jona qui la hantait, rien ne semblait vraiment dépendre d’autres choses. Et alors qu’elle se perdit dans le silence, sa rétrospective intérieure, la stupeur et la culpabilité à la vue de ce Hayden lui montrait. « Ooooh non… ma pauvre Becky… je suis même plus capable de prendre soin de toi… Ce n’est même pas un acte isolé. » Elle se vouta sur la chaise vers l’avant et fixa ses bottes. Une main passa dans sa crinière noir corbeau, alors qu’un soupire traversa ses lèvres. « Tu veux la version longue ou abrégée du moment ? » Grimaça-t-elle en se redressant le regard brillant, non par la douleur, elle l’avait bien exprimé sur la plage celle-là, plus par frustration de son état.