Après une longue journée de travail au garage, tu rentres enfin chez toi pour te laver et enlever la crasse accumulée. Tu n’as pas l’intention de te presser ; après tout, tu n’es pas pressé d’intégrer ce monde qui te semble si étranger. En arrivant dans le quartier huppé, tu choisis de te garer plus loin, hors de vue de la maison d’Asha. Ta vieille voiture n’a pas sa place ici, et tu préfères éviter les regards désapprobateurs.

Tu envoies un texto rapide à la brune pour la prévenir que tu es arrivé. Puis, tu te diriges à pied vers la maison, passant par l’arrière et attendant devant la porte de service. Lorsque la demoiselle t’ouvre, tu la regardes avec une expression de frustration bien visible.

« Je sais que je suis en retard » commences-tu d’un ton piquant « Contrairement à toi, je dois bosser pour vivre. Je me suis garé plus loin, histoire d’éviter que ma voiture ne fasse tâche dans ce coin »

Sans attendre de réponse, tu passes devant elle avec une nonchalance qui te caractérise, entrant dans la maison sans cérémonie. Une fois à l’intérieur, tu ne peux t’empêcher d’être frappé par le luxe et l’opulence des lieux. Le contraste avec ta propre vie est frappant. Tu observes le décor somptueux avec une mixture d’admiration réticente et de malaise.

« Je suppose que c’est ce qu’on appelle vivre dans un autre monde »

Alors qu’il passe devant toi, tu esquisses une petite moue faussement triste quand il fait remarquer que, contrairement à toi, il est obligé de travailler pour vivre. Comme si c’était ta faute... “Bouhou…”, tu gémis en essuyant une fausse larme sur ta joue avant de lever les yeux au ciel. Tu n’y peux strictement rien si ta famille a mieux réussi que les autres, que la sienne. Et puis au fond, tu te trouves plutôt sympa de lui proposer de profiter un peu de la vie que tu mènes en se faisant passer pour ton petit ami. Ce n’est pas une proposition que tu fais tous les jours. Peut-être parce que tes parents ne menacent pas non plus tous les jours de te trouver un mari sans te laisser avoir voix au chapitre. Toujours est-il qu’à tes yeux, il s’agit là plus d’une faveur que tu lui accordes qu’une réelle corvée. Il y gagne un train de vie un peu plus sympathique, et toi tu conserves ta liberté. Un combo gagnant. Win-Win.

En réalité, tu réalises bien qu’il ne s’agit que d’une façon de reculer pour mieux sauter, mais tant pis. Tu n’abandonneras pas sans t’être battue. Ou sans t’être amusée, au moins. Tu lui emboîte le pas jusqu’à arriver à sa hauteur tandis qu’il scrute du regard la pièce dans laquelle vous vous trouvez. Il s’agit seulement d’une pièce réservée aux employés, un salon mis à leur disposition pour leur pause déjeuner, ou toutes les choses que font les employés de maison quand ils ne sont pas en train… Well… D’être des employés de maison…! Tu ne t’es jamais vraiment intéressée à eux. Tu les croises pourtant tous les jours, et ils en savent sûrement plus sur toi que le reste de ta famille, mais tu n’as jamais cherché à apprendre à les connaître. Tu connais au moins leurs prénoms, c’est déjà un exploit en soi… “Si tu le dis…”, tu souffles en haussant les épaules. Ca ne te parait vraiment pas être le bout du monde. Peut-être parce que tu n’as toujours connu que l’opulence et que même si tu sais que tout le monde ne vit pas comme toi, sur le principe, tu n’as pas de réelle idée de ce à quoi ressemble le monde de Théo. Tu ne peux qu’essayer d’imaginer ce que c’est, de travailler d’arrache pied sans même savoir si ça sera suffisant pour tenir le mois, aller se coucher le ventre vide, passer l’hiver sans chauffage. Et encore, la vérité, c’est que tu n’as même jamais essayé de te mettre dans la peau de quelqu’un comme Théo. Parce que bien souvent, tout ce qui touche à autre chose que toi-même te passe bien au-dessus de la tête. Mais tu as au moins l’honnêteté de l’admettre, peut-être que tout n’est pas perdu, au fond.

“Bon, on commentera la déco une autre fois si tu veux bien…”, tu souffles finalement, déjà lassée de lui faire faire le tour du propriétaire. “On a du pain sur la planche…”, tu ajoutes en lui lançant un regard peu amène. En réalité, il n’est pas si mal dans son genre. Tu ne l’as pas choisi au hasard, il a au moins le mérite de te plaire physiquement et d’avoir du potentiel. Mais tu as tout de même besoin d’un peu de temps avant qu’il soit vraiment parfaitement présentable, et il a déjà amputé d’une bonne heure l’intervalle qui vous est imparti. “J’ai fais mes petites recherches, et on devrait pouvoir te faire passer pour le fils d’un magnat de l’automobile plutôt discret. Il a grandi dans un pensionnat et n’a jamais fait de vagues. Du pain béni pour mes parents… Et puis au moins, tu ne seras pas trop dépaysé!”, tu lui expliques en le guidant dans les escaliers menant à ta chambre… En considérant qu’on puisse appeler ça… Une chambre…?

Tu t’efforces de contenir ton agacement quand elle essuie une larme imaginaire sur sa joue, accompagnée de son "Bouhou...". Cette petite mise en scène te tape sur les nerfs. Elle n’a aucune idée de ce que c’est que de bosser toute la journée dans un garage, les mains couvertes de cambouis, juste pour pouvoir payer tes factures à la fin du mois. Mais tu te contentes de serrer la mâchoire. Elle ne mérite même pas que tu te prennes la tête avec ça.

Sans te retourner, tu franchis la porte, jetant un regard rapide autour de toi. Cette maison, c’est tout ce que tu n’as jamais connu : le luxe, l'opulence, tout parfaitement calculé pour impressionner. Tu laisses échapper un léger sifflement, malgré toi. C’est un autre monde, c’est sûr. Rien à voir avec ton appartement modeste où chaque centimètre compte. Ici, alors que tu la suis jusqu'à l'escalier qui mène à l'étage, tout semble… trop. Chaque meuble, chaque décoration semble coûter plus cher que ta bagnole entière. Ce décor, cette opulence, ça te rappelle juste à quel point vous êtes différents. Toi, tu viens d’un endroit où le moindre truc doit durer parce que tu n’as pas les moyens de le remplacer. Ici, tout est démesuré.

« Ouais, pas trop dépaysé, c’est sûr » répliques-tu d’un ton acide, la suivant dans les escaliers. Si elle savait… Tu connais chaque recoin des moteurs, chaque vis, chaque joint, mais l'univers des riches, des héritiers, c’est un autre terrain. Tu n’as pas grandi avec une cuillère en argent dans la bouche. Tu continues à observer autour de toi, chaque détail te rappelant que tu n’as rien à faire ici. Tu sens presque le poids du décor sur toi, comme si ce luxe t’écrasait.

« J’espère que t’es aussi bonne actrice que t’en as l’air » ajoutes-tu, une lueur d’ironie dans la voix. Parce que même si elle fait semblant de ne pas s’en soucier, toi, tu sais que cette farce pourrait vite déraper si quelqu’un sentait que tu ne colles pas au rôle.

Derrière Asha, tu te prépares mentalement à ce qui t'attend, mais rien ne te prépare vraiment à ce que tu vois en entrant dans sa chambre. Tu t'arrêtes un instant sur le seuil, les yeux écarquillés. C’est plus qu’une simple chambre, c’est une suite digne d’un palace. Tu te sens presque ridicule avec ton jean et ton t-shirt, comme si ta simple présence pouvait salir cet endroit. Tu te fais violence pour ne pas afficher ta stupéfaction.

« C'est ça, une 'chambre' pour toi ? » ironises-tu, tentant de dissimuler ton malaise derrière un sourire narquois. Tu fais un tour sur toi-même, observant chaque recoin.

« On dirait plus un musée qu’une pièce où tu dors ». En avançant un peu plus, tu te diriges vers une fenêtre, jetant un coup d’œil dehors, avant de te retourner vers elle. Ton regard tombe sur les deux costumes posés sur le lit. Assurément des vêtements que tu ne pourrais jamais te payer, même avec des mois de salaire. L’un comme l’autre respire le fric.

« Alors, marraine la bonne fée, tu vas me transformer en prince charmant ? » lâches-tu, amusé. Tu pointes les costumes d’un geste nonchalant.

« Vas-y, choisis celui qui te plaît le plus. C’est toi l’experte en trucs de riches »

Comme tu lui tournes le dos alors que vous montez les escaliers menant à ta chambre, tu te contente de lever les yeux au ciel en entendant son commentaire acerbe. Toi qui pensais te montrer un minimum sympa avec Théo en lui choisissant une fausse identité en lien avec le milieu automobile… Ce type n’est décidément jamais content. Du moins jamais en ta présence visiblement. Ça t'agace autant que ça t’arrange. Au moins, tu sais qu’il ne fait pas semblant, mais son comportement vis-à-vis de toi n’aide pas vraiment. Tu as du mal à croire qu’il puisse vraiment jouer le rôle de ton faux petit-ami alors qu’il semble te détester, toi, et tout ce que tu représentes. Mais comme tu n’as pas vraiment d’autre option…

“Contente toi de jouer ton rôle, je connais le mien sur le bout des doigts…”, tu lui réponds, aussi aimable que lui alors que vous montez les dernières marches. Tu as bien plus à perdre que lui dans cette histoire. Il ne risque ni sa réputation, ni celle de sa famille en étant vue avec toi. Si la vérité venait toutefois à éclater, là où lui serait sûrement accueilli en héros par ses pairs, tu serais toi, jetée en pâture aux requins de ce monde, mariée de force à un inconnu et forcée de jouer les real housewives jusqu’à la fin de tes jours. Une perspective d’avenir qui ne t’enchante pas le moins du monde. Ton plan doit donc être parfaitement exécuté. Aucune place ne doit être laissée à l’erreur.

Vous atteignez ta chambre, et tu lui jettes un regard interrogateur alors qu’il se moque du fait que tu puisses appeler ça une chambre et un sourire amusé étire finalement tes lèvres quand il compare la pièce à un musée. “Oh, c’est sûrement parce que je n’y dors pas si souvent que ça…”, tu réponds en haussant les épaules. Tu t’écroules souvent de fatigue bien avant d’avoir atteint ton lit, sur un sofa quelconque, dans une des nombreuses pièces qui jalonnent ton chemin, et il t’arrive plus souvent de dormir dans celui d’une de tes amies qu’ici. En réalité, tu ne passes qu’un temps infime dans cette maison. Tu fais en sorte d’être le moins possible en contact avec tes parents. C’est plus simple comme ça d’éviter leurs questions, et leurs regards plein de reproches quand tu rentres au petit matin, souvent encore ivre, avec ta tête en une des tabloïds qui te surnomment désormais Bombay Hilton, en référence à une autre héritière de chaîne d’hôtel autrefois bien connue pour ses frasques et qui semble désormais s’épanouir en pouponnant des bébés éprouvette. #perfectmother.

Perdue dans tes pensées tandis que Théo fait le tour de ta chambre, tu laisses échapper un nouveau rire quand il évoque sa transformation. “Je peux faire quelque chose pour faire de toi un prince, mais pour le côté charmant… J’ai un doute…”, tu lui lances en plissant les yeux. On ne peut pas dire qu’il ait été un modèle de gentillesse à ton égard depuis votre rencontre. Tout comme il serait malvenu de dire que tu t’es toi-même présentée sous ton meilleur jour à son contact. Et pourtant, il va vraiment falloir que vous parveniez à vous faire passer pour le couple idéal auprès de tout le monde… Bon sang, Asha… Dans quel pétrin tu t’es fourrée?. Comme il te laisse le choix du costume, tu te mords brièvement la lèvre inférieure, ton regard passant de Théo aux costumes et inversement. “Hmm… Le noir… C’est toujours une valeur sûre.”, tu décides en attrapant le smoking noir pour le lui tendre. “Tu peux te changer dans le dressing, tu souffles en lui indiquant les portes derrière toi, je vais aller te chercher une ceinture et des boutons de manchette…”.