Il m'arrivait encore d'être bouleversée, de ne pas réussir à comprendre mes émotions et à me laisser submerger par celles-ci. D'extérieur, les gens me disaient admirer ma force, mon envie de vivre mais ils ne savaient pas à quel point, tout ça, n'était qu'une façade. Je m'effondrais dès que les regards étaient tournés, dès que la porte était fermée. Heureusement, depuis qu'Isaac était revenu dans ma vie, il arrivait à adoucir ma peine. Il avait reconnecté quelque chose chez moi, comme si, allongée par terre, il avait été celui qui m'avait porté pour me remettre debout sans pour autant me lâcher. Ce n'était pourtant pas facile pour lui non plus, il vivait encore le deuil de son fils, de son propre sang et si je faisais ce que je pouvais pour l'aider à mon tour, ça restait une étape plus que difficile voir insurmontable. De deux ados plein d'espoir, nous étions désormais des adultes un peu cassés, échaudés par la vie mais pourtant, toujours dans l'espoir de retrouver un brin de bonheur à deux.

J'ouvrais les yeux, tournant doucement la tête vers Isaac qui semblait encore dormir. Je me tournais doucement, me positionnant vers lui et j'esquissais un sourire en voyant le sien, au coin de ses lèvres. Il ne dormait plus mais n'ouvrait pas pour autant les yeux. Je sais que tu es réveillé, soufflais je doucement sur un ton malicieux. Il n'était pas rare qu'on se réveille ensemble ni même qu'on passe la nuit tous les deux, c'était même devenu une habitude que je chérissais. Nous ne vivions pas officiellement tous les deux mais je pouvais compter, sur les doigts d'une main, nos nuits séparés. Je respectais tout de même le fait qu'il passe du temps avec sa fille et qu'elle n'était, sans doute, pas encore prête à le voir refaire sa vie bien que sa mère ne semblait pas se gêner. Je ne connaissais pas vraiment Colleen mais je n'avais pas non plus envie d'en faire une amie. J'avais ce ressentiment étrange envers elle, sans doute parce que lorsque j'étais venue voir Isaac à la fac pour qu'on se remette ensemble, c'était elle que j'avais vu dans ses bras. Je n'ai pas du tout envie de me lever, avouais je avant de jeter un œil sur le réveil qui indiquait une heure bien trop matinale pour que je pose un pied par terre.